Il ne s’agit pas d’une maladie psychiatrique, mais d’une maladie neurologique qui lèse les
régions frontales et temporales par un processus de dégénérescence neuronale entraînant la mort
cellulaire. Ce processus est évolutif, et distinct de celui de la maladie d’Alzheimer. Il est respon-
sable de modifications du comportement indépendamment des événements vécus par la per-
sonne malade, plus que de troubles de la mémoire ou de l’orientation. Les anomalies bio-
chimiques sont différentes de celles de la maladie d’Alzheimer ou de la maladie de Parkinson.
Ces maladies ne sont pour cela pas traitées avec les mêmes molécules.
Cette maladie est à l’origine :
de changements dans le comportement : apathie, perte de l’intérêt pour l’hygiène et troubles
du contrôle de soi (appétence pour l’alcool, augmentation de l’appétit, de la consommation de
tabac, stéréotypies, familiarité, perte des convenances sociales, achats inconsidérés, difficultés
à
rester en place, actes délictueux parfois) ;
de changements dans l’humeur : irritabilité, euphorie ou tristesse apparente plus que ressentie ;
d’une réduction de l’attention, de la concentration et de la mémoire, et de troubles du langage ;
d’une réduction de la tension artérielle pouvant entraîner des syncopes.
Cette maladie affecte autant les hommes que les femmes, contrairement à ce qui est obser
dans la maladie d’Alzheimer, avec un début entre 45 et 65 ans le plus souvent, certains malades
pouvant cependant être atteints plus précocement ou à un âge plus tardif.
Il s’agit d’une maladie dite orpheline, car elle touche moins d’une personne sur 2 000.
Quarante pour cent des personnes malades ont, dans leur famille, d’autres cas de troubles de
la mémoire ou du comportement, mais cela ne veut pas dire qu’il s’agit de la même maladie.
Dans les cas peu fréquents de transmission génétique autosomique dominante, on retrouve géné-
ralement des histoires similaires sur trois générations.
Durée d’évolution : il existe une grande disparité, la durée d’évolution de la maladie pouvant
aller de 3 à 20 ans.
Un complément d’information sur cette maladie est disponible sur le site français :
http://perso.wanadoo.fr/adna/DegenerescenceFT.html ou sur le site anglais : www.pdsg.org.uk
Favoriser la réalisation des tâches de la vie quotidienne : l’apathie est fréquente et réduit les
initiatives. Le patient n’est capable de réaliser les tâches simples de la vie quotidienne que sur sti-
mulation verbale, avec parfois la nécessité d’introduire des récompenses.
Encourager l’éclosion de nouvelles activités : si cette maladie réduit souvent le champ des acti-
vités, elle peut aussi en faire émerger de nouvelles, en particulier dans les domaines de l’art et du
sport. Certains patients développent ainsi un goût pour le dessin, la pratique d’un instrument de
musique ou d’une activité sportive, parfois de façon exclusive, compulsive. Il faudra savoir malgré
tout valoriser cette activité en la canalisant.
Des effets de la maladie : repérer les facteurs aggravants pour les éviter, comme la mise en échec,
la colère de l’entourage, une parole complexe (au second degré) qui ne sera pas comprise par le
malade, la monotonie de l’environnement ou la multiplicité des distracteurs (télévision, conversation,
musique des enfants, etc.), les longues fêtes, les réunions avec libre accès aux boissons alcoolisées,
la non-facilitation de l’habillage. Repérer aussi les troubles de la déglutition lors d’épisodes de glou-
Fiche à détacher et à archiver
N° 52
Fiche
technique
Sous la responsabilité de leurs auteurs
Recommandations aux proches de patients
ayant une dégénérescence frontotemporale
(maladie de Pick)
La Lettre du Neurologue - vol. IX - n° 6 - juin 2005 I
Apprendre
la maladie
Inciter
Recommandations aux proches de patients
ayant une dégénérescence frontotemporale (maladie de Pick)
F. Lebert
(Centre de la mémoire, hôpital Roger-Salengro,
centre hospitalier universitaire, Lille)
Protéger
tonnerie et fractionner les repas et les prises. Éloigner les armes, discuter avec le spécialiste du
risque du maintien de la conduite automobile.
L’état physique : limiter, dans la mesure du possible, l’obésité, qui favorisera les problèmes res-
piratoires et la perte de mobilité, l’alcoolisme, le tabagisme, les problèmes infectieux par négli-
gence physique.
Les biens : la réalisation de dépenses excessives étant fréquente, une intervention auprès de la
banque est souhaitable, avec une limitation des cartes de crédit et des chéquiers, en réfléchissant
à la nécessité d’une mise sous protection juridique. Un contact avec une assistante sociale vous
permettra d’en connaître la procédure.
Les droits : la mise en arrêt maladie est la première démarche à effectuer afin d’éviter un licencie-
ment pour faute professionnelle. Les malades relèvent d’une prise en charge à 100 % par l’assurance
maladie, dont la demande sera faite par le médecin traitant. Une demande de carte d’invalidité peut
être faite ; elle sera attribuée si la COTOREP évalue le taux d’incapacité du malade à plus de 80 %.
Le malade relevant d’une mise en maladie de longue durée bénéficie d’indemnités journalières. Au
bout de 3 ans, une mise en invalidité est envisageable. Si la 3ecatégorie est rejetée, on peut deman-
der l’allocation compensatrice pour tierce personne, attribuée lorsque le taux d’incapacité atteint au
moins 80 %. Pour les malades de moins de 60 ans titulaires d’une pension d’invalidité, une demande
de majoration de tierce personne peut être faite à condition d’être dans l’obligation de recourir à
l’assistance d’une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires. L’allocation adulte handicapé
peut être envisagée en fonction des antécédents d’activités professionnelles et des revenus.
Le malade étant le plus souvent anosognosique (il n’a pas conscience de ses difficultés), il ne
se soignera pas si ses proches ne l’y incitent pas.
Si aucun traitement n’est aujourd’hui reconnu comme médicament des dégénérescences fronto
-
temporales, les symptômes comportementaux et les modifications de l’humeur sont malgré tout
accessibles à certains médicaments agissant surtout sur le système sérotoninergique (inhibiteurs
de la recapture de la sérotonine). Ces médicaments sont habituellement utilisés dans la dépres-
sion. L’un des plus efficaces (la trazodone) dans notre expérience en 2004 agit sur l’instabilité
psychomotrice, l’agitation, l’hyperphagie et les troubles du sommeil et est disponible par autori-
sation transitoire d’utilisation dans les pharmacies des hôpitaux de France. En revanche, une
classe de médicaments est à éviter : celle des neuroleptiques.
Lors de troubles du langage initiaux, une aide par des séances d’orthophonie sera à proposer.
Solliciter des traitements pour l’hypotension lors de symptômes (syncopes, pâleurs, chutes, etc.).
Partager ses expériences. Cette maladie n’est bien comprise que de ceux qui l’ont vécue. Le
partage des expériences au sein d’une association de familles peut être précieuse. Elle peut aussi
aider à choisir la façon d’expliquer la maladie à la famille et aux amis, qui ont spontanément
tendance à s’éloigner.
Maintenir ses activités antérieures. Même si les troubles du comportement nécessitent la mise
en place d’une relative surveillance, le maintien des activités est souhaitable pour poursuivre des
activités indépendantes et à l’écart de la maladie, laquelle pourra s’échelonner sur des années,
en plus de la nécessité d’apporter un salaire en cas d’activités professionnelles.
S’éloigner, en passant la main. S’isoler pour se reposer, souffler, est indispensable pour tenir
dans la durée et éviter la dépression d’épuisement.
Refuser la violence conjugale. Même si c’est la maladie qui est responsable de ces nouveaux com-
portements, cela ne signifie pas qu’il faille les accepter en silence. Savoir se protéger est indispensable.
Penser à sa propre santé. Si les consultations médicales pour le malade sont fréquentes, le proche
néglige quant à lui sa propre santé, dont il aura pourtant besoin pour faire progressivement face à
la charge affective, morale et physique que représente au fil du temps la maladie de l’autre.
Recommandations aux proches de patients
ayant une dégénérescence frontotemporale
(maladie de Pick)
II La Lettre du Neurologue - vol. IX - n° 6 - juin 2005
Fiche à détacher et à archiver
Soigner
Se ménager,
ménager
ses proches
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