sensation de présence peut être plus diffuse, tel patient
parlant par exemple de son ange gardien.
D’autres patients ont des hallucinations de passage,
sous la forme de sensation fugace du passage d’un
animal à la périphérie du champ visuel. L’animal peut
être identifié précisément (un chien, une souris) ou
non. Enfin, les illusions visuelles sont aussi fréquentes.
Il s’agit là d’un défaut d’interprétation d’un stimulus
visuel réel. Cette transformation se fait habituellement
dans le sens de l’inanimé vers l’animé : une branche
d’arbre est vue en animal, une poussière sur la
moquette en insecte, un caillou sur le chemin en
visage.
Les hallucinations visuelles complexes
et les autres types d’hallucinations
Les hallucinations visuelles complexes constituent
le type le plus fréquent. Elles mettent habituellement
en scène des personnages, familiers ou non, mais il
peut s’agir d’animaux ou d’objets. Les scènes sont sou-
vent assez pauvres, statiques ou, plus souvent, cinéti-
ques, colorées ou non. Les contours sont volontiers un
peu flous. Le contenu hallucinatoire peut être assez
stéréotypé chez un même patient. Chaque épisode
dure quelques secondes à quelques minutes.
Les hallucinations auditives constituent volontiers
la « bande-son » d’une hallucination visuelle, par
exemple bruits de pas ou conversations de personna-
ges immatériels. Des bruits élémentaires, non enten-
dus par le conjoint, sont possibles (sonneries, coup à la
porte, etc.). Des hallucinations musicales sont occa-
sionnellement rapportées mais, dans notre expérience,
sont souvent associées à une surdité qui en constituent
un facteur favorisant classique. En revanche, les hallu-
cinations verbales à tonalité désagréable, ou les com-
mentaires en écho des pensées ou des actions sont très
rares et doivent faire évoquer une dépression sévère
ou un état psychotique chronique associé. Les halluci-
nations tactiles sont possiblement sous-estimées, car
rarement recherchées systématiquement [15]. Il s’agit
souvent de la sensation du passage d’un animal sur la
peau. Ce type d’hallucinations peut être multimodal,
conférant un certain réalisme à la scène. Tel patient, par
exemple, a senti pendant des années des musaraignes
ou d’autres petits animaux lui courir sur les jambes le
soir dans le lit. Soulevant les draps, il lui est souvent
arrivé de voir les animaux. Les hallucinations olfactives
sont exceptionnellement mentionnées.
Caractères généraux des hallucinations
Quel que soit leur type, trois caractères des halluci-
nations doivent être établis : l’horaire, la critique et les
symptômes associés. Les hallucinations peuvent sur-
venir à tout moment de la journée, mais une prédomi-
nance vespérale ou nocturne est habituelle. Lorsque la
survenue est exclusivement nocturne, le diagnostic dif-
férentiel avec des rêves, cauchemars, ou troubles du
comportement associés au sommeil paradoxal, peut
être difficile, surtout si le sujet a des troubles cognitifs.
Chez les patients fluctuants, le lien à l’état moteur est
rarement patent. Des hallucinations survenant préfé-
rentiellement au cours des périodes off ont été rappor-
tées. Il est important d’établir si les patients sont cons-
cients du caractère hallucinatoire des phénomènes. La
critique est la règle chez les patients atteints de MP et
indemnes de troubles cognitifs sévères, mais elle peut
être différée, le patient se laissant initialement prendre
par le réalisme de l’hallucination. Les hallucinations
sont alors généralement bien supportées et vécues
avec un certain détachement : il n’est pas rare que
l’entourage soit plus inquiet que le malade. Cependant,
même lorsque les hallucinations sont critiquées, elles
peuvent l’être de manière ambiguë ou fluctuante, lais-
sant supposer une part résiduelle d’adhésion. Il est
intéressant de noter qu’une même « labilité de la
croyance délirante » (Claude et Ey) ou encore cette
« attitude particulière d’hésitation » (Steck) avaient été
soulignées par d’anciens auteurs à propos des séquel-
les psychiques de l’encéphalite léthargique [3].
Lorsqu’il existe une démence, la critique est partielle
ou absente, et c’est alors que peuvent se développer
des idées délirantes à mécanisme hallucinatoire et (ou)
des troubles du comportement en rapport avec la thé-
matique hallucinatoire. À ce stade, on peut aussi obser-
ver des troubles de l’identification ou de la familiarité :
syndrome de Capgras, paramnésie reduplicative ou
non reconnaissance du caractère virtuel de l’image de
la télévision ou d’un miroir.
Évolution : hallucinations
chroniques et épisodes aigus
La situation la plus fréquente, que nous avons prise
pour type de description, est celle d’hallucinations
chroniques, sans délire ni confusion, sous la forme
d’épisodes brefs dont la fréquence est très variable
mais qui tendent à se répéter. Des études longitudina-
les à long terme ont confirmé le caractère durable du
phénomène chez la plupart des patients, ainsi que
l’augmentation de la prévalence cumulée au fil des ans
[16]. On ne dispose pas, toutefois, d’étude longitudi-
nale à long terme d’une cohorte de patients non sélec-
tionnés. Typiquement, les hallucinations apparaissent
G. Fénelon
Psychol NeuroPsychiatr Vieil, vol. 4, n° spécial 1, décembre 2006S20
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