
la philosophie du chirurgien quant à l’étendue de la
résection et la technique de reconstruction. Historique-
ment, la résection locorégionale étendue était considé-
rée comme inadaptée pour éradiquer la maladie et le
curage ganglionnaire comme probablement inutile.
L’ablation de la tumeur primitive par voie transhiatale
semblait donner les mêmes taux de survie à long terme
que les résections en bloc plus étendues. De nos jours,
à l’inverse, la résection R0 est considérée comme le
facteur pronostique le plus important dans le cancer de
l’œsophage et ce type de résection ne peut être réalisé
que par une résection en bloc de la tumeur primitive et
des ganglions régionaux.
Mise en condition préopératoire
Le management préopératoire d’un patient qui doit
bénéficier d’un geste d’exérèse œsophagienne doit
comporter plusieurs aspects. L’intoxication tabagique
doit être arrêtée au moins 1 mois avant la chirurgie.
Une kinésithérapie respiratoire associée aux fluidi-
fiants bronchiques en aérosols et aux médicaments
bronchodilatateurs est conseillée en préopératoire.
Une hygiène buccale et dentaire doit être imposée car
les bactéries anaérobies peuvent être une source
d’infection médiastinale et de pneumopathie. En cas
de dénutrition (perte ≥10 % du poids de forme), une
nutrition au mieux entérale doit être proposée pour une
période préopératoire d’au moins 7 jours. L’alimenta-
tion orale doit être facilitée en préopératoire par dila-
tation au ballon ou par gastrostomie percutanée
(endoscopique ou radiologique), cette dernière ne
contre-indiquant pas un geste ultérieur d’œsophagec-
tomie avec gastroplastie. La gastrostomie chirurgicale
doit être évitée, car plus morbide. Une immuno-
nutrition (type Oral Impact
®
Novartis Nutrition, une
brique 3 fois par jour pendant 7 jours en préopéra-
toire) est recommandée et ce, quel que soit l’état
nutritionnel des patients (dénutris ou non dénutris) [1].
Un prélèvement des expectorations bronchiques peut
être proposé, avec cultures aérobies et anaérobies,
afin de sélectionner des antibiotiques efficaces. Enfin,
une antibioprophylaxie ainsi qu’une thromboprophy-
laxie doivent être systématiquement envisagées dans la
période périopératoire.
Contre-indications
L’expérience du chirurgien ainsi que l’état général du
patient ont été identifiés comme les principaux facteurs
de mortalité postopératoire après œsophagectomie.
L’opérabilité du patient doit donc être évaluée avec,
comme critères de non-opérabilité généralement rete-
nus : la cirrhose avec insuffisance hépatocellulaire
et/ou hypertension portale, l’insuffisance respiratoire,
le volume expiratoire maximal/seconde (VEMS) infé-
rieur à 1000 mL/s, la perte de poids supérieure à
20 % du poids de forme et l’insuffisance cardiaque
stade III ou IV de la New York Heart Association
(NYHA).
Les critères de non-résécabilité habituellement retenus
sont : les adhérences à l’aorte sur plus de 90° de sa
circonférence, l’envahissement trachéobronchique,
azygos ou récurrentiel, le diamètre tumoral supérieur à
4 cm, les adénopathies cœliaques (excepté pour les
cancers de la jonction œsogastrique) ou sus-
claviculaires, les métastases viscérales.
Technique chirurgicale
Voies d’abord
L’œsophage peut être abordé par les 3 voies suivan-
tes : laparotomie-thoracotomie droite, laparotomie-
thoracotomie gauche ou transhiatale (figure 3).
L’œsophagectomie par double abord abdominal et
thoracique postéro-latéral droit offre l’accès le plus
direct à l’œsophage et facilite le curage abdominal et
médiastinal. Elle est indiquée pour toutes les tumeurs
intrathoraciques situées sous la crosse de la veine
azygos et est la voie d’abord préférée de la plupart des
chirurgiens. Cette approche permet une œsophagecto-
mie en bloc ainsi qu’une bonne exposition pour un
curage ganglionnaire régional étendu. Un abord cer-
vical complémentaire peut être réalisé pour l’anasto-
mose.
La voie transthoracique gauche, préférée des chirur-
giens chinois, permet la mobilisation de l’estomac par
la même voie d’abord, sous réserve d’une incision
diaphragmatique. Elle est principalement indiquée
pour les lésions du cardia et de l’œsophage distal [2].
L’œsophagectomie sans thoracotomie, ou voie
transhiatale, est principalement utilisée pour l’exérèse
des tumeurs de l’hypopharynx et de l’œsophage cervi-
cal, ainsi que pour l’exérèse des tumeurs intraépithé-
liales de l’œsophage intrathoracique. Elle est réalisée
par dissection à l’aveugle de l’œsophage thoracique
par double incision cervicale et abdominale. Cette
technique permet uniquement l’ablation des ganglions
périœsophagiens.
En conclusion, la laparotomie-thoracotomie droite (ou
intervention de Lewis-Santy) est l’intervention de réfé-
rence dans le traitement à visée curative des cancers du
bas œsophage.
Techniques de reconstruction
L’estomac est l’organe le plus couramment utilisé dans
la reconstruction après œsophagectomie. Après mobi-
lisation extensive du duodénum et de la racine du
Mini-revue
Hépato-Gastro, vol. 14, n°4, juillet-août 2007
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