
Bulletin CIIP no 15 - décembre 2004
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Lâarchitecture scolaire marque, dans lâespace, lâimportance accordĂ©e Ă lâĂ©ducation.
Autrefois aisĂ©ment reconnaissable, lâĂ©cole tend Ă devenir aujourdâhui un bĂątiment de
verre comme les autres sans identité particuliÚre.
JusquâĂ lâavĂšnement de la sociĂ©tĂ© indus-
trielle du XIXe siĂšcle, les savoirs se trans-
mettaient à travers les multiples activités
de la vie quotidienne. Il nây avait guĂšre
dâĂ©coles. Dans lâAntiquitĂ©, Platon et ses
Ă©lĂšves nâavaient besoin que dâun jardin.
Au Moyen Age, la salle de classe se tenait
souvent dans le chapitre des monastĂšres.
Cette pratique dâapprentissage par la vie et
dans la vie ressurgit dans les années 1970.
En 1972, le Programme Parkway de Phila-
delphie1, destiné à des élÚves peu réceptifs
Ă lâenseignement traditionnel, supprima,
en partie tout au moins, lâespace scolaire.
Les élÚves faisaient usage des équipements
urbains pour leurs apprentissages : musées,
bibliothĂšques, hĂŽpitaux, bureaux dâaffai-
res, centres dâachats. La moitiĂ© des discipli-
nes étaient enseignées par des spécialistes
extĂ©rieurs2. Aujourdâhui, la perspective
dâune sociĂ©tĂ© sans Ă©cole rĂ©apparaĂźt avec
les nouvelles possibilités des technologies
(Internet) et des rĂ©seaux dâapprentissage.
Il sâagit dâailleurs dâun des scĂ©narios du
futur esquissĂ© par les experts de lâOCDE.
Aux Etats-Unis déjà , de nombreux enfants
des classes aisées et moyennes ne fréquen-
tent plus lâĂ©cole publique et sont instruits
Ă domicile.
Les débuts de
lâĂ©cole
Les premiers établissements scolaires furent
les prestigieux collĂšges qui, pendant toute
la pĂ©riode de lâAncien RĂ©gime, Ă©taient rĂ©-
servĂ©s aux ïŹls des familles patriciennes et
bourgeoises. Il nâexistait pas de bĂątiment
pour lâenseignement Ă©lĂ©mentaire. Les
enfants des classes aisées étaient instruits
à domicile ; les autres fréquentaient par-
fois des petites salles guÚre aménagées
pour lâenseignement dans des bĂątiments
communaux ou dans la maison du maĂźtre.
Les enfants ouvriers apprenaient parfois
leur catéchisme et leurs lettres, dans les
fabriques, Ă lâĂ©cole du soir, au terme de
leur journée de travail.
Les salles de classe ne servaient dâailleurs
pas uniquement aux activités scolaires. Le
24 janvier 1834, une loi vaudoise interdit
que la salle de classe soit utilisée pour
boire et pour danser. Ces espaces dâap-
prentissage se trouvaient souvent dans des
quartiers populaires, bruyants ou mĂȘme
malfamés. Récemment, la question de
la proximitĂ© dâune Ă©cole et de lieux peu
compatibles avec sa mission sâest posĂ©e
Ă Moudon (VD). Parents et Commission
scolaire sâopposĂšrent avec succĂšs Ă lâouver-
ture dâune maison close Ă cĂŽtĂ© de lâĂ©cole
primaire de la Grenette3.
Au XIXe siĂšcle, dans les villes, quelque 300
enfants de tous les ùges étaient instruits
dans de grandes salles oĂč se pratiquait
lâenseignement mutuel. Cette mĂ©thode,
développée à Fribourg par le célÚbre
pédagogue que fut le PÚre Girard (1765-
1850) avait lâavantage dâalphabĂ©tiser et
dâinstruire un grand nombre dâenfants Ă
moindre frais. En 1807, le PÚre Grégoire
1 Finkelstein L. & Strick L.W. (1972) Enseigner par et pour la ville Perspectives éducatives vol 2 no1 Paris UNESCO
(p 83-88)
2 Derouet, Les murs de lâĂ©cole p 50
3 Les parents de veulent pas dâun bordel Ă cĂŽtĂ© de lâĂ©cole primaire. La libertĂ© 11.03.04
Pupitres et tableau noir installĂ©s dans la chambre Ă coucher du maĂźtre dâĂ©cole
Architecture scolaire : regard historique
tournĂ© vers lâavenir
SIMONE FORSTER
COLLABORATRICE SCIENTIFIQUE IRDP