La validité des recommandations de bonne pratique
publiées par des agences gouvernementales ou apparen-
tées, telles la Haute autorité de la santé (HAS), l’Agence
française de sécurité sanitaire et des produits de santé
(Afssaps), ou l’Institut du cancer (InCa), se fonde généra-
lement sur des preuves obtenues grâce à des revues systé-
matiques de la littérature ou, quand de telles preuves font
défaut, sur des consensus professionnels de bonne qualité
méthodologique [1, 2]. En France, les professionnels de
santé qui souhaitent pratiquer une médecine fondée sur
des niveaux de preuve doivent donc appliquer en priorité
ce type de recommandations, quand ils le peuvent. Les
recommandations des sociétés savantes ou celles d’agen-
ces gouvernementales étrangères peuvent être conseillées
en deuxième intention, sous réserve que leur niveau de
qualité méthodologique soit comparable à celui des
recommandations publiées par les agences officielles fran-
çaises, et que leur contenu soit compatible avec la régle-
mentation française.
En pathologie thyroïdienne, les recommandations de
bonne pratique ne manquent pas. Celles de la HAS
concernent le diagnostic et la surveillance biologique de
l’hypothyroïdie et de l’hyperthyroïdie, publiées en 1999 et
en 2000, quand la HAS s’appelait encore l’Anaes (Agence
nationale d’accréditation et d’évaluation en santé), ainsi
que les explorations thyroïdiennes autres que biologiques,
publiées en septembre 1997 [3], et les bonnes pratiques
pour la prise en charge des nodules thyroïdiens, publiées
en 1995, quand la HAS s’appelait encore l’Andem
(Agence nationale pour le développement de l’évaluation
médicale) [4]. Nous disposons aussi des guidelines de
l’ATA (American thyroid association) [5] et de la NACB
(National academy of clinical biochemistry) [6] sur le
rôle du laboratoire dans la pathologie de la thyroïde, qui
ont été traduits en français sous l’égide de la SFBC
(Société française de biologie clinique), de la SFE
(Société française d’endocrinologie) et du GRT (Groupe
de recherche sur la thyroïde) [7], ou encore des SOR
(Standards, options et recommandations) de la FNCLCC
(Fédération nationale des centres de lutte contre le can-
cer), affiliée à l’Institut du cancer (InCa) [8]. L’ATA a
également publié des recommandations concernant
l’insuffisance thyroïdienne maternelle [9] et l’hypothyroï-
die congénitale, en collaboration avec l’American aca-
demy of pediatrics [10]. Les recommandations de
l’AACE (American association of clinical endocrinolo-
gists) concernent les hyperthyroïdies et les hypothyroï-
dies ; les nodules thyroïdiens, en collaboration avec
l’Associazione medici endocrinologi ; les carcinomes thy-
roïdiens, en collaboration avec l’ES (Endocrine society)et
l’ACE (American college of endocrinology) ; et l’hypo-
thyroïdie fruste (ou sub-clinique), en collaboration avec
l’ATA, l’ES et l’ACE [11-15]. L’USPSTF (US preventive
services task force) a publié des recommandations concer-
nant le dépistage des dysthyroïdies frustes [16]. Les gui-
delines de l’Acog (American college of obstetricians and
gynecologists) concernent la pathologie thyroïdienne de la
grossesse [17].
Tous les cliniciens n’ont pas le temps de prendre connais-
sance de toutes ces recommandations, sauf peut-être
quand elles se situent au cœur de leurs spécialités ou cen-
tres d’intérêt, et encore moins de les mémoriser. Il en
résulte que de nombreux praticiens qui prescrivent des
bilans thyroïdiens risquent de ne pas intégrer ces bonnes
pratiques.
Le but du présent travail est d’aider les biologistes à com-
menter les bilans thyroïdiens, de manière à favoriser la
prise en compte des recommandations de bonne pratique
par les cliniciens, pour le bénéfice des patients. Le présent
travail pourra aussi aider les biologistes à décider, en
accord avec le prescripteur, de ne pas doser la TSH et/ou
la T4 libre et/ou la T3 libre et/ou à ne pas effectuer de test
à la TRH quand l’un ou l’autre de ces examens n’est pas
susceptible d’apporter la moindre information, voire
même être nuisible pour le patient (via des explorations
inutiles et/ou des décisions inappropriées), ou au contraire
à conseiller de prescrire ces examens quand ils sont sus-
ceptibles d’être utiles et qu’ils n’ont pas été prescrits, ainsi
que divers autres examens auxquels le prescripteur
n’aurait pas forcément pensé (bilan lipidique, CRP, NFS,
iodurie de 24 heures, iodémie, thyroglobuline, anticorps
anti-thyroglobuline, anticorps antiTPO, anticorps anti-
récepteurs de la TSH, etc.).
Matériels et méthodes
Pour rédiger nos commentaires, nous avons utilisé en prio-
rité les travaux susceptibles de fournir les meilleurs
niveaux de preuve, à savoir les revues systématiques et les
guides de bonne pratique fondés sur des niveaux de preu-
ves de bonne qualité méthodologique, en tentant d’identi-
fier, de manière aussi exhaustive que possible, les différen-
tes situations cliniques qui peuvent correspondre à toutes
les combinaisons de résultats possibles de TSH, de T4
libre et de T3 libre. Nous avons notamment cherché à
identifier les situations où, sur la base des seuls résultats
de TSH et de T4 libre, il est possible d’affirmer ou de
suspecter très fortement que le dosage de la T3 libre et/ou
de la T4 libre et/ou de la TSH seront inutiles. Cette démar-
che rationnelle est rappelée dans les figures 1 à 5, respec-
tivement dans le cas des recherches étiologiques des
hyperthyroïdies fréquentes (figure 1), rares (figure 2), des
hypothyroïdies fréquentes (figure 3), rares (figure 4), et
des nodules thyroïdiens (figure 5). Nous avons également
complété ces algorithmes diagnostiques par trois figures
culture-qualité
Ann Biol Clin, vol. 65, n° 3, mai-juin 2007318
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