Traitement des cancers du col de stade précoce
C.Uzan, E.Vincens, R.Mazeron, C.Balleyguier, C.Haie-Meder, P.Morice
Introduction
La majorité des cancers du col sont dus au papillomavirus. Ce virus, caractérisé dans les
années 80 et qui a valu à l’allemand Harald zur Hausen le prix Nobel 2008 pour ces travaux
sur le sujet, provoque le type histologique le plus fréquent, le carcinome épidermoïde.
L’incidence des cancers du col a diminué dans les pays développés grâce au dépistage par
frottis et elle doit continuer à diminuer dans le futur avec la diffusion de la vaccination.
Environ 1700 cas de cancer du col débutant sont diagnostiqués par an en France (1).
L’évolution naturelle de cette forme la plus typique, à partir de la dysplasie épithéliale, passe
par un stade de micro-invasion (Stade IA1, classification de FIGO, dont la version la plus
récente est de 2009 (2)). On observe au début le simple franchissement de la basale (invasion
stromale précoce), puis le développement de cellules tumorales vers la profondeur. La gravité
des lésions est directement liée au volume d’invasion ce qui correspond en pratique à la
profondeur mais aussi à la largeur de la tumeur, à l’existence d’emboles lymphovasculaires.
De plus à partir d’une profondeur d’invasion de 3 mm (définissant le stade IA2), il existe un
risque d’envahissement ganglionnaire. Celui-ci, bien qu’assez rare dans les cancers de stade
précoce, est un élément pronostique déterminant.
Le cancer du col de stade précoce est de bon pronostic et le défi majeur concernant sa prise en
charge est de limiter la morbidité des traitements et si possible, dans certains cas, préserver la
fertilité tout en conservant d’aussi bon résultats carcinologiques. La cœlioscopie s’est imposée
dans cette optique et la tachnique du ganglion sentinelle et la chirurgie robotique sont en cours
d’évaluation.
Nous traiterons ici des cancers de stade précoce (jusqu’au stade IB1) et insisterons sur les
nouvelles techniques qui sont développées ou en cours de développement pour avoir un
traitement moins morbide.
1- Le Bilan initial
a- Examen clinique
Le bilan préthérapeutique permet de déterminer le stade clinique selon la classification
FIGO (Tableau 1, (2)). Celle-ci n’intègre pas le statut ganglionnaire , ce qui lui est souvent
reproché. Si très longtemps l’essentiel concernait l’évaluation de l’atteinte des paramètres,
actuellement le volume tumoral paraît être l’élément le plus déterminant dans l’adaptation du
protocole thérapeutique. Quelque soit les avancées en imagerie, l’examen clinique demeure
essentiel. Les tumeurs de moins de 4 cm sans atteinte paramétriale ou atteinte à distance sont
considérées comme des stades précoces (IB1 ou moins).
En général, à part d’éventuelles métrorragies post-coïtales ou épisodiques, la patiente ne se
plaint d’aucun signe clinique. Les autres symptômes (impériosités, ténesme, douleurs
lombaires, douleur de type sciatique, œdème des membres inférieurs) sont l’apanage des
cancers du col de stade avancé.
A l’examen clinique, on évalue la taille tumorale, l’extension au vagin, l’atteinte
paramétriale (essentiellement par le toucher rectal). Une histologie est indispensable. La
lésion suspecte doit être décrite et localisée clairement avec réalisation de biopsies. En cas de
lésion de stade très précoce, aucune lésion n’est visible cliniquement et les prélèvements sont
dirigés par la colposcopie. La colposcopie, examen avec loupe binoculaire du col et du vagin
après application d’acide acétique et de Lugol, a comme objectif de préciser les limites de la
lésion, de choisir le lieu de la ou les biopsies et de reconnaître des lésions associées.
Pour les tumeurs de très petit volume, une imagerie systématique n’est pas nécessaire.
Par contre, dès que la lésion est macroscopiquement bien visible, une imagerie est
recommandée.
.
b- Imagerie
L’échographie standard est inefficace dans l’évaluation des tumeurs cervicales, elle est
essentiellement utilisée pour diagnostiquer une dilatation des cavités pyélocalicielles dans les
cancers du col de stade avancé.
L’imagerie par résonnance magnétique (IRM) est actuellement le meilleur examen
d’imagerie pour préciser l’extension loco-régionale des cancers du col utérin, et apparaît plus
performante que l’examen clinique seul dans cette indication (3,4).
a- Technique d’IRM
Le protocole d’examen IRM doit comporter essentiellement deux plans de coupes
orthogonaux (axial et sagittal) en séquence pondérée en T2, sans suppression de graisse. Pour
préciser l’extension aux paramètres, il est utile de réaliser des séquences complémentaires
axiales obliques, perpendiculaires au grand axe du col, avec des coupes fines (4 mm/0.4 mm)
centrées sur le col utérin..
Lorsque la lésion est petite, non visible spontanément ou après traitement, il est utile de
réaliser des coupes complémentaires, axiales ou sagittales pondérées en T1 après injection de
produit de contraste. Enfin il ne faut pas oublier de réaliser un bilan d'extension ganglionnaire
pelvien et abdominal par la réalisation de coupes axiales en pondération T2 du pelvis
jusqu'aux hiles rénaux.
Certaines équipes opacifient la cavité vaginale avec du gel ce qui permet de déplisser le vagin
et de détecter plus facilement un envahissement des cul-de-sac vaginaux. Ceci est surtout utile
dans les stades avancés.
b- Les résultats obtenus avec l’IRM
L’IRM permet de réaliser :
- une estimation du volume tumoral
- un bilan d’extension locorégional : envahissement des paramètres, extension
vaginale et stromale, vesicale ou rectale, à la paroi pelvienne, aux
adénopathies. Ces différentes atteintes font passer la lésion à un stade avancé.
L’IRM est nettement supérieure au scanner pour le bilan d’extension loco-régional des
cancers du col. L’IRM permet l’analyse des diffférents contrastes tissulaires du col (anatomie
zonale), contrairement au scanner. En revanche, les performances de l’IRM et de la TDM,
pour le bilan d’extension ganglionnaire, sont voisines (5). Une méta-analyse datant de 1997
rapporte des résultats similaires de la lymphographie, de la TDM et de l’IRM pour la
détection des métastases ganglionnaires pelviennes ou lombo-aortiques (6).
Estimation de la taille tumorale
L’estimation de la taille tumorale reste clinique, cependant l’IRM est d’un apport majeur
en particulier pour l’évaluation de l’extension de la tumeur vers l’isthme utérin (figure 1), qui
n’est pas décelable cliniquement, mais qui est fondamentale, en particulier si l’on discute
d’une chirurgie conservatrice (trachélectomie élargie) (7). En pratique, Il faut mesurer la
tumeur dans son plus grand axe, sur les coupes axiales et sagittales et préciser l'extension en
hauteur par rapport à l'isthme utérin.
Bilan d'extension loco-régional
La lésion tumorale est visible habituellement sous la forme d’une masse bourgeonnante
hyperintense, parfois hétérogène, par rapport au myomètre, en séquence pondérée en T2 (Fig
2). Cependant les aspects morphologiques de la tumeur peuvent être multiples : la tumeur peut
être exophytique, infiltrante ou endocervicale (Fig 3). Chez les femmes jeunes, le cancer du
col provient habituellement de la zone de transition et tend à être exophytique alors que chez
les femmes plus âgées la tumeur provient plus souvent du canal endo-cervical (8). Ce dernier
aspect est souvent un facteur de moins bon pronostic que la localisation exo-cervicale, car
souvent méconnu par l'examen clinique ou colposcopique (9).
Chez la femme enceinte en raison d'un hypersignal physiologique du col, la tumeur peut
apparaître hypointense (Fig 4).
Une tumeur visible en séquence pondérée T2 signifie qu'il s'agit au minimum d'un stade IB.
L’envahissement d'au moins un des paramètres correspond à un stade IIB. Le meilleur signe
pour l’absence d’envahissement des paramètres est la visibilité sur toute sa circonférence de
l’anneau hypointense fibreux du col en séquence pondéréee en T2 (Fig 5). Lorsque ce liseré
hypointense est visible sur sa totalité, la valeur prédictive négative de l’IRM est de 97 % (10).
La sensibilité de l’IRM dans cette indication varie de 79 à 100 %, avec un risque de sous-
évaluation dans 4 % des cas (9).
- Extension ganglionnaire
L’extension ganglionnaire est un facteur pronostique essentiel. La survie à 3 ans d’une
patiente atteinte d’une lésion de stade I / II sans atteinte ganglionnaire est de 94%, elle n’est
que de 64 % en cas de ganglions pelviens envahis et de 37 % si les ganglions lombo-aortiques
sont atteints (11). La survie est également liée à la pertinence des séquences thérapeutiques
utilisées, d’où l’importance d’un bilan initial précis pour l’extension loco-régional et
l’extension ganglionnaire.
L’IRM pelvienne pour un bilan d’extension d’un cancer du col utérin doit comporter des
coupes imageant le pelvis et la région lombo-aortique, des hiles rénaux au plancher pelvien,
en séquence pondérée en T2.. Le critère de surveillance d’atteinte ganglionnaire en IRM reste
la taille supérieure à 10 mm, pour le plus grand diamètre du ganglion (critères RECIST) (12).
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