
Approche gène-candidat
L’approche gène-candidat est une approche risquée tout
particulièrement quand la physiopathologie n’est pas claire.
Elle consiste à rechercher des anomalies de séquence dans
des gènes choisis pour leur possible implication dans la
maladie. À côté du fait que cette approche ne permet pas
de vraies avancées dans la compréhension d’une maladie
(elle ne fait que confirmer des hypothèses déjà émises), ce
type de technique peut apporter de fausses conclusions, car
les polymorphismes, même rares, ne sont pas exception-
nels. Dans ce cadre, les résultats doivent obligatoirement
être complétés par une approche fonctionnelle, prouvant
l’implication du gène muté et, idéalement, par la démon-
stration de la liaison entre l’anomalie de séquence et la
ségrégation de la maladie dans une ou plusieurs familles.
Études d’association
Les études d’association visent à mettre en évidence, dans
la population, un déséquilibre de liaison entre un phénotype
et un polymorphisme. Elles exposent aux mêmes risques
que l’approche gène-candidat quand elles sont limitées à
l’étude d’un gène choisi pour sa potentielle implication
dans la physiopathologie de la maladie. Par ailleurs, cette
technique, qui nécessite une population témoin bien appa-
riée, est très dépendante de la taille de l’échantillon et de la
fréquence des polymorphismes dans la population étudiée.
Ce déséquilibre peut survenir par chance, ce qui rend abso-
lument nécessaire la réplication de l’étude sur plusieurs
cohortes. L’approche génome entier, rendue possible par
les nouvelles technologies de biologie moléculaire et l’uti-
lisation de puces SNP, est plus performante mais nécessite
de grandes cohortes. Dans tous les cas, le phénotype doit
être le plus précis possible, mais les approches de déséqui-
libre de liaison peuvent se révéler peu efficaces et nécessiter
de très grandes cohortes si la maladie est très hétérogène sur
le plan génétique, de nombreux gènes pouvant être respon-
sables d’un phénotype final commun.
Génétique inverse (linkage)
L’approche de loin la plus performante repose sur le linkage
et consiste à rechercher, dans de grandes familles sur plu-
sieurs générations, une liaison entre le phénotype et une
région du génome commune aux sujets atteints. Cette tech-
nique, comme les études GWAS, présente le grand intérêt
de faire abstraction de toute hypothèse physiopathologique
jusqu’àl’identification du locus. Ces deux approches,
GWAS et linkage, peuvent d’ailleurs être couplées et rendre
la démarche plus performante. Une fois le locus identifié, il
faudra séquencer les gènes à la recherche d’une anomalie de
séquence dont il faudra vérifier la ségrégation dans la ou les
familles, éliminer un polymorphisme rare, puis confirmer le
rôle fonctionnel de ces mutations. Cette technique a
l’inconvénient de nécessiter de grandes familles sur plu-
sieurs générations, ce qui n’est pas toujours réalisable, par-
ticulièrement quand le phénotype est d’apparition tardive.
C’est le cas du RAC qui apparaît chez des sujets âgés dont le
statut des ascendants est souvent difficile à retrouver et celui
de la descendance souvent indéterminé, les sujets étant trop
jeunes pour avoir développé la maladie. Enfin, si la péné-
trance est variable ou s’il existe de fréquentes phénocopies,
cette technique de génétique inverse peut être difficile à
mettre en œuvre.
La génétique du rétrécissement aortique n’a réellement
débuté qu’au cours de ces dernières années, et les connais-
sances sont encore parcellaires, mais les résultats déjà dis-
ponibles y compris les données de génétique clinique et
d’épidémiologie génétique montrent que l’hypothèse géné-
tique n’est pas à négliger et représente un enjeu majeur dans
la démarche physiopathologique.
Ge
´ne
´tique de la bicuspidie aortique
La bicuspidie aortique présente l’avantage d’être identi-
fiable dès les premières années de la vie et de pouvoir plus
facilement en tracer le caractère héréditaire. Dans les années
1990 et 2000, plusieurs travaux de recherche clinique ont
montré que l’origine de la biscuspidie aortique était essen-
tiellement génétique. Une fréquence anormale de biscupi-
die avait été retrouvée chez les apparentés au premier degré
de sujets atteints de cette affection et surtout une large étude
américaine a montré que le taux d’héritabilité de la biscus-
pidie était de près de 90 % [9]. Le même groupe, par une
approche d’analyse de liaison, a pu identifier trois locus sur
les chromosomes 18, 5 et 13 [10]. Ces travaux n’étaient pas
focalisés sur le RAC, mais essentiellement sur la bicuspidie.
Un pas important a été franchi quand le gène NOTCH1 apu
être mis en cause [11]. La voie de NOTCH1 a en effet été
identifiée par une démarche de linkage dans une famille
américaine d’origine espagnole, où la ségrégation d’une
pathologie aortique était certaine sur quatre générations.
Dix sujets étaient porteurs d’une atteinte valvulaire aortique
et, parmi ceux-ci, six étaient porteurs d’une biscuspidie et
trois avaient des valves calcifiées sans bicuspidie. Une ana-
lyse de liaison génétique a permis de localiser le gène en
cause dans une région de 9 cM (environ 3 Mbases) en
9q34-35 entre le marqueur D9S1826 et D9qter, avec un
LOD score significatif de 3,5 à 0 % de recombinaison.
Parmi les 30 gènes connus se trouvait NOTCH1, dont le
séquençage a permis d’identifier une mutation présente
chez tous les sujets atteints et absente chez les sujets sains.
Cette mutation R1108X est responsable d’un codon stop
prématuré qui doit se traduire par une protéine tronquée.
260 STV, vol. 22, n°5, mai 2010
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