STUDIA CAROLIENSIA 2004. 3–4. SZÁM 5–12. BÉLA KÖPECZI LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE DE FRANÇOIS II RÁKÓCZI La guerre d’indépendance hongroise du début du XVIIIe siècle fut un événement important dans l’histoire européenne de l’époque moderne. Grâce à François II Rákóczi, la Hongrie fut l’allié de Louis XIV dans la guerre de la succession d’Espagne. Par son traité avec le tzar Pierre Ier , elle a participé à la guerre du Nord at au conflit russo-turc. Quelle fut la politique étrangère du prince, son apprentissage, l’organisation de la diplomatie, ses méthodes, ses résultats et les moyens de sa propagande? Telles sont les questions que nous désirons de répondre dans cette étude. 1 L’apprentissage L’aristocrate hongrois, éduqué par les jésuites, voulait rester un sujet soumis au roi de Hongrie, Léopold Ier, malgré ses souffrances personnelles et familiales. Il fut le fils de François Ier Rákóczi et de Hélène Zrinyi, dont le père fut exécuté par le gouvernement de Vienne. Le changement opéré eut lieu pas à pas sous l’influence de sa vie personnelle et sous celle de la situation désastreuse de son pays. En 1697, lors des troubles de la Hongrie du Nord, il prend la fuite et il cherche l’appui de la cour. Il voit que les dirigents autrichiens n’ont aucune confiance en lui. Il se retire chez son ami, le comte Battyányi. Là il a l’occasion de connaître, grâce à la connaisance du français, la littérature, la théologie, la philosophie de l’État de Machiavel, de Juste Lipse et surtout Les aventures de Télémaque de Fénélon, et il cherche également à s’orienter dans l’histoire et la géographie de l’Europe. Rentré dans ses domaines, il s’intéresse avant tout aux événements contemporains dont témoignent à partir de 1698 les revues hollandaises, Mercure historique et politique et le Lettres historiques. 2 Ses impressions personnelles le convainquent des malheurs du pays et il cherche des amis qui ont les mêmes idées. Lors des débuts de la guerre de la Succession d’Espagne, en tant que descendant des princes de Transylvanie, il s’adresse à la cour de France. 3 Il est arrêté, mais grâce à sa femme et aux jésuites, il réussit à s’évader en Pologne. Ici il est aidé par l’ambassadeur français, le marquis du Héron et, avec son aide, il réussit à convaincre Louis 1 2 3 B. Köpeczi: II. Rákóczi Ferenc külpolitikája (La politique étrangère de François II Rákóczi), Budapest, 2002. B. Köpeczi: Döntés előtt (Avant la décision), Budapest, 1982. B. Köpeczi: La France et la Hongrie au début du XVIIIe siècle, Budapest, 1971. 6 BÉLA KÖPECZI XIV de son aide. Le marquis de Bonnac lui procure de l’argent et il commence la guerre en Hongrie. Il doit organiser la guerre et établir sa diplomatie. La diplomatie hongroise Les princes de Transylvanie ont envoyé leurs diplomates à la cour de Vienne et à l’étranger pour un but déterminé, donc pas pour longtemps. Aux négotiations de Westphalie, les pays touchés ont expédié des diplomates pour un temps illimité, vu les difficultés des pourparlers. Rákóczi a repris cette habitude 4 , il a donc cherché des diplomates stables, il a organisé leurs voyages, a formulé leurs instructions et les ordres, a demandé une correspondance suivie et à la fin de leurs missions un compte-rendu. Naturellement il s’est servi des livres pour connaitre le métier et il a eu des conversations avec ceux qui ont participé à une mission. C’est ainsi qu’il a choisi pour la cour de Maximilien Emmanuel et pour Versailles, Ladislas Kökényesdi de Vetés 5 (qui a pris le nom du baron de Vetes), pour Constantinople, Jean Pápai, pour Moscou, Gaspard Nedeczky, pour la Suède et la Prusse, son secrétaire Paul Ráday, pour le Vatican et Versailles Dominique Brenner, et Jean Michel Klement pour la Prusse, la Hollande et l’Angleterre. 6 Les instructions furent formulées dans la pluspart des cas par Ráday et revisées par le prince. La communication fut organisée par la Pologne et par la Turquie, destinée pour la France, la Prusse, l’Angleterre, la Hollande et la Russie, ou pour Venice et pour Rome. Les lettres prirent trois ou quatre semaines pour arriver à leur destinataire. Ainsi le prince devait se contenter de répéter ce qui figurait dans les instructions ou de demander des compléments pour pouvoir répondre. Malgré toutes ses difficultés, une diplomatie bien organisée fut établie, son principal directeur fut le prince lui-même. Les relations avec la France Le principal allié de Louis XIV en Europe centrale fut le prince Rákóczi, le chef de la guerre d’indépendance hongroise. Après les démarches faites par Rákóczi, la cour de France lui a accordé un subside nécessaire pour le maintien de 4000 hommes, des officiers français, l’aide diplomatique et l’envoi d’un agent. Les subsides étaient trop modestes et le prince s’en est servi non seulement pour son armée mais aussi pour honorer ses envoyés. Les officiers français, venus de France ou de la Pologne, étaient surtout des ingéneurs. L’aide diplomatique fut utilisée surtout en Pologne où les aristocrates francophiles se sont servis du transfert de l’argent français et des armements. Malheureusement elle n’a pas réussi à faire déclarer à cause de la paix de Carlovitz, que la Turquie déclare la 4 5 6 La préface de K. Benda dans le seconde volume de Ráday Pál iratai, édités par lui et par F. Maksay, Budapest, 1961. B. Köpeczi: Vetési Kökényesdi László, Budapest, 2001. Egy cselszövő diplomata. Klement János Mihály (Un diplomat intrigant. Jean Michel Klement), Budapest, 2000. LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE DE F R A N Ç O I S II R Á K Ó C Z I 7 guerre à l’Autriche ou à aider militairement les Hongrois. La France a aidé Charles XII, roi de Suède et elle a contrecarré les relations de Rákóczi avec la Russie. En 1705, le marquis Des Alleurs fut expédié en tant qu’envoyé auprès Rákóczi, qui au début a appuyé les relations entre la cour de France et le prince, mais ses impressions personnelles l’ont convaincu du contraire. Il a critiqué Rákóczi à cause de l’utilisation de certaines sommes, retirés des subsides, il a appuyé les accusations des officiers français dans leur rapport avec les généraux hongrois. Dans la diplomatie il était contre les relations avec la Russie, et il n’a pu rien faire en ce qui concerne la Turquie. Il a condamné la paix de Varsovie et il a répandu le bruit du caractère « pompeux » de la cour princière. Au début la France fut convaincue d’une jonction entre l’armée bavarofrançaise et hongroise qui aurait dû occuper Vienne. Après la bataille de Höchstädt, cet espoir s’est évanoui, Maximilien Emmanuel devait quitter la Bavarie, il ne restait que la guerre hongroise en Europe centrale pour se défendre contre l’armée autrichienne. Cette guerre a duré huit ans, elle a perdu les combats réguliers, mais elle fut efficace dans la « petite guerre ». Louis XIV a hésité d’abord au point de vue de ses relations avec les Hongrois « rebelles ». Torcy, le secrétaire d’État l’a rassuré, puisque selon un mémoire présenté au roi, la Hongrie fut considérée comme un pays subjugué par les Autrichiens et Rákóczi comme le descendant des princes de la Transylvanie. Les instructions du marquis Des Alleurs reflètent ces constatations. Le roi, après l’élection de Rákóczi comme prince de Transylvanie, l’a reconnu comme tel. Ainsi donc l’absolutisme de Louis XIV a considéré que la cause hongroise était juste, la presse française et les pamphletes de l’époque se sont servi de ces mêmes arguments. En 1705 Rákóczi voulait conclure un traité avec Louis XIV après son élection comme prince. La demande fut présentée par le baron de Vetes et repoussée pour deux raisons: la Hongrie a reconnu comme roi un Habsbourg, et la demande ne fut pas représentée par le marquis Des Alleurs. En 1707, après l’abdication des Habsbourgs, le marquis priait le prince de présenter ses conditions. Il le fit de la façon suivante: un traité entre Louis XIV et la confédération hongroise et un autre avec le prince de Transylvanie. On a échangé les textes, après certaines rectifications, les traités furent prêts à la signature. Les pertes militaires des Hongrois et la situation économique et militaire de la France ont empêché la signature. Les historiens oublient cet événement, ils considèrent que Louis XIV a considéré la guerre hongroise comme une « digression », et c’est à cause de cela qu’il ne l’a pas appuyée suffisamment. La traité avec Pierre Ier Au début, Rákóczi a cherché l’appui d’Auguste II, roi de Pologne, bien qu’il savait que le roi en tant que l’électeur de Saxe appuyait l’Empereur dans la 8 BÉLA KÖPECZI guerre de la Succession d’Espagne. Le roi de Suède poursuivait sa guerre contre le czar et le roi de Pologne, et pour le remplacer, il fit élire comme roi de Pologne Stanislas Leszczyński. A cette époque le prince s’est adressé au roi de Suède et à Leszczyński pour demander leur aide et proposer un traité entre la Hongrie et la Pologne, aidé par Charles XII. Ce dernier s’est contenté d’une médiation auprès de la cour de Vienne, mais sans résultat. Par le traité d’Altranstädt Auguste II devait abdiquer. C’est dans cette situation que le tzar s’est adressé à Rákóczi en lui demandant d’accepter la couronne polonaise. Ses envoyés sont venus en Hongrie et ils ont fait cette proposition. Rákóczi était prêt à accepter la couronne polonaise, mais avec des restrictions. Ainsi il voulait faire conclure un accord entre le tzar et le roi de Suède, de demander pour cette médiation la France, trouver de l’aide russe pour la guerre hongroise et, si ce n’est pas possible, chercher la médiation avec Vienne. Une délégation hongroise, conduite par le général Bercsényi a conclu ce traité à Varsovie. Après la bataille de Poltava (1709), Auguste II est revenu en Pologne, donc il ne s’agissait plus de la couronne polonaise. Le czar ne voulait pas un conflit avec Vienne, il ne lui restait que la médiation, mais sans succès. Le roi de Suède s’est retiré en Turquie, la France a essayé de l’aider, ce qui a causé des discussions avec Rákóczi. Le prince a pris en charge des soldats polonais et suédois, qui se sont distingués dans une bataille contre les Autrichiens. Charles XII a protesté, les soldats se sont évadés. Rákóczi a envoyé une délégation à Bender pour chercher un compromis avec le tzar, sans résultat. Charles XII, après la paix de Pruth est passé par la Hongrie pour arriver dans son pays. La médiation anglo-hollandaise Les sujets hongrois des Habsbourgs ont tenté dès le début de chercher un compromis avec les Hongrois considérés comme « rebelles ». Léopold Ier a nommé Paul Széchenyi, évêque de Kalocsa, de commencer les négotiations qui ont obtenu des cessez-le feu mais qui n’ont pas abouti à un traité. Les Hongrois voulait maintenir la liberté d’élection du roi, le droit de la résistance de la noblesse et l’acceptation de la nomination de Rákóczi comme prince de la Transylvanie, outre la révocation d’autres privilèges de la nation. La cour de Vienne n’a pas accepté ces conditions. L’Angleterre et la Hollande se sont inquiétées de cette situation et surtout de la non-participation autrichienne aux guerres d’Italie et de l’Allemagne. Elles avaient également d’autres raisons, ainsi la protection accordée aux protestants de Hongrie et de Transylvanie. 7 Les gouvernements de ces pays ont voulu faire admettre les griefs des Hongrois pour récupérer leurs privilèges, mais ils ont 7 Les documents de cette médiation: Archivum Rákóczianum, édité par E. Simonyi, II/I-III, Pest, 1871, 1873 et Budapest, 1877. LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE DE F R A N Ç O I S II R Á K Ó C Z I 9 condamné les tentatives qui regardaient les structures actuelles, ainsi l’acceptation de la libre élection, le droit à la résistance et surtout l’attribution de la Transylvanie à Rákóczi. Les journaux et les pamphlets de Hollande et l’Angleterre ont appuyé les demandes de leurs gouvernements. Ils ont proposé leur médiation et elle fut acceptée par la cour de Vienne. En 1705 les négociations ont commencé avec Hamel-Bruynincx, du côté hollandais et avec George Stepney du côté anglais. Le chancelier Wratislaw s’est rendu en Hongrie, il a rencontré Rákóczi, essayant de le dissuader de sa demande concernant la Transylvanie. Bien qu’il s’est servi d’une affirmation qui devait devenir prophétique au sujet de l’alliance avec la France, Rákóczi ne fut pas ébranlé, malgré les instances de sa femme. Le nouvel empereur, Joseph Ier n’a pas voulu approuver la continuation de cessez-le-feu, les négotiations furent interrompues. Vienne a publié un manifeste qui a énuméré les conditions hongroises et les réponses autrichiennes. La confédération hongroise a répondu par les Animadversiones apologicae, qui cherchent à prouver que la cour de Vienne voulait rompre les négociations. Les ambassadeurs anglais et hollandais critiquèrent l’attitude autrichienne et ils protestèrent contre cet acte. La reine d’Angleterre, Anne promit à Rákóczi de reprendre la médiation. En 1711 elle a nommé l’ambassadeur extraordinaire, Peterboroug, de la reprendre, mais la cour de Vienne a repoussè sa demande. Le gouvernement de Vienne n’admettait plus la médiation, il a espéré de faire la dissension parmi les Hongrois et il a gagné le général Alexandre Károlyi, qui a reçu l’amnistie, sans en avertir le prince, et il a contribué avec le général autrichien Jean Pálfy à la signature de la paix de Szatmár (Satu Mare). Cet accord a rétabli la noblesse hongroise et transylvaine dans leurs privilèges, mais il n’a reconnu les droits exigés par la confédération et l’attribution de Transylvanie à Rákóczi. Le prince s’est trouvé en Pologne et il a refusé cet accord. L’exil En février 1711, Rákóczi s’est rendu en Pologne pour rencontrer Pierre Ier qui devait s’y rendre. 8 Il était suivi de ses généraux et d’un grand nombre de soldats qui furent hébergés par les aristocrates polonais et par l’armée russe. Le tzar arrivait en avril, mais il devait lutter contre l’armée turque. Rákóczi – malgré cette guerre – était convaincu que le tzar va l’aider. Entretemps les négociations d’Utrecht se poursuivaient et les Anglais et les Hollandais furent consternés par l’attitude de la cour de Vienne. C’est cette époque que Jonathan Swift fit publier son pamphlet The conduct of the allies où il critique la politique autrichienne: 8 B. Köpeczi: A bujdosó Rákóczi (Rákóczi en exil), Budapest, 1991. 10 BÉLA KÖPECZI « Elle a sacrifié l’alliance toute entière à sa passion et a complètement subjugé et réduit en esclavage un peuple malheureux, lequel après avoir subi trop de provocations, prit les armes afin de se libérer à l’oppression. » L’Autriche n’a plus participé aux négociations et la paix d’Utrecht fut signée sans sa signature. A cette époque le prince s’est trouvé en France après avoir quitté Danzig (Gdańsk) et après avoir été abandonné par le tzar. Prenant le nom du comte de Charoche, il participait à la messe, aux chasses, aux divertissements de la cour de Versailles. A Paris il a pris part aux représentations théâtrales, aux visites du Louvre, de l’Observatoire, et il s’est entretenu avec les peintres. Il est devenu un courtisan, bien vu du roi et des princes légitimes. Avant la paix de Rastadt il cherchait à reprendre la guerre de Hongrie, mais sans résultat. A Rastadt, le roi cherchait à obtenir la principauté de Transylvanie. Après la paix, il salua Louis XIV en ses termes: « Je sais, Sire, que vous avez fait tout ce que vous pouviez faire pour moi, mais l’occasion était trop belle et trop longtemps recherchée pour la laisser échapper. Je sais, Sire, que tout ainsi est reglée par la Providence, qui vous a ôté en partie les moyens de nous satisfaire aussi. Outre votre pitié naturelle, il s’agit de votre gloire de ne pas abandonner ceux qui sont persécutés, parce qu’ils ont été utiles, et toute l’Europe le considérera ainsi. » Le roi, qui à Danzig lui a ordonné une certaine somme, a fait payer les subsides de la fin de 1709 jusqu’à 1711, a augmenté sa pension et a ordonné de certaines sommes aux généraux qui s’étaient trouvés en Pologne. Avant la mort du roi, il voulait se retirer chez les Camaldules de Grosbois. Dans ses Confessions, il a présenté cette mort dans le cadre d’une tragédie. Touché par le jansénisme, il a écrit ses Mémoires en français, ses Confessions en latin, ses Aspirations en latin et en français. Son jansénisme ne l’a pas empêché de revenir à la politique. La guerre vénéto-turque fut aidée par l'Autriche et le prince voulait y participer. Il a reçu l’invitation du sultan qui lui a promis la principauté de Transylvanie, l’aide pour le réarmement des troupes chrétiennes, acceptant un tribut annuel. Rákóczi s’est présenté chez le régent, il a demandé l’avis des Camaldules et de la Sorbonne, et malgré les difficultés mentionnées par le duc d’Orléans il s’est décidé à s’embarquer sur un navire français. Il s’est adressé au cardinal Alberoni, ministre tout puissant de l’Espagne, et il lui a demandé l’envoi d’un agent en Turquie. Le colonnel Boissimène, comme envoyé d’Espagne, s’est rendu en Turquie. Le prince fut satisfait parce qu’il réussit à avoir le représentant d’une puissance chrétienne auprès de lui. L’Autriche a protesté, le pape croyait qu’Alberoni voulait conclure un traité avec la Porte, un scandale européen a secoué les positions du cardinal. Il devait rappeler son envoyé, qui fut emprisonné en Espagne, et en même temps on a procédé à un procès contre Alberoni. LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE DE F R A N Ç O I S II R Á K Ó C Z I 11 Le prince est arrivé en Turquie au moment où on poursuivait des négociations de paix par la médiation anglaise et hollandaise. Il a prié la Porte qu’on demande l’association d’autres puissances, mais personne ne voulait y participer. Le prince ne voulait pas signer un accord avec la Porte et de mobiliser des troupes chrétiennes pour la guerre. La paix de Passarovitz fut signée, les Autrichiens demandaient l’extradition de Rákóczi et de ses généraux, mais le sultan l’a refusé en indiquant que dans ce cas il s’agit de son invitation. Les émigrés ont quitté Andrionople et ses environs et devaient se retirer à Rodosto (Tekirdağ). En Turquie le prince a continué ses Confessions, il a écrit son Testament politique et moral et des écrits théologiques. Il devait protester contre les thèses jansénistes que ces censeurs de Turquie lui attribuaient, essayant de prouver qu’il les interprétait en un sens orthodoxe. Malgré cela il a entretenu ses relations avec la France, avec les aristocrates polonais, avec Moscou, il s’est adressé en 1720 au roi d’Espagne. Le congrès de Cambrai lui donnait l’idée de demander par l’envoyé Bon que l’Espagne, qui n’a pas signé la paix d’Utrecht et de Rastadt, de présenter ses intérêts pour la restitution de la Transylvanie. Il s’est adressé d’abord au cardinal Dubois, puis au duc d’Orléans, en affirmant que la guerre hongroise a permis aux Bourbons de regner en Espagne. Dans ces mémoires adressés à la cour d’Espagne, il a donné une idée de la situation européenne, il a essayé de prouver que l’Autriche empêchera l’attribution de la Toscane et de Parme à l’infant et que la guerre contre l’Autriche pourrait la rendre sûre. Le congrès ne donnait aucun résultat. En 1731 après la signature du traité de Séville où l’on a reglé les discussions entre l’Espagne et l’Angleterre, une autre occasion s’est présentée. L’envoyé Bon a repris l’idée d’une guerre contre Vienne, mais l’Autriche s’est rallié au traité mentionné et l’infant Don Carlos pouvait s’établir en Italie. Malgré les grandes distances et des difficultés de communication, le prince cherchait à intervenir dans la politique européenne. Le retentissement de la guerre d’indépendence La presse, les pamphlets, les histoires de l’époque se sont occupés de la guerre hongroise. Eustache Le Noble, Gueudeville, Flämitzer publiaient des pamphlets contre et pour le guerre. Le Noble a fait paraître en France en 1707 la Vie du prince Ragotzi. Dans leurs mémoires Dangeau et Saint-Simon se sont occupés de sa personne et de ses activités. En 1739 on a fait paraître à la Haye une Histoire des Révolutions de Hongrie, dont la partie historique, selon le témoignage de l’abbé Prévost, fut écrite par l’abbé Dominique Brenner. 9 L’ouvrage de Brenner représente l’idée de la république nobiliaire, de la même façon que le prince dans son Traité de la puissance, publié en 1751 à Paris dans le Testament mentionné où il combat ouvertement les thèses de Bossuet sur 9 Je l’ai traduite en hongrois. 12 BÉLA KÖPECZI l’absolutisme et il se considère comme le successeur de Saint Etienne et comme « père de la patrie ». Sur la base des faits mentionnés, nous pouvons considérer le prince Rákóczi comme le fondateur d’un corps diplomatique stable et comme le directeur de ses activités. Par le retentissement de ses exploits il devenait le véritable représentante de la guerre hongroise. Devant le parlement à Budapest, il est représenté comme un condottiere, je crois qu’il était avant tout un « homme de cabinet » 10 . 10 Voir Rákóczi útjain (Sur les routes de Rákóczi), Budapest, 2004.