La dysche´sie : diagnostic et traitement

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M ini-revue
La dyschésie :
diagnostic et traitement
ronique Vitton(1), Henri Damon(2),
Ve
Jean-Luc Faucheron(3)
1
^pital Nord,
Ho
service de gastroent
erologie,
unit
e d’exploration fonctionnelle digestive,
13915 Marseille Cedex 20
2
^pital Edouard Herriot,
Ho
Exploration fonctionnelle digestive,
69437 Lyon ;
Clinique protestante,
69 300 Caluire et Cuire
3
CHU de Grenoble,
clinique universitaire de chirurgie digestive,
unit
e de chirurgie colorectale,
38043 Grenoble cedex
e-mail : <[email protected]>
sume
Re
La dysch
esie est un trouble digestif fr
equent, d
efini par un ensemble de
^mes et affectant 13 % sympto
a 20 % de la population des pays occidentaux.
Sur le plan physiopathologique, la dysch
esie peut ^
etre fonctionnelle (« a
p
erin
ee normal »), ou secondaire a une anomalie anatomique (trouble associ
e
de la statique pelvienne). Les deux m
ecanismes sont souvent li
es et des troubles
de la statique pelvienne sont pr
esents chez 80 % des patients. L’interrogatoire
et l’examen clinique sont fondamentaux. L’interrogatoire ne doit pas
m
econnaı̂tre un ant
ec
edent d’abus sexuel, en cas de dysch
esie s
ev
ere,
resistante au traitement. La prescription d’examens complementaires n’est pas
syst
ematique. Les explorations sont propos
ees en cas d’
echec d’un traitement
de premi
ere intention et adapt
ees au m
ecanisme suspect
e. La manom
etrie
anorectale est l’examen fonctionnel de r
ef
erence pour mettre en evidence un
asynchronisme abdomino-pelvien. Elle permet aussi de r
ealiser un test
d’expulsion du ballonnet et d’
evaluer la sensibilit
e rectale. Si un trouble de
la statique pelvienne est suspect
e, la colpo-cysto-d
ef
ecographie reste l’examen
evaluation quantitative. L’IRM dynamique
de r
ef
erence pour le diagnostic et l’
permet d’apporter des informations int
eressantes, et d’autres techniques plus
r
ecentes se d
eveloppent comme l’
echographie endo-anale dynamique. Le
traitement peut faire appel a des r
egles hygi
eno-di
et
etiques en fonction de la
qualit
e des selles. Il ne faut pas oublier une prise en charge psychologique, en
particulier en cas d’abus sexuel. Sinon, le traitement repose en grande partie
sur la r
eeducation anorectale par biofeedback avec des taux de succ
es allant de
44 a 100 % des cas. Plus rarement, et seulement en cas d’
echec des
traitements pr
ec
edents, lorsqu’une cause anatomique a et
e observ
ee, et apr
es
un bilan fonctionnel et morphologique, un traitement chirurgical peut ^
etre
envisage.
s : asynchronisme abdomino-pelvien, trouble de la statique pelvienne, manometrie
n Mots cle
anorectale, colpo-cysto-defecographie, biofeedback
HEPATO GASTRO
et Oncologie digestive
Abstract
Dyschezia is a frequent disorder, defined by different symptoms and affecting 13
to 20% of the population. The mechanism of dyschezia may be only functional
‘‘dyschezia with normal perineum’’) or related to an anatomical disorder (‘‘pelvic
floor disorder’’). However, these two mechanisms are often associated and 80%
of the patients suffering from a dyschezia have pelvic floors disorders. A careful
symptomatic assessment and a good clinical examination are important in
dyschezia. A sexual abuse may be searched at the inquiring. Further
investigations are not systematically prescribed. They will be made if a first
intention treatment has failed and they will be adapted to the mechanism
suspected. Ano-rectal manometry remains the gold-standard to diagnose
anismus. A balloon test expulsion will also be done as well as the measurement of
the rectal sensibility. If a pelvic floor disorder is suspected, the colpo-cystodefecogrpahy remains the gold standard for the diagnosis of pelvic floor
y
doi: 10.1684/hpg.2012.0712
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017.
Dyschezia: from
diagnostic to treatment
Tir
es a part : V. Vitton
Pour citer cet article : Vitton V, Damon H, Faucheron JL. La dyschesie : diagnostic et traitement.
Hepato Gastro 2012 ; 19 : 263-271. doi : 10.1684/hpg.2012.0712
HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
vol. 19 n8 4, avril 2012
263
disorders. However, dynamic MRI is a recent interesting exploration in this
indication. There are also some emerging investigations as dynamic endo anal
ultrasonography but this latter is still, for the moment limited to some medical
teams. Treatment of dyschezia may need changes in the dietary habits and
laxatives prescription according to the quality of the stools. However, the
biofeeback training is the most specific treatment of dyschezia with a success
rate from 44 to 100%. Finally, after failure of a conservative treatment, when a
pelvic floor disorder is diagnosed, and after functional and morphological
evaluation, a surgical treatment may be indicated.
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n Key words: anismus, pelvic floor disorders, anorectal manometry, colpo-cysto-d
efecography, biofeedback training
Définition
Physiopathologie
La dyschesie est un trouble digestif fr
equent affectant
13 % a 20 % de la population des pays occidentaux, et
majoritairement des femmes [1, 2]. Elle fait partie du
syndrome de constipation fonctionnelle et est egalement
appelee constipation terminale ou d’
evacuation. La
^me mais
dyschesie n’est pas d
efinie par un seul sympto
^t par un ensemble de signes cliniques pouvant ^
pluto
etre ou
non associes entre eux. Elle est d
ecrite comme une
difficulte d’evacuation des mati
eres f
ecales, une exon
eration longue ou en plusieurs temps, des efforts de pouss
ee
importants ou prolong
es et, parfois, le recours a des
manœuvres digitales d’aide a l’
evacuation, endoanales ou
endovaginales. Elle peut se manifester comme la n
ecessit
e
d’un recours frequent a l’administration de suppositoires
ou de lavements evacuateurs [3, 4]. Si cette affection est
frequente, et a l’origine d’un absent
eisme moyen de
12 jours par an, il n’en demeure pas moins que 53 % des
patients ayant une dysch
esie n’ont jamais consulte pour ce
motif. De plus, chez les patients ayant consult
e, des
explorations fonctionnelles n’ont et
e r
ealis
ees que dans 0,3
a 3,6 % des cas [1, 2, 5].
Il existe deux groupes physiopathologiques :
‘‘
La dyschésie est décrite comme une
difficulté d’évacuation des matières fécales,
une exonération longue ou en plusieurs temps,
des efforts de poussée importants ou prolongés
et, parfois, le recours à des manœuvres digitales
d’aide à l’évacuation, endoanales
ou endovaginales
’’
Le diagnostic de la dysch
esie, de son m
ecanisme, et
d’eventuelles maladies associ
ees, est fondamental a poser
au travers de l’interrogatoire, de l’examen clinique et
d’eventuels examens compl
ementaires, afin d’orienter la
prise en charge la plus adapt
ee.
264
pe
rine
e normal ») ;
– soit la dysch
esie est fonctionnelle (« a
– soit elle est secondaire a une anomalie anatomique
(trouble de la statique pelvienne associ
e).
Ces deux groupes sont souvent intriqu
es, et des troubles de
la statique pelvienne sont pr
esents chez 80 % des patients
rapportant une dysch
esie [6].
Dyschésie fonctionnelle
Lorsque la dysch
esie est purement fonctionnelle, deux
causes principales sont possibles : l’asynchronisme abdomino-pelvien et l’hypertonie instable du canal anal.
L’asynchronisme abdomino-pelvien (
egalement appel
ee
anisme) correspond a une contraction paradoxale de la
sangle puborectale et du sphincter externe lors de la
manœuvre de Valsalva, au lieu de la relaxation que l’on
devrait normalement observer. Le patient, au cours de la
d
ef
ecation, va devoir affronter une barri
ere de pression qui
n’existe pas normalement et qu’il devra vaincre par des
efforts r
ep
et
es de pouss
ee. Cet asynchronisme abdominopelvien peut ^
etre mis en evidence cliniquement et par les
explorations fonctionnelles. La manom
etrie anorectale
montre une augmentation des pressions au niveau du
sphincter anal lors des efforts de pouss
ee. La rectographie
dynamique et l’IRM pelvienne dynamique peuvent mettre
en evidence une fermeture de l’angle anorectal durant la
pouss
ee volontaire.
Les ondes ultralentes ou hypertonie instable du canal anal
repr
esentent la deuxi
eme cause de dysfonctionnement
sphinct
erien responsable de dysch
esie (figure 1). Chez
certains sujets constip
es, la pression anale de repos peut
^
etre tr
es elev
ee. Il existe par ailleurs des variations cycliques
de grande amplitude de la pression de repos du canal anal.
Il est alors plus difficile de relaxer un canal anal tr
es tonique
HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
vol. 19 n8 4, avril 2012
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Dyschésie
Figure 1. Ondes ultralentes visualisees sur un enregistrement manometrique.
qu’un appareil sphinct
erien dont la pression de fermeture
est normale.
Dans certains cas, il peut exister une dysch
esie s
ev
ere sans
cause fonctionnelle evidente : il s’agit de l’akin
esie rectale,
nouvelle entite decrite par A. Dubreuil et J.L. Faucheron
[7]. Cette entite correspond a un d
ebit d’
evacuation
particulierement lent, mais sans obstacle fonctionnel ni
anatomique, et survient pratiquement exclusivement en
cas d’antecedents de chirurgie pelvienne.
Dyschésie par troubles de la statique
pelvienne
Ces troubles peuvent ^
etre isol
es ou le plus souvent associ
es
entre eux. Les plus fr
equemment observ
es sont le prolapsus
rectal interne (30 %) et la rectoc
ele (19 %). On peut
egalement trouver une ent
eroc
ele (19 %), un veritable
prolapsus rectal (13 %) et un p
erin
ee descendant (10 %)
[8, 9].
^mes
Le prolapsus rectal interne, en dehors des sympto
fonctionnels induits, peut egalement ^
etre a l’origine d’un
ulcere solitaire du rectum.
‘‘
La dyschésie est associée à des anomalies
anatomiques dans 80 % des cas
Démarche clinique
’’
Interrogatoire
L’interrogatoire a une place fondamentale dans la d
emarche
diagnostique de la dysch
esie. Les ant
ec
edents obstetricaux
(dur
ee de l’accouchement par voie basse, d
echirure,
extraction instrumentale), de chirurgie pelvienne (en
particulier l’hyst
erectomie) et de chirurgie digestive sont
importants a pr
eciser. Les maladies g
en
erales, les prises
m
edicamenteuses et les habitudes hygi
eno-di
etetiques
doivent egalement ^
etre document
ees. La r
ealisation de
manœuvres digitales d’aide a l’
evacuation doit syst
emati^
quement etre cherchee car souvent non evoqu
ee spontan
ement par les patients. Il peut s’agir de manœuvres
endovaginales (assez sp
ecifiques d’une rectoc
ele), de
manœuvres de maintien du p
erin
ee ou de manœuvres
endo-rectales d’extraction.
HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
vol. 19 n8 4, avril 2012
265
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^mes me
^mes de la dysche
sie, il faut
En dehors des sympto
preciser le nombre de selles, leur consistance, l’
emission de
glaires ou de sang, des douleurs ou une pesanteur
perineale, et des signes d’incontinence anale associ
ee. Il
faut egalement identifier une atteinte des autres
« compartiments » du p
erin
ee en cherchant une dyspareunie, une dysurie, des imp
eriosit
es mictionnelles ou une
incontinence urinaire.
Enfin, il faut egalement penser a pr
eciser le contexte social
^mage, difficult
et psychologique du patient (cho
es familia^mes sur les
les), et evaluer le retentissement des sympto
differentes dimensions de la qualit
e de vie. Il faut chercher,
avec pudeur et pr
ecautions, un ant
ec
edent d’abus sexuel.
En effet, Leroi et al. ont montr
e que la pr
evalence des abus
sexuels est quatre fois plus fr
equente chez les patients
ayant des troubles digestifs de la partie terminale de
l’intestin (essentiellement une constipation) que chez ceux
se plaignant de troubles moteurs de la partie proximale du
tube digestif [10].
‘‘
La prévalence des abus sexuels est quatre
fois plus fréquente chez les patients ayant
des troubles digestifs de la partie terminale
de l’intestin (essentiellement une constipation)
vs ceux se plaignant de troubles moteurs
proximaux
’’
pr
esence d’une rectoc
ele a la face ant
erieure du rectum. La
palpation bidigitale d
emasque une elytroc
ele devant
l’
ecartement des deux doigts lors de la pouss
ee li
ee a la
descente des anses digestives.
L’examen a l’anuscope peut mettre en evidence un ulc
ere
solitaire du rectum et peut voir s’engager un prolapsus
rectal interne en pouss
ee.
L’examen se poursuit en d
ecubitus dorsal, a nouveau au
repos et a la pouss
ee afin de mettre en evidence une
colpoc
ele.
‘‘
L’examen clinique a un rôle fondamental
dans la dyschésie
’’
Examens complémentaires
La r
ealisation d’examens compl
ementaires n’est pas
syst
ematique dans la dysch
esie, surtout dans un premier
temps.
Il n’y a pas de consensus concernant la r
ealisation des
explorations compl
ementaires dans la dysch
esie. Leur
indication est la confirmation du diagnostic (explorations
fonctionnelles) et surtout la recherche de troubles de la
statique pelvienne associ
es (explorations morphologiques),
afin de mieux comprendre le ou les m
ecanismes impliqu
es
^mes et de proposer ainsi un traitement
dans les sympto
adapt
e.
Examen clinique
^le est majeur, en particulier dans la recherche de
Son ro
troubles de la statique pelvienne associ
es, avec une tr
es
bonne valeur predictive negative [11].
Le patient peut ^etre initialement examin
e en position genupectorale ou en d
ecubitus lat
eral gauche, mais l’examen
doit se poursuivre en d
ecubitus dorsal pour une meilleure
evaluation de la pouss
ee. La position genu-pectoral sous
evalue les prolapsus pelviens.
Le premier temps de l’examen proctologique est l’inspection, d’abord au repos puis en pouss
ee. Elle cherche une
cicatrice, une fissure, un prolapsus mucoh
emorroı̈daire ou
rectal. L’inspection permet egalement d’appr
ecier la
trophicite vulvovaginale et de mettre en evidence une
colpocele affleurant la vulve. La pouss
ee permet
d’apprecier une descente p
erin
eale qui peut prendre
l’aspect d’une ballonnisation p
erin
eale. La mise en
evidence d’un prolapsus rectal n’est pas toujours possible
a l’examen en raison de la g^
ene occasionn
ee [3].
L’examen se poursuit par un toucher rectal qui permet de
chercher un fecalome ou la pr
esence de selles dans le
rectum. Il apprecie le tonus sphinct
erien et peut montrer
l’absence de rel^achement sphinct
erien lors de la pouss
ee.
Le toucher rectal avec l’index en crochet cherche la
266
‘‘
‘‘
La réalisation d’examens complémentaires
n’est pas systématique dans la dyschésie,
surtout dans un premier temps
’’
’’
Il n’y a pas de consensus concernant
la réalisation des explorations
complémentaires dans la dyschésie
cessaire, en particulier en cas
En revanche, il est ne
^mes ou de signes d’alarmes,
d’apparition r
ecente des sympto
de ne pas n
egliger l’
elimination d’une maladie organique par
une coloscopie et/ou une imagerie pelvienne.
Explorations à la recherche d’une
anomalie fonctionnelle
es apr
Elles peuvent ^
etre propose
es echec du traitement
initial m
edical pour confirmer le diagnostic de trouble de
l’exon
eration et comprendre le m
ecanisme a l’origine des
^mes.
sympto
HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
vol. 19 n8 4, avril 2012
Dyschésie
Manométrie anorectale
valuer de manie
re
La manometrie anorectale permet d’e
quantitative et qualitative le fonctionnement anorectal. Elle
reste l’examen fonctionnel de r
ef
erence pour chercher
une asynergie abdomino-p
erin
eale ou dyssynergie rectosphincterienne. N
eanmoins, cet examen p
eche par son
manque de standardisation et de reproductibilit
e avec une
mauvaise sensibilit
e [12].
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Anomalies manométriques à rechercher
en cas de dyschésie
Mesure du tonus de repos et contraction volontaire
Les pressions anales sont le plus souvent normales chez les
patients dyschesiques [13].
Recherche des réflexes rectoanal inhibiteur (RRAI)
et rectoanal excitateur (RRAE) (figure 2)
En effet, l’absence de RRAI ne permet pas d’affirmer une
maladie de Hirschprung ; le RRAI est parfois techniquement non detectable (seuil de d
eclenchement trop elev
e).
L’absence de RRAI traduit une maladie de Hirschsprung qui
est tres rarement observ
ee a l’^
age adulte, sauf parfois dans
sa forme courte. En cas de doute et avant de conclure chez
l’adulte, il faut s’assurer de la qualit
e de l’enregistrement
(absence de f
ecalome, m
egarectum, probl
eme technique).
Défécation simulée
En cas d’asynergie abdomino-p
erin
eale, l’effort de pouss
ee
s’accompagne, soit d’une augmentation paradoxale de la
pression anale, soit d’une absence de relaxation ou d’une
relaxation incompl
ete (figure 3). Ces anomalies peuvent
^
etre associ
ees a une contraction paradoxale isol
ee du
sphincter anal externe ou associ
ee a une contraction
paradoxale du muscle puborectal. Il est important de noter
que si le diagnostic d’absence d’asynergie manom
etrique a
une bonne valeur pr
edictive n
egative, il existe 15 % de
faux positifs chez les volontaires sains.
Il est possible de mesurer le d
efaut de relaxation par la
formule suivante : pourcentage de relaxation anale =
pression anale la plus faible au cours de l’effort de
pouss
ee/(pression anale au repos 100) [14].
Test d’expulsion du ballonnet
avec 50 mL d’eau environ.
Ce test utilise un ballon gonfle
Le patient doit pouvoir expulser le ballonnet sur une chaise
Figure 2. Le r
eflexe rectoanal inhibiteur apparaı̂t comme une relaxation du sphincter anal interne lors de la distension rectale.
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267
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Figure 3. Asynchronisme abdomino-pelvien avec contraction paradoxale du sphincter anal externe lors de l’effort de poussee.
3 minutes)
percee dans un temps allant de 10 secondes a
[14]. L’absence de standardisation de ce test en fait un
element dont la place reste controvers
ee. De plus, le
volume de 50 mL, arbitrairement fix
e, pourrait fausser
l’interpretation des r
esultats. Dans ce sens, un travail publi
e
dans Gastroenterology en 2004 avait utilis
e des volumes de
ballonnets correspondant au volume n
ecessaire pour
obtenir une sensation de besoin soutenue [15]. Dans ce
travail, la specificit
e et la valeur pr
edictive n
egative du test
pour eliminer une asynergie etaient respectivement de 89
et 97 %, ce qui est particuli
erement int
eressant et pourrait
^
etre applique de mani
ere g
en
eralis
ee.
Mesure de la sensibilité rectale et évaluation
de la compliance rectale
L’augmentation de la compliance rectale avec conservation
du RRAI evoque un m
egarectum fonctionnel. La pertinence
clinique de cette anomalie n’est pas formelle. N
eanmoins,
le megarectum fonctionnel est souvent la consequence
d’une dyschesie tr
es ancienne, il peut egalement s’observer
268
en cas de maladie neurologique. Il est important de
diagnostiquer ce tableau, car l’alt
eration de la sensibilit
e
rectale est accessible a la reeducation par sonde rectale a
ballonnet. Inversement, une dysch
esie s
ev
ere avec des
seuils de sensibilit
e rectale diminu
es evoque une hypersensibilit
e visc
erale associ
ee.
Mesure du temps de transit colique (figure 4)
La mesure du temps de transit avec des marqueurs radioopaques est une m
ethode simple, peu on
ereuse, facilement disponible. Diff
erents protocoles existent. Cet examen pr
esente n
eanmoins un manque de sensibilit
e et de
reproductibilit
e inter et intra-individuelle avec un allongement du temps de transit colique observ
e chez 38 a 80 %
des patients souffrant de constipation [16]. La mesure du
temps de transit colique peut permettre d’orienter vers le
m
ecanisme de la constipation et de chercher un trouble du
transit associ
e a la dysch
esie. En cas de constipation de
transit, les marqueurs persisteront dans l’ensemble du
cadre colique, alors qu’une accumulation des marqueurs
HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
vol. 19 n8 4, avril 2012
Dyschésie
Explorations à la recherche d’une
anomalie anatomique
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.11
Les explorations morphologiques sont essentiellement
indiqu
ees, en cas d’
echec de la prise en charge initiale
de la dysch
esie et lorsqu’une indication chirurgicale est
a discuter. Elles permettent d’authentifier et de quantifier
un trouble de la statique pelvienne, de chercher des
associations pouvant modifier le geste chirurgical telles que
la pr
esence d’une elythroc
ele, ou une anomalie des autres
compartiments.
.40
‘‘
Les explorations morphologiques
permettent d’authentifier et de quantifier
un trouble de la statique pelvienne, de chercher
des associations pouvant modifier le geste
chirurgical telles que la présence d’une
élythrocèle, ou une anomalie des autres
compartiments
’’
Colpo-cysto-défécographie
.14
Figure 4. Marqueurs radio opaques sur un cliche d’abdomen sans
pr
eparation pour mesure du temps de transit colique.
^lon sera en faveur d’un trouble
dans la partie distale du co
de l’evacuation.
‘‘
En cas de constipation de transit,
les marqueurs persisteront dans l’ensemble
du cadre colique, alors qu’une accumulation
des marqueurs dans la partie distale du côlon sera
en faveur d’un trouble de l’évacuation
Électrophysiologie périnéale
La colpo-cysto-d
ef
ecographie (CDD) reste l’examen de
r
ef
erence dans la recherche de troubles de la statique
pelvienne. Elle est le plus souvent r
ealis
ee avec une
quadruple opacification de l’ampoule rectale, du sigmoı̈de,
du vagin, des anses il
eales et doit comporter trois etapes :
repos, retenue et evacuation. La CCD evalue l’angle
anorectal ainsi que sa position par rapport aux rep
eres
osseux au cours des trois etapes. Elle appr
ecie egalement la
qualit
e de la vidange rectale.
L’asynchronisme abdomino-pelvien correspond a une
contraction de la sangle puborectale et du sphincter externe
lors de la manœuvre de Valsalva, au lieu de la relaxation que
l’on devrait normalement observer [8, 9].
IRM pelvienne dynamique (IRMd)
’’
tude e
lectromyographique peut
En cas d’anisme, l’e
montrer un renforcement de l’activit
e EMG du muscle
strie lors de la pouss
ee. N
eanmoins, eu egard a sa faible
concordance avec les autres investigations et a la douleur
pouvant ^etre ressentie lors de la r
ealisation de cet examen,
l’
etude EMG n’a pas sa place en pratique courante dans le
diagnostic de la dysch
esie [17].
Tout comme la CDD, l’IRMd permet de chercher des
troubles de la statique pelvienne associ
es a la dysch
esie.
Elle doit comporter deux phases : statique et dynamique.
L’IRMd a pour avantage d’^
etre non irradiante, peu
invasive, reproductible. De plus, elle permet d’etudier
les parties molles et les sphincters de l’anus. Ses
performances diagnostiques sont equivalentes pour le
compartiment ant
erieur et moyen mais restent inf
erieures
a celles de la CDD pour le compartiment post
erieur. En
particulier, le diagnostic de prolapsus rectal intra-anal peut
^
etre difficile en IRM. Le choix de l’une ou l’autre des deux
techniques d’imagerie d
epend essentiellement des habitudes des equipes et de leur disponibilit
e respective
[18, 19].
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269
Échographie endo-anale dynamique (EEAd)
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L’EEA n’a pas d’indication syst
ematique dans le bilan d’une
dyschesie. Elle est l’examen de r
ef
erence en cas d’incontinence anale associ
ee et en cas d’ant
ec
edent de traumatisme
sphincterien afin de chercher des l
esions qui pourraient se
demasquer apres un traitement chirurgical. L’utilisation de
sondes lineaires (ou biplan) a permis le d
eveloppement de
l’EEAd qui permet de chercher des troubles de la statique
pelvienne. C’est un examen simple, de courte dur
ee, peu
onereux et reproductible. Des travaux ont montr
e une
bonne concordance diagnostique entre l’EEA et la
defecographie dans le diagnostic des troubles de la statique
pelvienne. Une etude plus r
ecente a montr
e que l’EEAd et
l’IRMd obtenaient des performances similaires en restant
toutes deux moins performantes que la d
ef
ecographie. Cet
examen, s’il reste fait seulement par certains centres pour
des raisons de disponibilit
e, pourrait s’av
erer ^
etre un examen
simple et d’une aide int
eressante dans le diagnostic des
troubles de la statique pelvienne [20, 21].
‘‘
La manométrie anorectale reste l’examen
fonctionnel de référence
’’
Traitement
Traitement médical
en fonction
Le traitement medical par laxatifs est indique
de la qualite des selles (
echelle de Bristol) et de la pr
esence
d’une constipation de transit associ
ee. L’objectif du
traitement laxatif est d’obtenir des selles de consistance
molle et de volume suffisant pour faciliter l’
evacuation
spontanee. En cas d’
echec, des suppositoires a delitement
gazeux ou des microlavements peuvent ^
etre prescrits.
Enfin, il ne faut pas oublier que, dans le cas d’un syndrome
anxiodepressif associ
e, la prise en charge psychologique est
fondamentale, ainsi qu’en cas d’ant
ec
edent d’abus sexuel.
‘‘
En cas d’un syndrome anxiodépressif
associé, la prise en charge psychologique
est fondamentale, ainsi qu’en cas d’antécédent
d’abus sexuel
’’
Rééducation périnéale
La reeducation p
erin
eale par biofeedback a une place
importante dans le traitement de la dysch
esie. Elle peut
^
etre proposee en deuxi
eme intention, apr
es echec du
traitement medical. C’est une m
ethode active n
ecessitant
270
la compr
ehension et l’implication du patient ainsi qu’une
grande exp
erience du th
erapeute. Le but du traitement est
de restaurer une d
ef
ecation correcte en r
etablissant la
coordination entre le rectum et les sphincters de l’anus.
Une s
eance de r
e
education dure en moyenne 30 minutes
et 4 a 6 seances sont g
en
eralement pr
econis
ees dont
l’efficacit
e a long terme peut ^
etre renforc
ee par des
s
eances d’entretien [22]. Le biofeedback dit « sensitif »
peut permettre la correction par la r
e
education des
troubles de la sensibilit
e rectale qui est n
ecessaire chez
certains patients. Son but est d’am
eliorer le seuil de
perception de la sensibilit
e rectale pour favoriser une
meilleure perception du besoin de d
ef
ecation [22, 23]. Le
principe est fond
e sur l’utilisation d’un ballonnet de
e
education avec lequel on peut r
ealiser des insufflations
r
br
eves a volume d
ecroissant. Ceci a pour but de permettre
au patient de ressentir des volumes de plus en plus faibles.
Cette technique n
ecessite des s
eances r
ep
et
ees pendant
plusieurs semaines. La plupart des etudes portant sur
l’efficacit
e du biofeedback, malheureusement le plus
souvent non randomis
ees et h
et
erog
enes, rapportent des
taux de succ
es de 44 a 100 % des cas avec une am
elioration
subjective mais egalement objective des param
etres
fonctionnels anorectaux [23, 24]. On dispose de peu de
travaux sur l’efficacit
e
a long terme mais plusieurs etudes
montrent un maintien des r
esultats avec des suivis allant de
six mois a cinq ans. La r
e
education permet de diminuer le
nombre, le temps et l’intensit
e de la pouss
ee [25] et semble
obtenir de meilleurs r
esultats chez les patients pr
esentant un
transit normal [26]. Enfin, la r
e
education permet une
am
elioration de la qualit
e de vie ainsi que des param
etres
d’anxi
et
e, de d
epression et de somatisation [27].
‘‘
La rééducation périnéale par biofeedback
^ tre proposée en deuxième intention,
peut e
après échec du traitement médical
Traitement chirurgical
’’
En cas de dysch
esie, le traitement chirurgical se discute si le
traitement m
edical et la r
e
education p
erin
eale ont echou
e
et qu’une cause anatomique a et
e observ
ee : rectoc
ele,
prolapsus rectal. Il peut ^
etre propos
e par voie haute
(g
en
eralement par cœlioscopie) ou par voie basse (transanale, p
erin
eale ou vaginale).
Dans les formes s
ev
eres de constipation de transit, on peut,
de façon exceptionnelle, envisager une r
esection colique
(colectomie subtotale avec anastomose il
eo-rectale) apr
es
avoir eventuellement propos
e des irrigations coliques par
voie r
etrograde ou ant
erograde. Cette indication ne sera
pos
ee qu’apr
es l’
echec de toutes les th
erapeutiques non
chirurgicales, l’exclusion de toute pathologie psychiatrique
HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
vol. 19 n8 4, avril 2012
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ete de la motricit
e digestive. Dans tous
les cas l’indication chirurgicale pour constipation doit ^
etre
prise avec la plus grande prudence, et apr
es avoir r
ealis
e un
bilan fonctionnel pr
ecis.
re
^ts : aucun
Conflits d’inte
&
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Les r
ef
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