
L’interview du pape François :  
une feuille de route pour l’Afrique ? 
Cette interview aux revues jésuites propose d’exigeantes options pastorales. 
L’interview est marquée par le souci du pape de rejoindre ses confrères en s’appuyant sur la 
spiritualité ignatienne dans la ligne de l’option missionnaire universelle de la compagnie de 
Jésus.  Pour  lui,  la  communauté  est  également  une  dimension  importante.  En  tant  que 
missionnaire travaillant en Afrique centrale et marqué par la spiritualité de Saint Ignace, je 
me suis demandé : dans quelle  mesure les éclairages et les  interpellations destinés à  ses 
confrères  peuvent-ils concerner  aussi  bien  l’Eglise  qui  est  en  Afrique  que  notre  propre 
Société missionnaire ? 
Je ne retiens dans ce long document que ce qui concerne directement mon propos. 
S’adressant à la Compagnie, insistant sur l’importance du discernement,  François invite 
à  une  ouverture  qui  peut  aussi  bien  concerner  un  institut  missionnaire  que  les  diocèses 
d’Afrique. « À partir de l’espace où nous sommes, elle nous fait toujours regarder l’horizon. 
C’est faire les petites choses de tous  les jours avec  un  cœur grand  ouvert à  Dieu et  aux 
autres.  (…)  Pour  saint  Ignace  les  grands  principes  doivent  être  incarnés  en  prenant  en 
compte les circonstances de lieu et de temps ainsi que les personnes ». Cette parole montre 
l’importance de l’ouverture à l’universel tout an partant de la réalité concrète des gens, ce 
qui est le fondement de tout travail d’inculturation. 
 
Quant à la tentation pour le clergé de chercher le confort ou le pouvoir il précise : «  
Le discernement se réalise toujours en présence du Seigneur, en regardant les signes, en 
étant  attentif  à  ce  qui  arrive,  au  ressenti  des  personnes,  spécialement  des  pauvres.  Mes 
choix, même ceux de la vie quotidienne, comme l’utilisation d’une voiture modeste, sont liés 
à  un  discernement  spirituel  répondant  à  une  exigence  qui  naît  de  ce  qui  arrive,  des 
personnes, de la lecture des signes des temps. Le discernement dans le Seigneur me guide 
dans ma manière de gouverner. » Il met aussi en garde les institutions ecclésiastiques de se 
mettre  elle-même  au  centre  en  courant  le  risque  de  l’autosuffisance,  comptant  sur  leurs 
propres forces. « On peut avoir de grands projets et les réaliser en agissant sur des choses 
minimes.  Ou  on  peut  utiliser  de  faibles  moyens  qui  s’avèrent  plus  efficaces  que  des  plus 
forts, comme le dit aussi Saint Paul dans la Première Lettre aux Corinthiens ». Cette parole 
interroge un certain gaspillage dans les projets dits de « développement » qui ne profitent 
pas toujours aux destinataires les plus pauvres… 
 
Les  Eglises  d’Afrique  – comme  d’ailleurs  –  sont  appelées  à  être  comme  la  compagnie  de 
Jésus « aujourd’hui plus que jamais, […] contemplative dans l’action (…) Cela requiert 
beaucoup  d’humilité,  de  sacrifice,  de  courage,  spécialement  quand  on  vit  des 
incompréhensions ou que l’on est objet d’équivoques et de calomnies, mais c’est l’attitude la 
plus féconde ». 
 
A  propos  de  l’importance de  la  concertation  plutôt  que  l’autoritarisme –  piège  dans 
lequel  il  dit  être  lui-même  tombé  dans  le  passé  –  il  rappelle  ce  que  le  Concile  a  dit  sur 
l’importance de la synodalité (les différents conseils dans l’Eglise). Sa pratique peut inspirer 
des diocèses et des évêques pour qui l’ouverture à un vrai débat et à une coresponsabilité 
exigeante n’est encore qu’un vœu pieux.  : « Je partage cette expérience de vie pour faire 
comprendre  quels sont les dangers du gouvernement. Avec le temps, j’ai appris beaucoup 
de  choses.  Le  Seigneur  m’a  enseigné  à  gouverner  aussi  à  travers  mes  défauts  et  mes 
péchés. C’est ainsi que, comme archevêque de Buenos Aires, je réunissais tous les quinze 
jours les six évêques auxiliaires et, plusieurs fois par an, le Conseil presbytéral. Les questions 
étaient posées, un espace de discussion était ouvert. Cela m’a beaucoup aidé à prendre les 
meilleures  décisions.  Maintenant j’entends  quelques  personnes  me  dire  “Ne consultez  pas