Mouradian - Jean Pisani

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DEBT CRISIS MODELS IN THE
OLD LITERATURE
Mouradian Florence
Séminaire Problèmes Macroéconomiques
Contemporains 2012 : The Euro Revisited
Introduction




Il y a 2 façons d'aborder la notion de soutenabilité de la dette :
 Capacité des agents à rembourser : ratios classiques de solvabilité et de
soutenabilité.
 Disposition des agents à rembourser  Calcul d’optimisation des agents
Les dettes privées, qui comportent des garanties, peuvent être portées devant
la justice et permettre la saisie des actifs.
En contraste, dans le cas d’une dette publique :
- Ses créanciers ne peuvent pas saisir ses actifs
- Ils ne peuvent pas le forcer à payer (même s’il en a les moyens)
En l’absence d’un tribunal international des faillites, il n’y a pas de collatéral,
les créanciers ne peuvent pas devenir propriétaires du pays.

Dès lors que les contrats peuvent difficilement être respectés, pourquoi les
émetteurs souverains remboursent-ils ?
Introduction

La réponse logique est que le remboursement pour le pays doit s’avérer
moins onéreux que le défaut (Dooley, 2000)
 Il existe des bénéfices et des coûts de défaut
 L’ancienne littérature se focalise sur le calcul d’optimisation des agents,
Etat souverain et créanciers, qui définissent des types de contrats à
l’équilibre.




Notion d’une répudiation volontaire de la dette.
De quoi dépendent les coûts et les bénéfices du défaut ?
Que peut-on en déduire en termes de probabilité de défaut ?
Qu’est-ce qui dès lors incite ex ante à la prise de risque ?
Partie I
Le Modèle de référence :
Eaton & Gersovitz (1981)
1) Cadre du modèle


Contexte :
-
Les droits légaux des créanciers sur une possibilité de saisie des actifs de l’Etat à
l’étranger ou de toute autre mesure de représailles à son encontre, sont exclus.
-
Seule possibilité : l’exclure définitivement des marchés de capitaux.
-
La décision de défaut dépend d’un arbitrage entre les bénéfices de CT et les
coûts de LT d’une autarcie financière.
Les opportunités d’emprunts : hypothèses :
-
La maturité de la dette est d’une seule période : dt+1 = R(bt) = (1+r)bt
-
A chaque période t, l’emprunteur choisit :
 Ce qu’il rembourse : pt
 Ce qu’il emprunte : bt sur un ensemble B de montants qui lui sont proposés
 Donc soit pt = bt , soit pt = 0
1) Cadre du modèle

Fonction objective de l’emprunteur
 S’il fait défaut :

S’il choisit de rembourser :
 Le défaut est optimal si :
 En découle une probabilité de défaut endogène λ anticipée en t - 1 :
Théorème 1 : La probabilité de défaut en t croit de façon monotone avec le service d’obligation
de la dette dt .

Les créanciers :
-
Compétitifs et neutres au risque (diversification parfaite)
Peuvent prêter à un autre emprunteur sans risque à tout moment au taux
Connaissent λ(dt)
Ont une richesse bornée
1) Cadre du modèle

A L’équilibre compétitif, le contrat satisfait :
 Les créanciers lui proposeront un éventail de montant de prêt
borné sur
(offre)

Mais de son côté en maximisant son utilité, le pays voudra emprunter un
montant b* (demande)

L’emprunt effectif est déterminé par :

Existence potentielle d’un credit ceiling
2) Quand est-ce que le défaut intervient ?
Le pays alterne des yh et yl
 Il emprunte en période yl et rembourse en période yh (lissage de la
consommation)


Deux cas étudiés
1.


:
Cas déterministe
Les agents sont rationnels : ils connaissent la valeur de y à la période suivante
L’équilibre est caractérisé par une absence de défaut : à moins que les prêteurs
ne se trompent en prêtant plus que le ceiling , la dette sera toujours
remboursée.
Remarque : Bien sûr, une mauvaise interprétation par les prêteurs des caractéristiques
de l’emprunteur, peut conduire au défaut et à menacer la stabilité du marché.
2) Quand est-ce que le défaut intervient ?
2.



Cas stochastique
Introduction d’une incertitude sur y à la prochaine période : c’est une seconde raison
au défaut
 Soit yh , soit yl avec une probabilité ½ ,
 Il ne rembourse que si yh
Il existe un taux d’intérêt R pour lequel quelque soit y à la période suivante, Vd (yt)
< Vr (yt , dt)
Mais à un taux d’intérêt R’ > R, les prêteurs accepteront d’élargir le crédit au-là
du ceiling, même s’il y a une probabilité positive de défaut.

Si c’est le cas, et donc que le prêt dépasse le ceiling, il fera défaut dès lors que
yl à deux périodes consécutives…
A retenir
Le défaut peut intervenir pour deux raisons :
1.
2.
Menace des créanciers non crédibles
Marché du crédit n’est pas complet en raison du risque de défaut

L’allocation des ressources ne se fait pas par les prix, il existe un
ceiling au-delà duquel, pour certaines réalisations de y, le défaut peut
intervenir

Des emprunts risqués (supérieurs au ceiling) se feront quand même à
un taux d’intérêt compensant le risque (créancier neutre au risque).
Partie II
Crédibilité de la menace,
Optimisation des coûts du défaut et
Négociation
1) Rendre compte d’une menace crédible


L’hypothèse d’une exclusion définitive des marchés internationaux de
capitaux n’est pas tangible ..
 Celle-ci ne peut être au mieux que temporaire…
Il existe deux types de sanctions imposables plus tangibles :
 Saisie d’avoir à l’étranger du débiteur : représente un gain pour le
créancier à peu près équivalent  Bulow & Rogoff (1989)
 Perte d’efficacité économique imposée au pays défaillant, sous forme
d’exclusion partielle ou totale des échanges internationaux : ne
représentant aucun gain pour le créancier
2) La négociation chez Bulow & Rogoff (1988)
Deux différences majeures avec Eaton & Gersovitz :
(i)
Coûts du défaut :
 Possibilité de saisie des actifs .. modélisée ici par un % des exportations de
biens du pays.
 Exclusion du commerce international
(ii)
Approche de « bargaining » = négociation
 Hypothèse implicite de E&G : Le pays débiteur n’a que deux options :
rembourser ou faire défaut
 Or en réalité il existe une 3ème option qui est de marchander sur le
remboursement… i.e de renégocier le contrat.
 Un débiteur peut marchander parce que:
- Les banques ne recevront rien, à moins que le pays soit autorisé à
continuer d’exporter ses biens,
- Pendant que les négociations sont en cours, les biens se déprécient et les
banques ont des intérêts dessus.
 C’est aussi dans son intérêt : cela permet exante qu’il emprunte un montant
plus élevé de dette
2) La négociation chez Bulow & Rogoff (1988)

Les banques ne voudront jamais prêter plus que ce qu’elles sont capables de le
forcer à rembourser :


C’est une sorte de « credit ceiling » : si on lui prête plus, risque d’un
rééchelonnement…
Trois idées à retenir :

Un mouvement non anticipé de ces variables q, R, y et r peut donc conduire à
une renégociation…

Tout mécanisme visant à maintenir l’efficacité ex post du règlement de la dette
(connaitre et fixer q a priori) réduit alors sans aucun doute le risque exante :
types de contrats inexistants ?
 Suppose déjà une concertation entre créanciers et débiteurs, et une
coordination entre les créanciers exante qui soit crédible expost…

Les coûts du défaut (dont dépend q) doivent être optimaux :
3) La réalité des coûts de défaut
Boreinstein & Panizza (2009) : échantillon de 31 pays émergents entre 1997 et 2004


Exclusions des marchés de capitaux ? : Une fois passée la période de restructuration, le pays
retrouve accès au marché au bout de 3 ans.
Borrowing Costs : Les spreads augmentent de 400 points de base, puis de 250 dans la 2nde
année et perdent de leur robustesse statistique…



-
Coordination entre les créanciers lésés et tous les autres prêteurs qui peuvent trouver quand
même intéressant de prêter au pays ; sanctions non crédibles ?
Trade costs : les épisodes de défauts sont associés à une chute du commerce bilatéral, mais ils
ne sont pas capables d’identifier les canaux par lesquels le défaut a un effet sur le commerce.
Output costs : - 2,5 points de % dans l’année suivant le défaut, mais pas d’effet significatif sur
la croissance dans les années suivantes… .
En fait, la contraction de l’output tend à précéder les défauts et l’output commence à croitre
après le trimestre auquel le défaut a eu lieu
 Effets négatifs sur l’output sont probablement conduits par l’anticipation du défaut.
3) La réalité des coûts de défaut



Delayed defaults
Alors que les modèles économiques supposent souvent que les dirigeants sont incités
à faire défaut trop précocement ou trop souvent, dans le monde réel, les politiciens
et les bureaucrates reportent pendant de longues durées ce qui semble être un
défaut inévitable.
Il y a deux raisons possibles à cette réticence :

Coût politique

Assurer les marchés que la décision de défaut est inévitable, et non
stratégique : La perte de réputation en cas de défaut « stratégique » est
supérieure à celle du défaut “inévitable” (Modèle de Grossman & Van Huyck
(1988) )
 On reporte le défaut même au prix d’un coût économique plus élevé
durant le délai.
 « Gamble for resurrection » (Argentine, 2001; Cas de la Grèce ?)
Partie III
L’incomplétude des marchés du
crédit : le non-contingentement des
actifs
1) Le rôle de la non-indexation des contrats :
Arellano (2008)


Arellano, C. (2008), Default Risk and Income Fluctuations in Emerging Economies,
American Economic Review
C’est l’incomplétude des marchés qui conduit au défaut !
 Opportunités de couverture du risque limitée

Les marchés sont incomplets pour deux raisons :
-
D’une part, le risque de défaut
-
D’autre part, les contrats ne sont pas contingents à l’état : les prêteurs
compétitifs neutres au risque offrent des contrats de dette qui dans certains
états, résulteront en défaut, en chargeant une prime de risque plus élevée sur
ces prêts
1) Le rôle de la non-indexation des contrats
1) Le rôle de la non-indexation des contrats :
Arellano (2008)
1.
2.
La probabilité de défaut ne croit pas linéairement avec le niveau
d’emprunt : il existe un niveau d’emprunt après lequel la probabilité du
défaut augmente très vite de 0 à 1.
Le défaut est très couteux (averse au risque ?) pour les créanciers car ils
perdent la valeur de leurs investissements, et en conséquence les taux
d’intérêt requis pour compenser ce risque de défaut augmentent très vite
à mesure que la probabilité de défaut croît.

En associant cette idée avec la précédente, il existe des niveaux
d’emprunt après lesquels le taux d’intérêt sur la dette souveraine augmente
brusquement de r à un niveau prohibitif
2) Pourquoi les prêts ne sont pas contingents ?
 Rogoff, K.S. (2011) Sovereign Debt in the Second Great Contraction: Is This
Time Different?
o
o
On ne peut pas fixer des contrats sur des variables pour lesquelles le
pouvoir discrétionnaire des emprunteurs est énorme quant à la création de
statistiques qui seront utilisées pour l’indexation !
Cette question renvoie au contexte plus global de confiance : La Grèce par
exemple, n’est pas capable de lever des fonds en vendant ses actifs aux
étrangers, parce que les étrangers n’ont pas confiance dans ce qu’il
adviendra de ceux-ci….
3) La limite des modèles théoriques
Les modèles théoriques fournissent peu de référence sur le point à partir duquel un pays
fera défaut. Les références empiriques :
Les pays avec une longue série historique de défaut font face à des niveaux de
dettes bien plus faibles que les pays avec un relatif bon niveau historique de
remboursement.
 Entre début 19ème et 20ème : nombre moyens d’années en défaut et en
rééchelonnement : Grèce (50,6) Espagne (23,7), Portugal (10,6), Italie (3,4).

Reinhart, Rogoff & Savastano (2003) “Debt Intolerance,”

Les défauts sur les dettes externes apparaissent être un phénomène universel
lorsqu’un pays réalise sa transition de développement
Reinhart & Rogoff (2009) “This Time is Different: Eight Centuries of Financial Folly”

Les vagues de crises financières sont de manière typique associées avec des vagues
de dettes souveraines dans les quelques années qui suivent.
Reinhart & Rogoff (2011) “From Financial Crash to Debt Crisis forthcoming”
Conclusion



Ex ante les mécanismes conduisant au défaut :

L’incomplétude des marchés du crédit (i.e ne couvre pas toutes les opportunités
de risque) en raison :
 Du risque endogène de défaut : empêche l’ajustement par les prix donc
création d’un ceiling qui dans certains cas peut être dépassé
 Du non-contingentement des actifs : Conduit à des situations de prises de
risques où les probabilités de défaut, et donc les taux d’intérêt croient de
manière brutale… incitant les Etats au défaut.

La concertation ex ante entre créanciers & débiteurs, et la coordination des
créanciers ne sont pas suffisantes : les menaces sont peu crédibles et les coûts du
défaut ne sont pas optimaux
L’ancienne théorie ne rend pas compte de faits économiques persistants dans
l’histoire
Rôle clef de la confiance des créanciers & de la psychologie des marchés ?
 Crises autoréalisatrices
Bibliographie
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Arellano, C. (2008), Default Risk and Income Fluctuations in Emerging Economies, American
Economic Review, 98:3
Borensztein, E. & Panizza, U. (2009), The Costs of Sovereign Default, IMF Staff Paper,
November, vol.56(4)
Bulow, J. & Rogoff , K. S (1988), Multilateral Negotiations for Rescheduling Developing
Country Debt: A Bargaining-Theoretic Framework, IMF Staff Papers 35, December, pp.
644–57.
Eaton, J. & Gersovitz, M. (1981). Debt with Potential Repudiation: Theoretical and
Empirical Analysis, Review of Economic Studies, v. XLVII, 289-309.
Reinhart, C.M., Rogoff, K. S & Savastano, M. (2003), Debt Intolerance, in W. Brainard
and G. Perry, eds., Brookings Papers on Economic Activity 1: 2003
Reinhart, C.M. & Rogoff, K. S (2011), From Financial Crash to Debt Crisis, forthcoming,
American Economic Review, August 2011.
Reinhart, C.M. & Rogoff, K. S (2009), This Time is Different: Eight Centuries of Financial
Folly, Princeton University Press, 2009, chapters 10
Rogoff, K.S. (2011) Sovereign Debt in the Second Great Contraction: Is This Time
Different?, in The 2011 Martin Feldstein Lecture, NBER reporter, N° 3
Wright, M. (2011). The theory of sovereign debt and default. University of California, Los
Angeles.
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