Connexion de Gauss-Manin - Les Mathématiques à l`université d

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Connexion de Gauss-Manin
Delphine Pol
sous la direction de Michel Granger
19 juillet 2013
Mémoire de Master 2
Année 2012-2013
Table des matières
Introduction
3
1 Fibration de Milnor
1.1 Théorème d’Ehresmann . . . . . . . . . . .
1.1.1 Transversalité . . . . . . . . . . . . .
1.1.2 Cas des fonctions à valeurs réelles . .
1.1.3 Cas des fonctions à valeurs dans Rk
1.2 Fibration de Milnor . . . . . . . . . . . . . .
1.2.1 Gradient complexe . . . . . . . . . .
1.2.2 Le lemme des petits chemins . . . .
1.2.3 Fibration de Milnor . . . . . . . . .
1.3 Propriétés de la fibration de Milnor . . . . .
1.3.1 Elle ne dépend que du germe en 0 .
1.3.2 L’espace X(ε, η) est contractile . . .
1.3.3 Le nombre de Milnor . . . . . . . . .
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2 Connexion de Gauss-Manin et cohomologie
2.1 Connexion de Gauss-Manin . . . . . . . . .
2.1.1 Le fibré de Gauss-Manin . . . . . . .
2.1.2 Connexion de Gauss-Manin . . . . .
2.2 Cohomologie relative . . . . . . . . . . . . .
2.2.1 Définition et quelques propriétés . .
2.2.2 Cohérence . . . . . . . . . . . . . . .
2.2.3 Etude comparée . . . . . . . . . . .
2.2.4 Connexion . . . . . . . . . . . . . . .
2.2.5 Réseau de Brieskorn . . . . . . . . .
relative
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3 Exemples de calcul de la matrice de monodromie
3.1 Régularité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.2 Lien entre les vecteurs propres de la monodromie et les sections du faisceau H(X/D)
3.3 Cas des polynômes quasi-homogènes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.3.1 Calcul dans le cas quasi-homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.3.2 Exemples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.4 Cas non quasi-homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.4.1 Quelques résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.4.2 Un cas particulier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.5 Une ouverture : le lien avec les polynômes de Bernstein . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.5.1 Algèbre de Weyl . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.5.2 Polynôme de Bernstein . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.5.3 Lien avec la connexion de Gauss-Manin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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A Quelques propriétés des faisceaux
A.1 Définitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
A.2 Faisceaux cohérents et faisceaux localement libres
A.3 Cohomologie des faisceaux . . . . . . . . . . . . .
A.4 Variétés de Stein . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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Introduction
Ce mémoire porte sur la connexion de Gauss-Manin que l’on peut attacher à une singularité
isolée d’hypersurface donnée par un germe de fonction analytique f : (Cn+1 , 0) → (C, 0).
Le premier chapitre de ce travail concerne la fibration de Milnor, introduite dans [Mil68]. On
montre que f réalise une fibration localement triviale au-dessus d’un disque pointé, en dehors de la
fibre singulière, pour peu que l’on se restreigne à des voisinages assez petits de l’origine. On utilise
le théorème d’Ehresmann pour prouver ce résultat, puis on étudie quelques propriétés topologiques
de la fibration de Milnor.
Grâce à cette fibration, on construit un fibré vectoriel au-dessus du disque pointé, le fibré de
Gauss-Manin, que l’on munit d’une connexion plate. Notre objectif est d’étudier la monodromie qui
vient avec cette connexion car elle permet de retrouver des propriétés topologiques de la singularité,
d’après un résultat de Milnor. Néanmoins, pour calculer cette monodromie, on introduit un autre
faisceau plus manipulable, le faisceau de cohomologie relative H(X/D). On étudie quelques propriétés de ce faisceau dans le deuxième chapitre, en particulier sa cohérence, dont la preuve développée
ici suit celle proposée par E.Brieskorn dans [Bri70], mais avec davantage de détails. On montre que
le n-ième faisceau de cohomologie relative restreint au disque pointé est isomorphe au faisceau des
germes de sections holomorphes du fibré de Gauss-Manin, et on définit une connexion méromorphe
sur le faisceau de cohomologie relative, qui coïncide avec la connexion de Gauss-Manin initiale en
dehors de 0. Ainsi, au lieu de calculer la monodromie à partir du fibré de Gauss-Manin, on la calcule
à l’aide du faisceau H(X/D), et on montre qu’on peut même se restreindre à des formes définies sur
un voisinage de l’origine. On introduit alors le “réseau de Brieskorn”, qui permet de simplifier des
calculs en considérant des formes de degré maximal, et donc des fonctions holomorphes.
Le troisième chapitre montre comment on peut trouver des valeurs propres de la monodromie
à l’aide du faisceau H(X/D), et on en déduit la matrice de la monodromie dans le cas simple des
polynômes quasi-homogènes. On introduit ensuite le “saturé” du réseau de Brieskorn afin de calculer
le “résidu” de la connexion.L’étude des valeurs propres de la monodromie a aussi un intérêt dans
l’étude des polynômes de Bernstein, ainsi que le montre B.Malgrange dans [Mal75], car elles sont
intimement liées au racines du polynôme de Bernstein que l’on associe à une singularité. On ne fera
ici qu’énoncer le résultat, et le relier aux exemples calculés.
A la fin de ce mémoire se trouve une annexe regroupant plusieurs résultats concernant les faisceaux qui ont été utilisés, pour la plupart, dans le deuxième chapitre.
Ce mémoire m’a permis de m’initier à l’étude des singularités, et a fait appel à plusieurs domaines : la première partie utilise essentiellement de la géométrie différentielle à travers la construction de champs de vecteurs sur des variétés lisses, et l’étude de leur flot. La seconde partie quant
à elle fait surtout intervenir des résultats sur les faisceaux, et en particulier la cohomologie et les
suites spectrales, surtout dans la preuve de la cohérence du faisceau H(X/D). Le dernier chapitre
quant à lui repose sur de l’algèbre, qui permet de calculer des exemples simples.
3
Remerciements
Je tiens ici à exprimer toute ma gratitude envers Michel Granger, pour m’avoir proposé ce sujet et
pour toute l’aide et les bons conseils qu’il m’a apportés tout au long de la réalisation de ce mémoire.
Je remercie également Frédéric Mangolte pour avoir encadré mon mémoire l’an passé, ainsi que
l’ensemble des professeurs des Universités d’Angers et de Nantes pour les cours auxquels j’ai pu
assister. Je veux aussi remercier mes camarades de promo, en particulier Mohamed et Hang, pour
toutes nos séances de travail qui m’ont bien aidée cette année, Benjamin, pour son enthousiasme et
aussi pour nous avoir prêté son bureau, ainsi que mes amis et ma famille pour leur soutien.
4
Chapitre 1
Fibration de Milnor
Les variétés seront supposées séparées et paracompactes. Dans ce chapitre, on démontre le théorème d’Ehresmann (théorème 1.1.8), puis on l’utilise pour prouver le théorème de fibration de Milnor 1.2.7.
1.1
1.1.1
Théorème d’Ehresmann
Transversalité
Commençons par définir la transversalité de deux variétés lisses, dont nous aurons besoin à
plusieurs reprises dans ce chapitre. On notera Tx X l’espace tangent d’une variété lisse X en x.
Définition 1.1.1. Soient Y et Z deux sous-variétés lisses d’une variété lisse X. On dira que les
variétés Y et Z sont transverses en x ∈ Y ∩ Z si Tx Y + Tx Z = Tx X.
Proposition 1.1.2. Supposons que Y et Z sont deux sous-variétés lisses de codimensions respectives p et q d’une même variété lisse X de dimension n. Si Y et Z sont transverses en chaque point
d’intersection, alors Y ∩ Z est une sous-variété lisse de X de codimension p + q.
Preuve. Soit x ∈ Y ∩ Z. Alors il existe un ouvert U de X contenant x et f, g deux submersions
tels que U ∩ Y = f −1 (0) et U ∩ Z = g −1 (0). Alors U ∩ (Y ∩ Z) = h−1 (0) où h = (f, g)T . Par la
transversalité au point x, on a Tx Y +Tx Z = Tx X et donc Tx Y ∩Tx Z est de dimension n−(p+q). Par
conséquent, h est une submersion en x et Y ∩Z est une sous-variété lisse de X de codimension p+q.
1.1.2
Cas des fonctions à valeurs réelles
Ce paragraphe est consacré au théorème d’Ehresmann dans le cas d’une fonction à valeurs
réelles. La preuve du premier théorème est une légère adaptation d’une preuve donnée par J.Milnor
dans [Mil63].
Définition 1.1.3. Soient X une variété lisse et f : X → R une application lisse.
On munit X d’une métrique riemannienne. On définit le gradient de f en un point x de X
comme étant le vecteur gradx f vérifiant :
∀ξ ∈ Γ(U, T X), x ∈ U, hξ(x), gradx f i = dfx (ξ(x))
Remarque. On a alors pour toute courbe c : ] − ε, ε[→ X de classe C 1 :
d(f ◦ c)
dc
∀t ∈] − ε, ε[,
(t) =
(t), gradc(t) f
dt
dt
5
Dans cette partie, X est munie d’une métrique riemannienne.
Théorème 1.1.4. Soient X une variété lisse et f : X → R une application lisse. On suppose
que f est une submersion en tout point de X et qu’elle est propre.
Alors f : X → R est une fibration lisse localement triviale.
Preuve. On va construire un champ de vecteurs dont le flot répondra au problème.
Soit s ∈ R On prend a et b dans R tels que a < b et (0, s) ∈]a, b[2 . Comme f est propre, f −1 ([a, b])
est compact. Soit ρ une fonction C ∞ à support compact valant identiquement 1 sur f −1 ([a, b]) et 0
hors d’un voisinage compact de f −1 ([a, b]).
On définit alors un champ de vecteurs ξ sur X par :
1
gradf
hgradf, gradf i
On note Φξ son flot. Il est défini sur R × X puisque ξ est nul en dehors d’un compact.
Soit x0 ∈ X. Regardons t 7→ f ◦ Φtξ (x0 ). On suppose que Φtξ (x0 ) ∈ f −1 ([a, b]). Alors :
ξ=ρ.
df ◦ Φtξ (x0 )
dt
*
(t) =
dΦtξ (x0 )
dt
+
, gradΦt (x0 ) f
ξ
D
E
= ξ(Φtξ (x0 )), gradΦt (x0 ) f
ξ
=1
et donc, tant que Φtξ (x0 ) reste dans f −1 ([a, b]), on a f (Φtξ (x0 )) = t + Cx0 .
Soit ψ : f −1 (]a, b[) →]a, b[×f −1 (a) définie par :
−f (x)
∀x ∈ f −1 (]a, b[), ψ(x) = (f (x), Φξ
(x))
Alors ψ est lisse et f = pr1 ◦ ψ où pr1 désigne la projection sur la première coordonnée.
Montrons que ψ réalise un difféomorphisme sur les fibres.
On commence par remarquer que les fibres sont des sous-variétés lisses de X étant donné que
l’on suppose que f est une submersion en tout point.
Soit x ∈ f −1 (c) pour un c ∈]a, b[. L’application Φ−c
: X → X est un difféomorphisme de
ξ
réciproque Φcξ .
−c −1
Alors f (Φ−c
(c)) ⊆ f −1 (0).
ξ (x)) = −c + c = 0 et donc Φξ (f
Réciproquement, on vérifie que Φcξ (f −1 (0)) ⊆ f −1 (c). Par conséquent, ψ réalise bien un difféomorphisme sur les fibres, et constitue donc une trivialisation locale autour de s. Donc f : X → R
est une fibration localement triviale.
En fait, une légère modification de la preuve ci-dessus permet de montrer le théorème suivant :
(voir [Mil63], théorème 3.1)
Théorème 1.1.5. Soient f une fonction de classe C ∞ définie sur la variété X, et a < b deux
réels. on note X a = {x ∈ X ; f (x) 6 a}, et de même pour X b .
Si f −1 ([a, b]) est compacte et ne contient pas de point critique de f , alors X a et X b sont
difféomorphes. De plus, X a est un rétracte par déformation de X b .
6
Preuve. Avec les mêmes notations que dans la preuve précédente, on peut vérifier que Φb−a
réalise
ξ
a
b
un difféomorphisme entre les variétés à bord X et X .
On pose r : X b × [0, 1] → X b définie par :
(
x
si f (x) 6 a
r(x, t) =
t(a−f (x))
Φξ
(x) si f (x) ∈ [a, b]
Alors r est une rétraction par déformation de X a sur X b .
Intéressons-nous maintenant au cas des variétés à bord. Le résultat est valable pour les variétés à
bord en général, mais pour simplifier on va considérer que c’est une sous-variété à bord d’une variété
lisse de même dimension, comme c’est de toute façon le cas qui va nous être utile ensuite.
Théorème 1.1.6. Soient X une sous-variété lisse à bord lisse d’une variété M de même dimension, et f : V(X) → R lisse sur un voisinage ouvert de X. On suppose que f est une submersion
en tout point de V(X) et que pour tout compact K de R, f −1 (K) ∩ X est compact. On suppose
de plus que pour tout c ∈ R, la fibre f −1 (c) est transverse au bord ∂X.
Alors f : X → R est une fibration lisse localement triviale qui respecte les bords.
Preuve. On procède essentiellement de la même façon que dans le cas précédent, en faisant attention
à respecter les bords.
Soient s ∈ R et a < b deux réels tels que (0, s) ∈]a, b[2 . Alors f −1 ([a, b]) ∩ X est compact.
Grâce à la transversalité, en tout point x de ∂X, gradx f n’est pas orthogonal à l’espace tangent
de ∂X.
On prend un point x0 ∈ X.
Premier cas : x0 n’est pas dans le bord de X.
On se place dans un ouvert Ux0 dont l’adhérence n’intersecte pas le bord de X. On choisit une
fonction ρx0 C ∞ à support compact identiquement égale à 1 sur Ux0 et nulle en dehors d’un compact
inclus dans l’intérieur de X. On pose alors :
ξx0 = ρx0 .
1
gradf
hgradf, gradf i
Deuxième cas : x0 est un point du bord de X.
Grâce à une carte (U, φ) centrée en x0 , on se ramène à une boule B de Rn telle que le bord
soit envoyé bijectivement sur {xn = 0} ∩ B. Le vecteur φ∗ gradx0 f n’est pas orthogonal à {xn = 0}.
Quitte à réduire U , on peut supposer que c’est vrai sur tout B.
On note p : (x1 , . . . , xn ) 7→ (x1 , . . . , xn−1 , 0), et w = φ∗ gradf .
On pose :
1
η=ρ.
p(w)
hp(w), wi
où ρ est une fonction C ∞ à support compact valant identiquement 1 sur B/2 (la boule de rayon
moitié) et 0 en dehors d’un compact. Le même genre de calcul qu’avant permet de vérifier que tant
que Φtη (q) ∈ B/2, on a f ◦ φ−1 ◦ Φtη (q) = t + f (φ−1 (q)).
De plus, comme la composante selon xn est nulle, on vérifie que {xn = 0} ∩ B est stabilisé par φη
et par unicité des courbes intégrales passant par un point, φ(U ) aussi.
7
On ramène à présent ce champ de vecteurs et ses courbes intégrales sur la variété.
On pose ξ0 = (φ−1 )∗ η. Alors le flot de ξ0 est Φξ0 = φ−1 ◦ Φη ◦ φ.
df ◦ Φtξ0
Il stabilise le bord de X et
= 1 sur φ−1 (B/2). On l’étend sur V(X) par ξ1 = ρξ1 ξ0 avec
dt
comme d’habitude ρξ1 C ∞ à support compact valant identiquement 1 sur φ−1 (B/2).
Il ne reste plus qu’à tout recoller, on commence par extraire du recouvrement qu’on vient de
construire un recouvrement fini (Ui )06i6k grâce à la compacité de f −1 ([a, b]) ∩ X. On y ajoute un
recouvrement ouvert (Uj )j>k pour recouvrir le complémentaire de X dans M , et on pose ξj = 0
pour j > k. On choisit ρ C ∞ à support compact valant 1 sur f −1 ([a, b]) ∩ X et 0 ailleurs. On prend
une partition de l’unité (ψi ) associée à ce recouvrement de M et on pose
X
ξ=ρ.
ψi ξi
a
On vérifie alors que le flot Φξ respecte le bord de X sur f −1 ([a, b]) ∩ X et donc pour tout t, on
∩ f −1 ([a, b])) = X ∩ f −1 ([a, b]), et pour tout Φtξ (q) ∈ f −1 ([a, b]) ∩ X, f ◦ Φtξ (q) = t + Cq .
La fin de la preuve est identique à celle du théorème 1.1.4.
φtξ (X
Grâce au champ de vecteurs ainsi construit, on peut montrer l’analogue du théorème 1.1.5 :
Proposition 1.1.7. Si f vérifie les hypothèses de 1.1.6 dans une tranche f −1 ([a, b]), alors
f −1 (] − ∞, a[) ∩ X̊ et f −1 (] − ∞, b[) ∩ X̊
sont difféomorphes, et les ensembles f −1 (] − ∞, a]) ∩ X et f −1 (] − ∞, b]) ∩ X sont homéomorphes.
Ils ont aussi même type d’homotopie.
Preuve. La démonstration est identique à celle du théorème 1.1.5, la relation f ◦ Φtξ (q) = t + Cq
étant vérifiée pour Φtξ (q) ∈ f −1 ([a, b])∩X. On est obligé d’ouvrir en a et en b, et de prendre l’intérieur
de X, sinon ce n’est pas forcément une variété à bord lisse. On peut avoir des “coins” où ce n’est
pas lisse...
En revanche, f −1 (] − ∞, a]) ∩ X est une variété topologique à bord, dont le bord est :
(∂X ∩ f −1 (] − ∞, a]) ∪ (f −1 (a) ∩ X)
La rétraction est formée de la même façon que dans la preuve de 1.1.5
1.1.3
Cas des fonctions à valeurs dans Rk
Généralisons à présent au cas d’une fonction à valeurs dans Rk . On conserve les notations du
théorème 1.1.6 pour le deuxième énoncé.
Théorème 1.1.8 (Théorème d’Ehresmann).
1. Soient X une variété lisse de dimension n et f : X → Rk lisse. On suppose que f est une
submersion en tout point de X, et que f est propre.
Alors f : X → Rk est une fibration lisse localement triviale.
2. Soient X ⊂ M une sous variété lisse à bord, et f : V(X) → Rk lisse. On suppose que f
est une submersion en tout point de V(X) et que f |X est propre. On suppose de plus que
pour tout y ∈ Rk , f −1 (y) est transverse au bord.
Alors f : X → Rk est une fibration lisse localement triviale qui respecte le bord des fibres.
8
Preuve. Par récurrence sur k.
1. Pour k = 1, c’est le théorème 1.1.4.
On note f = (f1 , . . . , fk )T . Soit x ∈ Rk , x = (x1 , . . . , xk ).
On pose X1 = f1−1 (0) et F = (f2 , . . . , fk )T : X1 → Rk−1 .
On va appliquer l’hypothèse de récurrence à X1 et F .
Comme f est une submersion, f1 aussi et X1 est donc une variété lisse de dimension n − 1.
De plus, F est propre. Il reste à voir que F est une submersion en tout point de X1 , ce qui
est le cas étant donné que f est une submersion. (L’espace tangent à X1 est ker df1 , et on a
Kerdfj 6= Kerdf1 pour tout j 6= 1).
On peut donc lui appliquer l’hypothèse de récurrence.
Il existe un ouvert U1 contenant les points (x2 , . . . , xk ) et 0, que l’on peut supposer de la forme
]c2 , d2 [× · · · ×]ck , dk [, et une application ψ1 , tels que :
ψ1
F −1 (U1 ) ⊂ f1−1 (0)
U1 × f −1 (0)
pr1
F
U1
On prend c1 , d1 tels que (0, x1 ) ∈]c1 , d1 [. On pose K = ]c1 , d1 [×U1 . Par propreté de f , f −1 (K)
est un compact. On prend ρ une application C ∞ à support compact valant 1 sur f −1 (K).
L’application f étant une submersion
en tout point, on peut trouver un champ de vecteurs w
(
hw(p), gradp fj i = 0 si j > 1
tel que pour tout p ∈ X, on ait
.
hw(p), gradp fj i =
6 0 si j = 1
On pose alors :
ξ=ρ.
1
w
hw, gradf1 i
De même que dans les preuves précédentes, pour Φtξ (q) ∈ f −1 (K) on a :




d(f1 ◦ Φtξ (q))
=1
dt

d(fj ◦ Φtξ (q))


(t) = 0 pour j = 2, . . . , k
dt
Par conséquent, f1 ◦ Φtξ (q) = t + Cq et f2 , . . . , fk sont constantes le long des courbes intégrales. On pose U2 =]c1 , d1 [× · · · ×]ck , dk [. Le même raisonnement que dans la preuve du
théorème 1.1.4 montre que :
ψ2
f −1 (U2 )
]c1 , d1 [×f1−1 (0) ∩ F −1 (U2 )
pr1
f1
]c1 , d1 [
où ψ2 est un difféomorphisme qui laisse invariantes f2 , . . . , fk .
On pose ψ1 = (F, ψ˜1 ) et ψ2 = (f1 , ψ˜2 ). Alors ψ = (f, ψ˜1 ◦ ψ˜2 ) est une trivialisation locale.
9
2. Le principe est le même que pour le 1. Pour k = 1, c’est le théorème 1.1.6.
On pose X1 = f1−1 (0) et X2 = X1 ∩ X. X1 est une variété lisse de dimension n − 1, et X2
est une variété à bord, dont le bord est ∂X ∩ X1 , qui est bien une sous-variété de X par la
proposition 1.1.2, étant donné que X1 et ∂X sont transverses.
On pose F = (f2 , . . . , fk )T : X1 → Rk−1 . De même que dans le cas 1, c’est une submersion, et
on vérifie que F |X2 est propre. Il reste à voir la transversalité.
On a pour y ∈ Rk−1 et p ∈ ∂X2 , Tp ∂X2 = Tp ∂X ∩ Tp X1 et donc, comme ∂X et f −1 (0, y) sont
transverses, Tp ∂X + Tp f −1 (0, y) = Tp M et donc finalement en intersectant avec Tp X1 :
Tp ∂X2 + Tp F −1 (y) = Tp X1
d’où la transversalité. On peut donc appliquer l’hypothèse de récurrence à F , et on trouve de
même que dans le cas 1 un champ de vecteurs w. On procède alors comme dans la preuve du
théorème 1.1.6 pour que les difféomorphismes respectent le bord, ce qui permet de conclure.
Remarques.
1. On peut remplacer Rk par une variété difféomorphe à Rk .
2. On remarquera qu’une telle fonction f est une fibration triviale au-dessus d’un disque ⊂ Rk .
3. Le cas qui nous intéressera le plus sera le cas d’une variété à bord à valeurs dans R2 .
1.2
Fibration de Milnor
Nous allons à présent nous intéresser à une fonction holomorphe f : Cn+1 → C ayant une
singularité isolée à l’origine, et nous montrerons grâce au théorème d’Ehresmann qu’elle réalise une
fibration localement triviale en dehors de la fibre singulière.
1.2.1
Gradient complexe
Commençons par définir un gradient complexe. On le notera gradC f pour le différencier du
gradient “réel” défini dans la partie précédente. On va noter f = f1 + if2 , et zj = xj + iyj . On
rappelle les conditions de Cauchy-Riemann :
Proposition 1.2.1. Pour tout j on a :
∂f1
∂f2
∂f1
∂f2
=
et
=−
∂xj
∂yj
∂yj
∂xj
En utilisant ces égalités on peut montrer que :
1 ∂f
∂f
∂f
=
−i
∂zj
2 ∂xj
∂yj
∂f1
∂f1
=
−i
∂xj
∂yj
∂f2
∂f2
=
+i
∂yj
∂xj
10
On va noter h , ih le produit hermitien usuel sur Cn+1 , alors le produit scalaire euclidien sur
R2n+2 ' Cn+1 est égal à la partie réelle de h , ih . On pose :
C
grad (f ) =
∂f
∂f
,...,
∂z0
∂zn
T
le gradient complexe de f .
Alors on vérifie que pour toute courbe c : ] − ε, ε[→ X de classe C 1 :
d(f ◦ c)
dc
C
∀t ∈] − ε, ε[,
(t) =
(t), gradc(t) f
dt
dt
h

D
E D
E

 Re v, gradC f
= v, gradR f1
D
Eh D
E.
De plus, pour tout vecteur v ∈ Cn+1 , on a

C
 Im v, grad f
= v, gradR f2
h
1.2.2
Le lemme des petits chemins
Dans ce paragraphe, on met en place les variétés qui permettront d’appliquer le théorème d’Ehresmann 1.1.8 à notre fonction f , et ainsi de prouver le théorème de fibration de Milnor dans le
paragraphe suivant.
Définition 1.2.2. Soit f : Cn+1 → C une application holomorphe. On dira que 0 est une singularité isolée de f s’il existe U ⊂ Cn+1 un ouvert tel que pour tout x ∈ U , gradC
x f = 0 si et seulement
si x = 0.
On considère une fonction holomorphe 1 f : Cn+1 → C avec une singularité isolée en 0.
On commence par énoncer le lemme des petits chemins, qui est démontré dans le livre de Milnor [Mil68] dans le cas algébrique, mais valable aussi dans le cas analytique.
Lemme 1.2.3 (Lemme des petits chemins). Soit V un sous-ensemble de Rm défini par l’annulation de fonctions analytiques réelles.
Soit U un ouvert de la forme : {x ∈ Rm ; g1 (x) > 0, . . . , gk (x) > 0} où les gj sont analytiques
réelles.
Si 0 est dans l’adhérence de U ∩ V , alors il existe un chemin p : [0, ε[→ Rm analytique réel tel
que : p(0) = 0 et ∀t ∈]0, ε[, p(t) ∈ U ∩ V .
On va l’utiliser pour montrer que pour un certain ε0 la fibre singulière est transverse à toutes les
sphères de rayon plus petit.
Proposition 1.2.4. Il existe ε0 > 0 tel que pour tout 0 < ε 6 ε0 la fibre singulière f −1 (0) est
transverse à la sphère Sε .
Preuve. Par l’absurde. On suppose que pour tout ε0 > 0 on peut trouver un ε < ε0 tel que la fibre
singulière ne soit pas transverse à la sphère de rayon ε.
On va utiliser le lemme des petits chemins 1.2.3. Le lemme des petits chemins s’applique à
des fonctions réelles, donc on regarde f comme une fonction f˜ de R2n+2 → R2 . On note encore
f = f1 + if2 .
Si la fibre n’est pas transverse à la sphère en z, cela signifie que Ker(df1 ) ∩ Ker(df2 ) ⊂ Tz Sε . Par
conséquent, z est dans l’espace vectoriel engendré par les gradients réels gradf1 et gradf2 . Il existe
donc des coefficients réels α et β tels que αgradf1 + βgradf2 = z. On va supposer que α 6= 0, on a
donc gradf1 = λz + γgradf2 pour des constantes réelles λ et γ.
1. On montrera en 1.3.1 qu’on peut en fait considérer un germe de fonction holomorphe f : (Cn+1 , 0) → (C, 0)
11
Alors :
∂f
∂f1
∂f1
=
−i
∂zj
∂xj
∂yj
= λxj + γ∂xj f2 − i(λyj + γ∂yj f2 )
= λxj − γ∂yj f1 − i(λyj + γ∂xj f1 )
λ
∂f
=
zj .
∂zj
1 + iγ
Par conséquent, si la fibre est non transverse à la sphère, cela se traduit au niveau du gradient
complexe par le fait qu’il est colinéaire à z.
Et donc
On pose alors V = {z ∈ R2n+2 ' Cn+1 ; f (z) = 0, gradC
z (f ) colinéaire à z}.
2n+2
On prend U = {z ∈ R
; kzk > 0}.
Ces deux ensembles vérifient bien les hypothèses du lemme des petits chemins car la colinéarité
se traduit par l’annulation de mineurs. De plus, par hypothèse, 0 est dans l’adhérence de U ∩ V .
On peut donc trouver un chemin p : [0, δ[→ R2n+2 tel que p(0) = 0 et ∀t > 0, p(t) ∈ U ∩ V .
df (p(t))
Comme p reste constamment dans la fibre f −1 (0), on a
= 0.
dt
Mais on a aussi une expression avec le gradient :
dp(t)
, gradC
p(t) (f )
dt
dp(t)
=
, λ(t)p(t)
dt
h
λ(t) d
kp(t)k2
=
2 dt
=0
df (p(t))
=
dt
h
Comme le gradient n’est nul qu’en 0 vu qu’on a un point critique isolé, on en déduit que λ(t) 6= 0
pour t > 0. C’est donc que la norme de p est constante, mais elle est nulle en 0 donc p(t) = 0 pour
tout t > 0 : contradiction.
D’où le résultat.
Proposition 1.2.5. Avec les mêmes notations, si on se donne 0 < ε1 6 ε0 on peut trouver un η > 0
tel que les fibres f −1 (c) soient transverses aux sphères Sε pour ε1 6 ε 6 ε0 et |c| < η.
Preuve. Supposons le contraire. On a donc une suite cn qui tend vers 0 telle que pour tout n, il
existe εn ∈ [ε1 , ε0 ] et zn ∈ f −1 (c) ∩ Sεn tels que f −1 (c) ne soit pas transverse à Sεn en zn . Par
compacité, on peut extraire une suite (znk ) convergente (vers un z), mais que l’on va encore noter
(zn ). La suite (f (zn )) converge vers 0, donc z ∈ f −1 (0). Regardons maintenant les gradients. Pour
tout n, on a gradzn f = λn zn pour des constantes λn . On a de plus que gradzn f converge vers gradz0 f ,
kgradzn f k
kgradzn f k
et |λn | =
6
donc λn est une suite bornée puisque le gradient est borné sur
kzn k
ε1
la boule fermée de rayon ε0 , et donc (λn ) a une valeur d’adhérence λ. Par passage à la limite, on
devrait avoir gradz f = λz, ce qui est impossible puisque z est sur la fibre singulière et ε0 vérifie les
hypothèses de la proposition 1.2.4.
On a en particulier le corollaire suivant, en prenant ε1 = ε0 :
Corollaire 1.2.6. On garde le même ε0 . On en déduit un η > 0 tel que les fibres f −1 (c) pour |c| < η
soient transverses à Sε0 .
12
Figure 1.1 – Fibration de Milnor
1.2.3
Fibration de Milnor
On note X(ε, η) = {z ∈ Cn+1 ; kzk < ε et |f (z)| < η} et Dη∗ le disque de C de centre 0 de rayon
η privé de 0.
Théorème 1.2.7 (Fibration de Milnor). Soit f : Cn+1 → Cn une fonction holomorphe vérifiant f (0) = 0 et telle que 0 est une singularité isolée.
Alors il existe ε > 0 et η > 0 tels que :
f : X(ε, η)\f −1 (0) → Dη∗
est une fibration lisse localement triviale.
Preuve. On prend le ε obtenu à la proposition 1.2.4 et le η donné par le corollaire 1.2.6. On pose
X = B(0, ε) ∩ f −1 (Dη ). Il s’agit d’une variété à bord, dont le bord est Sε ∩ f −1 (Dη∗ ).
On pose f˜ : X\f −1 (0) → Dη∗ la restriction de f .
Alors f˜ est propre : l’image réciproque d’un compact de Dη∗ est un fermé de B(0, ε).
La fonction f est une submersion en tout point différent de l’origine, et donc f˜ aussi.
Le choix de η est fait pour que les fibres soient transverses au bord Sε .
Néanmoins, comme Dη∗ n’est pas difféomorphe à R2 , on ne peut pas appliquer tel quel le théorème
d’Ehresmann.
En revanche, on peut recouvrir Dη∗ par des disques ouverts ∆i ⊂ Dη∗ , et appliquer le théorème
d’Ehresmann à chacune des restrictions fi = f˜|X∩f −1 (∆i ) : X ∩ f −1 (∆i ) → ∆i . Ces trivialisations
respectent les bords.
On obtient ainsi des trivialisations locales au dessus des ∆i :
13
Φi
fi−1 (∆i )
∆i × Xti
fi
pr1
∆i
pour un ti ∈ ∆i . On a noté Xti = f −1 (ti ) ∩ B(0, ε).
Il ne reste plus qu’à montrer que toutes les fibres sont difféomorphes, ce qui permettra de remplacer chacun des Xti par le même Xt0 , pour un t0 ∈ Dη∗ .
On considère un chemin γ reliant t0 et ti dans Dη∗ . On peut le recouvrir par un nombre fini de
∆i et en utilisant la connexité du chemin, on en déduit que Xt0 est difféomorphe à Xti . On obtient
ainsi le résultat, chacun des Φi respectant le bord des fibres.
Définition 1.2.8. L’ensemble X(ε, η) est souvent appelé tube de Milnor.
Remarque. Si on a une application f : X → Y qui vérifient les hypothèses du théorème d’Ehresmann et si Y est connexe par arcs, f réalise une trivialisation localement triviale.
Remarque. Dans [Mil68], J.Milnor ne considère pas une fibration au-dessus du disque comme nous
l’avons fait ici, mais une fibration au dessus d’un cercle donnée par :
ϕ:
Sε \f −1 (0)
−→
z
7−→
S1
f (z)
|f (z)|
Il montre ensuite que la fibre ϕ−1 (eiθ ) est difféomorphe à la fibre f −1 (t) pour t 6= 0.
1.3
1.3.1
Propriétés de la fibration de Milnor
Elle ne dépend que du germe en 0
On note toujours X(ε, η) = {z ∈ Cn+1 ; kzk < ε et |f (z)| < η}.
On montre dans ce paragraphe que la fibration de Milnor ne dépend que du germe de la fonction
à l’origine.
Proposition 1.3.1. Soit f : Cn+1 → C holomorphe avec une singularité isolée à l’origine. On
suppose que ε et η sont tels que f : X(ε, η) → Dη∗ est une fibration localement triviale.
Alors pour tout 0 < η1 6 η, les ensembles X(ε, η) et X(ε, η1 ) sont difféomorphes.
Preuve. On considère l’application g = |f |2 et on applique la proposition 1.1.7 avec X = B ε .
On vérifie que g est une submersion en tout point de Cn+1 \f −1 (0) et si K est un compact de R,
g −1 (K) ∩ B ε est un compact. Par le choix de ε, les fibres de f sont toutes transverses à la sphère Sε .
Par conséquent, les fibres de g aussi, par inclusion des espaces tangents. La proposition 1.1.7 nous
donne le difféomorphisme.
Proposition 1.3.2. On suppose que f : X(ε, η) → Dη∗ est une fibration localement triviale. On
prend 0 < ε1 < ε et 0 < η1 tels que f : X(ε1 , η1 ) → Dη∗1 est une fibration localemant triviale.
Alors les ensembles X(ε, η) et X(ε1 , η1 ) sont difféomorphes.
Preuve. Si η1 > η, la proposition précédente assure que X(ε1 , η1 ) est difféomorphe à X(ε1 , η).
Si η1 < η, on a de même un difféomorphisme entre X(ε, η) et X(ε, η1 ).
On est donc ramené à montrer que pour η0 = min(η, η1 ), X(ε, η0 ) et X(ε1 , η0 ) sont difféomorphes.
On utilise la proposition 1.1.7 avec g = k.k, X = f −1 (Dη0 ).
14
Corollaire 1.3.3. La fibration de Milnor ne dépend que du germe en 0 de f .
Preuve. En effet, si g est un autre représentant, alors f et g coïncident sur une boule assez petite
autour de 0, et on utilise la proposition précédente pour conclure.
1.3.2
L’espace X(ε, η) est contractile
On va montrer ici que l’espace X(ε, η) est contractile.
Commençons par une remarque :
Remarque. Si A ⊂ X est un rétracte par déformation de X, alors A et X sont du même type
d’homotopie, et l’inclusion A ,→ X est une équivalence d’homotopie.
On va montrer que X(ε, η) est contractile en construisant une rétraction par déformation sur
l’origine.
Proposition 1.3.4. L’espace X(ε, η) est contractile.
Preuve. On va construire une rétraction par déformation de X = X(ε, η) sur 0 en rétractant
successivement “selon les valeurs de η” et “selon les valeurs de ε”.
On considère une suite décroissante (εn )n∈N telle que pour tout n, εn > 0, et qui converge vers 0.
On en déduit une autre suite (ηn )n∈N telle que pour tout n, X(εn , ηn ) vérifie les propriétés de la
fibration de Milnor. On peut supposer que cette suite est décroissante et qu’elle tend vers 0. En effet,
pour un couple (εn , ηn ) donné, on peut remplacer ηn par n’importe quelle valeur inférieure ou égale
à ηn , et strictement positive. On suppose aussi que ε0 = ε et η0 = η.
On va définir deux familles de rétractions, une pour les ηn et une autre pour les εn . On va pour
cela utiliser les notations de la preuve du théorème 1.1.6.
Pour la première famille de rétractions, on considère l’application |f | sur B ε , pour des intervalles
[ηn+1 , ηn ]. Alors sur B εn ∩ f −1 (Dηn ), les hypothèses du théorème d’Ehresmann 1.1.6 sont bien
vérifiées. On note Φn le flot correspondant. On pose X = B ε ∩ f −1 (Dη ).
On pose pour n ∈ N, Yn = B εn ∩ f −1 (Dηn ) et Zn = B εn ∩ f −1 (Dηn+1 ).
On définit alors rn : Yn × [0, 1] → X par :
(
y
si |f (y)| 6 ηn+1
rn (y, 1 − t) =
t(ηn+1 −|f (y)|)
Φn
(y) si |f (y)| ∈ [ηn+1 , ηn ]
On vérifie que rn est une rétraction par déformation de Yn sur Zn qui fixe l’origine. Pour t = 1
on trouve l’identité et pour t = 0 c’est la rétraction.
De plus, r0 est une rétraction par déformation de X sur B ε ∩ f −1 (Dη1 ) qui respecte les bords, si
bien qu’on vérifie que l’application restreinte à X × [0, 1] est une rétraction de X sur f −1 (Dη1 ) ∩ Bε .
(voir figure 1.2)
On définit la deuxième famille de rétraction par déformation en considérant l’application k.k sur
B ε . Elle vérifie les hypothèses du théorème d’Ehresmann 1.1.6 pour les intervalles [εn+1 , εn ] sur Zn .
On note Ψn le flot correspondant.
On définit alors ρn : Zn × [0, 1] → X par :
(
y
si kyk 6 εn+1
ρn (y, 1 − t) =
t(εn+1 −kyk)
Ψn
(y) si kyk ∈ [εn+1 , εn ]
On vérifie que ce sont des rétractions par déformation de Zn sur Yn+1 . (voir figure 1.3)
15
Figure 1.2 – Rétraction selon η
Figure 1.3 – Rétraction selon ε
De même que pour r0 , la restriction de ρ0 à Bε ∩ f −1 (Dη1 ) est une rétraction par déformation
de cet espace sur Bε1 ∩ f −1 (Dη1 ) = Y1 . (voir figure 1.3)
On pose pour tout n, rn (y) = rn (y, 0) et ρn (y) = ρn (y, 0).
On définit ensuite une application h : X×]0, 1] → X par :

h
i
1
1
rn (ρn−1 (rn−1 (ρn−2 (. . . r0 (y), . . . ))), (2n + 2)(2n + 1)t − 2n + 1) si t ∈
,
h 2n+2 2n+1 i
h(y, t) =
1
1
ρn (rn (ρn−1 (rn−1 (. . . r0 (y), . . . ))), (2n + 3)(2n + 2)t − 2n + 2)
si t ∈ 2n+3
, 2n+2
Alors h(., 1) = r0 (., 1) est l’identité de X, on vérifie que h est bien définie et continue.
De plus, si (yn , tn )n est une suite telle que (tn ) tend vers 0, on vérifie que h(yn , tn ) tend vers 0,
et donc on peut prolonger h en posant h(., 0) = 0, ce qui nous donne la rétraction voulue.
Remarque. Les applications ρn définies ci-dessus permettent aussi de montrer que la fibre singulière f −1 (0) est contractile sur 0.
1.3.3
Le nombre de Milnor
Dans [Mil68], J.Milnor montre que dans le cas d’une singularité isolée, la fibre f −1 (t) pour t ∈ D∗
a le type d’homotopie d’un bouquet de µ sphères de dimension n, et ce nombre est aussi la dimension
de l’espace de cohomologie H n (f −1 (t), C). Il est en fait possible de le relier à un autre nombre, à
savoir la dimension du C espace vectoriel C{z0 , . . . , zn }/J(f ), où J(f ) est l’idéal jacobien de f ,
c’est-à-dire l’idéal de C{z0 , . . . , zn } engendré par les dérivées partielles de f .
Commençons par montrer que l’espace C{z0 , . . . , zn }/J(f ) est bien de dimension finie. Pour cela,
on utilise le “Nullstellensatz analytique”, qui est l’analogue dans le cas analytique du théorème des
zéros de Hilbert usuel. On a d’abord besoin de quelques définitions :
Définition 1.3.5. On appelle germe d’ensemble en 0 une classe de {E ⊂ Cn ; 0 ∈ E}/ ∼ où
E ∼ F si et seulement si il existe W un ouvert contenant 0 tel que E ∩ W = F ∩ W .
Définition 1.3.6. Soit I ⊂ C{z1 , . . . , zn } un idéal. Comme l’anneau est noethérien, il existe des
germes f1 , . . . , fr qui engendrent I. On note V (I) l’ensemble des germes d’ensembles [E] tel qu’il
existe un ouvert U tel que pour tout 1 6 i 6 r, fi |E∩U = 0.
Définition 1.3.7. Soit E = [Ei ] une famille de germe d’ensembles. On note I(E) l’ensemble des
germes de fonction f tel que pour tout i, il existe un ouvert Ui contenant 0 tel que f |Ei ∩Ui = 0.
Cela nous permet de considérer l’analogue analytique du Nullstellensatz algébrique :
16
Théorème 1.3.8 (Nullstellensatz analytique). Pour un idéal I ⊂ C{z1 , . . . , zn } on a
√
I = I(V (I))
Pour le démontrer, on utilise le fait que l’anneau C{z0 , . . . , zn } est noethérien 2 .
Dans le cas qui nous intéresse, on prend I = J(f ) l’idéal engendré par les dérivées premières
de f . Alors l’ensemble V (I) est réduit à 0, puisque l’origine est une singularité isolée. De plus, les
fonctions z0 , . . . , zn sont dans I(V (I)), donc il existe par le Nullstellensatz analytique une puissance
d telle que (z0 , . . . , zn )d ⊂ J(f ). Par conséquent, l’espace vectoriel quotient C{z0 , . . . , zn }/J(f ) est
de dimension finie b.
Alors il est possible de prouver (voir [Bri70]) :
Théorème 1.3.9. On a l’égalité suivante, pour t ∈ D∗ :
dim C{z0 , . . . , zn }/J(f ) = dim H n (f −1 (t), C)
P
Preuve. L’idée est de transformer la fonction initiale f en une fonction fa (z) = f (z) − ni=0 ai zi
qui possède exactement b points critiques non-dégénérés, pour une valeur de a assez générale. A ce
moment-là, on pourra considérer des suites de Mayer-Vietoris pour des ensembles judicieusement
choisis, qui permettront de relier le nombre de points et la dimension de Hn (Xt0 , Z).
On note F = f −1 (t) la fibre de f pour une valeur t ∈ D∗ . Dans [Mil68], J.Milnor prouve qu’elle
a le type d’homotopie d’un bouquet de µ sphères de dimension n, c’est-à-dire l’espace quotient que
l’on obtient en prenant µ sphères de dimension n, sur lesquelles on choisit un point, et en identifiant
en un seul ces µ points. On note S n ∨ · · · ∨ S n un bouquet de sphères.
( On notera b = dimC C{z0 , . . . , zn }/J(f ). On va montrer que b = µ. On considère l’application
gradf : Cn+1 →
Cn+1
, dont la fibre au-dessus de 0 est réduite à l’origine puisqu’on suppose
z 7→ gradz f
que f a une singularité isolée en l’origine. 3
On admettra que du fait que la dimension de C{z0 , . . . , zn }/J(f ) est b, gradf est au voisinage
de l’origine un revêtement analytiquement ramifié de degré b. Pour a = (a0 , . . . , an ) assez général
proche de 0, la fibre de gradf sur un voisinage de l’origine contient exactement b points (x1 , . . . , xb ).
On pose alors :
fa (z) = f (z) −
n
X
ai zi
i=0
Cette application est donc singulière aux points (x1 , . . . , xb ) exactement. Comme de plus gradf
est un biholomorphisme au voisinage de chaque xr puisque ce ne sont pas des points de ramification
de gradf , on en déduit que la matrice jacobienne de gradf est de rang maximal en xr , et donc ces
2. Résultat qui lui-même repose sur le théorème de préparation de Weierstrass.
3. En fait, c’est plutôt la restriction à un voisinage de l’origine qui ne possède qu’une singularité.
17
points critiques sont non-dégénérés. On applique alors le lemme de Morse qui assure que sur un
voisinage de xr il existe un système de coordonnées dans lequel on a :
fa (y0 , . . . , yn ) = fa (xr ) + y02 + · · · + yn2
(1.1)
On prend les X = X(ε, η) et D = Dη donnés par le théorème de fibration de Milnor 1.2.7
appliqué à f . On pose alors Xa = fa−1 (Dη ) ∩ Bε .
Lemme 1.3.10.
1. Il existe a ∈ Cn+1 tel que Xa est difféomorphe à X.
2. L’application fa est singulière aux points xr et réalise une fibration localement triviale en
dehors des fibres contenant ces points. De plus, la fibre régulière de fa est difféomorphe à la
fibre régulière de f .
Preuve.
1. Le procédé est tout à fait analogue à ce qui a été fait dans la preuve des différentes versions
du théorème d’Ehresmann. On considère l’application ga : R2n+3 → R définie par ga (z, s) = s.
Cette application est clairement une submersion en tout point. On pose
Y = {(z, t) ∈ Cn+1 × R ; kzk 6 ε, |fsa (z)| 6 η}
La fibre en 0 de ga n’est autre que l’ensemble X(ε, η) de la fibration de Milnor.
Si on restreint ga à cet ensemble Y , elle est propre. Néanmoins, il faut changer un peu la
preuve du théorème 1.1.6, car Y n’est pas à bord lisse. Les problèmes se présentent pour les
points vérifiant kzk = ε et |fsa (z)| = η. En 0, comme X est un tube de Milnor, on en déduit
que f −1 (c) pour |c| = η est transverse à la boule B ε . Par conséquent, pour t assez proche de
−1 (c) pour |c| = η sont transverses à B . L’ensemble de ces points
0, disons |t| < δ, les fibres fsa
ε
forment une variété lisse de dimension 2n + 1, que l’on note Zδ . (voir proposition 1.1.2)
On considère le compact Y 0 = Y ∩ {|t| 6 δ/2}. Pour tout point y ∈ Y 0 \Zδ on construit sur
un voisinage de y un champ de vecteurs défini de la même manière que dans la preuve du
théorème 1.1.6, en choisissant des ouverts dont l’adhérence n’intersecte par Zδ . Il reste les
points de Zδ . On projette le gradient de ga sur l’espace tangent de Zδ , et on construit un
champ de vecteur de la même façon que dans la preuve de 1.1.6, ce qui permet, après avoir
recollé les champs de vecteurs grâce à une partition de l’unité, de trouver un flot Φt qui donne
l’homéomorphisme cherché. Par conséquent, pour t assez petit, X et Xsa sont homéomorphes.
Afin de ne pas alourdir inutilement les notations, on note encore a un tel vecteur sa qui ne
soit pas un point de ramification de gradf , qui admet donc exactement b antécédents.
2. La preuve est analogue à celle de la fibration de Milnor, dans la mesure ou d’après le premier
point, on a la transversalité des fibres au niveau du bord de la boule. Pour le difféomorphisme
entre les fibres, on considère l’application h : R2n+3 → R2 définie par :
h(z, s) = (s, fsa (z))
On regarde de nouveau la restriction de cette application au Y 0 défini ci-dessus, afin d’avoir
des propriétés de transversalité. Nous admettrons ici que le complémentaire du lieu des valeurs
critiques de h est connexe afin de pouvoir appliquer le théorème d’Ehresmann, qui donne
l’isomorphisme voulu entre les fibres.
On considère des boules fermées B r de petit rayon ρ centrées en chacun des xr , deux à deux
disjointes, et de sorte que fa s’écrive sous la forme (1.1). On note t1 , . . . , tk les valeurs critiques de f ,
18
Figure 1.4 – Rétracte du disque
c’est-à-dire les images des xr par f . On prendra garde qu’il peut y avoir plusieurs xr sur une même
fibre. On considère alors des petits disques fermés disjoints Dj de rayon δ autour des tj , et on prend
un point τj sur le bord de chacun de ces disques. On prend un point t0 qui ne soient pas dans un de
ces disques, et on admettra que l’on peut trouver des S
cheminsSγj d’origine t0 et d’extrémité τj , qui
n’intersectent les disques fermés qu’en τj , et tels que Dj ∪ γj soit un rétracte par déformation
de D.(voir figure 1.4)
On définit alors Xj = fa−1 (Dj ) le tube au-dessus du disque Dj , Fj = fa−1 (τj ) la fibre au-dessus
de τj , F0 = fa−1 (t0 ), X1 = ∪Xj l’union des tubes, X2 = fa−1 (∪γj ) l’ensemble au-dessus de la réunion
des chemins. Alors il est possible de voir que X1 ∪ X2 est homotopiquement équivalent à Xa . En
acceptant ce point, comme Xa est un rétracte par déformation de X, on en déduit, comme X est
contractile, que Hp (X1 ∪ X2 ) = 0 pour p > 1 et à Z pour p = 0. On utilise la suite de Mayer-Vietoris
pour X1 ∪ X2 :
· · · → Hp+1 (X1 ∪ X2 ) → Hp (X1 ∩ X2 ) → Hp (X1 ) ⊕ Hp (X2 ) → Hp (X1 ∪ X2 ) → · · ·
Et donc pour p > 1 :
∼
0 → Hp (tFj ) −
→ Hp (tXj ) ⊕ Hp (X2 ) → 0
Mais X2 est homotopiquement équivalent à F0 , et les Fj sont tous difféomorphes à F , donc :
k
M
j=1
Hp (Xj ) ⊕ Hp (F0 ) = Hp (F ) ⊕ · · · ⊕ Hp (F )
|
{z
}
(1.2)
k
Et comme la fibre F a le type d’homotopie d’un bouquet de µ sphères,


Z
si p = 0



Z ⊕ · · · ⊕ Z si p = n
{z
}
Hp (F ) = |

µ



0
sinon
Donc on a Hp (Xj ) = 0 pour p 6= 0, n.
S
On va regarder à présent le groupe Hn (Xj ). On pose B = br=1 B r , où les Br sont les boules
centrées en les xr définies précédemment.
On pose ensuite Xj0 = Xj ∩B qui nous donne des tubes contenant les points critiques de la valeur
critique tj , Xj00 = Xj \B, et de même pour les fibres, Fj0 = Fj ∩ B et Fj00 = Fj \B.
Alors on remarquera que Xj0 est la réunion de bj espaces contractiles correspondant à chacun des
points critiques de la valeur critique tj . On en déduit donc que :
19


⊕ ··· ⊕ Z
Z
|
{z
}
0
Hp (Xj ) =
bj

0
si p = 0
sinon
Regardons maintenant les Fj0 .
Lemme 1.3.11. Fj0 a le type d’homotopie d’une réunion disjointe de bj n-sphères.
Preuve. On considère xr ∈ Fj0 un des points critiques. Alors fa (y0 , . . . , yn ) = fa (xr ) + y02 + · · · yn2 .
Par conséquent, fa−1 (τj ) ∩ Br est donné par y02 + · · · + yn2 = τj − tj = δ.Cet ensemble a le même type
d’homotopie que la n-sphère réelle.
De plus, l’inclusion Fj00 ,→ Xj00 est une équivalence d’homotopie, et de même pour Fj0 ∩Fj00 ,→ Xj ∩Xj00
donc Hp (Fj00 ) = Hp (Xj00 ) et Hp (Fj0 ∩ Fj00 ) = Hp (Xj0 ∩ Xj00 ) pour tout p.
On a Xj = Xj0 ∪ Xj00 . La suite de Mayer-Vietoris donne :
Hn+1 (Xj ) → Hn (Xj0 ∩ Xj00 ) → Hn (Xj0 ) ⊕ Hn (Xj00 ) → Hn (Xj ) → Hn−1 (Xj0 ∩ Xj00 )
Et aussi comme Fj = Fj0 ∪ Fj00 :
Hn+1 (Fj ) → Hn (Fj0 ∩ Fj00 ) → Hn (Fj0 ) ⊕ Hn (Fj00 ) → Hn (Fj ) → Hn−1 (Fj0 ∩ Fj00 )
Finalement on obtient, en notant en dessous le rang de chacun des groupes :
Hn (Xj00 ) → Hn (Xj ) → Hn−1 (Xj0 ∩ Xj00 ) → Hn−1 (Xj00 ) → 0
| {z }
|
| {z }
{z
}
| {z }

0 → Hn (Xj0 ∩ Xj00 ) →



{z
}
|


a1
Hn (Xj0

0→



|

∩
{z
a1
Xj00 )
}
→
βj
a2
Hn (Fj0 ) ⊕ Hn (Xj00 )
| {z }
bj
a3
Hn−1 (Xj0
→
Hn (Fj ) →
| {z }
|
| {z }
µ
a2
{z
a3
a4
∩
Xj00 )
}
→ Hn−1 (Xj00 ) → 0
| {z }
a4
Comme la somme alternée des rangs dans chacune de ces deux suites est nulles, on trouve :
βj + bj − µ = 0
Et en utilisant l’équation (1.2), on trouve finalement :
b=
k
X
bj = µ
j=1
Ce qui est le résultat attendu.
20
Chapitre 2
Connexion de Gauss-Manin et
cohomologie relative
On part d’un germe de fonction holomorphe en 0, f : (Cn+1 , 0) → (C, 0) telle que f (0) = 0 et 0
est une singularité isolée.
La partie 1 et le théorème de Milnor donne l’existence d’une fibration localement triviale :
f : X(ε, η)\f −1 (0) → Dη∗ où X(ε, η) = {z ∈ Cn+1 ; kzk < ε et |f (z)| < η} et Dη∗ désigne le disque de
C de centre 0 de rayon η et privé du centre. En particulier, tous les disques ∆ ⊂ Dη∗ sont trivialisants.
Les espaces H n (Xt0 , C) sont des espaces vectoriels de dimension finie µ, où µ est le nombre de
Milnor. Nous allons montrer que ces espaces vectoriels forment un fibré vectoriel au-dessus du disque
pointé, et nous allons le munir d’une connexion.
2.1
2.1.1
Connexion de Gauss-Manin
Le fibré de Gauss-Manin
On prend n > 1.
Considérons une trivialisation locale donnée par le théorème de Milnor 1.2.7 :
f −1 (∆)
Φ∆ = (f, Ψ∆ )
∼
∆ × Xt0
f
pr1
∆
où l’on note Xt0 = f −1 (t0 ).
L’application Φ∆ est un difféomorphisme C ∞ .
Quitte à composer à l’arrivée avec (Φ∆ |Xt0 )−1 , on peut supposer que Ψ∆ est une rétraction de
f −1 (∆) sur Xt0 .
On va introduire les groupes de cohomologie à valeurs complexes des fibres de f , et ces trivialisations locales vont permettre de montrer qu’ils constituent les fibres d’un fibré vectoriel au dessus
du disque pointé D∗ .
Proposition 2.1.1. La restriction H n (f −1 (∆), C) → H n (Xt0 , C) est un isomorphisme.
Preuve. D’après la remarque précédente, on peut supposer que Ψ∆ est une rétraction de f −1 (∆)
sur Xt0 . Par conséquent, Ψ∆ ◦ i = idXt0 où i : Xt0 ,→ f −1 (∆) est l’inclusion canonique.
21
Figure 2.1 – Monodromie
Comme de plus Φ∆ est un difféomorphisme, les espaces de cohomologie H n (f −1 (∆), C) et
H n (∆ × Xt0 , C) sont isomorphes. Mais comme ∆ est contractile (c’est un disque), on a un isomorphisme entre H n (∆ × Xt0 , C) et H n (Xt0 , C), qui est un espace vectoriel de dimension µ finie.
Donc dim H n (f −1 (∆), C) = µ.
Les application Ψ∆ et i induisent des applications en cohomologie et on a (Ψ∆ ◦i)∗ = idH n (Xt0 ,C) .
Donc l’application de restriction i∗ : H n (f −1 (∆), C) → H n (Xt0 , C) est un isomorphisme. (d’inverse
(Ψ∆ )∗ )
Proposition 2.1.2. Pour tout (t0 , t1 ) ∈ ∆2 , on a donc un isomorphisme canonique φt0 ,t1 entre
H n (Xt0 , C) et H n (Xt1 , C) .
Preuve. Vue la proposition précédente, on a le diagramme commutatif suivant :
restriction
∼
H n (f −1 (∆), C)
restriction
H n (Xt0 , C)
∼
∼
φt0 ,t1
H n (Xt1 , C)
Cet isomorphisme ne dépend pas du choix de la trivialisation.
En effet, on peut exprimer φt0 ,t1 de la façon suivante :
φt0 ,t1 = i∗t1 ◦ (i∗t0 )−1
où iti : Xti ,→ f −1 (∆) est l’injection canonique.
On a aussi
φt0 ,t1 = i∗t1 ◦ (Ψ∆ )∗
Remarques. Si U ⊂ D∗ est simplement connexe, on peut définir de façon unique une application
entre deux fibres de GM grâce aux applications φt0 ,t1 définies ci-dessus.
Il faut noter que l’on n’a pas de façon générale pour des points t0 , . . . tk choisis dans le disque
pointé, l’égalité φt0 ,t1 ◦ φt1 ,t2 ◦ · · · ◦ φtk ,t0 = id|H n (Xt−0 ,C) , de la monodromie peut apparaître. (voir
figure 2.1) En revanche, si l’on reste dans un ouvert simplement connexe, c’est vrai.
Définition 2.1.3. Soient U un ouvert de D∗ et (Ct )t∈U une famille de classes de cohomologie telle
que pour tout t ∈ U, Ct ∈ H n (Xt , C). On dira que cette famille est localement constante si pour
tout disque trivialisant ∆ et tout couple de points (t1 , t2 ) ∈ ∆2 , Ct2 est l’image par l’isomorphisme
canonique φt1 ,t2 de Ct1 .
22
Cette définition est valable puisque les isomorphismes φt1 ,t2 ne dépendent pas des choix de disques
trivialisants.
Proposition 2.1.4. Soit (Ctj0 ) une base de H n (Xt0 , C). Alors pour tout t ∈ ∆, la famille (φt0 ,t (Ctj0 ))
est une base de H n (Xt , C). Si on se donne une autre base de H n (Xt0 , C), le passage d’une base
localement constante à une autre s’effectue par une matrice constante.
Pµ
l
Preuve. Soit (Btk0 ) une autre base de H n (Xt0 , C). Alors pour tout k, on a Btk0 =
l=1 bkl Ct0 .
Comme de plus les applications φt1 ,t2 sont des isomorphismes linéaires pour tout t1 , t2 dans ∆, on
en déduit que le passage d’une base à l’autre s’effectue pour tout t ∈ ∆ par la matrice constante
B = (bkl ).
Définition 2.1.5. Le fibré de Gauss-Manin est défini par :
GM =
[
H n (Xt , C)
t∈D∗
Proposition 2.1.6. Le fibré de Gauss-Manin est un fibré vectoriel holomorphe sur D∗ .
Preuve. On recouvre le disque pointé D∗ par des disques (∆j )j∈J .
Pour tout j on choisit un tj ∈ ∆j et une base (Ctkj )16k6µ de H n (Xtj , C).
L’application π associe à un élément [ω] de GM le t tel que [ω] ∈ H n (Xt , C)
S
t∈∆j
H n (Xt , C)
ϕ
H n (Xtj , C) × ∆
θ
Cµ × ∆
pr2
π
∆
où l’application ϕ est définie par ϕ([ω]) = (φt,tj ([ω]), t) si [ω] ∈ H n (Xt , C) pour t ∈ ∆j , et
où θ associe à un couple ([η], t) ∈ H n (Xtj , C) × ∆ le vecteur (a1 , . . . , aµ ), t avec (a1 , . . . , aµ ) les
coordonnées de [η] dans la base de H n (Xtj , C) choisie. On notera que ces coordonnées sont en fait
les coordonnées de [ω] dans la base (φt0 ,t (Ctkj )).
On note
[
ψj :
H n (Xt , C) → Cµ × ∆
t∈∆j
la composée θ ◦ ϕ.
Il faut définir une topologie sur
GM . On
va la choisir de sorte que l’application ψj soit continue.
On considère la famille U = ψj−1 (U ) pour tout j ∈ J et U décrivant les ouverts de Cµ × ∆.
Cette famille constitue une base d’ouvert de GM , c’est-à-dire que l’intersection de deux ensembles
de cette forme est union d’ensembles de U 1 .
Soient donc U1 = ψi−1 (V1 × W1 ) et U2 = ψj−1 (V2 × W2 ) deux éléments de U, où Vk ⊂ Cµ et
Wk ⊂ ∆l pour (k, l) = (1, i) ou (k, l) = (2, j).
Le seul cas qui pourrait poser problème est le cas W1 ∩ W2 6= 0. Regardons ψi ◦ ψj−1 .
Notons (Ctki ) la base de H n (Xti , C) choisie pour la trivialisation par ψi et (Btkj ) la base de
H n (Xtj , C) choisie pour la trivialisation par ψj . Soit t ∈ W1 ∩ W2 . Alors la base (Btkj ) induit par
l’application φtj ,t une base de H n (Xt , C), et de même pour (Ctki ). Soit B la matrice de passage
1. En fait, ça va même être un élément de U.
23
de la base (Ctk ) à (Btk ). D’après la proposition précédente, cette matrice B ne dépend pas du
point t ∈ W1 ∩ W2 . Par conséquent, un [ω] ∈ H n (Xt , C) est dans U1 ∩ U2 si et seulement si
t ∈ W1 ∩ W2 et ψi ([ω]) ∈ V1 et Bψi ([ω]) ∈ V2 . Par conséquent,
U1 ∩ U2 = ψi −1 (V1 × W1 ) ∩ (B −1 (V2 ) × W2 ) ∈ U
Et donc on peut prendre U comme base d’ouverts. De plus, par définition de U, les ψi sont
continus.
Montrons à présent que les ψi permettent de munir GM d’une structure de variété. Ils sont
clairement bijectifs étant donné que les φt,ti sont eux-mêmes des bijections. Il reste à voir que la
réciproque est continue. Soit U ∈ U, U = ψj−1 (V ) ⊂ π −1 (∆i ) avec V ouvert de Cµ × ∆. Si i = j,
alors ψi (U ) = V ouvert. Si i 6= j, en reprenant les mêmes notations, ψi (U ) = B −1 (V ) est donc
ouvert.
Par conséquent, les ψi sont des homéomorphismes.
En conservant toujours les mêmes notations et en supposant que ∆i ∩ ∆j 6= ∅ on a :
ψi ◦ ψj−1 = (B −1 , id∆i ∩∆j )
qui est donc lisse. Par conséquent, on a muni GM d’une structure de variété lisse.
Il ne reste plus qu’à vérifier que les ψi sont des trivialisations locales. Ce sont clairement des
difféomorphismes, et comme les φt,ti sont des isomorphismes linéaires, on en déduit que la restriction
de ψi à une fibre H n (Xt , C) réalise un isomorphisme linéaire entre H n (Xt , C) et Cµ × {t}.
On a donc bien muni GM d’une structure de fibré vectoriel holomorphe au dessus de D∗ .
On peut aussi munir GM d’une structure d’espace étalé au-dessus du disque pointé en le munissant de la topologie induite par les sections localement constantes, c’est-à-dire que les ensembles
{ct ; t ∈ U } pour U ouvert de D∗ et (ct ) une famille localement constante au-dessus de U constituent
une base d’ouverts.
Proposition 2.1.7. Une famille localement constante de GM s’identifie à une section du faisceau
Rn f∗ (CX\f −1 (0) ).
Preuve. On note X 0 = X\f −1 (0).
Le faisceau Rn f∗ (CX 0 ) est le faisceau associé au préfaisceau F dont les sections au-dessus d’un
ouvert V de D∗ sont, d’après la proposition A.3.14 :
Γ(V, F ) = H n (f −1 (V ), CX 0 )
Soient t ∈ D∗ et W ⊂ D∗ un ouvert trivialisant. Alors f −1 (V ) ' Xt0 × W , pour un t0 ∈ D fixé.
Regardons à présent la fibre en t. Comme tout ouvert V ⊆ W contient un disque ∆ contenant t, on
a:
(Rn f∗ (CX 0 ))t = −
lim
H n (f −1 (∆), CX 0 )
−→
∆3t
=−
lim
H n (Xt0 × ∆, CX 0 )
−→
∆3t
=−
lim
H n (Xt0 , CX 0 )
−→
∆3t
n
= H (Xt0 , C)
Donc Rp f∗ (CXt0 ) est un faisceau localement constant de fibre H n (Xt0 , C).
24
Regardons à présent les sections holomorphes de ce fibré.
Remarque. Soit ∆ un disque trivialisant, et soient t0 ∈ D∗ et (Ct10 , . . . , Ctµ0 ) une base de H n (Xt0 , C).
On considère alors la famille (Ctj ) définie par Ctj = φt0 ,t (Ctj0 ). Pour tout t ∈ ∆, (Ctj ) est une base
de H n (Xt , C).
P
Alors toute section au-dessus de ∆ s’écrit µj=1 aj (t) Ctj où aj (t) ∈ C.
Définition 2.1.8. Soit U un ouvert de D∗ . Une famille (ct )t∈U est dite analytique si pour tout
disque trivialisant ∆, il existe des fonctions holomorphes aj : ∆ → C telles que pour tout t ∈ ∆,
P
ct = µj=1 aj (t) Ctj .
On note GM le faisceau des germes de sections holomorphes de GM . C’est un faisceau localement
libre de rang µ par le choix d’une base (Ctj ).
Proposition 2.1.9. Une section du fibré GM est holomorphe si la famille correspondante est
analytique.
Remarque. Le faisceau des sections holomorphes est donné par :
GM ' Rn f∗ (CX\f −1 (0) ) ⊗CD∗ OD∗
2.1.2
Connexion de Gauss-Manin
On peut à présent définir une connexion sur le fibré GM , dont les sections horizontales seront
les familles localement constantes :
Définition 2.1.10. La connexion de Gauss-Manin est la connexion sur GM qui vérifie :
∇C = 0
si C est une section localement constante.
On a alors localement pour toute section holomorphe de GM et (C j ) une base de sections localement constantes :
µ
X
daj j
∇c =
C
dt
j=1
Remarque. Comme le fibré GM est un fibré au-dessus du disque qui est de dimension 1, la
connexion de Gauss-Manin est une connexion plate.
Soit t0 ∈ D∗ .
On considère alors pour un lacet γ de base t0 de support dans le disque pointé l’application
de transport parallèle τγ le long de γ, qui est donc un automorphisme de H n (Xt0 , C). Comme la
connexion de Gauss-Manin est plate, on en déduit que l’application de transport parallèle τγ ne
dépend que de la classe d’homotopie du lacet.
Définition 2.1.11. Soit γ0 un générateur positif du groupe fondamental π1 (D∗ ). La monodromie
de la connexion de Gauss-Manin est l’application :
T : H n (Xt0 , C) → H n (Xt0 , C)
donnée par le transport parallèle le long de ce générateur γ0 .
25
On peut aussi la définir grâce aux applications φt1 ,t2 de la façon suivante : on considère un cercle
entourant l’origine et inclus dans le disque pointé D∗ .
On considère un disque ∆0 contenant t0 , et un point t1 dans l’intersection du cercle avec le
disque, puis on considère un disque ∆1 contenant t1 , et un nouveau point t2 , et ainsi de suite jusqu’à
revenir à t0 . On peut recouvrir le cercle par un nombre fini de tels ouverts, et la monodromie est
donnée par la composée : φtk ,t0 ◦ φtk−1 ,tk ◦ · · · ◦ φt0 ,t1 . (voir figure 2.1)
Le fibré de Gauss-Manin est défini au-dessus de D∗ , mais tel quel on ne voit pas comment le
prolonger au disque entier, puisque la fibration n’est pas valable en 0.
On va introduire un autre faisceau défini sur D entier et qui va coïncider avec le faisceau GM des
germes de sections holomorphes de GM sur D∗ , et qui sera plus pratique à étudier que le faisceau
initial.
2.2
2.2.1
Cohomologie relative
Définition et quelques propriétés
On note ΩpX le faisceau des p-formes holomorphes sur X. De plus, la variété X = X(ε, η) est
une variété de Stein, ce qui permettra d’obtenir des résultats intéressants concernant les sections des
faisceaux cohérents.
Définition 2.2.1. On définit le faisceau sur X des p-formes relatives par :
ΩpX/D = ΩpX /(df ∧ Ωp−1
X )
On notera ω la classe d’un ω ∈ ΩpX dans ΩpX/D .
La différentielle d passe au quotient et donne une application dX/D définie par dX/D ω = dω. En
effet, on vérifie que c’est bien défini :
Si ω = ω 0 alors (localement) ω = ω 0 + df ∧ α et dω = dω 0 − df ∧ dα donc dω = dω 0 .
Le faisceau image directe 2 f∗ (ΩpX/D ) est défini sur D. On peut le voir comme un faisceau de OD modules par : si k ∈ OD et ω ∈ f∗ (ΩpX/D ), on a k.ω = (k ◦ f ).ω. On vérifie que dX/D est OD -linéaire :
dX/D (k.ω) = d(k ◦ f.α)
dk
(f )df ∧ α + k ◦ f dα
dt
= k ◦ f.dα
=
= k.dX/D α
On a clairement dX/D ◦ dX/D = 0. On définit un complexe par :
d0X/D
d1X/D
n−1
dX/D
dn
X/D
Ω0X/D −−−→ Ω1X/D −−−→ . . . −−−→ ΩnX/D −−−→ Ωn+1
X/D −→ 0
Et aussi le complexe image directe par f :
f∗ (Ω0X/D )
d0X/D
−−−→
f∗ (Ω1X/D )
d1X/D
n−1
dX/D
−−−→ . . . −−−→
f∗ (ΩnX/D )
2. Si F est un faisceau sur X, et U ouvert de D, f∗ F (U ) = F (f −1 (U )).
26
dn
X/D
−−−→ f∗ (Ωn+1
X/D ) −→ 0
Le faisceau Hk (X/D) sera par définition le k-ième faisceau de cohomologie de ce deuxième
complexe.
On notera H(X/D) = Hn (X/D).
Regardons quelques propriétés des faisceaux ΩpX/D et H(X/D). Le fait que la variété X soit de
Stein sera ici crucial, car il permettra d’annuler les cohomologies de degré strictement positif des
faisceaux cohérents.
Proposition 2.2.2. Soit ∆ un disque inclus dans D.
Alors toute section de ΩnX/D au-dessus de f −1 (∆) est représentée globalement par une section
de ΩnX au-dessus de f −1 (∆). La flèche
H 0 (f −1 (∆), ΩnX ) → H 0 (f −1 (∆), ΩnX/D )
est donc surjective.
Preuve. Le faisceau ΩkX est un faisceau cohérent de OX -modules pour tout k.
Alors df ∧ Ωn−1
est cohérent comme sous faisceau de type fini d’un faisceau cohérent. La suite
X
suivante est exacte :
n−1
0 → df ∧ ΩX
→ ΩnX → ΩnX/D → 0
qui donne comme la variété f −1 (∆) est de Stein :
0 −1
(∆), ΩnX ) → H 0 (f −1 (∆), ΩnX/D ) → 0
0 → H 0 (f −1 (∆), df ∧ Ωn−1
X ) → H (f
Et donc toute section sur f −1 (∆) de ΩnX/D admet un représentant global au-dessus de f −1 (∆).
et ΩnX sont cohérents, donc ΩnX/D est aussi
Remarque. Dans la suite exacte précédente, df ∧ Ωn−1
X
un faisceau cohérent sur OX . (voir proposition A.2.4)
Définition 2.2.3. Soit A un anneau commutatif, une suite (a1 , . . . , an ) d’éléments de A est dite
régulière si pour tout 1 6 i 6 n, ai n’est pas un diviseur de zéro dans A/(a1 , . . . , ai−1 ).
Lemme 2.2.4 (Lemme de De Rham algébrique).
V Soit A un anneau commutatif.
On considère ω ∈ Am une suite régulière et α ∈V p (Am ) avec p < m.
Alors ω ∧ α = 0 si et seulement si il existe β ∈ p−1 (Am ) tel que α = ω ∧ β.
Et dans le cas qui nous intéresse :
Corollaire 2.2.5. Une p-forme α ∈ ΩpX,0 , pour p 6 n est de la forme α = df ∧ β si et seulement si
df ∧ α = 0.
Preuve. On va appliquer le lemme de De Rham. On prend A = OX,0 , on identifie An+1 à Ω1X,0 , on
prend ω = df .
Il faudrait voir que df est régulière, et on aura le résultat. Cela vient du fait qu’on a une
singularité isolée, par conséquent la dimension de V (∂f /∂z0 , . . . , ∂f /∂zn ) est 0, dans l’anneau local
régulier C{z0 , . . . , zn }.
Proposition 2.2.6. Soit ∆ ⊆ D un disque, et soit ω une p-forme holomorphe sur f −1 (∆), avec
n > p > 1. On la suppose dX/D fermée. Alors il existe β ∈ ΩpX tel que dω = df ∧ β sur f −1 (∆).
27
Preuve. Comme dX/D ω = 0 on en déduit que dω s’écrit localement sous la forme df ∧ β. Montrons
que cette écriture est en fait globale.
On va montrer que la suite de faisceaux de OX -modules :
df ∧
p−1
0 → df ∧ ΩX
→ ΩpX −−→ df ∧ ΩpX → 0
est exacte.
Le seul point qui peut poser problème est de voir que df ∧ α = 0 si et seulement si α = df ∧ β.
En dehors de 0, c’est clair car df 6= 0 peut être prise comme élément d’une base de Ω1X . En 0, c’est
le corollaire du lemme de De Rham qui donne le résultat. Par conséquent, la suite est bien exacte.
Mais de plus, df ∧ Ωp−1
est un faisceau cohérent, donc si on prend les sections au dessus de f −1 (∆)
X
qui est de Stein, on trouve le résultat de la même façon que dans la preuve de la proposition 2.2.2.
Remarque. Vu la définition de dX/D , une forme dX/D exacte peut être représentée par une forme d
exacte.
Proposition 2.2.7. Les faisceaux
ΩpX/D
et j∗ (ΩpXt ) sont isomorphes, pour tout p 6 n et
(f −t0 )ΩpX/D
0
t0 ∈ D∗ et j : Xt0 ,→ X l’inclusion canonique.
Preuve. On a
ΩpX/D
(f −t0 )ΩpX/D
=
ΩpX
p
(f −t0 )ΩX +df ∧Ωp−1
X
.
Soit Ψ le morphisme de faisceaux qui à une section α de ΩpX/D /(f − t0 )ΩpX/D associe ω|Xt0 où ω
est un représentant de α dans ΩpX . C’est bien défini car df |Xt0 et (f − t0 )|Xt0 sont nuls.
On va montrer que Ψ est un isomorphisme sur les fibres.
Premier cas : y ∈
/ Xt0 .
Alors j∗ (ΩpXt )y = {0}. De plus, si y ∈
/ Xt0 , sur un voisinage de y dans X la fonction
0
holomorphe, et donc ΩpX/D /(f − t0 )ΩpX/D = {0}.
1
est
f − t0
Deuxième cas : y ∈ Xt0 .
On considère des coordonnées holomorphes de Xt0 notées (z1 , . . . , zn ) et centrées en y . Alors
(f, z1 , . . . , zn ) constitue un système de coordonnées de X au voisinage de y.
On va vérifier l’injectivité de Ψ.
Soient (ω1 , ω2 ) ∈ ((ΩpX/D )y )2 .
P
P
On note ω1 = |α|=p aα dzα un représentant de ω1 et de même ω2 = |α|=p bα dzα , où les aα et
bα sont des germes de fonctions holomorphes en y.
Alors comme Xt0 = f −1 (t0 ) on a :
ω1 = ω2 ⇐⇒ ∀α, aα |Xt0 = bα |Xt0 ⇐⇒ aα = bα + (f − t0 )g
où g est un germe de fonction holomorphe en y.
Par conséquent, ω1 et ω2 définissent la même classe dans ΩpX/D /(f − t0 )ΩpX/D , d’où l’injectivité
de Ψ sur les fibres.
Montrons maintenant que Ψ est
P surjective.
Soit η ∈ (ΩXt0 )y . Alors η = P
|α|=p aα dzα où les aα sont des germes de foncions holomorphes
de Xt0 en y. Alors on pose ω =
|α|=p aα dzα sur un voisinage de y dans X, et cela prouve la
surjectivité de Ψ.
On a donc bien un isomorphisme de faisceaux.
Proposition 2.2.8. La suite suivante est exacte pour tout y ∈ X\0 :
0 → f −1 (OD )y → Ω0X/D,y → Ω1X/D,y → · · · → ΩnX/D,y → 0
28
Preuve. Comme df est non nulle en y, on peut le prendre comme première coordonnée locale et
donc Ωn+1
X/D,y = 0.
Soit g ∈ Ω0X/D telle que dX/D g = 0. Cela signifie que dg = hdf pour un germe de fonction
holomorphe h. Soit un système de coordonnées locales sur X telles que la première coordonnée
soit f . (En dehors de 0, df 6= 0.)
∂g
Alors g s’écrit g(f, z1 , . . . zn ) et comme dg = hdf , on en déduit que
= 0 pour tout j > 1, et
∂zj
donc g(f, z1 , . . . , zn ) = ge(f ) avec ge ∈ OD donc g ∈ f −1 (OD ).
Pour les flèches suivantes, on va utiliser le lemme de Poincaré relatif.
On se place dans une carte centrée en y, de sorte qu’on arrive dans un ouvert étoilé U de Cn+1
tel que la première coordonnée z0 soit f .
On note ji : U → U × [0, 1] définie par ji (z) = (z, i) pour i = 0, 1.
On pose δ la dérivation des formes différentielles par rapport à z1 , . . . , zn . Comme dans la preuve
usuelle du lemme de Poincaré, on pose K l’application définie par :
K a(z, t)dzI = 0
Z
K a(z, t)dt ∧ dzI =
1
a(z, t)dt dzI
0
où a(z, t) est holomorphe par rapport à z et lisse par rapport à t.
On vérifie que l’on a Kδ + δK = j1∗ − j0∗ .
On pose pour x ∈ U et t ∈ [0, 1], H(x, t) = tx. Alors on vérifie que (H ◦ j1 − H ◦ j0 )(x) = x pour
tout x ∈ U . Par conséquent, par la relation précédente on trouve :
ω = (Kδ + δK)H ∗ ω
P
Soit ω ∈ ΩpX/D dX/D -fermée. Soit alors ω =
aI dzI une p-forme holomorphe qui représente ω.
On peut la choisir de sorte que pour tout I 3 0, aI = 0. Alors dω = df ∧ β donc δω = 0.
Alors ω = δKH ∗ ω et comme dKH ∗ ω = δKH ∗ ω + df ∧ η, on en déduit que ω est dX/D -exacte.
Proposition 2.2.9. La suite
0 → f −1 (OD )0 → Ω0X/D,0 → Ω1X/D,0
est exacte.
Preuve. Soit g ∈ Ω0X/D,0 . Il s’agit donc d’un germe de fonction holomorphe en 0. On considère un
représentant g de ce germe défini sur une boule ouverte V contenant l’origine.
On suppose que g est dX/D -fermée. Alors pour un point régulier x ∈ f −1 (0) ∩ V , x 6= 0, on a
déjà vu que f pouvait être prise comme première coordonnée, et que g était de la forme h ◦ f sur
un voisinage W de ce point x. L’application h ◦ f est bien définie sur f −1 (∆), pour un disque ∆
contenant l’origine, et coïncide avec g sur W . Comme f −1 (∆) ∩ V est connexe, par prolongement
analytique, on en déduit que g = h ◦ f sur f −1 (∆) ∩ V , et donc g ∈ f −1 (OD )0 .
Proposition 2.2.10. Pour tout disque ∆ ⊂ D∗ , pour tout p > 0 et pour tout q > 0, on a
H p (f −1 (∆), ΩqX/D ) = 0
De plus, pour tout t ∈ ∆, pour tout p > 0, q > 0 on a : (Rp f∗ (ΩqX/D )) = 0
t
29
Preuve. La variété f −1 (∆) est de Stein car X est de Stein, et les faisceaux ΩqX/D sont des faisceaux
cohérents, d’où le résultat.
Pour l’autre propriété, la proposition A.3.14 assure que :
(Rp f∗ ΩqX/D ) = −
lim
H p (f −1 (V ), ΩqX/D )
−→
t
V 3t
Mais comme tout ouvert V ⊂ ∆ contient un disque ouvert ∆2 , on en déduit que :
(Rp f∗ ΩqX/D ) = −lim
H p (f −1 (∆2 ), ΩqX/D ) = 0
−−→
t
∆2 3t
étant donné que les disques sont de Stein.
2.2.2
Cohérence
L’objectif de cette partie est de montrer que le faisceau H(X/D) est un faisceau cohérent sur D.
La démarche utilisée est celle proposée dans [Bri70], mais nous allons ici détailler davantage la
mise en place de la fonction qui nous permettra de montrer la cohérence.
On commence par modifier notre fonction f de départ afin de pouvoir travailler avec une application propre. Pour cela, on va commencer par montrer que f est équivalente à l’origine à un polynôme,
dans un sens qu’on précisera (définition 2.2.12), puis on se placera dans un espace projectif pour
avoir une application propre. Ensuite, nous insérerons le faisceau qui nous intéresse dans une suite
exacte longue où nous montrerons que les autres faisceaux en jeu sont cohérents. Certains points
seront admis.
Jets et degré de suffisance
Dans ce paragraphe nous montrons qu’il existe un système de coordonnées dans lequel la fonction
f s’exprime sous la forme d’un polynôme.
Définition 2.2.11. Soient f, g ∈ C{z1 , . . . , zn } deux germes de fonctions analytiques en 0, et k un
entier naturel. On définit une relation d’équivalence en posant f ∼ g si et seulement si f (0) = g(0) et
toutes leurs dérivées d’ordre inférieur ou égal à k en 0 sont égales. On appellera jet d’ordre k de f
la classe d’équivalence d’une fonction analytique f pour cette relation d’équivalence. On note jk (f )
le jet d’ordre k de f .
Remarque. Deux germes seront équivalents si et seulement si leurs développement en séries de
Taylor coïncident jusqu’à l’ordre k.
On note mn l’idéal maximal de l’anneau local C{z1 , . . . , zn }.
Définition 2.2.12. Deux germes f, g ∈ mn sont dits équivalents à droite s’il existe un biholomorphisme φ au voisinage de 0 ∈ Cn fixant 0 tel que f ◦ φ = g. On le note f ∼R g, ou juste f ∼ g
s’il n’y a pas d’ambiguïté.
Définition 2.2.13. On dira qu’un germe f ∈ mn est k-suffisant si pour tout germe g ∈ mn tel
que jk (f ) = jk (g), les germes f et g sont équivalents à droite. Le plus petit entier k vérifiant cette
propriété, s’il existe, sera appelé degré de suffisance de f .
Exemple 2.2.14. Si f n’a pas de point critique en 0, alors f peut être choisie comme première
coordonnée d’un système de coordonnées locales, et donc f ∼R x1 et on vérifie que f a pour degré
de suffisance 1.
30
On va montrer qu’un germe de fonction analytique possédant une singularité isolée en 0 possède
un degré de suffisance, et est donc équivalente à un polynôme à l’origine.
Pour cela, nous allons avoir besoin du lemme de Nakayama :
Lemme 2.2.15 (Lemme de Nakayama). Soit A un anneau commutatif unitaire, m un idéal, L
un module sur A et M et N deux sous-modules de L, où M est de type fini. Supposons que tout
élément de la forme (1 + x)−1 est inversible dans A pour x ∈ m.
Si M ⊆ N + mM alors M ⊆ N .
Remarque. Nous appliquerons ce résultat à l’anneau local des germes de fonctions analytiques
en 0, et pour l’idéal maximal m si bien que la condition d’inversion de (1 + x)−1 pour x ∈ m sera
automatiquement vérifiée.
Théorème 2.2.16. Si f : (Cn , 0) → (C, 0) est un germe de fonction analytique qui possède une
singularité isolée en 0, alors f est équivalente à un polynôme.
Preuve. L’hypothèse que f est à singularité isolée assure, par le Nullstellensatz analytique, qu’une
puissance de l’idéal maximal mn est incluse dans l’idéal jacobien J(f ) engendré par les dérivées
partielles de f . Nous allons montrer que f possède un degré de suffisance.
Soit donc k un entier tel que mk+1
⊆ m2n J(f ). Alors on a aussi mk+1
⊆ m2n J(f ) + mk+2
n
n
n . On
se donne un germe g d’application analytique en 0 telle que jk (g) = jk (f ). On va montrer que ces
deux germes sont équivalents à droite.
On définit une application F : Cn × [0, 1] → C par F (z, t) = f (z) + t g(z) − f (z) , de sorte que
F (., 0) = f et F (., 1) = g. On va en fait construire de proche en proche une famille à un paramètre
de biholomorphismes ht telle que pour tout (z, t) on ait :
F (ht (z), t) = F (z, 0) = f (z)
(2.1)
Ainsi, pour t = 1, on aura g ◦h1 = f , ce qui est le résultat voulu. Pour cela, nous allons considérer
une équation différentielle dont le flot sera l’application h cherchée.
Dérivons l’équation (2.1) par rapport à t. On obtient alors :
h∂t h(z, t), gradF (z, t)i + g(h(z, t)) − f (h(z, t)) = 0
(2.2)
car ∂t F (ht (x), t) = g(h(z, t)) − f (h(z, t)). Le gradient de F est pris par rapport aux variables
z1 , . . . , z n .
On remarquera qu’en posant ξ(z, t) = ∂t h(z, t) l’équation (2.2) devient, étant donné que les ht
sont des biholomorphismes :
hξ, gradF i + g − f = 0
On va chercher à construire un germe en (0, t0 ) d’application ξ : Cn × [0, 1] → Cn tel que :
1. Pour tout t dans un voisinage de t0 , ξ(0, t) = 0
2. Dans un voisinage de (0, t0 ), on a hξ, gradF i + g − f = 0
31
(2.3)
On va montrer que l’on peut trouver ξ : Cn+1 → Cn analytique vérifiant cette propriété, et alors sa
restriction à Cn × [0, 1] vérifiera les propriétés demandées.
L’existence de cette application repose sur le lemme de Nakayama 2.2.15.
On pose On+1 l’anneau des germes de fonctions holomorphes Cn+1 → C. On note mn+1 son idéal
maximal. On peut considérer l’idéal Jn+1 (F ) engendré dans On+1 par les dérivées premières de F
par rapport aux zj . Comme on suppose que les dérivées de f et g coïncident jusqu’à l’ordre k, on en
k+1 ⊆ J
déduit que f − g ∈Pmk+1
n+1 (F )mn , on aura le résultat
n . Par conséquent, si on montre que mn
∂F
car alors f − g =
ξ
où
ξ
∈
O
m
,
et
donc
ξ
(0,
t)
=
0.
j
n+1 n
j
∂zj j
On notera que
∂f
∂zj
=
∂F
∂zj
)
k
− t ∂(g−f
∂zj , et donc J(f ) ⊆ Jn+1 (F ) + On+1 mn . Par hypothèse, comme
f a une singularité isolée, mk+1
⊆ m2n J(f ) + mk+2
n
n . En utilisant l’inclusion précédente on trouve :
On+1 mkn ⊆ m2n Jn+1 (F ) + On+1 mk+2
n
Mais mn ⊆ mn+1 , donc en posant M = On+1 mkn et N = m2n Jn+1 (F ), on trouve M ⊆ N + mn+1 M , et
par le lemme de Nakayama 2.2.15, on obtient M ⊆ N . Mais comme mkn ⊆ M , on trouve le résultat
attendu.
On choisit donc un tel ξ. On va maintenant procéder de proche en proche pour construire le
biholomorphisme.
On regarde l’équation pour h : Cn × R → Cn et t0 ∈ [0, 1] :

 ∂h (z, t) = ξ(h(z, t), t)
∂t
(2.4)

h(z, t0 ) = z
Cette équation donne une solution h telle que sur un voisinage de t0 , mettons ]t0 − ε, t0 + ε[,
ht := h(., t) est un biholomorphisme car ht0 en est un.
∂h
(0, t) = 0 et h(0, t0 ) = 0.
De plus, les ht pour |t − t0 | < ε fixe l’origine car ξ(0, t) = 0 donc
∂t
On vérifie que l’on a :
∂Ft ◦ ht (z)
= hξ, gradF i + g − f = 0
∂t
par définition de ξ. Par conséquent, pour |t − t0 | < ε, Ft ◦ ht = Ft0 ◦ ht0 = Ft0 . On peut donc
recouvrir [0, 1] par des ouverts sur lesquels cette propriété est vérifiée, on en extrait un recouvrement
fini. Comme de plus [0, 1] est connexe, on en déduit le résultat, puisque en 0 on a f .
La conclusion de ce paragraphe est qu’à un changement de variables près, on peut supposer que
la fonction f est un polynôme. On notera que le fait que la fonction a une singularité isolée est
important car c’est ce point qui assure qu’une puissance de l’idéal maximal est dans l’idéal jacobien.
Théorèmes de Bertini
Le paragraphe précédent donne l’existence d’un système de coordonnées dans lequel f s’exprime
sous la forme d’un polynôme P . Comme l’application f possède un degré de suffisance, on peut
ajouter un polynôme homogène de haut degré N sans changer la nature de la singularité en 0.
Maintenant que nos applications sont des polynômes, nous allons pouvoir travailler en projectif.
On homogénéise le polynôme P grâce à une variable supplémentaire s, de sorte que le nouveau
polynôme Pe soit homogène de degré N . On considère l’application
ga = Pe(z0 , . . . , zn , s) +
X
|α|=N
32
aα z α
On considère la sous variété V de Pn+1 × P1 définie par ga − tt0 = 0 où [t : t0 ] sont les coordonnées
homogènes dans P1 . Dans l’ouvert affine s 6= 0, t0 6= 0, elle est définie par
X
aα z α − t = 0
P (z0 , . . . , zn ) +
|α|=N
On pose f¯a : V → P1 la restriction de la projection sur P1 . Le théorème suivant assure que
cette application n’a qu’un nombre fini de fibres singulières, un fermé de P1 distinct de P1 étant un
ensemble fini.
Théorème 2.2.17 (Théorème de Bertini-Sard). Soit ϕ : X → Y un morphisme dominant
entre variétés algébriques irréductibles, (i.e l’image de ϕ est dense pour la topologie de Zariski
dans Y ). On suppose X lisse. Alors il existe un ouvert non vide U de Y tel que les fibres ϕ−1 (y)
soient lisses pour y ∈ U .
On notera que la fibre f¯a−1 (0) est singulière au moins en 0. (en fait, c’est au point (0, 0) de
l’ouvert affine précédent)
P
Maintenant, nous allons montrer que l’on peut choisir H = |α|=N aα z α tel que la fibre précédente n’a que 0 comme point singulier.
Pour cela, nous allons modifier la preuve usuelle du théorème de Bertini, comme elle est proposée
dans [Har77], afin d’obtenir un hyperplan de la forme voulue.
La fibre V0 = f¯a−1 (0) est définie par Pe = 0.
On note M le nombre de monômes de degré N , on note α1 , . . . , αM les exposants correspondants.
On se place dans l’espace projectif Pn+M +2 muni des coordonnées homogènes
[z0 : . . . : zn : s : t0 : t1 : . . . : tM ]
On note 0 = [0 : . . . : s : 0 : . . . : 0], s 6= 0.
P
Les hyperplans qui nous intéressent sont ceux de la forme Ha : t0 + aα tα = 0. On note E
l’ensemble des hyperplans de cette forme, il est de dimension M .
On pose W la sous-variété de Pn+M +2 définie par :
n
o
W = [z0 : . . . : zn : s : Pe(z0 , . . . , zn , s) : z α1 : . . . : z αM ] ; (z0 , . . . , zn , s) ∈ Cn+2
C’est une variété lisse de dimension n + 1.
On remarque que W ∩ Ha est isomorphe à f¯a = 0.
Proposition 2.2.18. Il existe un a tel que W ∩ Ha soit lisse.
Preuve. Pour s = 0, on trouve W ∩ {s = 0} ∩ Ha :
sera lisse.
P
aα z α = 0 donc pour un a assez général, ce
Regardons ce qui se passe autour de 0. OnPcommence par remarquer que pour que l’hyperplan
Ha soit de la forme voulue, à savoir Ha : t0 + aα tα = 0, il faut et il suffit qu’il contienne l’espace
tangent de W en 0. Les hyperplans tels que l’intersection W ∩ Ha soit non lisse sont ceux qui
contiennent un point z ∈ W et Tz W . On pose K = {Ha ∈ E ; T0 W + Tz W + Rz ⊂ Ha }.
On commence par montrer que T0 W ⊕ Tz W pour tout z 6= 0. Pour cela, comme W est donné
par des équations, il suffit de voir que T0 W ∩ Tz W est le noyau de la matrice suivante :
33

0
0
..
.





 0
 ∂f

 ∂z0





···
···
···
···
0
0
..
.
0
∂f
∂zn
∂z αi
∂zj
1 0 ···
0 1 0···
..
..
.
.
0 0 ···0
1 0 ···
0 1 0···
..
..
.
.

0
0

.. 
.

1

0

0

.. 
.

0 0 ···0 1
La matrice constituée des M + 1 premières lignes a pour noyau T0 W , et la matrice des M + 1
dernières lignes a pour noyau Tz W . Montrons que la matrice ci-dessus est de rang n + M + 2.
Déjà, les M + 1 premières lignes sont indépendantes. Pour les lignes suivantes, on remarquera que
si la coordonnée zj de z est non nulle, la ligne correspondant à la dérivation du monôme zjN est
constituée de 0 sauf pour la (j + 1)-ième colonne et la colonne correspondant à cette puissance.
Sinon, si zj = 0, comme z 6= 0, il y a une coordonnée zk pour k 6 n + 1 qui est non nulle, et donc la
ligne correspondant au monôme zj ziN −1 n’a que des 0 sauf pour la (j + 1)-ième colonne et la colonne
de cette puissance. Par conséquent, cela montre que la matrice est de rang M + n + 2, et donc le
noyau est réduit à 0.
Ce qui nous donne bien T0 W ⊕ Tz W .
Si z ∈ T0 W ⊕ Tz W , alors il existe c0 , . . . , cn ∈ C tels que,

X ∂z αi
αi


=
cj
z
∀i ∈ {1, . . . , M }

∂zj
X ∂f


 f (z) =
cj
∂zj
z
/ T0 W ⊕ Tz W
On vérifie que les conditions sur les monômes donnent cj = Nj . Par conséquent, z ∈
P zj ∂f
si et seulement si f (z) 6=
.
On
peut
vérifier
qu’étant
donné
que
f
est
de
degré
strictement
N ∂zj
P zj ∂f
plus petit que N , la fonction f − N ∂zj n’est pas identiquement nulle, et définit une hypersurface S.
On regarde la variété d’incidence W × {Ha hyperplan ; Ha ⊃ T0 W + Tz W + Rz} \{0}. On
peut la projeter sur la variété W de dimension n + 1, et les fibres en dehors de S sont de dimension
M + n + 2 − (2n + 3) − 1 = M − n − 2, et au-dessus de l’hypersurface S de dimension n, la fibre est
de dimension M + n + 2 − (2n + 2) − 1 = M − n − 1. Par conséquent, la variété d’incidence est de
dimension M − 1. Comme de plus on peut la projeter dans l’ensemble E des hyperplans de la forme
Ha , qui est de dimension M , on en déduit qu’il existe bien des hyperplans de la forme Ha tels que
la variété (W ∩ Ha ) \{0} soit lisse.
En conclusion, il existe des constantes aα telles que seul un nombre fini de fibres de l’application
f¯ : V → P1 soient singulières, et que seul 0 soit est un point singulier de la fibre au dessus de t = 0.
Cohérence
On va construire une suite exacte longue de faisceaux où intervient le faisceau H(X/D), et où
deux faisceaux sur trois seront cohérents, ce qui permettra de conclure grâce à la proposition A.2.5.
Cette partie suit la preuve proposée par Brieskorn dans [Bri70]. Pour les propriétés concernant la
cohomologie, les foncteurs dérivés ou l’hypercohomologie, on pourra consulter l’annexe A.3.
A l’issue du paragraphe précédent, nous avons obtenu une application f¯ : V → P1 qui ne possède
qu’un nombre fini de fibres singulières, dont la fibre au dessus de [0 : 1], qui par ailleurs ne possède
qu’un point singulier, celui de départ.
34
Afin d’alléger les notations, nous allons noter f cette application, dont la singularité à l’origine
est la même que celle de départ.
Vu qu’il n’y a qu’un nombre fini de fibres singulières, on peut trouver un “disque” T contenant
0 = [0, 1] dans l’ouvert affine t0 6= 0 de P1 tel que toutes les fibres, sauf celle au dessus de 0, soient
lisses. On pose Y 0 = f −1 (T ) ⊆ V .
De même que dans le chapitre 1, on peut trouver un voisinage X de 0 dans Y 0 et un disque D
centré en 0 dans T tel que l’on ait une fibration de Milnor. (voir théorème 1.2.7)
Nous allons considérer les faisceaux de cohomologie relative Hp (X/D) définis dans le paragraphe 2.2.1. Nous allons montrer que ce sont des faisceaux cohérents. Pour cela, nous allons introduire d’autres faisceaux de cohomologie relative.
On pose Y = f −1 (D) ⊂ Y 0 , X l’adhérence de X dans Y , et Z = Y \X. Alors l’application
restreinte f : Z → D réalise une fibration localement triviale.
De la même façon que dans la section 2.2.1, on définit les faisceaux de p-formes relatives sur Y :
ΩpY /D = ΩpY /(df ∧ Ωp−1
Y ), et de même pour Z.
On pose alors :
Hp (Y /D) = Rp f∗ Ω•Y /D
Hcp (Z/D) = Rp f! Ω•Z/D
où f! est le foncteur “image directe à support propre” 3 .
Nous allons avoir besoin de donner une définition analogue de Hp (X/D), ce qui est justifié par
la proposition suivante :
Proposition 2.2.19. Le faisceau Hp (X/D) tel qu’il a été défini en 2.2.1 vérifie :
Hp (X/D) = Rp f∗ (Ω•X/D )
Preuve. On utilise pour cela la première suite spectrale :
0
E2pq = H p (Rq f∗ (Ω•X/D )) =⇒ R• f∗ Ω•X/D
La variété X est de Stein, donc pour tout disque ouvert ∆ ⊆ D, f −1 (∆) ∩ X est une variété de
Stein, et donc la cohomologie :
H q (f −1 (∆) ∩ X, ΩpX/D ) = 0 pour tout q > 0.
Et donc, en utilisant la proposition A.3.14, on a pour tout t ∈ D :
(Rq (f∗ (ΩpX/D ))) = −
lim
H q (f −1 (V ), ΩpX/D )
−→
t
V 3t
Comme tout V 3 t contient un disque ∆ 3 t, on peut dans la limite inductive ci-dessus se
limiter aux disques ouverts contenant t, et donc on trouve que (Rq (f∗ (ΩpX/D ))) = 0 pour q > 0. Par
t
conséquent, la première suite spectrale dégénère, et donc :
Rp f∗ (Ω•X/D ) = H p f∗ (Ω•X/D )
Ce qui est bien le résultat attendu.
3. Si F est un faisceau sur Z, U ⊆ Z un ouvert, f! (F )(U ) = {s ∈ F (f −1 (U )) ; f : Supp(s) → U propre }
35
Maintenant que nous avons défini ces différents faisceaux, nous allons montrer que les faisceaux
et Hcp (Z/D) sont cohérents pour tout p.
Hp (Y /D)
Proposition 2.2.20. Le faisceau Hp (Y /D) est un faisceau de OD -modules cohérent pour tout p.
Preuve. C’est ici que le fait de s’être placé au départ dans un espace projectif va nous être utile. En
effet, l’application f : Y → D est une application propre, et nous allons pouvoir utiliser le théorème
suivant, que nous devons à Grauert :
Théorème 2.2.21 (Théorème de finitude de Grauert). Si F est un faisceau analytique
cohérent sur X, et g : X → Y est une application holomorphe propre entre variétés analytiques
complexes, alors les faisceaux Rq g∗ (F ) sont des faisceaux de OY modules cohérents pour tout
q > 0.
Ce théorème assure donc que les faisceaux Rq f∗ (ΩpY /D ) sont des faisceaux de OD modules cohérents.
On considère la première suite spectrale :
0
E2pq = H p (Rq f∗ (Ω•Y /D )) =⇒ R• f∗ (Ω•Y /D )
C’est une suite de OD -modules. Cette suite spectrale converge et comme le quotient de deux
modules cohérents est cohérent, on en déduit que tous les termes Erpq de la suite spectrale pour
r > 2 sont des faisceaux cohérents. Par conséquent, pour tout p, q, Grp Rp+q f∗ (Ω•Y /D ) est cohérent,
et donc le faisceau Rp+q f∗ (Ω•Y /D ) est aussi cohérent.
Intéressons-nous maintenant aux faisceaux Hcp (Z/D).
Proposition 2.2.22. Le faisceau Hcp (Z/D) est un faisceau de OD -modules cohérent pour tout p.
Preuve. Tous les points de Z sont des points réguliers de f , étant donné qu’on a choisi nos ouverts
de sorte que la seule fibre singulière restante soit f −1 (0), et la seule singularité sur cette fibre est 0.
On considère les complexes suivants :
0
f −1 OD
0
0
···
0
Ω0Z/D
Ω1Z/D
Ω2Z/D
···
La flèche verticale donne d’après la proposition 2.2.8 un isomorphisme entre les groupes de
cohomologie de ces complexes. On considère les deuxièmes suites spectrales :
00
E2pq = Rp f! (H q ( 0 → f −1 OD → 0 )) =⇒ R• f! ( 0 → f −1 OD → 0 )
00
E2pq = Rp f! (H q (Ω•Z/D )) =⇒ R• f! (Ω•Z/D )
36
(
Etant donné que
H q ( 0 → f −1 OD → 0 ) = 0
, on en déduit que les suites spectrales dégéH q (Ω•Z/D ) = 0
nèrent, et donc Rp f! (Ω•Z/D ) est isomorphe à Rp f! ( 0 → f −1 OD → 0 ), qui est lui-même isomorphe
à Rp f! (f −1 OD ).
Par conséquent, si on montre que ce dernier faisceau est cohérent, on aura le résultat.
Pour cela, on utilise le résultat suivant :
Proposition 2.2.23. Pour tout faisceau F de C-modules sur D, on a :
Rp f! (f −1 F ) ' Rp f! (CZ ) ⊗CD F
On admet ce résultat. La preuve est donné dans [Bri70], et utilise les suites spectrales de Leray
ainsi que le théorème des coefficients universels.
En l’appliquant au cas que nous étudions, nous avons donc :
Rp f! (f −1 OD ) = Rp f! (CZ ) ⊗CD OD
On admettra que de la même façon qu’en 2.1.7, du fait que f : Z → D réalise une fibration
localement triviale, on a pour un t0 ∈ D et t ∈ D :
Rp f! (CZ )t = Hcp (Zt0 , C)
Et donc Rp f! (CZ ) ⊗CD OD est un faisceau localement libre de type fini. Il est donc cohérent, et
par conséquent, les faisceaux Hcp (Z/D) sont aussi cohérents.
On construit à présent une suite exacte longue :
Proposition 2.2.24. On peut définir une suite exacte longue de faisceaux de OD -modules sur D :
· · · Hp−1 (X/D) → Hcp (Z/D) → Hp (Y /D) → Hp (X/D) → Hcp+1 (Z/D) → · · ·
Preuve. On note i : Z ,→ Y et j : X ,→ Y les inclusions canoniques. On remarquera que Z est le
complémentaire de X dans Y .
On commence par montrer le lemme suivant :
Lemme 2.2.25. Si K • est un complexe de faisceaux de f −1 OD modules, on a pour tout p une suite
exacte courte de faisceaux de f −1 OD modules :
p
0 → KZp → K p → KX
→0
p
où KZp = i! (i−1 K p ) et KX
= j∗ (j −1 K p ).
Preuve. On regarde les fibres.
Soit y ∈ Y . Si y est dans X ou dans Z, il est clair que la suite est exacte. Il reste le cas où
y ∈ ∂X.
p
p
Alors KX,y
= Ky et KZ,y
= 0 car on a pris l’image directe à support propre pour i, et donc le
support ne peut pas atteindre le bord de X. La suite est donc encore exacte, et cela justifie le fait
d’avoir pris i! (i−1 K p ) et non i∗ (i−1 K p ).
On déduit de cette suite exacte courte une suite exacte longue de faisceaux de OD modules :
•
•
· · · → Rp−1 f! (KX
) → Rp f! (KZ• ) → Rp f! (KY• ) → Rp f! (KX
) → Rp+1 f! (KZ• ) → · · ·
37
Figure 2.2 – Illustration de la preuve de (2.6)
Comme de plus f : Y → D et f : X → D sont propres, on a Rp f! (KY• ) = Rp f∗ (KY• ) et
• ) = Rp f (K • ).
Rp f! (KX
∗
X
En prenant K • = Ω•Y /D , on obtient donc la suite exacte longue suivante :
•
· · · → Hcp (Z/D) → Hp (Y /D) → Rp f∗ (ΩX/D
) → ···
(2.5)
Il faut donc voir que Rp f∗ (Ω•X/D ) = Hp (X/D).
On considère les suites spectrales :
00
pq
•
)
E 2 = Rp f∗ (H q (Ω•X/D )) =⇒ R• f∗ (ΩX/D
00
E2pq = Rp f∗ (H q (Ω•X/D )) =⇒ R• f∗ (Ω•X/D )
On va montrer le résultat suivant : la flèche de restriction r de X sur X donne un isomorphisme
pq
entre 00 E 2 et 00 E2pq pour tous p, q > 0.
Premier cas : q > 0
D’après la proposition 2.2.8, les complexes Ω•X/D et Ω•X/D sont exacts en dehors de 0 et donc les
cohomologies sont concentrées en 0. Par conséquent, la restriction r induit un isomorphisme entre
pq
H q (Ω•X/D ) et H q (Ω•X/D ). On a donc : 00 E 2 ' 00 E2pq pour q > 0
Deuxième cas : q = 0
p0
Alors 00 E 2 = Rp f∗ (f −1 OD |X ) et 00 E2p0 = Rp f∗ (f −1 OD |X ) d’après la proposition 2.2.9.
On va montrer que le morphisme de restriction r est un isomorphisme :
Rp f∗ (f −1 OD |X ) ' Rp f∗ (f −1 OD |X )
(2.6)
On rappelle que X = Y ∩ Bε (voir théorème de Milnor 1.2.7). On prend 0 < ε0 < ε un rayon plus
petit, mais de sorte que X(ε0 , η) soit un tube de Milnor, et on pose X 00 = Y ∩ B ε0 , et X 0 = X\X 00 .
(voir figure 2.2). Les ensembles X et X 0 sont des ouverts de X et qui vérifient X = X ∪ X 0 .
38
On a alors d’après la suite de Mayer-Vietoris (admis) :
· · · → Rp f∗ (f −1 OD |X ) → Rp f∗ (f −1 OD |X ) + Rp f∗ (f −1 OD |X 0 ) → Rp f∗ (f −1 OD |X 0 ∩X ) → · · · (2.7)
Nous allons utiliser le théorème suivant de Kashiwara et Schapira : (voir Kashiwara Schapira,
Sheaves on Manifold)
Théorème 2.2.26. Soient X, Y et Z trois espaces topologiques, et f : X → Y , p : X → Z et
q : Y → Z tels que le diagramme suivant commute :
f
X
Y
p
q
Z
Alors si f est une équivalence d’homotopie, elle induit un isomorphisme :
Rk p∗ (p−1 OZ ) ' Rk q∗ (q −1 OZ )
On pose ∂X = X\X.
4
On notera que pour ε0 assez proche de ε, X 0 est un
( rétracte par déformation de X.
0
X ' ∂X × [0, 1[
On vérifie que l’on a grâce à une telle rétraction
0
X ∩ X ' ∂X×]0, 1[
Alors on a le diagramme commutatif suivant :
i
X 0 ∩ X = ∂X×]0, 1[
X 0 = ∂X × [0, 1[
f |X 0 ∩X
f |X 0
D
où i : X 0 ∩ X ,→ X 0 est l’inclusion canonique. Nous allons montrer que i est une équivalence
d’homotopie afin d’appliquer le théorème.
On vérifie que l’inclusion précédente induit l’inclusion de ∂X×]0, 1[ dans ∂X × [0, 1[ par les
isomorphismes. Nous sommes donc ramenés à montrer que j :]0, 1[,→ [0, 1] est une équivalence
d’homotopie.
Pour cela,
( on considère 0 < δ < 1. On remarque que H : [0, 1[×[0, 1] → [0, 1[ définie par
(1 − t)x + tδ si x < δ
H(x, t) =
est une rétraction par déformation de [0, 1[ sur [δ, 1[. On pose
x
si x > δ
g = H(., 1) la rétraction de [0, 1[ sur [δ, 1[. On considère alors les applications successives :
j
g
]0, 1[→
− [0, 1[→
− [δ, 1[,→]0, 1[
Alors la composée ρ :]0, 1[→ [0, 1[→ [δ, 1[→]0, 1[ est homotope à l’identité de ]0, 1[.
4. ce qui a été vu dans la preuve de la proposition 1.3.4 avec les applications ρn .
39
On peut donc appliquer le théorème 2.2.26 : la restriction de X 0 à X 0 ∩X donne un isomorphisme
entre Rp f∗ (f −1 OD |X 0 ) et Rp f∗ (f −1 OD |X 0 ∩X ). Par conséquent, par la suite de Mayer-Vietoris (2.7),
on vérifie que Rp f∗ (f −1 OD |X ) est isomorphe à Rp f∗ (f −1 OD |X ) par le morphisme de restriction.
p0
On a donc ainsi prouvé que 00 E 2 et 00 E2p0 sont isomorphes, et donc pour tout p, q > 0, on a
' 00 E2pq .
On obtient ainsi un isomorphisme entre Rk f∗ (Ω•X/D ) et Rk f∗ (Ω•X/D ).
Par conséquent, la suite exacte longue (2.5) devient :
00 E pq
2
· · · → Hcp (Z/D) → Hp (Y /D) → Hp (X/D) → · · ·
(2.8)
On obtient ainsi le théorème suivant :
Théorème 2.2.27. Le faisceau Hp (X/D) est cohérent pour tout p > 0.
Preuve. On considère la suite exacte longue (2.8). Les faisceaux Hcp (Z/D) et Hp (Y /D) sont cohérents pour tout p, et donc par la proposition A.2.5, les faisceaux Hp (X/D) sont aussi cohérents. 2.2.3
Etude comparée
Dans la partie précédente nous avons développé la preuve de Brieskorn [Bri70] de la cohérence
du faisceau H(X/D). Sebastiani a montré dans [Seb70] qu’on avait mieux :
Théorème 2.2.28. Le faisceau H(X/D) est libre sur OD de rang µ.
Nous allons montrer que la restriction à D∗ de H(X/D) coïncide avec notre faisceau initial des
germes de sections holomorphes GM du fibré de Gauss-Manin. La preuve développée ici est celle
proposée dans [ElA].
Remarque. Le faisceau H(X/D) est en fait le faisceau associé au préfaisceau F dont les sections
au-dessus d’un disque ∆ sont :
Γ(∆, F ) =
{ω ∈ f∗ (ΩnX/D )(∆) ; dX/D (ω) = 0}
dX/D f∗ Ωn−1
X/D (∆)
Par conséquent, on pourra calculer la fibre de H(X/D) grâce aux sections du préfaisceau.
Commençons par un lemme :
Proposition 2.2.29. Soient V une variété analytique complexe de dimension complexe n + 1 et
f : V → ∆0 ⊂ C une application holomorphe telle que df ne s’annule pas. Soient aussi η une
n-forme C ∞ , d-fermée, à support propre pour f , et ω une n-forme holomorphe sur V qui vérifie
dω = df ∧ α pour une n-forme α.
On pose :
Z
ω∧η
a(t) =
f −1 (t)
Alors :
40
1. L’application a est holomorphe.
R
2. da
dt = f −1 (t) α ∧ η
Remarque. On note souvent α =
dω
.
df
Preuve.
1. Montrons d’abord que la fonction a est lisse.
R
Commençons par remarquer que pour tout t, a(t) = f −1 (t)∩Supp η ω ∧ η et donc la restriction
R
de f à Supp η, notée fe, est une application propre et a(t) = e−1 ω ∧ η. Alors fe est propre,
f
(t)
de différentielle non nulle en tout point.
La lissité étant une propriété locale, on fixe un point t ∈ ∆0 . On pose Xt,η = f −1 (t) ∩ Supp(η).
Il s’agit donc d’un compact.
Pour tout point y ∈ Xt,η , on peut trouver, comme f est une submersion, un voisinage Uy ⊂
f −1 (t) et un ouvert Vy tel que :
∼
Vy
Uy × ∆ y
pr2
f
∆y
où ∆y est un disque centré en t. Par compacité, on en extrait un recouvrement fini (Uj ), et il
existe un disque ∆ ⊆ ∩∆j . On a alors des Wj ⊆ Vj qui vérifient :
Φj = (f, Ψj )
Wj
Uj × ∆
∼
pr2
f
∆
On considère une partition (χj ) de l’unité associée au recouvrement (Wj ) ci-dessus. Alors on
a:
Z
ω∧η =
a(t) =
f −1 (t)
XZ
f −1 (t)∩Wj
j
χj ω ∧ η
Comme la somme est finie, il suffit de montrer que pour tout j,
Z
h : t 7→
χj ω ∧ η
f −1 (t)∩Wj
est lisse.
∗
On pose α(x, t) = (Φ−1
j ) (ω ∧ η). On note φtt0 = ψj |fe−1 (t) comme dans la partie 2.1.1. C’est
∗
un difféomorphisme de f −1 (t) ∩ Wj sur f −1 (t0 ) ∩ Wj , et α(x, t) = (φ−1
tt0 ) (ω ∧ η). On a donc :
Z
h(t) =
f −1 (t)∩Wj
Z
χj ω ∧ η =
f −1 (t0 )∩Wj
χj α(x, t) dx
Comme χj est à support compact, par les théorèmes de dérivation sous l’intégrale, on en déduit
que h est lisse, et par conséquent a est elle-aussi lisse.
41
∂a
dt = 0.
Montrons que c’est une fonction holomorphe, ce qui revient à montrer que ∂a :=
∂t
Nous allons calculer la dérivée au sens des distributions. On prend donc une fonction ϕ C ∞ à
support compact sur ∆. On a alors :
Z
Z
θ(t)∂a dt = −
a d(θdt)
∆
∆
Z
!
Z
ω ∧ η d(θdt)
=−
∆
f −1 (t)
Z
ω ∧ η ∧ d(θ ◦ f df )
=−
V
Mais comme d(ω ∧ η ∧ (θ ◦ f df )) = dω ∧ η ∧ (θ ◦ f df ) + ω ∧ η ∧ d(θ ◦ f df ) étant donné que
dη = 0, on a, par l’intermédiaire du théorème de Stokes :
Z
Z
θ(t)∂a dt =
dω ∧ η ∧ (θ ◦ f df )
δ
V
=0
car dω ∧ df = 0 vu que dω = df ∧ α. Par conséquent, a est bien holomorphe.
2. On veut maintenant calculer la dérivée de a. On procède de même en posant ∂a =
Z
∂a
∂t dt
:
Z
θ(t)∂a dt = −
a d(θdt)
∆
∆
!
Z
Z
ω ∧ η d(θdt)
=−
∆
f −1 (t)
Z
=−
ω ∧ η ∧ d(θ ◦ f df )
V
Z
=
dω ∧ η ∧ (θ ◦ f df )
V
Z
=
α ∧ η ∧ (θ ◦ f df ∧ df )
V
!
Z
Z
α ∧ η θdt ∧ dt
=
f −1 (t)
∆
Et donc on obtient le résultat voulu, vu qu’on savait déjà que a était lisse, la dérivée au sens
des distributions et la dérivée usuelle coïncident :
∂a
=
∂t
Z
α∧η
f −1 (t)
Ce qui achève la preuve de la proposition 2.2.29.
42
Théorème 2.2.30. La restriction de Hn (X/D) à D∗ est canoniquement isomorphe au faisceau GM .
Preuve. Soit ∆ ⊂ D∗ un disque.
On prend [ω] ∈ Γ(∆, Hn (X/D)), avec ω ∈ ΩnX/D (f −1 (∆)).
On a donc d’après la proposition 2.2.2 un représentant global ω ∈ ΩnX (f −1 (∆)). Soit t ∈ ∆.
La restriction de ω à Xt est une n-forme donc elle est fermée car de degré maximal sur la variété
complexe Xt . De plus, la restriction de df à Xt est nulle
Par conséquent, on peut définir une application θ∆ qui à une classe [ω] de Γ(∆, H(X/D)) associe ct = [ω|Xt ] ∈ H n (Xt , C) t∈∆ .
Montrons à présent que t 7→ ct est holomorphe. On prend (Ctj ) une base constituée de sections
localement constantes. On a donc :
ct =
µ
X
aj (t)Ctj
(2.9)
j=1
Par définition, on est ramené à montrer que les aj sont holomorphes.
On considère l’application suivante, où Φ est une trivialisation locale donnée par le théorème de
Milnor 1.2.7 :
f −1 (∆)
Φ = (f, Ψ)
∼
∆ × Xt0
On se donne une base (Ctj0 ) de H n (Xt0 , C).
On en déduit une base localement constante (Ctj = Ψ∗ (Ctj0 )|Xt ).
Comme les variétés lisses Xt sont de dimension réelle 2n, on en déduit par la dualité de Poincaré
que :
H n (Xt , C) ' (Hcn (Xt , C))∗
où l’on note par une étoile le dual et l’indice c indique que l’on considère la cohomologie à support
compact. Comme de plus ce sont des espaces vectoriels de dimension finie µ, on a :
Hcn (Xt , C) ' (H n (Xt , C))∗
On pose (ηtj0 ) la base duale de (Ctj0 ). On identifie les ηtj0 à des éléments de Hcn (Xt0 , C). Soient
ηetj0 des représentants des (ηtj0 ). Ce sont donc des n-formes différentielles définies sur Xt0 , à support
compact et d-fermées. On peut définir les formes différentielles Ψ∗ (e
ηtj0 ) sur f −1 (∆). Cependant, elles
ne sont pas à support compact.
En revanche, on vérifie qu’elles sont à support propre pour f . En effet, donnons-nous un compact K de ∆, et montrons que f −1 (K) ∩ Supp(Ψ∗ (e
ηtj0 )) est compact.
Si on reprend la preuve du théorème de Milnor, l’application Φ est en fait la restriction d’une
application, qu’on va noter Φ̂ = (f, Ψ̂), définie sur B ε ∩ f −1 (∆) et qui respecte le bord. Par conséquent, l’image réciproque de K par Ψ̂ n’intersecte pas le bord de cette boule comme Φ̂ respecte les
bords, ce qui donne, Ψ̂−1 (K) = Ψ−1 (K). Et alors l’application f : Ψ−1 (K) → ∆ est propre. (Si K 0
est un compact de ∆, Ψ−1 (K) ∩ f −1 (K 0 ) est un fermé du “tube” fermé f −1 (K 0 ) ∩ B ε qui n’intersecte
pas le bord de la boule.)
43
Par conséquent, les restrictions ηetj = Ψ∗ (e
ηtj0 )|Xt sont à support compact, le support étant
Ψ−1 (K) ∩ f −1 (t).
De plus, comme d et Ψ∗ commutent, les formes Ψ∗ (e
ηtj0 ) sont fermées.
On en déduit que les formes ηetj induisent des classes de cohomologie ηtj ∈ Hcn (XRt , C).
Il faut maintenant voir qu’il s’agit de la base duale de Ctj . On va donc calculer Xt Ctj ∧ ηtk .
Si on montre que l’expression ci-dessus ne dépend pas de t, on aura le résultat car on sait que
pour t0 , c’est bien la base duale.
D’après le théorème de Stokes appliqué à la variété à bord f −1 ([t0 , t]) dont le bord est exactement
Xt ∪ Xt0 , on a :
Z
Z
Z
Ctj ∧ ηtk −
Ctj0 ∧ ηtk0 = d(C j ∧ η k )
Xt
−1
Xt
f ([t0 ,t])
0
Mais comme C j et η k sont des formes fermées, on trouve 0, et donc (ηtj ) est bien la base duale
de (Ctj ).
Maintenant qu’on a la base duale de (Ctj ) nous allons pouvoir trouver une expression des aj de
l’expression (2.9) qui va nous permettre d’appliquer la proposition 2.2.29.
En effet, on a alors :
Z
aj (t) =
Xt
ω ∧ ηtj
On vérifie que l’on a les hypothèses de la proposition 2.2.29 : df ne s’annule pas sur f −1 (∆), et η j
est une forme différentielle fermée à support f -propre et ω est dX/D fermée donc qui s’écrit df ∧ β.
Par conséquent, la proposition assure que les aj sont holomorphes, et ainsi l’application
θ∆ :
Γ(∆, H(X/D))
[ω]
−→
7−→
Γ(∆, GM
)
[ω|Xt ] t∈∆
est bien définie.
Comme les ∆ forment une base d’ouverts de D∗ , on a ainsi défini un morphisme de faisceaux. Il
faut voir que c’est un isomorphisme.
Comme d’après le théorème de Sebastiani 2.2.28, H(X/D) est un faisceau localement libre de OD modules, on peut le voir comme de faisceau des sections d’un fibré vectoriel dont la fibre en t0 ∈ D∗
H(X/D)t0
est (t−t0 )H(X/D)
. On va montrer qu’elle est isomorphe à H n (Xt0 , C).
t
0
On note j l’inclusion de Xt0 dans f −1 (∆).
La suite de faisceaux de OD -modules suivante est exacte sur f −1 (∆) :
f −t0
0 → f −1 (OD ) −−−→ f −1 (OD ) → j∗ (CXt0 ) → 0
(
0 si y ∈
/ Xt0
En effet, on a j∗ (CXt0 )y =
C si y ∈ Xt0
Si y ∈
/ Xt0 , alors t − t0 est inversible dans f −1 (OD )y et donc
f −1 (OD )y
(t−t0 )f −1 (OD )y
comme l’idéal engendré par t−t0 est l’idéal maximal de l’anneau local OD,t0 , on a
d’où la suite exacte (2.10).
(2.10)
= 0, et si y ∈ Xt0 ,
f −1 (OD )y
(t−t0 )f −1 (OD )y
= C,
De plus, d’après la proposition 2.2.8 la suite suivante est une résolution de f −1 (OD ) sur f −1 (∆) :
0 → f −1 (OD ) → Ω0X/D → Ω1X/D → · · · → ΩnX/D → 0
44
(2.11)
et la suite suivante est une résolution du faisceau j∗ (CXt0 ) sur f −1 (∆) :
0 → j∗ (CXt0 ) → j∗ (Ω0Xt ) → · · · → j∗ (ΩnXt ) → 0
0
0
(2.12)
On considère alors la suite exacte longue obtenue grâce à la suite exacte courte 2.10 pour le
foncteur f∗ :
0 → f∗ (f −1 (OD )) → f∗ (f −1 (OD )) → f∗ (j∗ C)
→ R1 f∗ (f −1 (OD )) → R1 f∗ (f −1 (OD )) → R1 f∗ (j∗ C) → · · ·
· · · → Rn f∗ (f −1 (OD )) → Rn f∗ (f −1 (OD )) → Rn f∗ (j∗ C) → · · ·
On notera que les résolutions 2.11 et 2.12 sont acycliques pour f∗ . En effet, pour la première, c’est
la proposition 2.2.10 qui l’assure. Pour la seconde, montrons que les fibres du faisceau (Rp f∗ (j∗ ΩqXt ))
0
sont nulles pour tout t ∈ ∆. Déjà, si t 6= t0 , c’est clair, puisqu’il existe un ouvert contenant t mais
pas t0 , et dont l’image réciproque par j sera vide. Maintenant, il reste à voir la fibre en t0 . On utilise
la proposition A.3.14 :
(Rp f∗ (j∗ ΩqXt )) = −lim
H p (f −1 (V ), j∗ ΩqXt )
−−→
t0
0
0
t0 ∈V
p
= −lim
H (j
−−→
−1
◦f
t0 ∈V
p
−1
(V ), ΩqXt )
0
= H (Xt0 , ΩqXt )
0
=0
En effet, la variété Xt0 est de Stein et le faisceau ΩqXt est cohérent.
0
Par conséquent, les deux résolutions étant acycliques pour le foncteur f∗ , on a en vertu de la
proposition A.3.10 :
Rp f∗ (f −1 (OD )) = H p (f∗ (Ω•X/D )) = Hp (X/D)
Rp f∗ (j∗ CXt0 ) = H p (f∗ j∗ Ω•Xt )
0
En particulier, on a étant donné que Hn+1 (X/D) = 0 car il est cohérent et nul en dehors de 0 :
t−t
0
· · · → H(X/D) −−−→
H(X/D) → H n (f∗ j∗ Ω•Xt ) → 0
0
Et donc H(X/D)/(t − t0 )H(X/D) '
H n (f∗ j∗ ΩXt0 ).
De plus, par la proposition A.3.17 : H n (f∗ j∗ Ω•Xt ) = H n (f∗ j∗ Ω•Xt ) .
0 t0
0 t0
•
•
Et on a : f∗ j∗ ΩXt
= Γ(Xt0 , ΩXt ).
0
t0
0
Il ne reste plus qu’à voir pourquoi H n (Xt0 , C) = H n (Ω•Xt (Xt0 )). C’est dû au théorème de De
0
Rham abstrait A.4.6 et au fait qu’une sous-variété fermée d’une variété de Stein est une variété de
Stein. (voir proposition A.4.2)
On a ainsi montré que les faisceaux GM |D∗ et H(X/D)|D∗ sont isomorphes. On pouvait en fait
aussi utiliser un procédé analogue à ce qui a été développé dans le paragraphe précédent, à l’aide de
suites spectrales, cependant, cette preuve est moins explicite, mais permet de montrer la :
45
Proposition 2.2.31. Les faisceaux Rp f∗ (CX 0 ) ⊗CD∗ OD∗ et Hp (X/D)|D∗ sont isomorphes, où on
a noté X 0 = X\f −1 (0).
Preuve. La preuve est sensiblement analogue à celle de la proposition 2.2.22. On considère les suites
spectrales
00 pq
E2 = Rp f∗ (H q ( 0 → f −1 OD∗ → 0 )) =⇒ R• f∗ ( 0 → f −1 OD∗ → 0 )
00
E2pq = Rp f∗ (H q (Ω•X/D |X 0 )) =⇒ R• f∗ (Ω•X/D |X 0 )
La proposition 2.2.8 assure que ces suites spectrales sont isomorphes et dégénèrent, et on admettra
de même que Rp f∗ (f −1 OD∗ ) = Rp f∗ (CX 0 ) ⊗CD∗ OD∗ , ce qui donne, étant donné que Hp (X/D) =
Rp f∗ (Ω•X/D ) un isomorphisme :
Hp (X/D)|D∗ ' Rp f∗ (CX 0 ) ⊗CD∗ OD∗
Ce qui est le résultat attendu.
En fait, en utilisant un résultat de Milnor qui assure que les groupes de cohomologie H p (Xt , C)
sont nuls pour p 6= 0, n et t ∈ D∗ , on a même le théorème suivant :
Théorème 2.2.32. Les faisceaux Hp (X/D) sont nuls pour 0 < p < n et p > n + 1.
Preuve. Comme df 6= 0 en dehors de la fibre singulière, on en déduit que la restriction du faisceau
Hn+1 (X/D) à D∗ est nulle. Pour 0 < p 6 n − 1, c’est le résultat de Milnor mentionné ci-dessus qui
donne le même résultat.
Le théorème 2.2.27 indique que les faisceaux Hp (X/D) sont des faisceaux de OD -modules cohérents. Par conséquent, ils sont localement isomorphes sur un voisinage V de 0 au conoyau d’une
r → O s . Mais comme les fibres en tout point de V différent de 0 sont nulles, on
application ϕ : OD
D
en déduit que la fibre en 0 est nulle elle-aussi.
Quant aux faisceaux Hp (X/D) pour p > n + 2, ils sont clairement nuls.
2.2.4
Connexion
Le faisceau H(X/D) est un faisceau localement libre d’après le théorème de Sebastiani, et donc
il peut être vu comme le faisceau des sections d’un fibré vectoriel dont les fibres sont données par le
quotient H(X/D)t0 /(t − t0 )H(X/D)t0 .
On va maintenant définir une connexion sur le faisceau H(X/D)|D∗ et montrer que par l’isomorphisme qu’on vient d’établir, elle correspond à la connexion de Gauss-Manin définie en 2.1.2.
Soit ∆ ⊂ D∗ un petit disque.
Définition 2.2.33. Soit [ω] ∈ Γ(∆, H(X/D)). Elle est représentée globalement au-dessus de f −1 (∆)
par une n-forme ω ∈ ΩnX .
Alors comme dX/D ω = 0 on a dω = df ∧ β globalement au-dessus de f −1 (∆) par la proposition 2.2.6. On pose alors :
b
∇[ω]
= [β]
b est bien définie et à valeurs dans H(X/D).
Proposition 2.2.34. L’application ∇
46
Preuve. Il faut voir que dβ ∈ df ∧ ΩnX et que sa classe dans H(X/D) ne dépend pas d’un choix de
représentant.
Sur f −1 (∆), f peut être choisie comme première coordonnée d’un système de coordonnées locales
et donc df ∧ ΩnX |f −1 (∆) = Ωn+1
X |f −1 (∆) . Par conséquent, β est bien dX/D -fermée, et définit une classe
[β] ∈ Γ(∆, H(X/D)).
Soit ω2 un autre représentant de [ω]. Alors ω2 = ω + df ∧ α + dγ (au moins localement). On a
alors :
dω2 = dω − df ∧ dα
= df ∧ (β − dα)
Et [β] = [β − dα]. De plus, si β 0 est telle que dω = df ∧ β 0 alors β 0 = β + df ∧ η.
b est bien définie sur les sections au-dessus de ∆, et comme les ∆ forment
On en déduit que ∇
une base d’ouverts on vérifie qu’on a bien un morphisme de faisceaux.
b est une connexion sur H(X/D)|D∗ .
Proposition 2.2.35. L’application ∇
∂
Preuve. En fait, c’est plutôt la contraction selon le champ de vecteur ∂t
du disque d’une connexion
sur le fibré vectoriel sous-jacent.
b est C linéaire de façon immédiate. Il faut à présent vérifier qu’elle vérifie une
On vérifie que ∇
règle de Leibniz. Soit k ∈ OD et ω ∈ ΩnX/D dX/D -fermée telle que dω = df ∧ β.
dk
◦ f df ∧ ω + k ◦ f dω
dt
dk
= df ∧
◦ f.ω + k ◦ f.β
dt
d(k ◦ f.ω) =
Par conséquent,
dk
b
b
∇(k.[ω])
.[ω] + k.∇([ω])
=
dt
b est une connexion.
Ce qui prouve que ∇
On va à présent montrer que cette connexion est en fait méromorphe en 0.
Proposition 2.2.36. Il existe ` ∈ N tel que tout α ∈ f ` ΩnX/D soit dX/D -fermée.
Remarque. En fait, on peut prendre ` = n + 1 d’après un résultat de Briançon et Skoda.
Preuve. En dehors de 0, df ∧ ΩnX = Ωn+1
étant donné que f peut être prise comme coordonnée.
X
k
Donc en dehors de 0, pour tout entier k, f ΩnX/D ⊂ Z(ΩnX/D ), où Z(ΩnX/D ) désigne les formes dX/D fermées.
Il faut donc regarder ce qui se passe en 0.
Il existe un entier ` > 0 tel que f ` ∈ J(f ) ⊂ OX,0 , où J(f ) désigne l’idéal jacobien de f . Il existe
donc des germes de fonctions holomorphes λi tels que
f` =
n
X
i=0
47
λi
∂f
∂zi
−1 (0) :
Soit η ∈ Ωn+1
X . Alors η s’écrit localement autour d’un y ∈ f
η = g dz0 ∧ · · · ∧ dzn
∂f
dz0 ∧ · · · ∧ dzn .
λi g
∂zi
P
ci ∧ · · · ∧ dzn , on trouve f ` η = df ∧ β.
En posant β =
(−1)i λi g dz0 ∧ · · · ∧ dz
Donc :
et donc f ` η =
P
f ` Ωn+1
⊂ df ∧ ΩnX
X
(2.13)
Soit maintenant ω ∈ ΩnX/D , et ω un représentant autour de 0. Alors :
d(f ` ω) = `f `−1 df ∧ ω + f ` dω
= df ∧ `f `−1 ω + α
⊂ df ∧ ΩnX . On en déduit donc que f ` ω est dX/D -fermée.
où α est donné par l’inclusion f ` Ωn+1
X
D’après la proposition 2.2.2 qui repose sur le lemme de De Rham algébrique, pour toute forme ω
qui est dX/D -fermée au voisinage de 0 il existe β tel que dω = df ∧ β, si bien que l’on peut étendre
b en 0. La seule chose qu’il faut noter est que cette fois-ci, β n’est pas forcément dX/D fermée
∇
puisqu’en 0, la différentielle de f s’annule. En revanche, par la proposition précédente, on sait que
f ` β ∈ df ∧ ΩnX . Ceci nous donne la proposition suivante :
b envoie H(X/D) dans lui-même.
Proposition 2.2.37. L’application f ` ∇
Maintenant qu’on a introduit cette connexion méromorphe en 0, on va la comparer avec notre
connexion de Gauss-Manin initiale ∇.
b sur H(X/D)|D∗ s’identifie à la connexion de Gauss-Manin
Proposition 2.2.38. La connexion ∇
par l’isomorphisme du théorème 2.2.30.
Preuve. A une section [ω] de H(X/D) au dessus d’un ∆ ⊂ D∗ on lui fait correspondre par l’isomorphisme θ du théorème 2.2.30 la section de GM définie par
ct = [ω|Xt ]
Pµ
j
j=1 aj (t)Ct
où les aj sont holomorphes et (Ctj ) est une base de sections
P
daj j
C
localement constantes. Par conséquent, ∇(c) = µj=1
dt
Comme ω est dX/D -fermée, il existe α tel que dω = df ∧ α.
P
b
Alors ∇([ω])
= [α]. De plus, θ([α]) s’écrit θ([α]) = µj=0 bj C j .
Or, en reprenant les notations de la preuve du théorème 2.2.30,
Z
daj
(t) =
α ∧ ηtj = bj
dt
Xt
On a montré que ct =
étant donné que (C j ) et (η j ) sont des bases duales. D’où :
b
θ(∇([ω]))
= ∇(θ([ω]))
Ce qui est bien le résultat attendu.
48
2.2.5
Réseau de Brieskorn
On va s’intéresser à ce qui se passe au voisinage de la singularité 0 ∈ X de f . On a le résultat
suivant :
Proposition 2.2.39. La fibre Hp (X/D)0 du faisceau Hp (X/D) est isomorphe à H p (Ω•X/D,0 ).
Preuve. On considère la seconde suite spectrale :
00
E2pq = Rp f∗ (H q (Ω•X/D )) 0 =⇒ (R• f∗ (Ω•X/D ))
0
On considère d’abord les termes pour q > 0.
D’après la proposition 2.2.8, H q (Ω•X/D ) est concentré en 0, c’est-à-dire que pour tout y ∈ X\0,
H q (Ω•X/D ) = 0. Par conséquent, H q (Ω•X/D ) est un faisceau flasque, et donc pour p > 0, q > 0, on a
00 E pq
2
y
= 0.
Pour p = 0, q > 0, 00 E20q = (f∗ (H q (Ω•X/D ))) . Mais comme le faisceau H q (Ω•X/D ) est concentré
0
en 0, on en déduit que 00 E20q = H q (Ω•X/D ) . De plus, par la proposition A.3.17, on a H q (Ω•X/D ) =
0
0
H q (Ω•X/D,0 ).
Il reste à regarder pour q = 0. On a Ω0X/D = OX et H 0 (Ω•X/D ) = f −1 OD (voir proposition 2.2.9).
On a donc E2p0 = (Rp f∗ (f −1 (OD )))0 . On utilise la proposition A.3.14 qui donne :
(Rp f∗ (f −1 (OD )))0 = −
lim
H p (f −1 (U ), f −1 (OD ))
−→
U 30
On note f¯ : X → D.
L’isomorphisme 2.6 assure que Rp f∗ (f −1 (OD )|X ) est isomorphe à Rp f¯∗ (f¯−1 (OD )|X ), ce qui
permet d’avoir f¯ propre et alors tout ouvert V de X contenant f¯−1 (0) contient un ouvert de la
forme f¯−1 (U ) Par conséquent :
(Rp f∗ (f −1 (OD )))0 = −−−lim
H p (V, f¯−1 (OD )
−−−−→
−1
V ⊃f¯
(0)
et par la proposition A.3.16, on a
(Rp f∗ (f −1 (OD )))0 = H p (f¯−1 (0), f¯−1 (OD )) = H p (f¯−1 (0), OD,0 )
Mais de plus, l’espace f¯−1 (0) est contractile, et donc par le théorème des coefficients universels
qui donne l’isomorphisme H p (f¯−1 (0), OD,0 ) ' H p (f¯−1 (0), C) ⊗ OD , on a 00 E2p0 = 0 pour p > 0 et
E200 = H 0 (Ω•X/D )0 .
La suite spectrale dégénère, tous les termes E2p,q étant nuls pour q > 0, et donc on a un isomorphisme :
H p (Ω•X/D ) ' (Rp f∗ (Ω•X/D ))
Ce qui est le résultat attendu car
0
p
•
H (ΩX/D )
0
=
0
p
•
H ((ΩX/D )0 ).
On notera dans la suite H0n = H n (Ω•X/D ) .
0
Dans le dernier paragraphe, nous avons introduit une connexion sur le faisceau H(X/D). Nous
b
avons en particulier remarqué (voir proposition 2.2.37) que pour un entier `, l’application f ` ∇
`
n
b
envoie H(X/D) dans lui-même. Cela nous permet de définir une application f ∇0 sur H0 par
l’isomorphisme de la proposition précédente.
49
Corollaire 2.2.40. En particulier, la proposition ci-dessus assure que si l’on trouve un système de
générateurs de H0n on en déduit par cet isomorphisme un système de générateurs de H(X/D)0 , et
donc un système de générateurs local de H(X/D) autour de 0.
Les formes différentielles en degré maximal sont plus faciles à étudier : au voisinage d’un point,
une fois un système de coordonnées donné, il ne reste plus qu’à étudier une fonction holomorphe.
b 0 à ces modules.
On va définir des OD,0 -modules dans lesquels s’injecte H0n . On étendra alors ∇
On remarquera que OD,0 = C{t}, les germes de fonctions holomorphes en 0.
Définition 2.2.41. On pose
0
00
H0n =
H0n =
ΩnX,0
n−1
df ∧ Ωn−1
X,0 + dΩX,0
Ωn+1
X,0
df ∧ dΩn−1
X,0
Proposition 2.2.42. Les applications suivantes sont des injections :
df ∧
H0n → 0 H0n −−→ 00 H0n
Preuve. La première est l’inclusion de
→Ωn+1
Ker dX/D :Ωn
X/D,0
X/D,0
Im dX/D :Ωn−1
→Ωn
X/D,0
X/D,0
dans
Ωn
X/D,0
n−1
dX/D ΩX/D,0
.
La seconde vient du lemme de De Rham algébrique 2.2.5 : si pour un α ∈ ΩnX,0 on a df ∧ α ∈
n−1
df ∧ dΩn−1
X,0 alors df ∧ α = df ∧ dβ pour un β dans ΩX,0 et donc par le lemme de De Rham,
α = dβ + df ∧ γ pour un γ dans Ωn−1
X,0 .
Proposition 2.2.43. Les modules H0n , 0 H0n , et 00 H0n sont des OD,0 -modules libres de rang µ, le
nombre de Milnor.
Preuve. On notera que l’anneau OD,0 = C{t} est un anneau principal. Un résultat de Sebastiani
assure que ces trois modules sont des OD,0 modules libres.
Le faisceau GM des germes de sections holomorphes du fibré de Gauss-Manin est localement
libre de rang µ. D’après le théorème 2.2.30, GM est isomorphe à H(X/D)|D∗ . De plus, le faisceau
H(X/D) est un faisceau de OD -modules cohérent. La proposition 2.2.39 donne un isomorphisme
entre H(X/D)0 et H0n . Comme de plus d’après le résultat de Sebastiani 2.2.28, le faisceau est libre
et H0n est un OD,0 module sans torsion, on en déduit que H(X/D)0 est un OD,0 module libre de
rang µ, et donc aussi H0n .
Pour les OD,0 = C{t}-modules 0 H0n et 00 H0n , nous allons utiliser les injections 2.2.42.
Au lieu de considérer
nous allons les tensoriser par le corps des fonctions
1 les C{t} modules,
n
méromorphes K = C{t} t . Comme H0 est un C{t}-module libre de rang µ, on en déduit que le K
espace vectoriel H0n ⊗C{t} K est de dimension finie µ. On a les inclusions :
H0n ⊆ 0 H0n ⊆ 00 H0n
et pour une puissance k, f k 00 H0n ⊆ H0n . On en déduit que :
H0n ⊗ K ⊆ 00 H0n ⊗ K = f k 00 H0n ⊗ K ⊆ H0n ⊗ K
Et donc dimK 00 H0n ⊗ K = µ. Par conséquent, le C{t}-module libre 00 H0n est aussi de rang µ. On
a donc aussi immédiatement que 0 H0n est de rang µ.
50
Remarque. Les C{t}-modules libres H0n , 0 H0n et 00 H0n sont des réseaux de 00 H0n ⊗ C{t}
1
t
.
Définition 2.2.44. Le OD,0 -module libre de rang µ 00 H0n est appelé réseau de Brieskorn.
Proposition 2.2.45. Les quotients 0 H0n /H0n et 00 H0n /(df ∧ 0 H0n ) sont des C-espaces vectoriels de
dimension µ.
Preuve. Signalons que Ωn+1
X/D,0 ' C{z0 , . . . , zn }/J(f ) est un C espace vectoriel de dimension µ.
1. On a : 0 H0n /H0n = ΩnX/D,0 /Z(ΩnX/D,0 ) où Z(ΩnX/D,0 ) désigne les n-formes relatives dX/D fermées.
Vérifions que la différentielle dX/D induit un isomorphisme entre ΩnX/D,0 /Z(ΩnX/D,0 ) et Ωn+1
X/D,0 .
Le noyau de dX/D est Z(ΩnX/D,0 ). Par conséquent, la flèche induite par dX/D :
ΩnX/D,0 /Z(ΩnX/D,0 ) → Ωn+1
X/D,0
est injective. Il faut voir qu’elle est surjective. Cela vient du fait que la différentielle d : ΩnX,0 →
Ωn+1
X,0 l’est vu que les (n + 1) formes sont fermées.
2. On a directement 00 H0n /(df ∧ 0 H0n ) = Ωn+1
X/D,0 .
Et donc ce sont bien des espaces vectoriels de dimension µ.
b sur H n , 0 H n et 00 H n .
Nous allons à présent étendre la connexion ∇
0
0
0
b : H(X/D) → H(X/D). On a donc une
On a vu en 2.2.37 qu’il existait un entier ` tel que f ` ∇
b 0 : H(X/D)0 → H(X/D)0 , et par l’isomorphisme de la proposition 2.2.39,
application induite f ` ∇
b 0 : H n → H n . Elle est définie par f ` ∇
b 0 [ω] = [f ` α] ∈ H n où
on en déduit une application f ` ∇
0
0
0
dω = df ∧ α.
b 0 des applications 0 ∇
b 0 et 00 ∇
b 0 sur respectiDéfinissons à présent à partir de cette application ∇
00
n
0
n
vement H0 et H0 .
Définition 2.2.46. Soit [ω] ∈ 0 H0n . Alors f ` ω est dX/D fermée et donc il existe α ∈ ΩnX,0 tel que
d(f ` ω) = df ∧ α. Alors α définit une classe [α] ∈ 0 H0n . On pose alors :
b 0 [ω] = ∇
b 0 [f ` ω] − `f `−1 [ω]
f ` 0∇
Remarque. On peut remarquer que :
b 0 [ω] = f ` dω
df ∧ f ` 0 ∇
b 0 : 0 H n → 0 H n est bien définie, et est une extension de ∇
b 0.
Proposition 2.2.47. L’application f `0 ∇
0
0
Preuve. Soit η un autre représentant de la classe de [ω]. Alors η = ω + df ∧ β + dγ et donc
d(f ` η) = d(f ` (ω + df ∧ β + dγ))
= df ∧ α − f ` dβ + `f `−1 dγ
Et [α − f ` dβ + `f `−1 dγ] = [α + d(f ` β) + d(`f `−1 γ)] = [α] ∈ 0 H0n .
Si d(f ` ω) = df ∧ α0 , alors df ∧ (α − α0 ) = 0 et par le lemme de De Rham algébrique 2.2.5,
0
b 0 est bien définie.
[α ] = [α]. Par conséquent, l’application 0 ∇
b 0 [ω] = f ` ∇
b 0 [ω].
Soit maintenant [ω] ∈ H0n . On va vérifier que f ` 0 ∇
`
`−1
`
b 0 [f ω] = `f [ω] + f ∇
b 0 [ω]
C’est immédiat du fait que ∇
51
b 0 [β] =
Définition 2.2.48. Soit [η] ∈ 00 H0n . Alors f ` η = df ∧β où β est une n-forme. On a donc df ∧0 ∇
dβ, et on pose :
b 0 [η] = [dβ] − `f `−1 [η]
f ` 00 ∇
De même, on a la proposition suivante :
b0 :
Proposition 2.2.49. L’application f `00 ∇
0
b 0 par l’inclusion 2.2.42
de ∇
00 H n
0
→
00 H n
0
est bien définie, et est une extension
Preuve. Si ω est un autre représentant de [η], ω = η + df ∧ dα, on a f ` ω = df ∧ (β + f ` dα), et donc
b 0 est bien définie.
[dβ] = [d(β + f ` dα)]. De même le lemme de De Rham permet de conclure que 00 ∇
Il faut voir que pour [η = df ∧ ω] ∈ df ∧ 0 H0n , on a :
b 0 [ω]
b 0 [η] = f ` df ∧ 0 ∇
f ` 00 ∇
On a :
b 0 [η] = [d(f ` ω)] − `f `−1 [η]
f ` 00 ∇
= [df ∧ (`f `−1 ω) + f ` dω] − `f `−1 [η]
= f ` [dω]
b 0 [ω]
= df ∧ f ` 0 ∇
b 0 est bien une extension de 0 ∇
b 0.
Ce qui prouve que 00 ∇
Un avantage non négligeable de cette dernière définition est le suivant :
Si on se donne un système de coordonnées locales au voisinage de 0, toute (n + 1)-forme η s’écrit
η = gdz pour un germe de fonction holomorphe g en 0. On sait qu’il existe ξ une n-forme telle que
f ` dz = df ∧ ξ, et alors :
b 0 [gdz] = [d(gξ)] − `f `−1 [gdz]
f ` 00 ∇
b 0 sont simples.
Ainsi, si ξ est connu, les calculs de 00 ∇
A présent que nous avons étendu notre connexion initiale, nous allons montrer dans le chapitre
suivant comment les utiliser pour calculer la monodromie, au moins dans certains cas.
52
Chapitre 3
Exemples de calcul de la matrice de
monodromie
3.1
Régularité
Avant d’entamer cette partie, il faut signaler un résultat important que nous admettrons ici :
b est singulière régulière.
Théorème 3.1.1. La connexion ∇
Une démonstration de ce résultat est donnée dans [Bri70].
On rappelle qu’une connexion est dite singulière régulière si elle est méromorphe en 0, et si
les coefficients d’une base horizontale multiforme sur D∗ dans une base locale uniforme du fibré en
0 sont à croissance modérée.
b
b étant une
Plus précisément, on regarde l’équation ∇[ω]
= 0 sur H(X/D). L’application ∇
connexion méromorphe sur H(X/D), si l’on se donne une base locale (e1 , . . . , eµ ) de H(X/D) au
voisinage de 0, il existe des applications méromorphes mij telles que :
b j) =
∇(e
µ
X
mij ei
i=1
b
Rechercher unePsection horizontale revient alors à résoudre ∇[ω]
= 0, c’est-à-dire dans la base
locale, avec [ω] = aj ej :
X daj
j
dt
ej +
X
aj mij ei = 0
i,j
Ou encore, en écriture matricielle, avec a = (a1 , . . . , aµ )T et M = (mij ) :
da
= −M a
dt
où M est à coefficients méromorphes.
Il est alors possible de montrer qu’un tel système différentiel admet une matrice fondamentale
de la forme S(t)tP où S est une matrice inversible à coefficients holomorphes et P est une matrice
constante.
On dispose de quelques critères permettant de conclure quant à la régularité d’un tel système :
53
Proposition 3.1.2.
1. Le système est régulier si et seulement si S est méromorphe en 0.
2. Critère de Fuchs. Lorsque la matrice M a un pôle simple en 0, le système est régulier.
b étant méromorphe en 0 d’après la proposition 2.2.37, la résolution de l’équaLa connexion ∇
b
tion ∇[ω] = 0 fournit une matrice fondamentale multiforme S(t)tP , dont les colonnes forment une
base horizontale multiforme de H(X/D). La monodromie est alors donnée par la matrice e2iπP .
3.2
Lien entre les vecteurs propres de la monodromie et les sections
du faisceau H(X/D)
Revenons à l’application de monodromie introduite dans le paragraphe 2.1.2 :
T : H n (Xt0 , C) → H n (Xt0 , C)
L’objectif est de calculer la matrice de la monodromie, ou son polynôme caractéristique, qui
donnent des informations topologiques sur la singularité.
On se propose de ramener le problème des sections horizontales de GM à la recherche de certaines
sections du faisceau de cohomologie relative H(X/D).
On suppose que v0 est un vecteur propre de la monodromie pour la valeur propre e−2iπu . On
considère alors une section multiforme du fibré de Gauss-Manin GM définie de proche en proche
à partir des applications φt1 ,t2 introduites dans la partie 2.1.1. Cela nous permet de définir une
application w : {Re(ξ) < 0} → GM qui à un ξ associe w(ξ) ∈ H n (Xeξ , C). On notera v(t) l’application multiforme correspondante. On notera qu’il s’agit d’une section horizontale, dans la mesure
où localement on obtient les sections par les isomorphismes φt1 ,t2 .
Le fait que v0 soit un vecteur propre de la monodromie pour la valeur propre e−2iπu se traduit
par le fait que, si eξ = t0 , on a : T (w(ξ)) = e−2iπu w(ξ).
Proposition 3.2.1. A la section multiforme v(t) on peut associer une famille uniforme définie par :
σ(t) = tu v(t)
Preuve. On remarque que pour ξ vérifiant eξ = t, on a : eξu w(ξ) = e(ξ+2iπ)u e−2iπu w(ξ), et donc la
| {z }
=w(ξ+2iπ)
famille σ(t) est bien uniforme.
Par l’isomorphisme θ du théorème 2.2.30, on peut faire correspondre à σ une section de H(X/D)
au-dessus de D∗ . Il faudrait voir que cette section est méromorphe en 0. Pour cela on a besoin du
théorème de régularité de la connexion de Gauss-Manin.
En utilisant la proposition 2.2.38, on remarque qu’à la section horizontale multiforme v(t) on peut
faire correspondre une section horizontale multiforme de H(X/D). Soit ε une base locale uniforme
autour de 0, et e une base horizontale multiforme de H(X/D) dont le premier vecteur est θ−1 (v).
Alors il existe une matrice M à coefficients multiforme de détermination finie telle que ε = M e, et
donc e = M −1 ε, et tu e = tu M −1 ε où tuP
M −1 est à croissance modérée. Donc quand on regarde la
ligne correspondant à v, on trouve σ =
mj εj où les mj sont à croissance modérée. Mais comme
σ est uniforme, on en déduit que les mj sont méromorphes.
On va montrer le résultat suivant :
54
Proposition 3.2.2. A tout vecteur propre v0 de T on peut associer une n-forme holomorphe ω telle
que
df
dω = (m + u) ∧ ω
(3.1)
f
et ω|Xt0 induit un vecteur propre pour e−2iπu .
Réciproquement, si ω est une n-forme holomorphe qui vérifie (3.1), la section multiforme définie
ω
sur D∗ par m+u induit un vecteur propre de la monodromie T pour la valeur propre e−2iπu , ou le
f
vecteur nul.
Preuve. Soit v0 un vecteur propre de la monodromie. On lui associe par le procédé ci-dessus une
section méromorphe σ(t) = tu v(t). Il existe donc un entier m tel que f m σ ∈ Γ(D, H(X/D)).
On considère ω ∈ Γ(X, ΩnX ) un représentant de f m σ. On a alors dω = df ∧ α pour une n-forme α,
et cette écriture est globale vu que X est de Stein. (voir proposition 2.2.6) On a alors, par définition,
b
∇[ω]
= α, où α ∈ ΩnX /(df ∧ Ωn−1
X ).
De plus, θ[ω] = [ω|Xt ]t , et ω|Xt = tm+u v(t). Comme la section multiforme v(t) est horizontale,
et par la proposition 2.2.38 on a :
t∇(θ[ω]) = (m + u)tm+u et
b
= tθ(∇[w])
= tθ[α]
Et donc tα|Xt = (m + u)tm+u v(t) pour tout t, et par l’isomorphisme θ, on a :
[f α] = [(m + u)ω]
Par conséquent, il existe des n-formes β et γ telles que :
f α = (m + u)ω + df ∧ β + dγ
On a alors :
f df ∧ α = (m + u)df ∧ ω + df ∧ dγ
Et comme df ∧ α = dω :
dω =
df
∧ ((m + u)ω + dγ)
f
Et donc on a aussi :
d(f ω + df ∧ γ) = df ∧ ω + f dω − df ∧ dγ
= df ∧ ω + (m + u)df ∧ ω
df
= (m + u + 1) ∧ (f ω + df ∧ γ)
f
Et donc la n-forme ω1 = f ω + df ∧ γ convient. On vérifie que sa restriction à Xt0 donne tm+1
e0 , qui
0
est bien un vecteur propre pour e−2iπu .
Cela montre le premier sens de l’implication.
55
Montrons la réciproque. Si ω est une n-forme holomorphe sur X qui vérifie dω = (m + u) df
f ∧ ω,
alors on vérifie que
ω
d
=0
f m+u
ω
Alors f m+u
définit une section horizontale multiforme de GM par l’isomorphisme θ. Cette section
peut être nulle ou bien donne un vecteur propre de la monodromie. En effet, si eξ = t0 , on remarquera
que :
ω|Xt0
(ξ+2iπ)(m+u)
e
= e−2iπu
ω|Xt0
ξ(m+u)
e
Ce qui est bien le résultat attendu.
On a ainsi transporté le problème de la recherche de vecteurs propres de la monodromie T à la
recherche de n-formes holomorphes qui vérifient la relation (3.1).
3.3
3.3.1
Cas des polynômes quasi-homogènes
Calcul dans le cas quasi-homogène
On va regarder un exemple simple d’application du résultat précédent.
Définition 3.3.1. Un polynôme f ∈ C[z0 , . . . , zn ] est dit quasi-homogène s’il existe des nombres
n+1
rationnels strictement positifs (w0P
, . . . , wn ) ∈ (Q+∗ )
tels que f soit une combinaison linéaire de
monômes z0α0 · · · znαn qui vérifient nj=0 αj wj = 1.
Exemple 3.3.2.
• Les polynômes homogènes sont quasi-homogènes.
• Les polynômes de la forme z0α0 + · · · znαn sont quasi-homogènes.
On rappelle que deux germes de fonctions analytiques f et g sont dits équivalents si et seulement
si il existe un germe de difféomorphisme ϕ tel que f = g ◦ ϕ. (voir définition 2.2.12)
Proposition 3.3.3. Une fonction analytique f avec une singularité isolée est équivalente à un polynôme quasi-homogène si et seulement si elle appartient à son idéal jacobien.
Preuve. Soit f une fonction analytique équivalente à un polynôme quasi-homogène. Alors dans un
système de coordonnées convenables on a :
n
X
j=0
wj z j
XX
∂f
=
wj αj aα z α
∂zj
α
j
=f
et donc f est dans son idéal jacobien.
La réciproque est quant à elle plus compliquée et sera admise. Elle est montrée par K.Saito
dans [Sai71].
56
Dans la suite de ce paragraphe, on suppose que f est un polynôme quasi-homogène.
Notre objectif est de trouver une matrice de la monodromie. Nous allons donc chercher des
vecteurs propres et des valeurs propres de la monodromie. Dans le cas quasi-homogène, les choses
se passent bien dans la mesure où f ∈ J(f ). La matrice de monodromie est alors diagonalisable, et
ses valeurs propres sont assez faciles à trouver.
Commençons par noter que d’après le théorème 2.2.30, si on trouve un système de générateurs
du faisceau H(X/D) au voisinage de 0, on en déduit un système de générateurs de GM . Or, d’après
le corollaire 2.2.40, cela revient à trouver un système de générateurs de H0n . On est donc ramené
à étudier un OD,0 -module, qui est libre de rang µ d’après la proposition 2.2.43. Nous allons donc
n+1
chercher une base de H0n . En fait, on va même se ramener à chercher une C-base de Ωn+1
X,0 /(J(f )ΩX,0 ).
n+1
L’espace Ωn+1
X,0 /(J(f )ΩX,0 ) est un C-espace vectoriel isomorphe à C{z0 , . . . , zn }/J(f ) dont on
peut considérer une base de la forme (z α dz).
Cette base présente un intérêt certain dans la mesure où on vérifie que l’on a les calculs suivants :
Comme f est supposée quasi-homogène, il existe des rationnels wj tels que :
f=
n
X
wj z j
j=0
∂f
∂zj
b 0 (dz). On remarque que : f dz = df ∧ ξ avec
On calcule 00 ∇
ξ=
n
X
ci ∧ · · · ∧ dzn
(−1)i wi zi dz0 ∧ · · · ∧ dz
i=0
On a alors :
b 0 (dz) = dξ − dz
f 00 ∇
!
X
=
wi − 1 dz
i
Et de même pour tout multi-indice α :
b 0 (z α dz) = d(z α ξ) − z α dz
f 00 ∇
= d(z α ) ∧ ξ + z α dξ − z α dz
!
X
=
(αi + 1)wi − 1 z α dz
i
On commence par remarquer que :
Proposition 3.3.4. Pour f quasi-homogène, on a un isomorphisme :
00 H n
0
t 00 H0n
'
Ωn+1
X,0
df ∧ ΩnX,0
57
(3.2)
Preuve. On remarque d’abord que :
00 H n
0
t 00 H0n
=
Ωn+1
X,0
df ∧ dΩnX,0 + f Ωn+1
X,0
De plus, comme f est quasi-homogène, f ∈ J(f ) et donc f Ωn+1
X,0 ⊆ df ∧ ΩX,0 . Par conséquent on
a une application, qui est surjective :
00 H n
0
t 00 H0n
−→
Ωn+1
X,0
df ∧ ΩnX,0
(3.3)
Ωn+1
X,0
' C{z0 , . . . , zn }/J(f ) est un C espace vectoriel de dimension µ,
df ∧ ΩnX,0
et d’après la proposition 2.2.43, 00 H0n est un OD,0 -module libre de rang µ, la flèche (3.3) est un
isomorphisme de C espaces vectoriels.
Comme de plus,
Les (z α dz) forment une C-base de
C-base de 00 H0n /(t 00 H0n ).
Ωn+1
X
, et donc par l’isomorphisme (3.3), on obtient une
df ∧ ΩnX
Proposition 3.3.5. Dans ce cas, la différentielle dX/D : ΩnX/D,0 → Ωn+1
X/D,0 induit un isomorphisme :
0
H0n /H0n → 00 H0n /(t 00 H0n )
Preuve. Comme on l’a signalé, 00 H0n /(t 00 H0n ) est isomorphe à Ωn+1
X/D,0 . On conclut grâce à la proposition 2.2.45.
b 0.
Et maintenant, on va revenir à H0n par l’application ∇
Proposition 3.3.6.
b 0 : H n → 0 H n est bijective 1 .
1. L’application ∇
0
0
n
0
b
2. L’application ∇0 : H0 → H0n induit un isomorphisme entre H0n /(t H0n ) et 0 H0n /H0n . 2
Preuve.
b 0 est une application linéaire entre les C-espaces vectoriels H n et 0 H n . Vérifions
1. L’application ∇
0
0
qu’elle est injective et surjective.
b 0 [ω] = 0. Soit alors un représentant ω ∈ Ωn de cette classe. On a
Soit [ω] ∈ H0n telle que ∇
X,0
alors dω = df ∧ α, avec [α] = 0 ∈ 0 H0n . Par conséquent, α = df ∧ β + dγ. (égalité de n-formes
holomorphes). On en déduit que ω = df ∧ dγ = −d(df ∧ γ) et donc la forme ω + df ∧ γ est
n−1
fermée, et donc exacte au voisinage de 0 ∈ X, il existe donc δ ∈ ΩX,0
tel que ω = dδ − df ∧ γ,
et donc [ω] = 0 ∈ H0n .
Pour la surjectivité, on considère [α] ∈ 0 H0n . Alors df ∧ α est une forme de degré maximal,
donc elle est fermée, et donc localement exacte : il existe ω ∈ ΩnX,0 tel que dω = df ∧ α, et
b 0 [ω] = [α].
donc ∇
1. Ce résultat est aussi valable dans le cas non quasi-homogène...
2. Mais pas celui-là !
58
b est une bijection, donc elle est en particulier surjective. On
2. Le premier point assure que ∇
b 0 (t H n ) ⊆ (H n ), c’est-à-dire qu’elle passe au quotient. En
doit donc simplement prouver que ∇
0
0
effet, comme on a déjà la surjectivité, et comme les C espaces vectoriels H0n /(t H0n ) et 0 H0n /H0n
sont de dimension µ, on obtiendra ainsi le résultat.
b 0 (tω) = ω + t∇
b 0 (ω). Mais comme f est quasi-homogène, tω ∈ H n ,
Soit tω ∈ t H0n . Alors ∇
0
n
n
b 0 (t H ) ⊆ H , ce qui assure que l’application ∇
b 0 passe au quotient
et donc on a bien ∇
0
0
b 0 : H n /(t H n ) → 0 H n /H n .
∇
0
0
0
0
Ce qui achève la preuve de la proposition 3.3.6.
n
On en déduit donc que la base de Ωn+1
X,0 /df ∧ ΩX,0 induit par cet isomorphisme une base du C
n
n
espace vectoriel H0 /(t H0 ).
Proposition 3.3.7. On note ([ωα ]) la base de H0n /(t H0n ) ainsi obtenue. Alors elle induit une base
de H0n .
P
Preuve. Soit ω ∈ H0n . Alors [ω] = α λα [ωα ] pour des λα ∈ C. Par conséquent,
X
ω=
λα ωα + tη
α
avec η ∈ H0n . On note N le sous OD,0 -module de H0n engendré par les ωα . On a alors :
H0n ⊆ N + mH0n
où m = (t) est l’idéal maximal de OD,0 . Le module H0n est de type fini, donc on peut appliquer
le lemme de Nakayama 2.2.15 : H0n ⊆ N , et donc les ωα engendrent H0n .
Montrons à présent
P que la famille des ωα est libre.
Supposons que α λα ωα = 0. Alors comme la famille [ωα ] est libre dans H0n /(t H0n ), on en déduit
que pour tout α, λα (0) = 0, et donc les termes de degré 0 des λα sont nuls. On peut factoriser par t :
t
X
λ0α ωα = 0
α
P
Mais comme
est un OD,0 module sans torsion, on en déduit que α λ0α ωα = 0. Donc les
termes constants de λ0α , qui sont en fait les termes de degré 1 de λα , sont nuls. On montre ainsi
que tous les termes du développement en série entière des λα sont nuls, et donc λα = 0 ∈ OD,0 . Par
conséquent, la famille (ωα ) est une famille libre du OD,0 module H0n .
H0n
Nous avons alors tous les résultats nécessaires pour démontrer le théorème suivant :
Théorème 3.3.8. Soit f un polynôme quasi-homogène.
Alors il existe µ monômes z α tels que (z α dz) soient une base de Ωn+1
X/D .
Pn
i
ci ∧ · · · ∧ dzn . (voir (3.2))
On pose alors ξ = i=0 (−1) wi zi dz0 ∧ · · · ∧ dz
α
Alors la famille ωα := f z ξ constitue une base de H0n qui vérifie pour tout α, il existe λα ∈ C
tel que :
df
d(ωα ) = λα ∧ ωα
f
Et donc la famille ωα / f λα constitue une base horizontale multiforme de H(X/D) et dans
cette base la monodromie est représentée par une matrice diagonale dont la diagonale est formée
des e−2iπλα .
59
P
α
Preuve. On reprend les notations du début du paragraphe. Comme d(z α ξ) = ( P
(αi + 1)w
i ) z dz,
P
la famille (z α ξ) est une C-base de 0 H0n /H0n par l’isomorphisme 3.3.5. On pose λα =
αi wi + wi +1.
On vérifie alors que
b 0 [f z α ξ] = λα z α ξ
∇
Donc les [ωα ] := [f z α ξ] forment une C-base de H0n /(t H0n ) par l’isomorphisme 3.3.6, et par la
proposition 3.3.7, les (ωα ) forment une base du OD,0 -module H0n , qui est isomorphe à H(X/D)0 , et
donc on obtient une base autour de 0 de H(X/D). Par l’isomorphisme 2.2.30, on trouve donc une
base de GM autour de 0.
Les n-formes ωα vérifient bien la relation (3.1), donc on peut appliquer la proposition 3.2.2 qui
donne le résultat, vu qu’elles induisent une base de GM .
Cela nous donne une manière explicite de calculer la matrice de la monodromie. Il suffit pour
cela de déterminer une base du quotient C{z0 , . . . , zn }, de déterminer ξ, et on en déduit les vecteurs
propres et les valeurs propres.
b est imRemarque. Dans le cas des polynômes quasi-homogènes, la régularité de la connexion ∇
α
médiate car elle a pour matrice dans la base (f z ξ) introduite ci-dessus la matrice diagonale dont
les coefficients sont λα /f . La matrice de la connexion a donc un pôle simple en 0, et par le critère
de Fuchs 3.1.2, elle est régulière.
3.3.2
Exemples
On applique le résultat précédent à deux exemples :
P
Proposition 3.3.9. Soit f = ni=0 ziαi , où αi > 2. Dans ce cas, le nombre de Milnor vaut :
µ=
n
Y
(αj − 1)
j=0
et le polynôme caractéristique de la monodromie est donnée par :
∆f (λ) =
αY
0 −1
···
αY
n −1
Pn
λ − e−2iπ(
j=0
kj /αj )
kn =1
k0 =1
Q
β
Preuve. Une base de C{z0 , . . . , zn } est constituée des monômes nj=0 zj ji pour 0 6 βji 6 αj − 2.
Le polynôme f est quasi-homogène pour les poids (1/α0 , . . . , 1/αn ). On a donc :
f=
n
X
zi ∂f
αi ∂zi
i=0
Alors f dz = df ∧ ξ où :
ξ=
n
X
i=0
(−1)i
zi
ci ∧ · · · ∧ dzn
dz0 ∧ · · · ∧ dz
αi
On a alors :
dξ =
n
X
1
αi
i=0
Et de même :
60
!
df
∧ξ
f

d(z βi ξ) = 
n
X
βji + 1
αj
j=0

 df ∧ (z βi ξ)
f
D’après la proposition 3.2.2, les formes z βi ξ induisent des vecteurs propres de la monodromie
−2iπ
pour respectivement les valeurs propres e
Pn
j=0
βji +1
αj
. D’où le résultat.
Exemple 3.3.10. On considère le polynôme f (x, y, z) = x2 z + y 3 + xz 2 . C’est un polynôme homogène de degré 3, donc il est a fortiori quasi-homogène, pour les poids (1/3, 1/3, 1/3). On a :
grad f = (2xz + z 2 , 3y 2 , x2 + 2zx)
On vérifie que grad f = 0 si et seulement si x = y = z = 0. L’origine est donc bien un point
critique isolé.
De plus, C{x, y, z}/J(f ) = h1, x, y, z, xz, xy, yzi, et donc le nombre de Milnor est 7.
On a :
3f (x, y, z) = x
On pose donc :
ξ=
∂f
∂f
∂f
+y
+z
∂x
∂y
∂z
x
y
z
dy ∧ dz − dx ∧ dz + dx ∧ dy
3
3
3
On a :
i+j+k
+ 1 xi y j z k dx ∧ dy ∧ dz
d(x y z ξ) =
3
i+j+k
df
=
+1
∧ (xi y j z k ξ)
3
f
i j k
xi y j z k ξ
est une base horizontale multiforme du
f (i+j+k+3)/3 06i+j+k62
faisceau H(X/D). Dans cette base, la matrice de la monodromie est :


1
0
···
···
···
···
0

.. 
..
0 e−2iπ/3
.
. 


 ..
.. 
..
..
−2iπ/3
.
.
.
e
. 


 ..
.
..
..
.. 
−2iπ/3

.
.
.
e


 ..
.
..
.
..
.. 
2iπ/3
.

.
e


 ..

..
.
.
e2iπ/3
0 
0
···
···
···
···
0
e2iπ/3
Par conséquent, la famille
3.4
Cas non quasi-homogène
Le cas non quasi-homogène est plus difficile que le cas quasi-homogène, et dans ce paragraphe
nous développerons un exemple afin de montrer quels genres de méthodes on peut employer.
61
3.4.1
Quelques résultats
Remarquons que dans le cas général la propriété suivante est vérifiée :
Proposition 3.4.1.
b 0 : H n → 0 H n est bijective.
1. L’application ∇
0
0
00
0
n
00
b
2. L’application ∇0 : H0 ⊆ H0n → 00 H0n est bijective.
Preuve.
1. voir 3.3.
2. On rappelle que l’inclusion de 0 H0n dans 00 H0n est donnée par le produit extérieur à gauche
b 0 (df ∧ α) = dα ∈ 00 H n . L’application 00 ∇
b 0 est donc
par df . On considère α ∈ 0 H0n . Alors 00 ∇
0
surjective, les formes de degré maximal étant exactes.
Pour l’injectivité, supposons que dα = 0. Alors α = dβ, et donc df ∧ α = 0 ∈ 00 H0n , et donc
00 ∇
b 0 est injective. D’où la bijectivité.
En revanche, dans le cas général, il faut remarquer que l’on n’a pas d’isomorphisme entre
n
et Ωn+1
X,0 /df ∧ ΩX,0 .
On ne va pas cette fois-ci déterminer directement la matrice de la monodromie, mais on va
regarder ce qu’on appelle le “résidu” de la connexion de Gauss-Manin. Pour alléger les notations, on
b les applications ∇
b 0, 0∇
b 0 et 00 ∇
b 0 , et on notera H 0 = df ∧ 0 H n et H 00 = 00 H n . On pose
notera aussi ∇
0
0
1
00
b sur V par la relation ∇(η
b × a) = (∇η)
b ⊗ a + η ⊗ da ,
V = H ⊗ C{t} t . On étend
l’application
∇
dt
où η ∈ H 00 et a ∈ C{t} 1t .
00 H n /(t 00 H n )
0
0
b le C{t}-module
Définition 3.4.2. On appelle saturé de H 00 par t∇
f00 = H 00 + t∇H
b 00 + · · · + (t∇)
b r H 00 + · · ·
H
f0 de H 0 .
On définit de même le saturé H
b = t∇
b + id, cela revient au même de considérer les
Remarque. On notera que par la relation ∇t
b Cela permet de vérifier qu’il s’agit bien de C{t}-modules : t(∇t)
b k = (t∇)
b k t donc
saturés par ∇t.
b k H 00 .
b k H 00 ⊆ (t∇)
t(∇t)
On aura besoin du théorème suivant, qui sera admis :
b : V → V est régulière si et seulement si pour tout réseau
Théorème 3.4.3. Une connexion ∇
L de V , le C{t}-module
e = L + (t∇)L
b + (t∇)
b 2L + . . .
L
est un réseau de V .
Proposition 3.4.4.
f00 et H
f0 sont des réseaux de V .
1. Les saturés H
f00 = Pr (t∇)
f0 .
b i H 00 . Idem pour H
2. Il existe r ∈ N tel que H
i=0
62
f00 est un réseau. Par conséquent, il est de
Preuve. La régularité de la connexion assure que H
00
00
b
b r H 00 contienne tous les générateurs
type fini, et donc il existe r tel que H + t∇H + · · · + (t∇)
f00 . Comme de plus on vérifie grâce à une remarque faite
d’un système fini de générateurs de H
00
00
b
b r H 00 ) ⊆ H 00 + t∇H
b 00 + · · · + (t∇)
b k H 00 , on en déduit que
précédemment que t(H + t∇H + · · · + (t∇)
f00 = H 00 + (t∇)H
b 00 + · · · + (t∇)
b r H 00 .
H
f00 ) ⊆ H
f00 .
b H
Alors en particulier, on notera que t∇(
f00 l’endomorphisme de H
f00 /(t H
f00 )
b sur H
Définition 3.4.5. Dans ce cas, on appelle résidu de ∇
b
induit par t∇.
b on peut calculer ∇t,
b les deux étant liés par la relation t∇
b =
Remarque. Au lieu de calculer t∇,
b − id.
∇t
Dans le cas quasi-homogène, on a un isomorphisme entre H 00 /(t H 00 ) et C{z0 , . . . , zn }/J(f ), et
donc avec H 00 /H 0 . Le premier isomorphisme disparaît dans le cas non quasi-homogène du fait que
l’on n’a plus l’appartenance de f à son idéal jacobien. En revanche, nous allons pouvoir en récupérer
l’analogue avec les saturés :
Proposition 3.4.6. Dans le cas général, on a un isomorphisme de C espaces vectoriels :
f00 /H
f0 ' H
f00 /(t H
f00 )
H
b 0 = H 00 d’après la proposition 3.4.1. Alors on vérifie
Preuve. Commençons par rappeler que ∇H
que :
b ∇tH
b 0 ) = ∇(H
b 0 + t∇H
b 0 ) = H 00 + ∇tH
b 00
∇(
f0 ) = H
f00 : l’application
b ∇t)
b k H 0 ) = (∇t)
b k H 0 + . . ., si bien que ∇(
b H
et de façon générale, ∇((
f0 → H
f00 est surjective.
b :H
∇
f0 ) = tH
f00 . On admet que t∇
f0 → H
f0 est une bijection. Cela nous donne alors
b H
b :H
On a donc t∇(
f00 = H
f0 , d’où le résultat.
tH
f00 /H
f0 , on pourra en déduire une C base de H
f00 /(t H
f00 ), et
Ainsi, si on trouve une C base de H
f00 .
par le même procédé que dans la preuve de la proposition 3.3.7, on obtiendra une C{t} base de H
f00 /(t H
f00 ). Alors il existe λ ∈ C tel que
b sur H
Supposons trouvé un vecteur propre η de f ∇
b
f ∇η = λη.
Il s’agit maintenant de voir qu’on peut lui faire correspondre un élément α ∈ H0n qui vérifie la relation (3.1) afin d’appliquer la proposition 3.2.2 pour en déduire un vecteur propre de la monodromie.
f00 , on a t∇η
f00 .
b = λη + tβ avec β ∈ H
Quand on remonte à H
Par conséquent, on n’a pas directement une forme vérifiant la relation (3.2.2), à cause du tβ qui
apparaît. Le résultat dont nous allons avoir besoin se trouve dans l’exposé d’Haefliger dans [Bor87].
b : on suppose que deux valeurs
On va faire une hypothèse supplémentaire sur les valeurs propres de f ∇
propres ne diffèrent pas d’un entier non nul. Cela vient du fait que si deux valeurs propres diffèrent
d’un entier, elles donnent le même nombre quand on passe à l’exponentielle. Plus précisément, nous
avons besoin de l’énoncé suivant (proposition III 1.4.1 dans [Bor87]) :
dU
A(t)
=
U un système différentiel régulier, où B(t) est holomorphe.
dt
t
On suppose de plus que deux valeurs propres de A(0) ne diffèrent pas d’un entier non nul. Alors le
dV
A(0)
système est équivalent au système
=
V et la monodromie est donnée par exp(2iπA(0)).
dt
t
Proposition 3.4.7. Soit
63
On dira qu’un système est équivalent à un autre s’il existe une matrice inversible et holomorphe
dU
A(t)
dV
A(0)
P (t) telle que si U est solution de
=
U alors V = M U est solution de
=
V,
dt
t
dt
t
c’est-à-dire qu’on fait un changement de coordonnées holomorphe.
f00 /(t H
f00 ) → H
f00 /(t H
f00 ), dans une C-base (ω1 , . . . , ωµ ). Cette
b :H
Notons A0 la matrice de t∇
P
f00 . On a alors t∇ω
b j = µ akj (t)ωk où les akj sont holomorphes.
base induit une C{t}-base de H
k=0
b On va chercher à résoudre
Recherchons une base horizontale de ∇.
X
b
t∇
αj (t)ωj = 0
b est une C{t} connexion, on trouve :
En utilisant la règle de dérivation de Leibniz comme ∇
t
X dαj (t)
j
dt
ωj +
X
αj (t)akj (t)ωk
j,k
Et donc en écriture matricielle, en notant α le vecteur colonne formé des αj et A(t) la matrice
des (ajk ), on trouve :
dα
A(t)
=−
α
dt
t
C’est bien un système régulier (pôle simple). De plus, vue la définition de A(t), A(0) = A0 . On
f00 → H
f00 est conjuguée
b :H
peut donc utiliser la proposition 3.4.7 qui assure que la monodromie de ∇
à la matrice exp(−2iπA0 ).
f00 /(t H
f00 ) → H
f00 /(t H
f00 ), on en
b :H
En particulier, on notera que si λ est une valeur propre de t∇
f00 tel que f ∇η
b = λη. Alors f m η ∈ df ∧ H n pour un certain m, on a donc
déduit qu’il existe η ∈ H
0
m
n
f η = df ∧ α pour un α ∈ H0 , et :
b m η)
dα = ∇(f
b
= mf m−1 η + f m ∇η
df
= (m + λ) ∧ α
f
Et on en déduit ainsi par la proposition 3.2.2 que e−2iπλ est une valeur propre de la monodromie
de la connexion de Gauss-Manin ∇ sur GM .
f00 /H
f0 . Nous
b de H
Le problème est donc de trouver les valeurs propres de l’endomorphisme f ∇
n’allons pas le faire ici dans le cas général, on va se contenter de développer un exemple.
3.4.2
Un cas particulier
a
b
On considère un polynôme de la forme f (x, y) = xa + yb + xa−2 y b−2 avec a > 4, b > 4.
Commençons par regarder le nombre de Milnor d’un tel polynôme.
Proposition 3.4.8. Le nombre de Milnor de f est µ = (a − 1)(b − 1).
Preuve. Montrons que si i > a − 1 ou j > b − 1, alors xi y j ∈ J(f ).
On remarque que :
64
fx := ∂x f = xa−1 + (a − 2)xa−3 y b−2
fy := ∂y f = y b−1 + (b − 2)xa−2 y b−3
Supposons que i > a − 1 et j > 1. Alors :
xi y j = xi−(a−1) y j fx − (a − 2)xi−2 y b+j−2
h
i
= xi−(a−1) y j fx − (a − 2) xi−2 y j−1 fy − (b − 2)xa−4 y b−4 (xi y j )
Et donc xi y j ∈ J(f ) car 1 − (a − 2)(b − 2)xa−4 y b−4 est inversible.
Si j = 0, on a xi = xi−(a−1) fx − (a − 2)xi−2 y b−2 . Si i − 2 > a − 1, comme b − 2 > 1, alors par
le calcul précédent, xi−2 y b−2 ∈ J(f ) et donc xi aussi. Il reste le cas où i − 2 6 a − 2. Alors xi et
xi−2 y b−2 sont égaux modulo J(f ). On notera que tout ceci est symétrique en x et en y, si bien qu’on
a le même résultat en intervertissant les rôles de x et y.
En conclusion, C{x, y}/J(f ) est engendré par les monômes de la forme xi y j pour 0 6 i 6 a − 2
et 0 6 j 6 b − 2. Ces monômes forment une C base du quotient C{x, y}/J(f ). Le nombre de Milnor
est donc (a − 1)(b − 1).
Remarque. On remarquera que le nombre de Milnor obtenu dans ce cas est le même que pour le
polynôme quasi-homogène xa + y b .
Regardons un exemple plus précis pour pouvoir faire des calculs explicites.
On considère le polynôme
x4 y 5
f (x, y) =
+
+ x2 y 3
4
5
On vérifie que ce polynôme n’est pas quasi-homogène. On ne peut donc pas appliquer la méthode
du paragraphe précédent.
On calcule les dérivées de f :
fx :=
∂f
= x3 + 2xy 3
∂x
fy :=
∂f
= y 4 + 3x2 y 2
∂y
En particulier, on peut noter que
f=
x
y
1
fx + fy − x2 y 3
4
5
10
(3.4)
Première étape : Nombre de Milnor et ordre du pôle
D’après l’étude du cas général au début de ce paragraphe, le nombre de Milnor est µ = 3×4 = 12.
On notera que :
x
y
1
f 2 = f fx + f fy − f x2 y 3
(3.5)
4
5
10
65
Et aussi :
f x2 y 3 =
x3 y 3
x2 y 4
1
fx +
fy − x4 y 6 ∈ (fx , fy )
4
5
10
(3.6)
En effet :
x4 y 6 = xy 6 fx − 2x2 y 9 = xy 6 fx − 2x2 y 5 fy + 6x4 y 7
(3.7)
Ce qui donne (1 − 6y)x4 y 6 = xy 6 fx − 2x2 y 5 fy , et 1 − 6y est inversible.
En particulier, f 2 ∈ (fx , fy ) mais f ∈
/ (fx , fy ). On a explicitement :
1 − 6y
1 − 6y
1
(1−6y)f =
xf fx +
yf fy −
4
5
10
2
x3 y 3
x2 y 4
1
6
2 5
(1 − 6y)
fx + (1 − 6y)
fy − (xy fx − 2x y fy )
4
5
10
(3.8)
x
1 − 6y x3 y 3 xy 6
(1 − 6y)f = (1 − 6y) f −
+
fx
4
10
4
100
1 − 6y x2 y 4 x2 y 5
y
−
fy
+ (1 − 6y) f −
5
10
5
50
2
(3.9)
L’ordre du pôle est donc 2, ce que l’on savait déjà par le résultat de Briançon et Skoda évoqué
dans la remarque de la proposition 2.2.36, mais dans la suite des calculs, on a besoin de l’expression
de f 2 en fonction de ses dérivées partielles.
Deuxième étape : Trouver une base de C{x, y}/(fx , fy )
La famille B0 = (1, x, x2 , y, y 2 , y 3 , xy, xy 2 , xy 3 , x2 y, x2 y 2 , x2 y 3 ) est une C base de C{x, y}/(fx , fy ).
Néanmoins, vue l’équation (3.4), on peut remplacer x2 y 3 par f . On obtient encore une C base
B1 du quotient.
f00 , H 00 /H 0 , H
f00 /H
f0 afin de ne pas
On pose ω = dx ∧ dy. On notera xj y k ω les classes dans H 00 , H
alourdir les notations.
n
On rappelle que H 00 /H 0 = Ωn+1
X,0 /df ∧ ΩX,0 . Par conséquent, la C base précédente induit une
C base de H 00 /H 0 par multiplication par ω. Or, comme le dernier vecteur est f ω, on en déduit
que la famille ω, xω, x2 ω, yω, y 2 ω, y 3 ω, xyω, xy 2 ω, xy 3 ω, x2 yω, x2 y 2 ω engendre H 00 /H 0 comme C{t}module.
Cette famille engendre donc comme C espace vectoriel H 00 /(tH 00 + H 0 ). Il faut voir qu’elle est
libre. Cela vient du fait qu’elle est libre dans H 00 /H 0 , et les puissances qui apparaissent sont toutes
plus petites que 4 pour x et 5 pour y. Cette famille constitue donc une base de H 00 /(tH 00 + H 0 ). Et
on a déjà signalé que B1 est une C base de H 00 /H 0 . Nous allons utiliser cette base pour faire des
f00 /(t H
f00 ).
calculs qui montreront qu’elle nous fournit une base de H
b
Troisième étape : Calculs de ∇f
nP
o
b )m xj y k ω ; am ∈ C{t}
On pose Cj,k =
am (∇f
On va distinguer quelques cas.
On suppose que j > 1. On a :
j+1 k
j k+1
1 j+2 k+3
xj y k f = x 4 y fx + x y5 fy − 10
x y
66
xj+2 y k+3 = xj−1 y k+3 fx − 2xj y k+6 = xj y k+3 fx − 2xj y k+2 fy + 6xj+2 y k+4
Donc :
(1 − 6y)xj+2 y k+3 = xj−1 y k+3 fx − 2xj y k+2 fy
(3.10)
D’où finalement :
j k+1
x y
xj+1 y k
3xj+1 y k+1 xj−1 y k+3
j k+2
fx +
fy
(1 − 6y)x y f =
−
−
−x y
4
2
10
5
j k
(3.11)
Cela nous permet de faire les calculs. Pour cela, nous allons utiliser la formule de Brieskorn :
∂Ay
∂Ax
b
Lemme 3.4.9 (Formule de Brieskorn). ∇((A
+
ω
x fx + Ay fy )ω) =
∂x
∂y
Preuve. C’est immédiat car (Ax fx + Ay fy )ω = df ∧ (Ax dy − Ay dx).
b xj y k ω = ∇f
b ((1 − 6y)xj y k ω) + ∇f
b (6xj y k+1 ω), et ∇f
b ((6xj y k+1 )ω) ∈ Cj,k+1 .
On notera que ∇f
On a donc en faisant les calculs :
b xyω
b xω = 7 xω − 5xyω + 6∇f
∇f
10
3
y
19
13
2
2
b x ω = x ω − ω − x2 yω + 6∇f
b x2 yω
∇f
20
10
2
b xyω = 9 xyω − 6xy 2 ω + 6∇f
b xy 2 ω
∇f
10
4
b x2 yω = 23 x2 yω − y ω − 15 x2 y 2 ω + 6∇f
b x2 y 2 ω
∇f
20
10
2
b xy 3 ω
b xy 2 ω = 11 xy 2 ω − 7xy 3 ω + 6∇f
∇f
10
b xy 3 ω = 13 xy 3 ω − 8xy 4 ω + 6∇f
b xy 4 ω
∇f
10
5
b x2 y 2 ω = 27 x2 y 2 ω − y ω − 17 x2 y 3 ω + 6∇f
b x2 y 3 ω
∇f
20
10
2
On trouve de même des formules pour k > 1.
k
k+1
xy
6 k+1
y
6y k+2 x2 y k−1
k
(1 − 6y)y f =
− xy
fx +
−
−
fy
(3.12)
4
5
5
5
10
D’où, avec la formule de Brieskorn :
b yω = 13 yω − 24 y 2 ω + 6∇f
b y2ω
∇f
20
5
2
b y3ω
b y 2 ω = 17 y 2 ω − x ω − 6y 3 ω + 6∇f
∇f
20
10
2
b y 3 ω = 21 y 3 ω − x y ω − 36 y 4 ω + 6∇f
b y4ω
∇f
20
5
5
b )2 ω.
Il nous reste à présent à calculer (∇f
b )2 ω = ∇(
b ∇f
b 2 ω) − ∇f
b ω.
On commence par remarquer que (∇f
2
b
b 2
On va calculer
∇f ω. 2On va pour cela utiliser l’expression (3.9). On notera encore que ∇f ω =
2
b
b
∇ (1 − 6y)f ω + 6∇(yf ω)
On a donc :
b 2ω =
∇f
29
11 2 3
39
19
3xy
6y 2
y6
b 2 yω) (3.13)
f−
x y ω − yf ω + x2 y 4 ω −
fx ω −
fy ω +
ω + 6∇(f
20
200
10
20
2
5
100
b −1 C0,1 .
On va montrer que les termes hors de la parenthèse sont dans ∇
b yω ∈ C0,1
b ∇(f
b 2 yω)) = (∇f
b )2 yω + ∇f
∇(
Et pour les termes restants, on remarque que :
y2
x2 y 4
x2 y 4
xy
y2
yf = xy
4 fx + 5 fy − 10 donc 10 = 4 + 5 − yf .
b −1 C0,1 et donc x2 y 4 aussi. Comme de plus
En particulier, on vérifie que f yω, xyfx ω, y 2 fy ∈ ∇
y6
y2
3xy
3y 2
3y
1
2
2
4
= 100 fy − 40 fx − 50 fy + 10 f , on en déduit que ce terme est aussi dans
100 = 100 y fy − 3x y
−1
b C0,1 .
∇
67
Il reste donc à étudier les termes dans la parenthèse.
On remarque que :
y
1 2 3
x
10 x y = 4 fx + 5 fy − f
Ce qui nous donne finalement :
b 2ω =
∇f
131
11
11
4
13
b 2 yω
2f − xfx −
yfy ω −
yf ω + xyfx + y 2 fy + 6∇f
80
100
10
5
20
(3.14)
Etdonc : b 2 ω = 2∇f
b ω − 99 ω − 71 ∇f
b yω + 21 yω + 6(∇f
b )2 yω
b ∇f
∇
400
10
10
Et donc :
b yω + 21 yω + 6(∇f
b )2 ω = ∇f
b ω − 99 ω − 131 ∇f
b )2 yω + 6∇f
b yω
(∇f
400
10
10
Quatrième étape : Matrice du résidu
On commence par vérifier que la famille
b ω, xω, x2 ω, yω, y 2 ω, y 3 ω, xyω, x2 yω, xy 2 ω, x2 y 2 ω, xy 3 ω
B = ω, ∇f
est une C base de H 00 /(t H 00 ).
f00 = (∇f
b )H 00 + H 00 .
Grâce aux calculs précédents, on peut montrer que H
b )2 H 00 ⊆ (∇f
b )H 00 + H 00 . On notera que le dernier calcul
En effet, il suffit de montrer que (∇f
2
00
00
b
b
assure que (∇f ) ω ∈ (∇f )H + H .
Prenons donc η ∈ H 00 . Alors η = hω avec toujours ω = dx ∧ dy. Si h est sans terme constant on
b hω ∈ H 00 , et (∇f
b )2 hω ∈ ∇f
b H 00 . Si h est constante, le calcul précédent
a alors hf ∈ J(f ) et donc ∇f
f00 = (∇f
b )2 ω ∈ H 00 + ∇f
b H 00 . Ainsi a-t-on donc bien H
b )H 00 + H 00 .
assure que (∇f
f0 = f H 00 + H 0 .
Ensuite, on a H
f0 est claire car f H
f00 = H
f0 donc f H 00 ⊆ H
f0 .
L’inclusion f H 00 + H 0 ⊆ H
f00 = H
f0 , donc H
f0 = f H 00 + f (∇f
b H 00 ⊆ f H 00 + H 0 . Si
b )H 00 . Il faut donc voir que f ∇f
On a f H
00
b hω ∈ H 00 donc
hω ∈ H , et si h est sans terme constant, on a directement f h ∈ J(f ) donc ∇f
00
b hω ∈ f H .
f ∇f
b ω = ∇f
b 2 ω − f ω. Comme f ω ∈ f H 00 , et qu’on vérifie par l’expresSinon, on remarque que f ∇f
2
b
b yω + f yω, que ∇f
b 2 ω ∈ f H 00 + H 0 .
sion (3.14), étant donné que ∇f yω = f ∇f
f0 = f H 00 + H 0 . Or, on avait déjà signalé que H
f00 /(t H
f00 ) = H
f00 /H
f0 . Ce
Finalement, on obtient H
quotient est un C espace vectoriel de rang µ = 12.
f0 pour des raisons de degré, et
On remarque qu’aucun des éléments de la famille B n’est dans H
00
00
f
f
ils sont indépendants et forment une C-base de H /(t H ).
f00 /(t H
f00 ). Les points
b dans H
Grâce à l’étape précédente, on peut ainsi calculer la matrice de ∇f
indiquent des coefficients non nuls, mais qui n’interviennent pas dans le calcul du polynôme caractéristique.
68
ω
0

1



















b ω
∇f
99
− 400
1
xω
y2ω
yω
ω
b ω
∇f
7
xω
10
13
yω
.
20
17
2
y ω
.
.
20
x2 ω
.
.
.
y3ω
.
.
.
xyω
.
xy 2 ω
.
xy 3 ω
.
.
x2 yω
.
.
x2 y 2 ω
.
.
.
Alors le polynôme caractéristique de
(s −
x2 ω
y3ω
xyω
xy 2 ω
xy 3 ω
x2 yω
x2 y 2 ω

19
20
.
21
20
9
10
.
.
11
10
.
.
.
.
.
cette matrice est
13
10
23
20
.




















27
20
9
11
14
13
17
19
21
18
26
23
27
)(s − )(s − )(s − )(s − )(s − )(s − )(s − )(s − )(s − )(s − )
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
En particulier, il est scindé à racines simples donc la matrice est diagonalisable.
On retrouve presque les mêmes valeurs propres que pour le polynôme quasi-homogène correspondant, qui sont :
0
1
2
0
9/20
14/20
19/20
1
13/20
18/20
23/20
2
17/20
22/20
27/20
3
21/20
26/20
31/20
31
La seule valeur qui diffère est la dernière, 20
est remplacée par 11
20 .
b
b
Le résidu de la connexion est f ∇ = ∇f − id, on vérifie que ses valeurs propres sont les valeurs
propres ci-dessus diminuées de 1, il est donc aussi diagonalisable.
Les valeurs propres de la monodromie étant données par e−2iπu où u décrit les racines du polynôme caractéristique, on en déduit que la monodromie de la connexion de Gauss-Manin de ce polynôme possède les mêmes valeurs propres que la monodromie du polynôme quasi-homogène x4 + y 5 ,
et qu’elle est en particulier diagonalisable.
Dans les cas que nous avons étudié ici, la matrice de la monodromie était diagonalisable. Ce n’est
pas toujours le cas : par exemple, pour le polynôme x5 + y 5 + x2 y 2 , J.Scherk dans [Sch78] calcule la
b par un procédé tout à fait analogue à celui développé ci-dessus, et il trouve
matrice du résidu f ∇
que la matrice n’est pas diagonalisable, elle possède un bloc de Jordan d’ordre 2. Il existe en fait
un théorème connu sous le nom de théorème de monodromie qui assure que la taille des blocs de
Jordan de la matrice de la monodromie est majorée par la dimension n + 1.
3.5
Une ouverture : le lien avec les polynômes de Bernstein
On ne fera ici que donner une idée générale du lien entre les valeurs propres de la monodromie
et les racines du polynôme de Bernstein.
3.5.1
Algèbre de Weyl
Pour plus de détails concernant l’algèbre de Weyl, on peut par exemple consulter [Cou95].
On considère l’anneau des polynômes C[z1 , . . . , zn ].
69
L’algèbre de Weyl est An = C[z1 , . . . , zn ]h∂1 , . . . , ∂n i où
[∂i , xj ] = δij
(3.15)
Un élément de An est appelé opérateur différentiel, et il est possible de montrer qu’il s’écrit de
façon unique sous la forme :
X
aαβ xα ∂ β
(3.16)
|β|6d
On peut munir cet anneau d’une filtration induite par le degré en ∂, c’est-à-dire que :
C = F0 ⊂ F1 ⊂ ··· ⊂ Fd ⊂ ...
où F d = {P ∈ An ; ord∂ (P ) 6 d}, en notant ord∂ le degré de P en ∂. (Bien défini par l’écriture
unique (3.16))
L
On a alors l’anneau filtré Gr(An ) = k>0 F k /F k−1 .
Il s’agit d’un anneau commutatif, contrairement à An ! Il est isomorphe à C[z1 , . . . , zn , ∂1 , . . . , ∂n ].
En particulier, Grk (An ) est constitué des termes homogènes de degré k en ∂. On note σk (P ) la classe
d’un élément P ∈ F k dans F k /F k−1 . Cette classe est appelée symbole de P . On notera que si P
est de degré strictement plus petit que k en ∂, alors son symbole d’ordre k est nul.
La commutativité vient du fait que si ∂i zi apparaît, on peut le remplacer par zi ∂i + 1 par la
relation (3.15), et donc le terme en facteur de 1 sera dans un des termes précédents de la filtration.
La multiplication
P sur le gradué est donnée par, si on se donne P et Q deux opérateurs différentiels,
σk (P Q) = σk ( kj=0 σj (P )σk−j (Q)), ce qui correspond bien à la multiplication de polynômes, dans
la mesure où σk est linéaire, et σk (σj (P )σk−j (Q)) = σk (σk−j (P )σj (Q)). Cela sert à montrer que
l’anneau An est noethérien.
Exemple 3.5.1.
σ2 (zi2 ∂i zi ∂i ) = σ2 (zi2 (zi ∂i )∂i + zi2 ∂i ) = zi3 ∂i2
On peut aussi considérer le même type d’objets en remplaçant l’anneau C[z1 , . . . , zn ] des polynômes par l’anneau des séries convergentes O = C{z1 , . . . , zn }, et définir
P de même un anneau d’opérateurs différentiels D = Oh∂1 , . . . , ∂n i. Un élément de D s’écrit alors |α|6N Pα ∂ α avec Pα ∈ O.
3.5.2
Polynôme de Bernstein
Considérons à nouveau notre germe f ∈ C{z0 , . . . , zn } = O. Alors on considère O[f −1 ] l’ensemble
des fonctions rationnelles de la forme g/f r où g ∈ O. On vérifie que cet ensemble est stable par la
multiplication par un élément de O et par la dérivation par rapport aux zj , étant donné que cela
fait apparaître au dénominateur f 2r . Par conséquent, O[f −1 ] est un D-module. On considère deux
indéterminées supplémentaires s et T , et le O[f −1 , s]-module libre de base P
T . On va définir une
k
action de D[s] sur O[f −1 , s]T . Un élément de D[s] peut s’écrire sous la forme N
k=0 Pk s où Pk ∈ D
est un opérateur différentiel à coefficients dans C{z0 , . . . , zn } linéaire en les ∂ β . Les actions par la
multiplication par zj ou s est l’action évidente, et on pose ∂z∂ j s = 0 et si g ∈ O[f −1 , s]
∂
∂g
∂f
(gT ) =
T + sgf −1
T
∂zj
∂zj
∂zj
On définit ainsi une action de D[s] sur O[f −1 , s]T . Dans la suite, on notera f s à la place de
T . Il s’agit d’une écriture formelle, et on vérifie que lorsque s est entier, on retrouve les règles de
dérivation habituelles. On notera aussi f s+k à la place de f k f s pour k ∈ Z.
On a alors le théorème suivant, que nous admettrons :
70
Théorème 3.5.2. Il existe un polynôme B ∈ C[s] non nul et un opérateur différentiel P ∈ D[s]
tels que :
P f s+1 = Bf s
(3.17)
On a alors :
Proposition 3.5.3. L’ensemble des polynômes B ∈ C[s] tel qu’il existe un opérateur P ∈ D[s] est
un idéal de C[s]. Il est donc en particulier principal.
Cette proposition permet de définir le polynôme de Bernstein de f :
Définition 3.5.4. Le polynôme de Bernstein de f est le générateur unitaire de cet idéal. On
l’appelle aussi b-fonction, et on la note bf (s) ou juste b(s) s’il n’y a pas d’ambiguïté.
En particulier, pour s = −1, on a la relation P (−1) = B(−1)f −1 et donc B(−1) = 0.
Comme −1 est toujours une racine du polynôme de Bernstein, on considère souvent eb défini par
b = (s + 1)eb à la place de b.
Ce sont les racines du polynôme eb qui vont nous intéresser.
En général, le calcul du polynôme de Bernstein est compliqué, néanmoins on peut le faire faci2
2
lement pour la fonction f suivante : f = zP
1 + . . . + zn .
n
2
En effet, considérons l’opérateur P = j=1 ∂j . Alors on vérifie que :
P.f s+1 =
X
=
X
∂j2 f s+1
4(s + 1)szj2 f s−1 + 2(s + 1)f s
= (s + 1)(4s + 2n)f s
Le polynôme de Bernstein de cette fonction f est donc (s + 1)(s + n/2).
On notera que f est un polynôme homogène, on peut donc appliquer les résultats de la partie 3.3.
b dz = (n/2)dz. La racine n/2 du polynôme de
Le nombre de Milnor est 1, et on vérifie que ∇f
b
Bernstein est donc aussi une valeur propre de −∇f , et e−iπn est une valeur propre de la monodromie.
3.5.3
Lien avec la connexion de Gauss-Manin
Dans le paragraphe précédent, on a donné un exemple montrant un lien entre la b fonction et la
monodromie. Dans [Mal75], B.Malgrange montre que ce lien est toujours valable, plus précisément,
il montre le théorème suivant (on reprend les notations de la partie 3.4) :
Théorème 3.5.5. Pour f avec une singularité isolée à l’origine, la fonction eb est égale au
f00 /(t H
f00 ).
b de H
polynôme minimal de l’endomorphisme −∇f
Corollaire 3.5.6. Si on note rj les racines de eb, les valeurs propres de la monodromie de la
connexion de Gauss-Manin ∇ sont les e2iπrj .
71
On déduit alors directement de ce résultat par l’intermédiaire des calculs de résidus que nous
avons déjà effectués quelques polynômes de Bernstein :
f00 est
Dans le cas des polynômes quasi-homogènes, on peut commencer par noter que le saturé H
00
00
00
00
b
b
en fait égal à H : étant donné que f ∈ J(f ), ∇f H ⊆ H . On va donc regarder ∇f sur H /(t H 00 ).
b est
En fait, on a montré directement que l’on pouvait trouver une base de H 00 /(t H 00 ) telle que ∇f
α
diagonale, en considérant simplement les termes de la forme z dz. Le polynôme caractéristique (et
f00 /(t H 00 ) est donc dans ce cas facile à trouver, et le théorème nous assure
b sur H
minimal) de ∇f
P
que pour un polynôme quasi-homogène f = aα z α avec pour poids (wj ), le polynôme de Bernstein
est :
µ
n
Y
X
bf (s) = (s + 1) (s +
(αij + 1)ωj )
i=1
j=0
où les multi-indices (αi0 , . . . , αin ) sont ceux permettant de définir une C base de C{z0 , . . . , zn }/J(f ).
Le polynôme de Bernstein est alors immédiat à calculer.
b
Dans l’exemple non quasi-homogène que nous avons étudié, le polynôme caractéristique de ∇f
donne le polynôme de Bernstein :
bf (s) = (s + 1)(s +
11
)
20
72
Y
j∈{1,2,3}
k∈{1,2,3,4}
(i,j)6=(3,4)
(s +
j
k
+ )
4 5
Annexe A
Quelques propriétés des faisceaux
L’objectif de cette annexe est de donner les résultats concernant les faisceaux qui sont utilisés
dans ce mémoire, afin d’en faciliter la lecture. Il ne s’agit donc bien sûr pas de développer toute la
théorie, et les résultats seront énoncés sans preuve. Pour plus de détails concernant les faisceaux, on
pourra consulter [God73] ou [Voi02] par exemple.
A.1
Définitions
Afin de fixer les idées, rappelons les définitions de faisceau et de préfaisceau :
Définition A.1.1. Soit X un espace topologique.
Un préfaisceau F d’ensembles est la donnée pour chaque ouvert U de X d’un ensemble F (U )
et pour deux ouverts V ⊂ U de X d’une application ρU V dite “de restriction” : ρU V : F (U ) → F (V )
telles que si W ⊂ V ⊂ U on ait : ρU W = ρV W ◦ ρU V et ρU U = idF (U ) .
Définition A.1.2. Un préfaisceau F est un faisceau s’il vérifie de plus les conditions suivantes :
• Soit U un ouvert de X, et (Ui )i∈I un recouvrement ouvert de U . Si deux éléments s, s0 de F (U )
vérifient pour tout i ∈ I, s|Ui = s0 |Ui alors s = s0 .
• Soit U un ouvert de X recouvert par des ouverts (Ui )i∈I , et soit (si )i∈I telle que pour tout
i ∈ I, si ∈ F (Ui ). Alors si pour tout i, j ∈ I on a si |Ui ∩Uj = sj |Ui ∩Uj alors il existe s ∈ F (U )
tel que pour tout i ∈ I, s|Ui = si .
Définition A.1.3. On appellera fibre d’un (pré)faisceau F en x (“stalk” en anglais) la limite inductive des F (U ) pour x ∈ U . Cet ensemble est donné par :
Fx = {[U, s] ; x ∈ U, U ouvert , s ∈ F (U )}/ ∼
où [U, s] ∼ [V, σ] si et seulement si il exite un ouvert W ⊂ U ∩ V contenant x tel que s|W = σ|W .
Définition A.1.4. Un morphisme de (pré)faisceaux ϕ : F → G est la donnée pour tout ouvert U de X d’une application ϕU : F (U ) → G (U ) telle que le diagramme suivant commute pour
V ⊂U :
F (U )
ϕU
ρU V
F (V )
G (U )
ρU V
ϕV
73
G (V )
Un tel morphisme de faisceaux induit une application ϕx : Fx → Gx .
Définissons à présent le faisceau associé à un préfaisceau :
Définition A.1.5. Soit F un préfaisceau. Pour tout x ∈FX on pose Fx la limite inductive des
f=
f
F (U ) pour U ouvert de X contenant x. On note F
x∈X Fx . On munit F de la topologie
engendré par les ensembles de la forme {[U, s]y ; y ∈ U, s ∈ F (U )} où U est un ouvert de X et
[U, s]y le germe de s en y, qui est donc un élément de Fy .
f le faisceau associé au préfaisceau F .
On appelle F
f est bien un faisceau sur X.
On peut vérifier que F
f lui est isomorphe.
En particulier, si le préfaisceau F était déjà un faisceau, le faisceau F
On peut aussi définir des (pré)faisceaux de groupes, d’anneaux, de modules... On demandera
alors aux applications de restriction de respecter la structure.
En particulier, si on se donne un faisceau d’anneaux A , un faisceau de A -modules est un
faisceau F tel que pour tout ouvert U , F (U ) est un A (U )-module et de plus si λ ∈ A (U ) et
s ∈ F (U ), pour V ⊂ U , on a : (λ.s)|V = λ|V .s|V .
Le cas qui va nous intéresser en particulier sera celui des faisceaux de OX -modules ou de OD modules.
Nous aurons besoin aussi de quelques opérations sur les faisceaux :
Définition A.1.6. Soit ϕ : F → G un morphisme de faisceaux. Alors on définit les faisceaux
noyau, image et conoyau par :
1. Le noyau de ϕ est le faisceau dont les sections sont U 7→ KerϕU .
2. L’image de ϕ est le faisceau associé au préfaisceau défini par U 7→ ImϕU .
3. Le conoyau de ϕ est le faisceau associé au préfaisceau défini par U 7→ CokerϕU .
Proposition A.1.7. Les fibres de ces faisceaux en un point x ∈ X sont respectivement Kerϕx ,
Imϕx , et Cokerϕx .
Définition A.1.8. Soit G ⊂ F .Le faisceau quotient est le faisceau associé au préfaisceau dont les
sections sont U 7→ F (U )/G (U ). On vérifie que la fibre en un point x ∈ X est (F /G )x = Fx /Gx .
Définition A.1.9. Une suite de faisceaux
F →G →H
est dite exacte si pour tout x ∈ X, la suite de modules
Fx → Gx → Hx
est exacte.
A.2
Faisceaux cohérents et faisceaux localement libres
Pour davantage de détails concernant les faisceaux cohérents, on pourra consulter [Ser55].
Définition A.2.1. Soit A un faisceau d’anneaux et F un faisceau de A -modules. On dit que F
est cohérent si :
1. F est de type fini, c’est-à-dire qu’il est localement engendré sur A par un nombre fini de ses
sections.
74
2. Si (s1 , . . . , sp ) sont des sections de F au-dessus d’un ouvert U , le faisceau des relations entre
les si est un faisceau de type fini sur U .
Proposition A.2.2. Un sous-faisceau de type fini d’un faisceau cohérent est cohérent.
Proposition A.2.3. Si F est un faisceau de A -modules cohérent, il est localement isomorphe au
conoyau d’une application ϕ : A p → A q .
Proposition A.2.4. Soit une suite exacte courte de faisceaux :
0→F →G →H →0
Si deux des trois faisceaux sont cohérents, alors le troisième l’est aussi.
Preuve. voir [Ser55]
Proposition A.2.5. De même, su on a une suite exacte longue de faisceaux dans laquelle deux
faisceaux sur trois sont cohérents, alors les autres faisceaux sont aussi cohérents.
Exemple A.2.6. Le faisceau ΩnX sur une variété analytique X est un faisceau de OX -modules
cohérents.
Définition A.2.7. Un faisceau F de OX -modules est dit localement libre de rang r si tout point
de X possède un voisinage ouvert tel que la restriction de F à ce voisinage soit isomorphe à
OD ⊕ · · · ⊕ OD .
{z
}
|
r
A.3
Cohomologie des faisceaux
Cette section récapitule un certain nombre de résultats issus de [Voi02] et [God73]. On se place
dans la catégorie des faisceaux de groupes abéliens.
Complexe et cohomologie
Définition A.3.1. Un complexe de faisceaux est une suite (F i )i∈Z de faisceaux définis sur un même
espace munie d’applications di : F i → F i+1 telles que di+1 ◦ di = 0.
Définition A.3.2. On appellera k-ième faisceau de cohomologie du complexe (F • ) le faisceau
quotient
Ker(dk )
H k (F • ) =
Im(dk−1 )
Définition A.3.3. On appellera résolution d’un faisceau F toute suite exacte de faisceaux de la
forme :
0 −→ F −→ G0 −→ G1 −→ . . . −→ Gk −→ · · ·
En particulier :
Lemme A.3.4 (Lemme de Poincaré holomorphe). Si X est une variété complexe de dimension n la suite suivante est une résolution du faisceau constant C sur X :
0 → C → Ω0X → Ω1X → · · · → ΩnX → 0
75
Foncteurs dérivés
Définition A.3.5. Un faisceau I est dit injectif si pour tout morphisme injectif i : F → G et tout
morphisme φ : F → I, il existe un morphisme ψ : G → I tel que le diagramme suivant commute :
i
F
G
ψ
φ
I
On admettra que la catégorie des faisceaux de groupes abéliens possède assez d’injectifs, et donc
que tout faisceau possède une résolution par des faisceaux injectifs.
Définition A.3.6. Soit F un faisceau, et T un foncteur exact à gauche, et (I • ) une résolution
injective de F . On définira le k-ième foncteur dérivé par Rk T (F ) = H k (T (I • )).
On admettra la proposition suivante :
Proposition A.3.7.
1. Les foncteurs dérivés sont bien définis à isomorphisme près.
2. R0 T (F ) = T (F )
3. Pour toute suite exacte courte
0 → F 0 → F → F 00 → 0
on a une suite exacte longue :
0 → T (F 0 ) → T (F ) → T (F 00 ) → R1 T (F 0 ) → R1 T (F ) → R1 T (F 00 ) → · · ·
Proposition A.3.8. Si on a un morphisme de faisceaux φ : F → G on en déduit un morphisme
canonique Rk T (φ) : Rk T (F ) → Rk T (G ).
Définition A.3.9. Un faisceau F sera dit acyclique pour le foncteur T si pour tout q > 0,
Rq T (F ) = 0.
Proposition A.3.10. Soit F un faisceau. Si G • est une résolution acyclique de F pour le foncteur T alors pour tout k,
Rk T (F ) = H k (T (G • ))
Les foncteurs utilisés dans ce mémoire sont les foncteurs “section globale Γ”, image directe f∗ et
image directe à support propre f! . On vérifie que ce sont des foncteurs exacts à gauche.
Définition A.3.11. Le k-ième groupe de cohomologie d’un faisceau F est par définition :
H k (X, F ) = Rk Γ(F )
76
Faisceaux flasques
Définition A.3.12. Un faisceau F est dit flasque si les flèches de restriction sont surjectives.
En particulier, on notera que la restriction à un ouvert d’un faisceau flasque est flasque.
Proposition A.3.13. Un faisceau flasque est acyclique pour le foncteur Γ, on peut donc calculer la
cohomologie d’un faisceau à partir d’une résolution flasque par la proposition A.3.10.
Une façon de construire une résolution flasque d’un faisceau est proposée dans [God73].
Donnons un résultat concernant le foncteur image directe (voir [Har77], proposition III 8.1)
Proposition A.3.14. Soit f : X → Y une application continue entre espaces topologiques. Alors
pour tout faisceau F et tout k > 0, le k-ième faisceau dérivé de F est le faisceau associé au
préfaisceau dont les sections sont pour V ouvert de Y :
V 7→ H k (f −1 (V ), F |f −1 (V ) )
Et alors on a le corollaire suivant :
Corollaire A.3.15. Si F est un faisceau flasque sur X, alors pour tout k > 0, Rk f∗ (F ) = 0.
Propriétés
Proposition A.3.16. Soient X une variété (paracompacte) et A ⊆ X un sous-espace fermé. On
considère un faisceau F sur X. Alors pour tout p ∈ N :
lim H p (U, F ) ' H p (A, F )
−−−→
U ⊃A
Proposition A.3.17. On considère un complexe de faisceaux F • au-dessus de X. Alors pour x ∈ X
on a :
H p (Fx• ) = (H p (F • ))x
Proposition A.3.18. Soit M une variété lisse de dimension n. Alors la suite suivante est une
résolution du faisceau constant CM sur M :
0 → CM → A0 → A1 → · · · → An → 0
où Ap désigne le faisceau des p-formes différentielles à valeurs complexes.
Théorème A.3.19. Soit M une variété lisse. Alors :
H p (M, CM ) =
{α ∈ Γ(M, ApM ) ; dα = 0}
d Γ(M, Ap−1
)
M
77
Hypercohomologie
Nous allons à présent donner quelques définitions et résultats concernant l’hypercohomologie et
les suites spectrales.
On part d’un complexe de faisceaux (F p )p>0 . On admettra la proposition suivante :
Proposition A.3.20. Pour un tel complexe de faisceaux F • , il existe un complexe double d’objets
injectifs I •,• tel que l’on ait le double tableau suivant :
0
0
0
0
F0
F1
F2
···
I 1,0
I 2,0
···
I 0,1
I 1,1
I 2,1
..
.
..
.
..
.
I 0,0
d1
d2
où les colonnes sont exactes. Alors le complexe simple associé est I r = ⊕p+q=r I p,q muni de la
différentielle dI = d1 + (−1)p d2 . Alors on a un quasi-isomorphisme φ• de complexes entre F • et I • ,
et chaque φr est injectif.
Définition A.3.21. On définira alors l’hypercohomologie de F • comme étant :
Hp (X, F • ) = H p (Γ(X, I • ))
Définition A.3.22. De façon plus générale, si T est un foncteur exact à gauche, on définit :
Rp T (F • ) = H p (T (I • ))
Proposition A.3.23. Si on considère le complexe (Σ) : 0 → F → 0, on a
Rp T (Σ) = Rp T (F )
Suites spectrales
Dans la partie sur la cohérence du faisceaux H(X/D), on utilise des résultats sur les suites spectrales. Nous n’allons bien sûr pas détailler toute la théorie des suites spectrales ici, mais seulement
donner quelques indications aidant la lecture du paragraphe 2.2.2.
Définition A.3.24. On appelle suite spectrale une suite (Er , dr )r>0 de groupes bigradués :
M
Er =
Erp,q
p,q>0
munie de différentielles dr : Erp,q → Erp+r,q−r+1 telles que dr ◦ dr = 0 et
p,q
Er+1
=
Kerdr : Erp,q → Erp+r,q−r+1
Imdr : Erp−r,q+r−1
Soit (A• , F ) un complexe filtré, c’est-à-dire muni d’une filtration F p Ak ⊆ F p−1 Ak ⊆ · · · ⊆
F 0 Ak = Ak telle que d(F p Ak ) ⊆ F p Ak+1 . Cette filtration induit une filtration sur les H k (A• ) 1 .
1. donnée par F p H i (A• ) = Im(H i (F p A• ) → H i (A• ))
78
Le gradué de H i (A• ) est donné par Grp H i (A• ) = F p H i (A• )/F p+1 H i (A• ).
On a alors le théorème suivant :
Théorème A.3.25. On suppose que pour tout k, il existe ` tel que F ` Ak = 0 2 .
Alors il existe une suite spectrale vérifiant E0pq = F p Ap+q /F p+1 Ap+q et pour p + q fixé, il
existe r assez grand tel que Erp,q = Grp H p+q (A• ). On notera :
Erpq =⇒ H p+q (A• )
Définition A.3.26. On dit que la suite spectrale Erpq dégénère s’il existe r > 0 tel que pour tous
p, q > 0 et s > r on a Erpq = Espq . C’est en particulier le cas si à un certain rang, les termes non
nuls sont compris dans une “bande”.
On peut aussi définir des suites spectrales d’hypercohomologie, dont l’aboutissement sera les
Rp T (F • ). Ce seront ces suites qui nous intéresse dans le paragraphe concernant la cohérence.
On considère un foncteur T exact à gauche.
De même que précédemment, on se donne un complexe F • de faisceaux.
Théorème A.3.27.
1. Il existe une suite spectrale, appelée seconde suite spectrale,
00
p,q
E r =⇒ Rp+q T (F • )
canonique à partir du terme 00 E p,q
2 qui satisfait :
00
pq
E 2 = Rp T (H q (F • ))
2. Il existe une suite spectrale, appelée première suite spectrale,
0
p,q
E r =⇒ Rp+q T (F • )
canonique à partir du terme 0 E p,q
2 qui satisfait :
0
pq
E 2 = H p (Rq T (F • ))
Dans les cas qui nous intéressent, assez souvent, les termes E2pq sont tous nuls sauf pour q = 0. Il
est clair qu’alors la suite spectrale en question dégénère au rang 2, et donc finalement, Grp Rk T (F • ) =
0 si k 6= p et E2k0 sinon. En particulier, cela signifie que pour ` 6 k, F ` Rk T (F • ) = Grk Rk T (F • ) =
F k Rk T (F • ). Et donc :
Rk T (F • ) = E2k0
A.4
Variétés de Stein
Concernant les variétés de Stein, la seule propriété qui nous intéresse est le fait que les cohomologies de degré strictement positif des faisceaux analytiques cohérents sont nulles. Pour une étude
plus précise des variétés de Stein, on pourra consulter [Hör90].
79
Définition A.4.1. Une variété analytique X sera dite de Stein si :
• X est holomorphiquement convexe, c’est-à-dire que pour tout compact K ⊂ X,
b = {z ∈ X ; |f (z)| 6 sup |f |, ∀f ∈ O(X)}
K
K
est compact.
• Si z1 6= z2 alors il existe f ∈ O(X) telle que f (z1 ) 6= f (z2 ).
• Pour tout z ∈ X, il existe n fonctions f1 , . . . , fn ∈ O(X) qui forment un système de coordonnées locales en z.
Proposition A.4.2. Toute sous-variété analytique fermée d’une variété de Stein est de Stein.
Proposition A.4.3. Les variétés convexes sont de Stein, donc en particulier les polydisques sont
de Stein.
Proposition A.4.4. Soit f : X → Y une application holomorphe. Si X est de Stein, alors pour
U ⊆ Y un ouvert de Stein de Y , f −1 (U ) ∩ X est de Stein.
Le théorème qui va nous intéresser concernant les variétés de Stein est le suivant :
Théorème A.4.5. Soient X une variété de Stein et F un faisceau de OX -modules cohérent.
Alors pour tout p > 0,
H p (X, F ) = 0
Un autre théorème nous sera utile :
Théorème A.4.6 (Théorème de De Rham abstrait). Pour une variété de Stein X, on a :
H p (X, C) = Ker(d : Γ(X, Ωp ) → Γ(X, Ωp+1 ))/(d Γ(X, Ωp−1 ))
où Ωp désigne le faisceau des p-formes holomorphes.
80
Bibliographie
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1987
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[Cou95] Coutinho S.C., A primer of algebraic D-modules, London Mathematical Society, Student
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[God73] Godement R., Théorie des faisceaux, Publications de l’institut de mathématiques de l’Université de Strasbourg, 13, Hermann, 1973
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[Voi02] Voisin C., Théorie de Hodge et Géométrie Algébrique Complexe, Société Mathématiques de
France, cours spécialisé 10, 2002
81
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