La psycho-oncologie
Agnès Perpère
Nathalie Jouniaux-Delbez
Services de radiothérapie
et de neuro-oncologie,
Groupe hospitalier
la Pitié-Salpêtrière, Paris
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.La psycho-oncologie a pour objet de
prendre en charge les re
´percussions
e
´motionnelles, psychiques, compor-
tementales et familiales des maladies
cance
´reuses.
Les acteurs de la psycho-oncologie sont principa-
lement le psychiatre et le psychologue, appele
´s
« psycho-oncologues ». Leur pre
´sence au sein de
l’e
´quipe soignante symbolise aux yeux des
patients la reconnaissance de leur souffrance
psychique.
Ces derniers sont a
`la disposition des patients
mais aussi des familles et des proches.
Si tous les patients ne consultent pas de psycho-
oncologue, certains ressentent ne
´anmoins le
besoin de pouvoir parler avec une personne exte
´-
rieure a
`leur entourage, souvent pour prote
´ger
ce dernier. De manie
`re tout a
`fait paralle
`le, il
arrive que l’entourage fasse la me
ˆme de
´marche
pour prote
´ger son proche malade et ne pas lui
faire part de ses propres difficulte
´s.
D’autre part, certains patients ne veulent pas
expliquer leurs doutes ou de leurs craintes a
`
leur me
´decin oncologue, ou ont peur de « lui
faire perdre du temps ».
HISTORIQUE DE LA PSYCHO-ONCOLOGIE
Cette discipline est relativement re
´cente.
Voici quelques dates cle
´s.
1998 : Premiers E
´tats Ge
´ne
´raux du Cancer :
patients, familles et soignants expriment un
besoin non satisfait de soutien psychologique.
Ces demandes sont formalise
´es dans le Livre
Blanc re
´alise
´par la Ligue Nationale contre le
Cancer [1] ;
Septembre 1999 : Cre
´ation du programme
EPAC « Ensemble parlons autrement du cancer »,
dont un des axes est l’indispensable soutien psy-
chologique ;
2000 : Deuxie
`mes E
´tats Ge
´ne
´raux du Cancer.
Les patients et les familles re
´clament « que les
chercheurs cherchent, que les cance
´rologues soi-
gnent et que des psychologues soient pre
´sents
pour nous entendre » ;
2003 : Le Plan Cancer stipule (mesure 42) :
«il
faut accroı
ˆtre les possibilite
´s pour les patients
de be
´ne
´ficier (…) de soutien psychologique et
social »
. (http://www.sante.gouv.fr/htm/dossiers/
cancer/plaquette_cancer.pdf).
LE PSYCHO-ONCOLOGUE, QUI EST-CE ?
C’est un psychiatre ou un psychologue.
Le psychiatre est me
´decin. Il est donc qualifie
´
pour diagnostiquer les troubles psychiques qui
peuvent e
ˆtre associe
´sa
`une tumeur ce
´re
´brale
qu’ils soient :
–re
´ve
´lateurs de la tumeur ce
´re
´brale, du fait de
sa localisation dans le cerveau ;
– des sympto
ˆmes neurologiques secondaires de
la maladie ou des traitements (certains traite-
ments de chimiothe
´rapie, les anticonvulsivants
ou les corticoı
¨des peuvent modifier l’humeur
des patients) ;
–re
´actionnels a
`l’annonce du diagnostic (sur-
tout anxie
´te
´et/ou de
´pression) ;
– pre
´existants a
`la tumeur ce
´re
´brale.
Le psychiatre est habilite
´a
`prescrire des me
´dica-
ments si cela s’ave
`re ne
´cessaire en e
´tant attentif
aux traitements que vous recevez de
´ja
`.
Le psychologue a suivi un cursus en sciences
humaines. Il est habilite
´a
`faire un diagnostic
des troubles psychologiques (parfois a
`l’aide de
questionnaires ou de tests, ou simplement en
vous posant des questions) et son travail est foca-
lise
´sur la compre
´hension des mouvements psy-
chiques qui s’effectuent immanquablement chez
tous les patients atteints de maladies graves.
Tous deux vous proposeront une prise en charge
psychologique qui re
´pondra a
`votre souffrance
et a
`votre demande.
LE PSYCHO-ONCOLOGUE, POURQUOI?
L’annonce d’un cancer :
– est de
´stabilisante, toujours traumatique ;
– rend fragile et vulne
´rable ;
– fait perdre l’illusion d’immortalite
´;
– bouleverse le sentiment d’identite
´;
–de
´sorganise le sche
´ma corporel (perception de
son propre corps) ;
peut laisser craindre au patient qu’il va peut-
e
ˆtre devoir de
´pendre des autres ;
fait perdre confiance, perdre le contro
ˆle et
marginalise ;
– peut me
ˆme, dans certains cas, culpabiliser le
patient de faire vivre ces moments difficiles a
`
ceux qu’il aime.
Dans les services accueillant des patients
atteints de tumeurs ce
´re
´brales, le psycho-
oncologue s’adresse a
`ceux qui souffrent : les
patients, les familles et les proches.
L’annonce, et me
ˆme l’hypothe
`se, d’une maladie
cance
´reuse telle qu’une tumeur ce
´re
´brale est
toujours ve
´cue comme un traumatisme auquel
chacun re
´agit diffe
´remment selon sa personna-
Neurologie.com 2009 ; 1 (4) : 1-2
DOI : 10.1684/nro.2009.0079 neurologie.com
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vol. 1 n°4
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avril 2009 1
Docteur quest-ce que
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lite
´, son ve
´cu, son entourage familial et social, sa culture et
le moment de sa vie.
Il ne faut pas sous-estimer ce que l’on pourrait appeler
l’histoire naturelle de la maladie. Le temps fait beaucoup
dans la modification des perceptions, car le traumatisme
du diagnostic s’atte
´nue, et notre fonctionnement psy-
chique explore des ressources qui nous e
´taient parfois
inconnues. Les re
´percussions du diagnostic e
´voluent donc
au fur et a
`mesure que le temps passe en vivant avec la
maladie.
LE PSYCHO-ONCOLOGUE, COMMENT ?
Vous connaissez souvent sa pre
´sence par l’interme
´diaire
d’une plaquette d’informations, d’un carnet de suivi, ou
encore d’un affichage ou
`figurent tous les nume
´ros de te
´le
´-
phone dont vous pourriez avoir besoin au cours du suivi de
votre maladie. L’e
´quipe infirmie
`re et aide-soignante, tou-
jours au plus pre
`s des patients et de leur famille, est le
premier soutien dans la prise en charge de cette maladie,
et si elle le juge opportun, elle vous proposera de rencon-
trer le psycho-oncologue.
Le psycho-oncologue vous propose un suivi psychologique.
Cela peut consister en de simples entretiens de soutien, ou
bien e
ˆtre un peu plus actif, et voir avec vous ce qui vous
fait souffrir, a
`quelle fac¸on de voir les choses est attache
´e
cette souffrance et de
´cider avec vous ce que l’ont peut en
modifier pour que vous puissiez vivre ce moment de la
maladie le mieux possible.
Ensemble vous pourrez mettre en lumie
`re quels sont les
comportements et pense
´es qui vous re
´ussissent le mieux
a
`vous en particulier, vous soutiennent et vous accompa-
gnent.
Le psycho-oncologue est la
`pour proposer une aide supple
´-
mentaire et non pour l’imposer. Il est un professionnel de
sante
´, donc soumis au secret professionnel, qui sera, en
prenant le temps, un tiers qui n’est pas affectivement
me
ˆle
´aux conse
´quences de la maladie sur votre vie et
peut donc vous aider a
`mettre e
´vidence ce qui est le plus
important pour vous et a
`relativiser certaines choses. Vous
pouvez donc, sans aucune crainte de jugement, exposer
vos difficulte
´sa
`penser votre vie, apprendre a
`parler de la
maladie a
`ce moment ou
`tout est bouleverse
´.
LE PSYCHO-ONCOLOGUE, POUR QUI ?
Pour tous ceux qui sont touche
´s de pre
`s ou de loin par la
maladie : les patients e
´videmment, mais aussi les conjoints
qui peuvent se sentir comple
`tement de
´munis, qui ne
savent pas s’ils font « bien ». Parfois un simple entretien
rassurant suffira.
Pour les enfants de patients malades, parce qu’il est plus
facile de poser ses questions a
`quelqu’un en blouse blanche
qu’on ne connaı
ˆt pas : on n’aura pas peur de lui faire du
mal ou de le mettre mal a
`l’aise.
Qu’est ce que le psycho-oncologue apporte aux patients/
familles ?
– Du temps et un temps de pause ;
– Une meilleure gestion des e
´motions.
–Une
´clairage sur les re
´actions des autres patients/de l’en-
tourage/de la socie
´te
´en ge
´ne
´ral ;
Un « filet de se
´curite
´» en cas d’urgence ;
Un relais, « huile dans les rouages » entre la famille et
l’e
´quipe soignante ;
–Un ro
ˆle d’orientation : kine
´, sexologue, sophrologue,
etc ;
–Unro
ˆle de conseil ponctuel « comment annoncer a
`mes
enfants…? » ;
– Une aide a
`la pre
´servation du lien familial ;
– Un suivi psychothe
´rapique si ne
´cessaire.
LE PSYCHO-ONCOLOGUE, QUAND?
Dans la plupart des cas, les patients/familles consultent
aux moments cruciaux de la maladie :
– apre
`s l’annonce de la maladie et avant le de
´but du trai-
tement ;
quelques jours avant la fin du traitement ;
– en cours de re
´mission, en particulier au moment des
contro
ˆles ;
– au moment d’une re
´cidive ;
– en cas de de
´pression ou d’anxie
´te
´importante.
Mais aussi :
– quand un soignant vous le propose, souvent il vous
connaı
ˆt bien et connaı
ˆt bien la maladie ;
quand vous ressentez cette longueur de la prise en
charge me
´dicale, que vous avez le sentiment de ne pas
en voir le bout ;
– quand venir a
`l’ho
ˆpital devient difficile, ou quand on
pense avoir envie de tout arre
ˆter ;
– quand on ne perc¸oit que les inconve
´nients des traite-
ments et plus les conse
´quences be
´ne
´fiques qui viendront
a
`plus long terme ;
– quand on ne parvient plus a
`parler de la maladie a
`ses
proches et que l’on peut avoir le sentiment de ne pas e
ˆtre
compris. Cette sensation peut e
ˆtre accentue
´e chez les
patients qui ont une maladie silencieuse : les autres ne
voient pas qu’ils ont une maladie si grave et, pensant
bien faire, sur-stimule les patients ou font comme si la
maladie n’existait pas, alors que la personne malade
peut avoir, a
`ce moment, besoin d’e
ˆtre soutenue et enten-
due dans sa lassitude douloureuse de vivre avec une mala-
die et des traitements si lourds et si envahissants dans la
vie quotidienne ;
– quand on se pose des questions auxquelles on ne trouve
pas de re
´ponse satisfaisante ou que l’on n’a pas envie de
les exposer a
`ses proches ;
quand on se sent fatigue
´, las, e
´puise
´, stresse
´, anxieux,
triste ;
– et surtout quand vous en avez envie, quand vous vous
sentez pre
ˆt.
Re
´fe
´rence
1. Les malades prennent la parole. In :
Livre blanc des Premiers E
´tats ge
´ne
´raux
des malades du cancer.Re
´alise
´par la
Ligue contre le cancer. E
´ditions Ramsay,
1999.
2neurologie.com
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vol. 1 n°4
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avril 2009
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