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Les vaccins en six questions. Le Monde.fr 30.06.2015 Par Moina Fauchier-Delavigne, Pascale Santi et Sandrine Cabut
« La vaccination, cela ne se discute pas. » Cette
déclaration de la ministre de la santé, Marisol
Touraine, vendredi 29 mai, en réponse à la pétition
mise en ligne en mai par le professeur Henri Joyeux a
le mérite de la clarté. Elle ajoutait : « Il ne faut pas
avoir de doute par rapport aux vaccins, ce qui n’exclut
pas la transparence et la recherche pour toujours
améliorer la qualité de nos vaccins. » Mais pourquoi
les propos de la ministre restent-ils inaudibles ? (…)
Peut-être parce que la crédibilité de ces acteurs est de
plus en plus écornée : les autorités sanitaires
continuent de payer les maladresses de la gestion de
la vaccination contre l’hépatite B, longtemps
suspectée de déclencher des scléroses en plaques.
Mais aussi de la pandémie de grippe H1N1, en 2009 –
l’un des vaccins utilisés à cette occasion ayant en
outre engendré des narcolepsies. Leur communication
sur le sujet reste insuffisante, souvent trop
péremptoire. Et contradictoire : elles font campagne
pour l’obligation vaccinale sans, semble-t-il, se donner
vraiment les moyens d’anticiper les pénuries. La
parole des experts est, elle, rendue suspecte par leurs
liens d’intérêts plus ou moins dissimulés avec
l’industrie pharmaceutique.
L’actualité favorise généralement le discours anti-
vaccin. En avril, les effets secondaires liés à un vaccin
protégeant contre les antirotavirus étaient pointés du
doigt à cause de décès de nourrissons. Aujourd’hui,
c’est le cas d’une petite fille de 7 mois, entre la vie et
la mort après une fièvre aiguë et des convulsions dans
les heures suivant l’injection concomitante d’un
vaccin hexavalent (Infanrix Hexa) et contre le
pneumocoque (Prevenar). Même si la responsabilité
du SAMU, qui a refusé de prendre en charge l’enfant,
est aussi mise en cause, l’image de la vaccination
risque une nouvelle fois d’en pâtir. En Espagne, à
l’inverse, un enfant vient de mourir d’une diphtérie,
contre laquelle ses parents ne l’avaient pas vacciné.
(…) [Mais] des incertitudes demeurent, qui méritent
débat public : qu’y a-t-il derrière les pénuries de
vaccins obligatoires et quelles sont les solutions
alternatives ? Que sait-on vraiment des adjuvants ? La
vaccination obligatoire a-t-elle encore un sens ?
Eléments de réponse à trois questions cruciales.
Pourquoi la pénurie actuelle, et quelles sont les
alternatives en pratique ? (…)
Quels sont les risques d’une baisse des vaccinations ?
L’OMS estime que la vaccination évite chaque année
entre 2 millions et 3 millions de décès. « Si en France
la vaccination régressait, des maladies reviendraient,
alerte-t-on au ministère de la santé. La poliomyélite, le
tétanos n’ont pas disparu, c’est un contresens que
d’affirmer cela. On voit des cas de poliomyélite au
Moyen-Orient ou en Europe de l’Est, le tétanos existe
dans des populations non vaccinées. » La seule
maladie aujourd’hui éradiquée est la variole,
officiellement depuis 1980.
En France, l’Institut de veille sanitaire (InVS) s’est
inquiétée début juin de la recrudescence de la
rougeole. Près de 200 cas ont été déclarés depuis le
début de l’année en France, notamment dans le Haut-
Rhin. Et depuis 2008, 23 500 cas ont été signalés,
ayant entraîné 1 500 cas de pneumopathie grave, 34
formes neurologiques compliquées avec séquelles
graves et 10 décès. La couverture vaccinale atteint
80 %, alors qu’il faudrait 90 à 95 % pour éliminer la
circulation du virus.
Depuis l’introduction de la vaccination anti-diphtérie
dans les années 1920, puis sa généralisation dans les
années 1950, l’incidence de cette maladie infectieuse
avait considérablement diminué dans les pays
industrialisés. Elle est revenue dans les pays d’Europe
de l’Est dans les années 1990, avec 47 000 cas. Depuis,
en France, un seul cas non importé a été identifié,
en 2011 par l’ARS de Toulouse.
(…) L’incidence du tétanos a également beaucoup
chuté. Alors qu’en 1975, un peu plus de 300 cas
avaient été recensés en France, 205 l’ont été par
l’InVS entre 2000 et 2012, dont 83 % chez les plus de
70 ans. En cause : le manque de vaccination de la
population adulte.
Alors qu’elle était vue comme une maladie du passé,
la tuberculose, une des premières causes de mortalité
dans le monde, a certes nettement reculé en France,
mais des dizaines de cas sont recensés. La Seine-Saint-
Denis est le département le plus touché, du fait de la
présence de migrants venant d’Asie, d’Afrique
subsaharienne ou d’Europe de l’Est, où l’incidence est
plus forte qu’en France. (…)
Les adjuvants sont-ils suffisamment étudiés ?
La question de l’innocuité des vaccins se cristallise en
particulier sur les adjuvants suspectés par les « anti-
vaccins », mais aussi par certains chercheurs, d’induire
une série d’effets secondaires. Utilisés pour certains,
comme l’aluminium, depuis presque un siècle, les
adjuvants ont pour fonction de renforcer la réponse
immunitaire, donc de réduire la quantité d’antigène
par dose, et le nombre de doses nécessaires pour
assurer une bonne réponse immunitaire.
Le Comité consultatif mondial de la sécurité vaccinale
(GACVS), émanation de l’OMS, a conclu à l’innocuité