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LUNDI 23 FEVRIER
A. LE CORPS EN SCENE
Le stage est inauguré par une courte introduction de Dominique Lardenois, directeur
du théâtre, qui rappelle sa rencontre et ses diverses collaborations avec Anne Astolfe et son
court passage à l'école Lecoq (se souvenant avec humour de devoir improviser sur la couleur
jaune), tout en reconnaissant qu'il "a remis le corps au centre de la création théâtrale", avec
d'autres metteurs en scène tels que Giorgio Strehler ou Ariane Mnouchkine. Il évoque les
difficultés que représente la création d'un spectacle, notamment sur la thématique du travail,
et souligne le fait que durant deux étés, la compagnie du LAABO a été accueillie au théâtre
de Privas. Le spectacle Hold on est un succès, fort de 70 représentations (ce qui est beaucoup
pour un premier spectacle), et annonce que la deuxième création d'Anne Astolfe (toujours sur
le thème du travail) sera sans doute représentée au théâtre.
Anne Astolfe commence par dire qu'un stage à destination des enseignants est une
nouveauté pour elle (souvent les stagiaires sont des formateurs ou des animateurs de centre),
et s'enquiert des attentes du stage, en rappelant les enjeux du stage qui sont évidemment
reliés par la dimension pédagogique: l'école Lecoq, l'écriture collective sur plateau et la
démarche artistique.
Elle dresse les grandes étapes de son parcours : issue du monde du sport -elle a commencé
par les STAPS-, elle découvre lors d'ateliers proposés par la formation sportive le théâtre et le
plaisir du jeu. De là, elle décide de changer de voie et intervient très tôt dans des ateliers de
théâtre à Feyzin, avant de rejoindre l'école Lecoq. Sa formation première trouve là une sorte
d'aboutissement, et le passage du mouvement sportif au mouvement théâtral se fait
naturellement. Elle anime ensuite des ateliers à Privas en direction des enfants (Les P'tits
mômes) et des adolescents. En 2007 et 2008, elle poursuit sa formation chez Lecoq, fondée
cette fois sur l'observation. Sans intervenir (ce qui n'est pas sans frustration), elle doit regarder
comment fonctionnent les élèves, qui s'approprient les techniques du mouvement.
Suite à cette expérience, elle décide de créer un laboratoire de recherches, qui devient
le LAABO, fondé sur la recherche, l'erreur et l'expérimentation du mouvement et du jeu.
L'équipe entière (metteur en scène, comédiens, techniciens) se réfère aux principes de
l'OULIPO, et notamment de la contrainte, observant ainsi comment transposer sur le plateau
les contraintes d'écriture à travers le jeu, le rythme, le geste, afin d'arriver à une "phrase
gestuelle".
L'aspect mécanique du geste les entraîne vers le monde du travail, et ils décident
d'orienter leur travail vers le monde du travail et ses conséquences : perte ou déstructuration
de l'identité (d'où le choix du prénom unisexe Dominique) et/ou de la vie privée. L'équipe
commence par se documenter sur le sujet, notamment l'ouvrage de Christophe Dejours, La
Souffrance au travail, et travaille en collaboration avec le CNAM.
Les improvisations ne les satisfaisant pas, du fait d'un manque d'expérience dans le
domaine de la plateforme téléphonique, ils décident de s'immerger dans cet univers en
rédigeant de faux-CV et en cherchant à être embauchés (ce qui n'est pas immédiat!). Le but
est de ramener de "la matière vécue pendant l'immersion" et de l'intégrer dans la création,
sous forme d'improvisation, par exemple autour de l'infantilisation ou du principe d'auto-
évaluation, en amenant le décalage nécessaire ou la transposition sur la scène du théâtre. A
partir de là, le fait de connaître la réalité a permis de gagner en justesse et de transposer cet
univers dans le spectacle de la compagnie, intitulé Hold on (Ne raccrochez pas).
Le premier échange concerne la notion de jeu avant la parole, qui est différent du mime
ou du jeu silencieux. Le corps parle, et il s'agit d'être curieux du corps, en regardant ce qui se
passe en soi et autour : par exemple, comment entrer dans un lieu, sous le regard des autres