Les mécanismes de résistance chez les bactéries à Gram négatif Jacques Croizé MCU-PH UFR Médecine - CHU - Grenoble DU Antibiologie 17 janvier 2007 Structure d’une bactérie Mode d’action des antibiotiques Mécanismes de résistance Résistance naturelle Mécanismes biochimiques de résistance • Inactivation ou modification de l’antibiotique (B lactamines et aminosides) • Altération de la cible (macrolides) • Accumulation diminuée – Diminution de la perméabilité – Efflux augmenté • Souvent mécanismes complexes , mixtes Mécanismes génétiques de résistance • Survenue de mutations dans le génome bactérien, soit dans le chromosome (transmission verticale) soit dans les éléments mobiles (plasmide ou transposon) (transmission verticale ou horizontale) • Acquisition d’ADN étranger provenant d’autres bactéries (tranposon, plasmide, intégron) Les b lactamases Les Béta-lactamases • Emergence continuelle de nouvelles enzymes chez entérobactéries, P. aeruginosa et Acinetobacter • Méthodes d’analyse génétique avec l’amplification génique et le séquençage ont augmenté le nombre rendant le phénomène complexe • Depuis 1960-70, quatre classes (Ambler) – A,C,D sont des enzymes à sérine active – B sont des métallo-béta-lactamases (MBL) dont l’activité à besoin de Zn ++ pour s’exprimer Les Béta-lactamases • Classe A : touche péni A puis C3G – 23 chromosomiques (départ TEM) – Plus de 120 dérivés des TEM et 50 dérivées de SHV plasmidiques dont les BLSE comprenant les céfotaximases (CTX-M) l’amplification génique et le séquençage ont augmenté le nombre • Classe B : touche C3G et imipénème (aztréonam sensible) – MBL chromosomiques chez les BGN oxydatifs – MBL plasmidiques chez Pyo (VIM), Acinetobacter Les Béta-lactamases • Classe C (C1G puis autres) – Enzymes naturelles (Case ou AmpC) – Hyperproduction (BLSE et Case) résistances aux « C4G » – Case plasmidique C3G touchées mais pas les C4G • Classe D pénicillinase peu sensible aux inhibiteurs – Oxacillinase: Surtout chez pseudomonas puis entérobactéries Résistance plasmidique aux fluoroquinolones • Jusqu’en 1994, seule résistance par mutation : sur ADN gyrase, Topoisomérase IV, génes de régulation des systèmes d’influx (porines) ou de d’efflux • En 1994, description du gène qnr chez K. pneumoniae, transférable, sur des plasmides ou des intégrons associées souvent à des BLSE ou des cases plasmidiques • Niveau de résistance bas : Nal 32, oflo 1, cipro 0,25 • Fréquence faible en France (étude multicentrique : 22 souches (22/487 BLSE) alors aucune souche sur les 690 R aux quinolones mais BLSE - Mécanismes d’efflux actif et résistance par efflux actif Système d’efflux • Définition : ce sont des mécanismes de transport membranaire universellement répandus chez des organismes vivants; ils ont un rôle clé dans la physiologie bactérienne • Rôle : préserver l’équilibre physico-chimique du milieu intracellulaire en s’opposant à l’accumulation de substances naturelles ou synthétiques toxiques :transport de substances nutritives et export de substances toxiques. • Différenciation des pompes à efflux par : – – – – Spécificité ou non des molécules exportées Structure : une à trois protéines Type d’énergie nécessaire : ATP ou force proton-motrice Mode expression : inductible ou constitutif Structure des systèmes d’efflux actif • Protéine localisée dans l’épaisseur de la membrane cytoplasmique assurant la reconnaissance, le fixation et le transport de substrats proches par leur structure • La pompe comporte 4, 12 ou 14 segments peptidiques hydrophobes transmembranaires reliés entre eux par des boucles hydrophiles extramembranaires. La comparaison des séquences en acides aminés à permis de les en cinq grandes familles. • Elles sont des substrats spécifiques ou sont à spectre large (multidrug : MD) • Les pompes MD sont conservées et sont codées par le chromosome; les pompes spécifiques sont codées par des plasmides (Tn ou intégron) Rôle des systèmes d’efflux actif dans la résistance aux antibiotiques ou aux biocides • Pompe localisée dans la membrane cytoplasmique va empêcher l’antibiotique ou le biocide d’atteindre sa cible en effectuant son efflux actif hors de la bactérie • Les antibiotiques qui ne pourront atteindre la cible intracytoplasmique seront plus touchés que ceux agissant sur des cibles à la surface de la bactérie (B lactamines, glyco et lipopeptides sont moins touchés) Les cinq grandes familles des systèmes d’efflux actif • MFS ou MF: major facilitator superfamily – avec 12 ou 14 domaines transmembranaires • SMR : small multidrugresistance – avec 4 domaines transmembranaires • MATE : multidrug and toxic exclusion Les systèmes d’efflux actif chez les Gram négatif • Souvent de types RND • Codés par gènes chromosomiques ++ avec systèmes régulateurs complexes permettant l’adaptation de la bactérie • Peuvent aussi être codés par – plasmide ou transposon: Tet – Intégron : MFS polyrésistance chez STM DT 104 Résistance naturelle chez les Gram négatif • Ensemble de mécanismes de résistance – Modification ou hydrolyse de l’antibiotique – Faible affinité de l’antibiotique sur sa cible – Imperméabilité ou efflux actif • La résistance naturelle par efflux est importante chez les Gram négatif • La preuve de la résistance par efflux est apporté – par des expériences d’inactivation de gènes rendant les bactéries plus sensibles avec des CMI 2 à 16 fois inférieures aux souches sauvages – Par l’utilisation d’inhibiteurs de l’énergie membranaire : réserpine, CCCP Résistance acquise chez les Gram négatif • Acquisition de gènes étrangers : tet, cmlA, flo, qac – Modification ou hydrolyse de l’antibiotique – Faible affinité de l’antibiotique sur sa cible – Imperméabilité ou efflux actif • Surproduction d’un système existant, par mutation – CMI augmentées modérément : de 4 à 8 fois – Exemples E. coli et Gonocoque AcrAB-TolC et MtrCDE : résistance bas niveau Tét, Macro et CMP et sensibilité conservée de FQ et BL – Exemple Pyo : suexpression de MexAB-OprM : résistance à Tic et Azt et certaines FQ Exemples chez certains BGN Surveillance de la résistance • A la fois résultat phénotypique (réponse I ou R) • Et mécanismes biochimiques ou enzymatiques • Mécanismes génétiques • Mécanismes moléculaires Entérobactéries E. coli – CHU Grenoble 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 Amoxicilline 54 46 48 45 46 47 47 49 57 50 Amoxicilline + A.C. 27 29 34 28 25 28 26 30 29 21 Ticarcilline 39 41 44 42 43 44 44 45 44 47 Ticarcilline + A.C. 9 11 12 12 9 11 11 12 12 13 Tazocilline 3,7 3,2 3,1 3,2 2,7 2,6 3 4 4 4 Imipénème 0 0 0 0 0 0 0,2 0,1 0 0 Céfalotine 33 39 36 31 30 32 33 37 38 Céfotaxime 1,2 1 0,9 0,8 0,4 0,8 0,8 0,6 1,4 Ceftazidime 1,1 1,3 1 0,9 0,4 0,9 0,8 0,6 4,7 Gentamicine 1,5 1,6 2,5 2,5 2,5 3,4 4 4 5,6 4,8 Tobramycine 1,8 1,6 2,1 2,2 2,1 2,8 3,6 3,7 5,7 5,3 Nétilmicine 1,3 1,2 1,6 1,3 1,1 1,3 2,1 1,8 4,5 4,6 Amikacine 0,6 0,4 0,2 0,4 1 0,6 0,6 0,4 1,2 1,3 Cotrimoxazole 24 23 27 26 24 24 23 25 22 23 Acide nalidixique 11 10 12 13 12,5 14 15 16 17 18 Fluoroquinolones 3,8 3,1 5,6 4,7 5,3 7 7,7 8 10 12 Fosfomycine 1,3 0,6 0,5 0,8 1,2 0,9 1,1 0,9 0,1 0,4 1,6 E. coli – CHU Grenoble 1995 2000 2004 Amoxicilline 54 47 50 Amoxicilline + A.C. 27 28 21 Ticarcilline 39 44 47 Ticarcilline + A.C. 9 11 13 Tazocilline 3,7 2,6 4 Imipénème 0 0 0 Céfalotine 33 32 Céfotaxime 1,2 0,8 Ceftazidime 1,1 0,9 Gentamicine 1,5 3,4 4,8 Tobramycine 1,8 2,8 5,3 Nétilmicine 1,3 1,3 4,6 Amikacine 0,6 0,6 1,3 Cotrimoxazole 24 24 23 Acide nalidixique 11 14 18 Fluoroquinolones 3,8 7 12 Fosfomycine 1,3 0,9 0,4 1,6 BGN résistants C3G • Résistance naturelle • Résistance acquise – Hcase – BLSE (CTXM ou non) – Case plasmidique C3G hyperproduction Case naturelle E. Cloacae HCase C freundii Hcase E cloacae Hcase 2006 2 C3G par BLSE BLSE au CHU Grenoble Année Patients(nbre) E. coli E. aerogenes Autres P. aeruginosa 2000 34 13 16 11 1 2001 21 7 6 9 0 2002 18 3 5 8 2 2003 23 10 3 9 3 2004 40 18 9 17 0 2005 44 35 1 8 0 2006 99 56 12 33 (KP) 2 E. Coli BLSE E. Coli BLSE - CTXM C3G R par céphalosporinase E. Coli résistant céfépime (céphalosporinase plasmidique ?) Acinetobacter baumannii Résistance A baumannii • Résistance naturelle • Résistance acquise polyrésistance • Sensibilisation d’une souche épidémique porteur d’une BLSE type VEB-1 par InVS en septembre 2003 (synergie TIM avec CAZ) Acinetobacter baumannii souche sauvage Souche « alerte sept 2003 « – AB avec BLSE VEB-1 P. aeruginosa P. aeruginosa • Surveillance de la résistance – – – – Ceftazidime Imipénème Ciprofloxacine Tobramycine Détection de MBL carbapénèmase(positif) P. aeruginosa muqueux sensible Evolution du pourcentage de résistance de P. aeruginosa Ticarcilline Timentin Tazocilline Imipénéme Céfotaxime Céfépime Cefpirome Ceftazidime Gentamicine Tobramycine Nétilmicine Amikacine Oflo/Norfloxacine Ciprofloxacine Fosfomycine 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 42 36 41 39 35 41 35 32 33 35 34 45 31 30 36 37 34 40 35 32 34 34 34 46 29 20 20 20 19 23 22 18 22 21 21 25 20 18 12 17 16 21 21 18 21 23 24 23 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100 - - 32 29 18 25 21 22 28 31 32 - - 47 40 44 44 43 42 43 47 44 37 - 24 20 24 19 19 25 17 15 19 19 18 25 37 33 49 53 47 47 48 50 62 61 58 36 20 17 16 16 13 15 16 18 21 22 19 22 24 18 33 36 37 36 37 38 45 39 40 42 16 12 17 19 18 23 26 25 28 27 26 57 57 60 57 54 59 53 59 65 62 56 25 - 38 39 37 37 34 35 30 30 36 32 31 38 59 56 59 60 51 55 66 63 67 57 43 45 Evolution du pourcentage de résistance de P. aeruginosa – CHU Grenoble 1995 2000 2004 Ticarcilline 41 32 45 Timentin 36 32 46 Tazocilline 20 18 25 Imipénéme 12 18 23 Céfotaxime 100 100 100 Céfépime 32 22 37 Cefpirome 47 42 - Ceftazidime 24 15 25 Gentamicine 49 50 36 Tobramycine 16 18 22 Nétilmicine 33 38 42 Amikacine 17 25 25 60 59 - Ciprofloxacine 37 30 38 Fosfomycine 59 63 45 Oflo/Norfloxacine Place des BGN dans la surveillance des BMR • Bactéries soumises aux mesures d’isolement septique – SARM, EBLSE, A baumannii; Pyo CAZR et IMPR • Autres bactéries selon leur profil de résistance – S. maltophilia