L’Information psychiatrique 2005 ; 81 : 897-902 TROUBLES BIPOLAIRES Place des mesures psychoéducatives dans le traitement des troubles de l’humeur Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Christian Gay* RÉSUMÉ La maladie bipolaire est grave et invalidante, elle est la cause de beaucoup de souffrance pour le malade et pour son entourage. Il est bien démontré que les traitements par des psychothérapies psychoéducatives permettent de diminuer ses récidives et de limiter le nombre des hospitalisations. Les mesures psychoéducatives consistent à informer de manière structurée et à éduquer des patients et leurs familles. Leurs objectifs sont d’établir et de maintenir une alliance thérapeutique, d’apprendre à connaître le trouble et à savoir reconnaître précocement les symptômes d’une récidive, d’amener le patient à accepter sa maladie, d’améliorer l’observance du traitement, d’agir sur certains déterminants environnementaux et sur la gestion de l’existence et de limiter les conséquences du trouble. Mots clés : troubles bipolaires, psychothérapie psychoéducative ABSTRACT The use of psycho-educative schemes in treating thymic disorders. Bipolar illness is a severe and debilitating illness. It is the cause of much suffering for the patients and their families. It has been shown that psycho-reeducation psychotherapies decrease relapses and rehospitalizations. Psycho-reeducation is based on education and structured information of the patients and their families. The main goals are to learn the patients how to recognize the disorder and become compliant to the treatment, to establish a therapeutic alliance, to prevent relapses, to act on causal environmental factors, to manage daily life, and to limit the consequences of the disorder. Key words: bipolar disorders, psycho-reeducation RESUMEN Interés de la medidas psicoeducativas en el tratamiento de los transtornos del humor. La enfermedad bipolar es una enfermedad grave e invalidante que origina mucho sufrimiento para el enfermo y su familia. Está demostrado que el tratamiento basado en en las psicoterapias psicoeducativas permite disminuir las recidivas de la enfermedad y limitar el número de hospitalizaciones. Las medidas psicoeducativas consisten en una información estructurada y en una educación de los pacientes y de sus familias. El objetivo es lograr y mantener una alianza terapéutica, aprender a conocer el transtorno y saber reconocer precozmente los síntomas de una recidiva, ayudar al paciente a aceptar la enfermedad, mejorar la observacia del tratamiento, actuar sobre algunos determinantes del entorno y sobre la gestión de la existencia, limitando así las consecuencias de la enfermedad. Palabras clave : transtornos bipolares, psicoterapias psicoeducativas, alianza terapéutica, información, observancia, prevención * Centre hospitalier Sainte-Anne, Paris. <[email protected]> L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 81, N° 10 - DÉCEMBRE 2005 897 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. C. Gay Nous avons, dans notre service à l’hôpital Sainte-Anne, une expérience de plusieurs années des mesures psychoéducatives dans les maladies maniacodépressives. Avant nous, de telles mesures avaient déjà été mises en place dans d’autres services de l’hôpital pour la prise en charge des troubles schizophréniques. L’enjeu des prises en charge psychoéducatives dans les maladies maniacodépressives est très important parce que ce sont des maladies graves et invalidantes, qui génèrent beaucoup de souffrance pour les patients et leur entourage. Elles sont reconnues comme faisant partie des dix maladies les plus handicapantes sur le plan mondial. Ses handicaps sont sociaux, professionnels et familiaux ; ils conduisent à une marginalisation des patients. Ses conséquences sont graves aussi en termes de mortalité, trois fois plus importante que dans la population générale, ce qui ne s’explique pas seulement par le risque suicidaire, mais aussi par les conduites à risque et les maladies somatiques (en particulier cardiovasculaires). Les incidences médicolégales sont aussi importantes, parce que les patients souffrant de troubles maniacodépressifs s’exposent facilement à enfreindre la loi et sont souvent responsables de délits mineurs. La recherche de sensations fortes est une caractéristique fréquemment observée chez les maniacodépressifs. Le coût financier des troubles de l’humeur est très élevé. Il n’est pas bien connu en France, mais il a été évalué à 45 milliards de dollars aux États-Unis. Il est nécessaire d’optimiser le diagnostic et le traitement de la maladie, et d’améliorer d’une façon générale la prise en charge des patients. On sait que la résistance à la prise en charge est très forte chez beaucoup d’entre eux. Ils refusent souvent de prendre leur traitement, pour de nombreuses raisons, qui tiennent à la fois à leur personnalité et à la nature même de la maladie. En état maniaque, ils sont dans l’incapacité d’évaluer leur état et nient toute pathologie. En phase dépressive, ils sont envahis par un pessimisme général avec des idées d’incurabilité, Un objectif important des prises en charge est de permettre de contrôler les facteurs qui sont susceptibles de provoquer rechutes et récidives. Il existe des études récentes qui montrent que le recours à des mesures psychoéducatives permet de diminuer le nombre de récidives et d’hospitalisations Les mesures psychoéducatives consistent à informer de manière structurée et à éduquer les patients et leur famille. Cette façon de procéder est relativement récente. Il y a vingt ou trente ans, l’approche des troubles maniacodépressifs était essentiellement médicamenteuse et le traitement reposait surtout sur le lithium. La vision actuelle du traitement de ces troubles est assez différente. Elle est plurifactorielle. On sait que les troubles bipolaires sont déterminés par un ensemble de facteurs (environnement, famille, couple, travail, hygiène de vie, attitude vis-à-vis des traitements) dont beaucoup sont maintenant pris en compte dans l’approche thérapeutique. On cherche ainsi à intervenir sur les différents déterminants de la maladie et des rechutes. On sait aussi qu’il existe des 898 troubles associés, sur lesquels une intervention est possible. Le pronostic de la maladie est d’autant meilleur que le traitement aura été entrepris précocement et on cherche donc à agir le plus tôt possible. Thérapies familiales, conjugales, d’inspiration analytique, de groupe et comportementales Les perturbations comportementales et émotionnelles provoquées par la maladie dissolvent les liens familiaux. Et les difficultés familiales et conjugales sont des facteurs de récidive, cela a été montré dans plusieurs études. Dans ces conditions, les mesures d’information sur la maladie auprès de la famille sont indispensables. Les thérapies familiales et de couple peuvent aussi trouver leur place. En ce qui concerne les traitements d’inspiration analytique, il a longtemps été dit que la psychose maniacodépressive n’est pas une bonne indication pour un travail analytique. Il a été dit par exemple que l’humeur ludique des patients hypomanes ou maniaques met nécessairement en échec le travail analytique. Mais beaucoup ont aujourd’hui une vision différente des choses et il semble que l’on puisse très bien être à la fois maniacodépressif et pris dans un conflit névrotique, ce qui pourrait rendre le travail analytique beaucoup plus accessible. Enfin, les thérapies comportementales, de même que les thérapies interpersonnelles, peuvent constituer des indications intéressantes, et plusieurs études ont récemment été publiées démontrant leur intérêt dans les troubles maniacodépressifs. Modalités générales des mesures psychoéducatives Les techniques de prise en charge destinées aux patients et à leurs familles sont effectuées par des professionnels de la santé (médecins, psychologues, infirmières) qui ont été spécifiquement formés et sont qualifiés. Elles représentent un acte thérapeutique qui s’inscrit dans le cadre d’une alliance. Elles associent une information à des mesures psychologiques bien précises. Dans le service, nous avons mis en place deux approches parallèles : - Des conférences qui ont lieu une fois par semaine et qui abordent tous les aspects des maladies maniacodépressives. Il s’agit d’informations très générales : la clinique, les traitements, les déterminants psychologiques, la vie familiale et professionnelle, la créativité. Environ vingt-cinq thèmes sont abordés dans l’année pour une cinquantaine d’heures. - Des groupes composés d’un nombre limité d’une dizaine de patients (des personnes de l’entourage familial peuvent être présentes). Les personnes sont sélectionnées pour former des groupes homogènes. Les thèmes de dis- L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 81, N° 10 - DÉCEMBRE 2005 Mesures psycoéducatives dans le traitement des troubles de l’humeur cussion sont variables et en général décidés par le groupe. Le principe est d’associer une information de base à des mesures psychologiques spécifiques permettant au sujet d’acquérir un certain contrôle sur sa maladie. Les objectifs sont d’établir et de maintenir une alliance thérapeutique, d’apprendre à reconnaître le trouble, à accepter la maladie, à améliorer l’observance du traitement, à savoir reconnaître précocement les symptômes d’une récidive, à agir sur certains déterminants environnementaux et sur la gestion de l’existence, à limiter les conséquences du trouble. - Plus récemment nous avons élaboré un programme psychoéducatif plus complet qui figure en annexe. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. La reconnaissance des troubles La reconnaissance précoce des symptômes est un élément important, ce qui a été souligné par des auteurs anglais qui ont montré que l’information et un travail de reconnaissance précoce des premières manifestations de la maladie permettent de prévenir les hospitalisations, surtout chez les patients maniaques. Agir sur les déterminants de la maladie et sur l’observance La maladie est déterminée par un certain nombre de facteurs dont certains sont assez bien connus. On sait par exemple qu’interviennent des facteurs qui sont liés au stress et au mode de vie des patients. Plusieurs types de stress sont reconnus comme susceptibles de déstabiliser les patients et de favoriser les récidives, ce sont par exemple ceux qui génèrent des perturbations des rythmes quotidiens de la vie et le manque de sommeil. Il est intéressant ici de rappeler que Kraepelin, au début du XXe siècle, avait déjà insisté sur l’importance des facteurs déclenchants les troubles maniacodépressifs, particulièrement au début de la maladie. Ces événements déclenchants du début de la maladie ne sont pas toujours ceux qui déclenchent les rechutes, même si c’est parfois le cas. Dans d’autres cas, on suppose qu’il existe une sorte de mise en route plus ou moins automatique de la maladie sans que la présence de facteurs déclenchants initiaux soit nécessaire, avec une seule diminution générale du seuil de tolérance aux événements environnants. Et il faut souligner ici l’importance de l’observance du traitement : les traitements des troubles de l’humeur ont des effets protecteurs contre les effets déstructurants du stress, mais ils sont très inégalement observés par les patients, pour des raisons tenant à leur personnalité et au fait qu’ils sont chroniques, sur le très long terme, ce qui n’est pas toujours bien accepté. Toutes ces choses doivent être bien expliquées aux patients et à leurs familles. L’acceptation du trouble Faire accepter aux patients leur maladie est le problème numéro un. C’est une des questions les plus difficiles à résoudre, mais la réussite de cet objectif conditionnera les résultats de la prise en charge des patients. L’acceptation de la maladie a des effets très favorables de beaucoup de points de vue, particulièrement en ce qui concerne l’observance. Il est très difficile de faire accepter leur trouble aux patients du fait de l’image négative qui est associée aux maladies mentales : les définitions des termes « manie » et « dépression » dans le Petit Larousse sont très négatives. Cette acceptation s’obtient étape par étape. La première concerne le diagnostic. Il est certainement nécessaire de faire en sorte que les patients connaissent le diagnostic de leur maladie, mais cela ne se fait pas brutalement. Il faut travailler sur la définition du trouble. Par exemple, il peut être utile de faire référence à des personnes illustres. Les Américains commencent toujours par citer Napoléon. Nous préférons faire référence à Lincoln, Roosevelt et Churchill, ou encore à Schuman, Rossini et Balzac. On conseille aussi la lecture du livre de Kay Jamison, De l’exaltation à la dépression, qui est un livre très instructif et émouvant où Kay Jamison, qui est maniacodépressive, raconte sa propre histoire. Les patients retirent beaucoup de cet ouvrage qui montre que l’on peut accéder à des fonctions professionnelles très importantes tout en souffrant d’une maladie maniacodépressive. D’autres livres sont intéressants à lire pour les patients : Histoire de Pierre, le Miroir de Janus par exemple Améliorer la qualité de l’observance Cela consiste d’abord à mettre en avant les avantages que l’on peut tirer des traitements par le lithium, les nouveaux antipsychotiques, les antidépresseurs et les antiépileptiques, pour des effets indésirables somme toute assez limités. Puis à rappeler que les personnes souffrant de maladies maniacodépressives sont exposées aux récidives, au suicide, aux conduites à risque et à la désocialisation. On souligne aussi fortement les risques liés à l’arrêt du traitement. L’arrêt brutal d’un traitement (surtout par le lithium) peut provoquer une aggravation rapide des troubles et, chez certaines personnes, une résurgence maniaque immédiate. Il faut aussi insister sur le fait que, quand on prescrit un traitement, cela s’inscrit dans le cadre d’une alliance. Une ordonnance n’est plus, comme c’était le cas autrefois, ordonnée, mais elle est aujourd’hui longuement discutée avec le patient. Je me souviens qu’il y a une vingtaine d’années, des psychiatres écrivaient en toutes lettres sur leurs ordonnances : « j’ordonne ». Il est certain que cette manière de faire est très décalée de nos pratiques actuelles. Aujourd’hui, la discussion des traitements avec les patients et le fait qu’ils soient partie prenante dans la prise en charge médicamenteuse sont des éléments essentiels. On discute des traitements et des effets secondaires, des taux sanguins de lithium, des risques de somnolence, etc. On doit très souvent lutter contre des idées fausses qui circulent dans les médias ou autres. Sachant que, parallèlement à cette information sur le médicament, il y a une information à diffuser L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 81, N° 10 - DÉCEMBRE 2005 899 C. Gay sur la vie du sujet et sur le contrôle des événements qui peuvent déclencher des rechutes. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Reconnaître les signes annonciateurs d’une rechute Il existe d’assez nombreuses études qui montrent que les patients qui ont suivi des programmes utilisant des mesures de psychoéducation ont moins de récidives et de réhospitalisations. Encore faut-il qu’ils sachent reconnaître les symptômes qui précèdent leurs rechutes. Parce que, quand un patient ne se sent pas bien, cela ne veut pas automatiquement dire qu’il va rechuter. Il y a toujours une frontière difficile à délimiter. Un patient maniacodépressif en train de rechuter peut certainement présenter les symptômes classiques qui précèdent les rechutes, comme, lors d’une rechute maniaque, une insomnie, faire des dépenses excessives, se mettre à parler beaucoup, à avoir de multiples projets, tenir des propos religieux inhabituels. Mais il peut aussi avoir ce que l’on appelle un signal-symptôme, symptôme qui lui est assez spécifique et qu’il doit savoir reconnaître comme tel. Un travail est à faire pour amener progressivement le patient, aidé de l’entourage, à reconnaître son symptôme. Il y a des manières assez standardisées de travailler sur les symptômes courants ou quotidiens. L’Américain Robert Post a créé un diagramme dans lequel le patient doit noter quotidiennement son humeur, son temps de sommeil et d’autres éléments, qui l’amènent à être sensibilisé à des événements habituellement anodins, mais qui peuvent prendre une dimension importante, pour anticiper des symptômes plus graves, annonciateurs d’une rechute. Il existe aussi des échelles d’auto-évaluation de type analogique, où le patient se situe sur une droite, du côté du plus ou du côté du moins. Agir sur les déterminants Nous avons précédemment insisté sur le déterminisme plurifactoriel de la maladie. Des études ont montré que, dans le cas des jumeaux monozygotes, c’est-à-dire qui ont exactement le même patrimoine génétique, il arrive que l’un déclenche la maladie et pas l’autre. Il y donc des déterminants de la maladie liés à la prédisposition et d’autres liés à l’environnement. Toute une série de situations ou d’événements très précoces, dont l’importance a été bien démontrée dans le déterminisme des troubles de l’humeur, sont les carences affectives, les deuils précoces, les agressions sexuelles, les séparations. Il s’agit de facteurs de fragilisation, habituellement difficiles à reconstituer à l’âge adulte, mais que l’on retrouve couramment chez les personnalités abandonniques ou borderline. On retrouve souvent de tels antécédents chez celles qui souffrent de troubles de l’humeur avec souvent aussi des éléments plus tardifs, qui peuvent avoir un rôle déclenchant ou précipitant chez les prédisposées : un surmenage, un manque de sommeil, une cassure des rythmes, un abus de 900 toxiques (alcool ou drogues), des situations conflictuelles. Ces éléments peuvent déclencher l’apparition des troubles et un certain nombre d’entre eux peuvent être contrôlés avec une meilleure gestion de vie. J’insiste donc beaucoup sur l’intérêt d’avoir une meilleure hygiène de vie concernant les rythmes, le sommeil, la prise de toxiques ou de café, etc. car il y a véritablement là des moyens de limiter le risque de récidives. Je conseille aux patients de lire l’ouvrage de Bauer et McBride, les Programmes psychothérapeutiques d’objectifs personnels (Editions Médecine/ Hygiène), seul ouvrage en français qui traite de cette question. Bauer et McBride décrivent une stratégie de prise en charge dans le cadre des mesures psychoéducatives, avec une information très complète sur ce qui peut être fait, information basique sur la façon dont se déroulent les réunions, stratégies qui permettent de standardiser les mesures psychoéducatives de façon reproductible, avec un programme de soins en deux phases : cinq séances d’information, puis identification d’objectifs utiles et réalistes (qui concernent la peur des rechutes, la chronicité des symptômes, l’acceptation sociale et professionnelle, le fonctionnement social). Limites des mesures de psychoéducation Plusieurs études faites sur le long terme ont montré que les patients qui avaient une prise en charge utilisant les mesures de psychoéducation avaient moins de rechutes et moins de réhospitalisations, d’autant plus que les mesures incluaient les familles. Néanmoins, il faut dire aussi que ces prises en charge ont leurs limites. La première limite est celle de la mise en place de tels programmes : besoin de locaux, de temps disponible, d’équipes soignantes formées à ces techniques, application de codifications qui ne sont pas encore très bien faites. De plus, ces mesures ne s’appliquent pas, ou seulement très difficilement, à certains malades, par exemple ceux qui présentent des manies instables, qui sont en général convaincus qu’ils sont plus forts que le traitement. Des facteurs de personnalité entrent aussi toujours en jeu. L’idéal est de mettre en place ces mesures quand les patients sont au cours d’une phase d’intervalle libre (mais ils sont souvent moins demandeurs lors de ces périodes-là). Conclusion Les mesures psychoéducatives font partie intégrante de la prise en charge des patients souffrant de troubles maniacodépressifs. Elles sont destinées aux patients et à leurs familles, à qui elles doivent permettre de mieux comprendre la maladie et ses conséquences, ses facteurs étiologiques et les objectifs thérapeutiques. Elles doivent permettre L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 81, N° 10 - DÉCEMBRE 2005 Mesures psycoéducatives dans le traitement des troubles de l’humeur Programme psychoéducatif destiné aux patients atteints de troubles bipolaires Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. re 1 séance. Introduction Définition de la psychoéducation, présentation du groupe, principes et règles de fonctionnement des thérapies de groupe, généralités sur les troubles bipolaires. 2e et 3e séances. La dépression Connaître les symptômes de l’épisode dépressif, identifier les symptômes qui annoncent une récidive ou une rechute, être informé sur les différentes causes, les conséquences et les modalités évolutives du trouble dépressif, apprendre à s’auto-évaluer (questionnaire d’auto-évaluation, échelle analogique...), mise en situation, être capable de lister ses propres symptômes dépressifs, pouvoir identifier les symptômes annonciateurs d’une rechute ou d’une récidive dépressive, connaître les causes des états dépressifs, être capable d’évaluer son humeur et les autres symptômes. 4e séance. Traitements de la dépression Savoir distinguer un antidépresseur d’un tranquillisant, d’un thymorégulateur ou d’un neuroleptique, connaître les différentes approches thérapeutiques de la dépression, connaître les objectifs d’un traitement médicamenteux, savoir distinguer un effet indésirable d’un accident de traitement, signification et contrôle d’un effet indésirable, connaître les indications d’un traitement par ECT, être informé sur l’intérêt des psychothérapies, connaître les précautions d’utilisation des antidépresseurs. 5e et 6e séances. L’excitation maniaque et l’état mixte Connaître les symptômes d’un état d’excitation, identifier les symptômes qui annoncent une récidive ou une rechute, être informé sur les différentes causes, les conséquences et les modalités évolutives de l’excitation, apprendre à s’auto-évaluer (questionnaire d’autoévaluation, échelle analogique...), être capable de lister ses propres symptômes d’excitation, pouvoir identifier les symptômes annonciateurs d’un état d’excitation, être capable de préciser les causes d’un état d’excitation, connaître les différences entre un état d’excitation et un état mixte, mise en situation, évaluer son humeur et les autres symptômes, présentation du film Au sommet de la descente, analyse des symptômes, commentaires, présentation du diagramme de suivi des troubles bipolaires, première cotation de ce diagramme. 7e séance. Traitement des états d’excitation et prévention des récidives Savoir distinguer un thymorégulateur d’un tranquillisant, d’un antidépresseur ou d’un neuroleptique, connaître les différentes approches thérapeutiques de l’état d’excitation, connaître les objectifs d’un traitement thymorégulateur, savoir distinguer un effet indésirable d’un accident de traitement, signification et contrôle d’un effet indésirable, être informé sur l’intérêt des psychothérapies, connaître les précautions d’utilisation des thymorégulateurs. 8e séance. Reconnaissance et évaluation du trouble Exercices visant à reconnaître les symptômes d’une récidive et ceux qui annoncent une rechute à partir de présentations de cas et de mises en situation, calcul de son index de bipolarité, évaluation de son humeur sur le diagramme, évaluation de son humeur à partir d’échelles analogiques. 9e séance. Règles d’hygiène de vie Le sommeil (connaître les conséquences d’une insomnie ou d’une hypersomnie et savoir comment faciliter son endormissement), savoir respecter ses rythmes sociaux, connaître les principaux excitants, situation de surmenage, savoir les reconnaître et les contrôler, mise en situation, évaluation de son humeur sur le diagramme. 10e séance. Contrôler la rechute ou la récidive Connaître les facteurs fragilisants, déclenchants et précipitants des rechutes, savoir reconnaître ses propres facteurs déclenchants ou précipitants, savoir contrôler l’impact des facteurs déclenchants, exposition de cas à titre d’exemple, mise en situation, évaluation de son humeur sur le diagramme. 11e séance. Gestion de sa vie personnelle (familiale, sociale, professionnelle, sportive...), résolution des problèmes Connaître les facteurs de dysfonctionnement au sein de la famille, comment faciliter la communication, éviter les conflits, comment parler de son trouble à ses enfants, son conjoint, ses parents, vie sexuelle (difficultés, risques...), savoir quoi dire à ses amis, choisir ses interlocuteurs, mise en situation, choix des études, d’une activité professionnelle, comment organiser sa vie professionnelle, choix de ses loisirs, évaluation de son humeur sur le diagramme. 12e séance. Contrôle de ses émotions Acquisition des principes de base de la relaxation, apprendre à réévaluer des situations, mise en situation, évaluation de son humeur sur le diagramme. 13e séance. Abord cognitif Savoir lutter contre ses pensées négatives, mise en situation, évaluation de son humeur sur le diagramme. 14e séance. Gestion de sa vie et acceptation Comment bien organiser ses journées, comment accepter son trouble et comment le faire accepter aux autres, mise en situation, évaluation de son humeur sur le diagramme. 15e séance. Intérêt de la psychoéducation Évaluation des 14 séances, critiques, commentaires, questionnaire de satisfaction, présentation du carnet de suivi. Une 16e séance est prévue 6 mois après afin d’évaluer à distance l’intérêt de ces mesures thérapeutiques L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 81, N° 10 - DÉCEMBRE 2005 901 C. Gay nuent que quand le patient est bien informé et a compris ce qui va suivre. À Sainte-Anne, c’est un peu différent, dans le sens où les patients ont en général déjà bénéficié de ces conférences, donc de ces informations. GAY C. Place des mesures psychoéducatives dans le traitement des troubles de l’humeur. L’Information Psychiatrique 2005 ; 81 : 897-902 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. également d’améliorer la qualité de l’observance et donc de limiter le nombre de récidives. Les patients doivent devenir capables d’anticiper les rechutes et d’agir sur les facteurs annonciateurs d’une rechute, surtout en ce qui concerne l’hygiène de vie. Les mesures psychoéducatives ne peuvent être mises en place que si le patient a déjà pris contact avec l’équipe soignante et après qu’il a reçu une information assez complète sur la maladie. En pratique, on commence par cinq semaines d’information et les mesures ne conti- Virginia Woolf 902 L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 81, N° 10 - DÉCEMBRE 2005