La dermatite atopique - chu

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Cahier de
formation
n° 96
DOSSIER
La dermatite atopique
1. La dermatite atopique touche
surtout :
a. les enfants entre 3 mois
et 5 ans ;
b. les adolescents ;
c. les adultes.
Sommaire
Savoir
La dermatite atopique est une dermatose chronique
inflammatoire prurigineuse. D’apparence bénigne, elle
peut avoir un impact très négatif sur la qualité de vie.
Savoir faire
Soulager et accompagner le patient
Lorsque des patients atopiques vivent une poussée très
sévère, les Idels peuvent être sollicitées pour continuer les
soins, où se mêlent technique, relationnel et éducation.
3. Au quotidien, pour limiter
les poussées de la maladie,
il est généralement conseillé de :
a. supprimer lait et œuf
de l’alimentation ;
b. prendre des douches
rapides et tièdes, avec
un lavant doux, et se sécher
par tamponnement ;
c. hydrater la peau avec
un émollient.
Les personnes âgées souffrent parfois de prurit sénile
et d’eczéma, dont la prise en charge est très similaire
à celle de la dermatite atopique.
Réponses du quiz :
Quiz
2. Le traitement des poussées
inflammatoires repose surtout
sur des dermocorticoïdes:
a. vrai ;
b. faux.
1- a ; 2 - a ; 3 - b et c
© Espaceinfirmier.fr, Initiatives Santé 2016
Quiz
Quand le traitement fait peur
La corticophobie, ou “peur des dermocorticoïdes”, est
le principal problème rencontré dans la prise en charge
de la dermatite atopique. Entendre les craintes, expliquer
et rassurer sont les maîtres mots.
La peau aussi vieillit
Savoir plus
CAHIER RÉALISÉ PAR FLORENCE LEANDRO, PHARMACIENNE, AVEC L’AIMABLE
RELECTUREDU DR SANDRINE RAPPELLE, DERMATOLOGUEAU CENTREHOSPITALIER
D’ARLES (BOUCHES-DU-RHÔNE)
L’auteur a déclaré des liens d’intérêts
(membre de l’Association française de l’eczéma).
LE POINT SUR
DERMATOLOGIE Le zona . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.46
PRESSION ARTÉRIELLE L’automesure tensionnelle . . . . . . . p.48
DÉCEMBRE 2016 - N° 331 - L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE
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Cahier de
formation n° 96
Savoir
La dermatite atopique est une dermatose chronique inflammatoire prurigineuse.
Les périodes de crise, où des plaques d’eczéma apparaissent, alternent avec des périodes
de rémission, pendant laquelle la peau reste sèche et fragile. D’apparence bénigne,
cette maladie peut avoir un impact très négatif sur la qualité de vie.
DES RAPPELS
SUR LA PEAU
Anatomie
© Espaceinfirmier.fr, Initiatives Santé 2016
La peau (ou tégument) regroupe plusieurs entités distinctes : en profondeur, l’hypoderme est un tissu
conjonctif lâche vascularisé et
innervé, associé à un tissu adipeux ;
au-dessus de lui, le derme est un
tissu conjonctif fibreux, vascularisé
et innervé, riche en eau ; enfin, l’épiderme est un épithélium de revêtement avasculaire mais innervé, pavimenteux, stratifié et kératinisé,
recouvert par une couche de cellules
mortes (la couche cornée ou stratum
corneum) et un film hydrolipidique
de surface. À tout ceci s’ajoutent des
annexes cutanées : les poils (ou follicules pileux), les ongles et les cheveux (ou phanères), les glandes sébacées et sudoripares.
Rôles fondamentaux
➲ La peau joue plusieurs rôles primordiaux pour l’organisme : régulation thermique, protection contre
les chocs, rôle sensoriel... Elle représente également une barrière
majeure : une première ligne de
défense non spécifique et efficace
contre la plupart des agents nocifs
pour l’organisme.
➲ Cette fonction barrière est assurée
non seulement par l’agencement et
la cohésion des cellules épidermiques entre elles, les espaces interstitiels étant remplis par un ciment
lipidique, mais également par un
30
pH acide (5,5), des peptides antimicrobiens sécrétés par les kératinocytes et une forte connexion au système immunitaire et aux ganglions
sous-jacents. Le microbiote cutané,
constitué par une flore microbienne
très diversifiée, apparaît de plus en
plus comme un élément majeur de
la fonction barrière.
LA DERMATITE
ATOPIQUE
Définition
Selon la Société française de dermatologie, à l’origine d’une conférence
de consensus sur la dermatite atopique de l’enfant en 2005, la dermatite
atopique est une dermatose inflammatoire prurigineuse chronique évoluant par poussées et touchant préférentiellement le jeune enfant.
Description de la maladie
n Poussées
➲ Des plaques d’eczéma apparaissent à certains endroits du corps et
du visage, les localisations variant
en fonction de l’individu et notamment de son âge (voir schéma p.32).
➲ L’aspect des lésions est variable
selon la gravité, l’âge, le moment
de l’examen. Dans la plupart des
cas, elles sont érythémateuses,
rugueuses et prurigineuses, avec
souvent une sensation de chaleur
associée. Elles peuvent également
être suintantes, notamment chez le
jeune enfant en début de poussée,
ou plus épaisses et dites “lichéni-
L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE - N° 331 - DÉCEMBRE 2016
fiées” chez l’adolescent et l’adulte,
lorsque les plaques sont anciennes
et apparaissent de façon récurrente
toujours aux mêmes endroits.
n Rémissions
En dehors des poussées de la maladie,
la peau reste sèche et fragile, plus ou
moins en fonction des patients. Par
exemple, la xérose, ou sécheresse
cutanée, n’apparaît pas tout de suite
chez le petit enfant, mais plutôt aux
alentours de 1 ou 2 ans.
n Mécanisme
physiopathologique
Une poussée d’eczéma comprend classiquement trois phases successives:
➲ la sensibilisation: premier contact
asymptomatique avec l’allergène,
activation du système immunitaire
et production de lymphocytes T
spécifiques ;
➲ l’expression : il s’agit de la phase
inflammatoire ;
➲ la résolution, dont les mécanismes
sont encore mal connus.
n Retentissement
psychologique
Il a tendance à être sous-estimé, alors
qu’il est bien présent et touche à la
fois le patient et sa famille. Les démangeaisons mobilisent de l’énergie,
beaucoup et longtemps. Elles entraînent des troubles du sommeil et de
l’irritabilité. De nombreux enfants
atteints ont du mal à rester attentifs
en classe. Le regard des autres est
La dermatite atopique
parfois difficile à vivre, d’où une
importante baisse de l’estime de soi.
Facteurs responsables
de la maladie
La dermatite atopique résulte d’une
combinaison de facteurs génétiques
et environnementaux. Il n’est pas
pertinent de rechercher une seule
et unique cause à cette maladie.
n Facteurs environnementaux
Les patients atteints de dermatite
atopique présentent une prédisposition génétique du système immunitaire à privilégier des réactions
d’hypersensibilité vis-à-vis d’antigènes communs dans l’alimentation,
l’environnement extérieur ou domestique. Ces allergènes sont appelés
“atopènes”.
n Anomalies génétiques
cutanées
Au niveau cutané, la dermatite atopique est le résultat d’une double
anomalie génétique :
➲ d’une part, la barrière épidermique est défaillante à plusieurs
niveaux, le plus connu étant la perte
de fonction d’une protéine appelée
“filaggrine”, qui participe à la cohésion
et à la fonction barrière de la peau.
Les causes possibles sont multiples,
elles peuvent être intéressantes à
repérer, mais les mesures d’éviction
ne doivent pas perturber la vie des
familles. Les principaux facteurs
favorisant les poussées sont les pollens, les acariens, la poussière de
maison, les moisissures, les poils
d’animaux, le froid, le vent, la sueur,
les frottements, le contact avec des
matières ou des substances irritantes, certains aliments, le stress,
les infections, les poussées dentaires... Chaque patient réagit différemment, voire ne réagit pas du
tout, à chacun des éléments de cette
liste non exhaustive.
Épidémiologie
➲ La dermatite atopique est une
maladie fréquente et essentiellement
infantile. Elle touche environ un
© Association française de l'eczéma
en cause
n Atopie
© Espaceinfirmier.fr, Initiatives Santé 2016
La peau devient alors une véritable
passoire laissant s’échapper trop d’eau
et pénétrer trop d’allergènes;
➲ d’autre part, il existe des dysfonctionnements du système immunitaire cutané, qui réagit excessivement face au moindre allergène du
quotidien (voir schéma ci-dessous).
Dermatite atopique du petit enfant: plaques
d’eczéma localisées sur les membres.
enfant sur cinq, et constitue le premier motif de consultation en
dermo-pédiatrie.
➲ Dans les pays industrialisés, la prévalence de la maladie a été multipliée
par trois en trente ans. L’hypothèse
hygiéniste consiste à expliquer ce
phénomène par l’augmentation du
niveau de vie et la baisse des infections. Le système immunitaire n’apprend plus à se défendre contre les
pathogènes et se met à réagir à tous
les éléments qui l’entourent, et
notamment les plus anodins.
nnn
La peau atopique et ses défauts
Les allergènes
pénètrent plus
facilement
© D’après la Fondation pour la dermatite atopique
L’eau
s’échappe
plus
• Cellules mal agencées,
ciment de mauvaise qualité
= l’épiderme atopique
est une passoire
En dehors
des poussées
Les nerfs atteignent l’épiderme: inconfort, prurit
Réaction
immunitaire
excessive
Inflammation
• Stratum corneum
de mauvaise qualité
•La dermatite atopique est
principalement une maladie
de l’épiderme
Les vaisseaux sanguins n’atteignent pas ou peu l’épiderme:
les traitements locaux ne passent pas dans le sang
DÉCEMBRE 2016 - N° 331 - L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE
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Cahier de
formation n° 96
n Autres manifestations
© Association française de l'eczéma
Un individu atteint de dermatite atopique peut potentiellement développer d’autres aspects de l’atopie
au cours de sa vie, et notamment de
l’asthme à l’adolescence ou de la
rhino-conjonctivite allergique à l’âge
adulte. Là encore, cela dépend de
chaque patient.
Dermatite atopique de l’adulte: plaques
d’eczéma localisées sur les mains.
Évolution de la maladie
n Selon l’âge
© Espaceinfirmier.fr, Initiatives Santé 2016
La dermatite atopique apparait typiquement vers l’âge de 3 mois et disparaît en général avant 5 ans, et au
plus tard à la préadolescence. Certains patients peuvent néanmoins
souffrir de la maladie tout au long
de leur vie, avec par exemple des
cas de recrudescence des symptômes à l’âge adulte après des années
d’accalmie. Il est impossible de prévoir à l’avance ce qui va se passer
pour chaque patient.
n Principales complications
➲ Le staphylocoque doré est une
bactérie plus fréquemment présente
sur la peau atopique et donc plus à
même de surinfecter les lésions : ces
dernières prennent un aspect d’impétigo (suintement et croûtes jaunâtres) et sont dites “impétiginisées”.
➲ Des surinfections virales dues au
virus de l’herpès peuvent être
potentiellement graves avec apparition de lésions nécrotiques et
hémorragiques.
➲ Une autre complication à mentionner est l’eczéma de contact (lire
ci-après), souvent dû à l’application
répétée de topiques.
Comment
diagnostiquer?
Le diagnostic est surtout basé sur
l’examen clinique et l’interrogatoire,
ce dernier étant essentiel si le patient
n’est pas en poussée au moment de
la consultation.
n Critères de diagnostic
La dermatite atopique est une dermatose prurigineuse associée à au
moins trois des critères suivants :
➲ antécédents personnels de dermatite des plis de flexion, aux coudes,
dans les creux poplités, sur la face
antérieure des chevilles, au cou (les
joues chez les moins de 10 ans) ;
➲ antécédents personnels d’asthme
ou de rhinite allergique (ou antécédents de maladie atopique chez un
parent au premier degré chez l’enfant de moins de 4 ans) ;
Les localisations classiques des plaques selon l’âge
Tête
et cou
Derrière l’oreille
(pli sous-auriculaire)
Paupières
Cou
Joues,
menton
Tronc
Faces
externes
des jambes
et des bras
Mains et
poignets
Plis des genoux
et des coudes
Chevilles
0-2 ans
= Zones convexes
(ou zones bombées)
Mains
enfant > 2 ans
= Plis
© pushinka11 - Fotolia
adulte
32
= Atteintes localisées
Eczéma plutôt
suintant
L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE - N° 331 - DÉCEMBRE 2016
Eczéma plutôt
lichénifié
La dermatite atopique
➲ antécédents de peau sèche généralisée au cours de la dernière année;
➲ eczéma visible des grands plis (ou
eczéma des joues, du front et des
convexités des membres chez l’enfant au-dessous de 4 ans) ;
➲ début des signes cutanés avant
l’âge de 2 ans (critère utilisable chez
les plus de 4 ans uniquement).
Question de patient
La maladie est-elle héréditaire?
Un enfant a entre 50 et 70% de risque de développer une
dermatite atopique si un parent est déjà atteint, et 80% si les deux
parents sont touchés par la maladie. L’atopie est constitutionnelle
et met en jeu des gènes, mais l’environnement a aussi un rôle très
important. Il est plus juste de parler de prédisposition génétique.
n Compléter
© Espaceinfirmier.fr, Initiatives Santé 2016
le diagnostic
➲ Des échelles peuvent compléter
le diagnostic et permettent d’évaluer
la gravité de l’atteinte et/ou l’impact
sur la qualité de vie.
➲ Un bilan allergologique n’est indiqué que dans certains cas bien précis, par exemple en cas de résistance
au traitement bien conduit ou chez
un enfant avec stagnation ou cassure
de la courbe staturo-pondérale.
n Diagnostics
différentiels
➲ Il existe un certain nombre de
diagnostics différentiels : dermatite
séborrhéique, gale chez le bébé ;
lymphome cutané chez l’adulte ;
psoriasis à tout âge... D’où le
recours à des examens complémentaires si besoin. Exemples : examen au dermatoscope à la
recherche du sarcopte de la gale,
biopsie pour éliminer un diagnostic
de lymphome...
➲ Ne pas confondre la dermatite atopique avec d’autres types d’eczéma,
en général rencontrés chez l’adolescent et l’adulte : c’est le cas par
exemple de l’eczéma de contact (la
peau réagit localement en présence
de l’agent allergisant : nickel, parfum...), de l’eczéma dyshidrosique
(atteinte surtout palmo-plantaire
avec des vésicules pouvant confluer
entre elles, se rompre et former des
croûtes) ou du prurit sénile (lire
Savoir faire p.42). Mais les différentes
formes d’eczéma peuvent se cumuler
chez un même patient.
COMMENT TRAITER UNE
DERMATITE ATOPIQUE
Stratégie thérapeutique
Il n’existe pas encore de traitement
étiologique et définitif de cette maladie. Le traitement de la dermatite atopique est purement symptomatique.
n Traitement de base
Il est local et comprend deux volets,
un peu comme dans la prise en
charge de l’asthme : le traitement
des poussées ainsi que le traitement
de fond.
◗ Le traitement des poussées
➲ En première intention, les dermocorticoïdes sont choisis parmi différents niveaux de puissance, à appliquer une fois par jour jusqu’à
disparition des lésions. Ces médicaments agissent localement et rapidement mais souffrent d’une mauvaise réputation limitant leur bon
usage (lire Savoir faire p.39).
➲ En seconde intention, en cas
d’échec ou d’intolérance vis-à-vis
des dermocorticoïdes, le dermatologue ou le pédiatre peut prescrire
un traitement immunosupresseur
local à base de tacrolimus (Protopic)
aux adultes et aux enfants de plus
de 2 ans. Le tacrolimus est une alternative intéressante notamment sur
le visage, mais n’est plus recommandé chez l’enfant, et remboursé
uniquement dans la dermatite atopique sévère des plus de 16 ans.
➲ En parallèle de ces soins locaux,
des antihistaminiques sont parfois
prescrits pour lutter contre les
démangeaisons et apaiser le patient,
notamment la nuit.
◗ Le traitement de fond
➲ Il correspond à l’application quotidienne, ou pluriquotidienne en
fonction des besoins, d’un émollient.
Celui-ci va renforcer la fonction barrière pour limiter la fréquence et l’intensité des poussées de la maladie.
➲ Un traitement d’entretien à base
de dermocorticoïdes et/ou de tacrolimus est parfois proposé, à appliquer deux fois par semaine sur les
zones habituellement touchées par
l’eczéma.
n En cas d’échec
Des alternatives existent pour traiter
les poussées de la maladie, tandis
que le traitement de fond reste
inchangé, à base d’émollients.
◗ La photothérapie
Réalisée le plus souvent en milieu
hospitalier, elle reproduit les effets
bénéfiques du soleil sur la peau
inflammatoire. La photothérapie
est efficace chez certains patients
mais peut s’avérer délétère chez
d’autres, avec une recrudescence
des poussées. Sont à prendre en
compte les effets indésirables possibles tels les coups de soleil, le prurit, voire les complications ophtalmologiques ou encore les cancers
cutanés, ainsi que les contraintes
horaires avec la nécessité de plusieurs séances par semaine.
◗ Les immunosuppresseurs per os
Ils sont parfois utilisés, notamment
la ciclosporine qui possède une auto-
DÉCEMBRE 2016 - N° 331 - L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE
nnn
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Cahier de
formation n° 96
risation de mise sur le marché (AMM)
chez l’adulte atteint de dermatite atopique. Les immunosuppresseurs systémiques nécessitent un suivi biologique et clinique rapproché, et ne
dispensent pas des soins locaux.
◗ De nouveaux traitements en vue
Des biothérapies injectables (dupilumab) vont prochainement voir le
jour, pour tenter d’apporter une solution aux cas les plus sévères.
n Traitement
des surinfections
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➲ Les surinfections bactériennes
sont traitées au moyen d’antiseptiques et d’antibiotiques locaux ou
généraux en fonction de la sévérité
de l’atteinte. Les dermocorticoïdes
ne sont pas forcément arrêtés au
cours de cette période, car ils participent à la lutte contre l’inflammation de la peau.
➲ Pour les surinfections virales, il
faut avoir recours à des antiviraux,
par voie injectable dans les cas les
plus sévères.
n Médecines alternatives
➲ Des cures thermales sont parfois
proposées aux patients, à Avène, La
Roche-Posay, Uriage, Saint-Gervais...
Attention, elles doivent durer trois
semaines et seuls les soins prodigués
sur place sont pris en charge par
l’Assurance maladie.
➲ De nombreux patients ont recours
à des thérapies parallèles sans forcément informer leur médecin :
homéopathie, acupuncture, hypnose... Aucune des ces techniques
n’a pour le moment été validée dans
la dermatite atopique, mais certaines
peuvent constituer un traitement
d’appoint utile au patient.
➲ Même constat du côté du soutien
psychologique avec des thérapies
individuelles ou familiales et des
programmes d’éducation thérapeutique en milieu hospitalier (lire Savoir
faire p.38).
34
LES DERMOCORTICOÏDES
La corticothérapie locale, dont les
premières utilisations remontent
aux années 1950, est incontournable dans la prise en charge de la
dermatite atopique de l’enfant et
de l’adulte.
Mode d’action
Le mode d’action des dermocorticoïdes est principalement génomique, avec une modulation de l’expression de certains gènes, ce qui
confère au produit des propriétés
anti-inflammatoires, immunosuppressives et antiprolifératives sur
tous les composants cellulaires de
la peau.
Produits disponibles
Il existe différentes molécules et
spécialités : la bêtaméthasone dans
Betneval et Diprosone ; le désonide
dans Tridesonit, Locatop, Locapred ;
la fluticasone dans Flixovate ; l’hydrocortisone dans Efficort, Locoïd...
Mais attention, tous ces produits
ne sont pas interchangeables.
Les anti-inflammatoires topiques pour les poussées
DCI
SPÉCIALITÉS
bétaméthasone
dipropionate
Diprosone 0,05%, crème,
pommade, lotion
bétaméthasone
valérate
Betneval 0,1%, crème,
pommade, lotion
désonide
Locatop 0,1%, crème
diflucortolone
valérate
Nérisone 0,1%, crème,
pommade
Nérisone Gras 0,1%,
pommade
difluprednate
Epitopic 0,05%, crème
fluticasone
propionate
Flixovate 0,005%, pommade
Flixovate 0,05%, crème
(AMM dès l’âge de 3 mois)
POSOLOGIES
Dermocorticoïdes de classe III: activité forte
hydrocortisone
butyrate
Locoïd 0,1%, crème, crème
épaisse, pommade, lotion,
émulsion
hydrocortisone
acéponate
Efficort 0,127%, crème
hydrophile, crème lipophile
Une fois par jour, le soir, sur
les plaques d’eczéma. En mettre
jusqu’à disparition des lésions.
En pratique : appliquer partout
où c’est rouge et rugueux et
prurigineux; ainsi, peut-être que
le lendemain, une plaque sera
déjà partie et ainsi de suite,
ce qui fera moins de cortisone
à appliquer au fil des jours.
Redémarrer dès réapparition
des lésions.
Utilisation sur le corps.
Dermocorticoïdes de classe II: activité moyenne
désonide
Locapred 0,1%, crème
Tridésonit 0,05%, crème
Idem ci-dessus.
Utilisation préférentielle sur le visage
et chez les bébés.
Immunossupresseur topique en seconde intention
tacrolimus 0,03%
L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE - N° 331 - DÉCEMBRE 2016
Protopic, pommade
Attaque: deux fois par jour durant
trois semaines maximum, puis
une fois par jour jusqu’à disparition
des lésions.
Entretien: deux fois par semaine
sur les zones touchées (douze mois
maximum puis réévaluation).
Pas avant deux ans.
Utilisation privilégiée sur le visage.
Remboursé dans les poussées sévères
des plus de 16 ans.
La dermatite atopique
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Classement
des dermocorticoïdes
Une classification internationalement
reconnue, basée sur le test de vasoconstriction cutanée de McKenzie
et sur les données d’efficacité des
essais cliniques, distingue quatre
niveaux d’activité.
➲ Classe I: activité faible, pas assez
puissante pour traiter la dermatite
atopique. Par exemple, Cortapaisyl
disponible sans ordonnance.
➲ Classe II: activité moyenne, surtout
utilisée sur le visage et chez les
enfants en bas âge. Principalement
Tridesonit et Locapred.
➲ Classe III: activité forte, surtout
utilisée sur le corps. La classe III
regroupe de nombreuses spécialités : Diprosone, Efficort, Flixovate,
Nérisone...
➲ Classe IV: activité très forte, parfois
prescrite dans la dermatite atopique
en cas de plaques rebelles lichénifiées. Elle regroupe principalement
Diprolène et Dermoval.
Galénique
Les différentes textures disponibles
doivent s’utiliser au bon moment et
au bon endroit pour que le traitement soit efficace. Une crème s’applique sur des plaques suintantes
ou dans les plis. Une pommade, plus
grasse, est indiquée sur les plaques
épaissies et sèches. Les formes gel,
lotion, mousse s’appliquent sur le
cuir chevelu et les régions pileuses.
LES ÉMOLLIENTS
Mode d’action
Le terme “émollient” vient du latin
emollire qui signifie “assouplir”,
“ramollir”. Ce sont donc des produits
qui vont permettre de redonner souplesse et douceur à la peau, en même
temps qu’ils restaurent transitoirement sa fonction barrière. L’application d’un émollient permet aussi
de lutter contre l’inconfort et les sensations de tiraillements.
Question de patient
Doit-on modifier son régime alimentaire en cas d’eczéma?
Lorsque les plaques d’eczéma sont en partie dues à la prise
d’un aliment, comme par exemple les œufs ou le lait,
et que ce lien de cause à effet a été objectivé par un allergologue,
alors un régime d’éviction doit être mis en place, mais
cela reste extrêmement rare.
Pour tous les autres patients, il faut lutter contre les régimes
abusifs, pourvoyeurs de carences.
Composition
➲ Les émollients ont une action
bénéfique (assouplissante, hydratante, réparatrice) sur la peau sèche
des patients atopiques.
➲ L’ingrédient majoritaire est toujours de l’eau, thermale ou non.
Des agents humectants, la glycérine
par exemple, vont capter et retenir
l’eau, tandis que les substances
occlusives (hydrophiles : acide hyaluronique... ou hydrophobes : vaseline...) forment un film et empêchent l’évaporation de l’eau à partir
de la surface cutanée. Enfin, des
corps gras, tels des acides gras,
agissent comme des correcteurs
du ciment lipidique.
➲ Pour une peau atopique, limiter
les parfums ainsi que les autres substances allergisantes : conservateurs,
lanoline...
Galénique
Variées, les textures sont plus ou
moins grasses, à choisir en fonction
des besoins du patient: crème, baume,
cérat... (lire aussi Savoir faire p.42).
Remboursement
La prise en charge par l’Assurance
maladie est très variable en fonction
des produits.
n Émollient médicament
Le traditionnel Dexeryl est un médicament composé par une triple
association de corps gras : glycé-
rine, paraffine et vaseline, mais
seuls ses génériques sont remboursés. Sa rémanence est faible, d’où
son indication dans les xéroses
légères à modérées.
n Préparations magistrales
Le recours à des préparations magistrales, c’est-à-dire des médicaments
préparés à la pharmacie selon une
prescription médicale destinée à un
malade déterminé en raison de l’absence de spécialité pharmaceutique
disponible, permet de proposer aux
patients des produits très nourrissants et remboursés, mais le caractère “artisanal” du produit impose
une utilisation dans le mois qui suit.
n Dispositifs médicaux
Atopiclair est un dispositif médical
parfois prescrit et partiellement
pris en charge, à la fois pour hydrater la peau et lutter contre les premiers signes de l’inflammation.
D’autres dispositifs médicaux existent mais sont non remboursés :
Bepanthen Sensicalm (Bayer),
Dexyane MeD (Ducray)...
n De la dermocosmétique
La majorité des émollients sont des
produits de dermocosmétique non
remboursés. Ils s’inscrivent le plus
souvent dans des gammes complètes
“spécial peaux atopiques” : Lipikar
(La Roche-Posay), Xeracalm (Avène),
Xemose (Uriage)... <
DÉCEMBRE 2016 - N° 331 - L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE
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