avec effet au 1er mai. De toute évidence, ce nouveau plan de rigueur
ne sera pas le dernier.
Ce qui frappe le plus, dans ce climat de crise extrême, c’est que le
gouvernement s’acharne à maintenir son taux ultra-réduit de 12,5 %
d’impôt sur les bénéfices des sociétés. Brian Lenihan l’a dit et répété le
7 avril : il est hors de question de revenir sur la stratégie qui a fait la
fortune du pays depuis les années 1990, en attirant les sièges sociaux
de multinationales et les investissements étrangers. Mieux vaut
ponctionner lourdement la population irlandaise que de prendre le
risque de tout perdre en faisant fuir les capitaux internationaux.
Difficile de prévoir comment les Irlandais réagiront lors des élections
européennes : rejet du gouvernement, rejet du monde extérieur, ou
même rejet des deux à la fois. Mais une chose est sûre : l’Irlande ne se
sortira pas seule du terrible engrenage dans lequel le système
international l’a enferrée.
La stratégie de développement fondée sur le dumping fiscal, adoptée
par tant de petits pays, est un désastre. L’Irlande a été suivie par
beaucoup d’autres dans cette voie, et ne peut revenir seule en arrière.
Presque tous les pays de l’Est ont maintenant des taux d’imposition
des bénéfices des sociétés d’à peine 10 %. En 2008, le géant
informatique Dell avait annoncé la fermeture de ses unités de
production et leur relocalisation en Pologne, provoquant la panique en
Irlande. L’accumulation de capitaux étrangers se paie en outre au prix
fort : actuellement, un pays comme l’Irlande verse chaque année
environ 20 % de sa production intérieure sous forme de bénéfices et
dividendes aux détenteurs étrangers de ses bureaux et usines.
Techniquement, le PNB (produit national brut), dont disposent
véritablement les Irlandais, se retrouve ainsi de 20 % inférieur au PIB.
Cerise sur le gâteau : l’euro ne permet même pas d’éviter à l’Irlande de
devoir payer des taux d’intérêt exorbitants sur sa dette publique. Les
taux d’intérêt à dix ans en Irlande ou en Grèce sont actuellement près
de deux fois plus élevés qu’en Allemagne (5,7 % contre 3,1 %),
phénomène tout à fait anormal s’agissant de pays partageant la même
monnaie, et qui montre que les marchés spéculent sur une
banqueroute de ces pays, voire une explosion de l’union monétaire. En
injectant des aides financières d’urgence, comme cela a déjà été fait en
Hongrie, le FMI est certes outillé pour éteindre provisoirement ce type
d’incendie. Mais seule l’Union européenne peut espérer avoir la
légitimité politique pour traiter les causes qui ont mené à ces
désastres. En gros, le deal devrait être le suivant : l’Union garantit la
stabilité financière de la zone, et vient en aide aux petits pays si
nécessaire ; mais en contrepartie ces derniers renoncent à leur
stratégie de dumping fiscal, avec par exemple des taux d’imposition