Les Traitements de Substitution aux Opiacées

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Les Traitements de
Substitution aux Opiacées
E.LEFORT
Cadre Supérieur de Santé
Addictologie P.Brousse
Traitements de Substitution aux Opiacées
INTRODUCTION :
En France :
en 2010, près de 40 000 patients traités par la Méthadone.
(estimation faite à partir d’une posologie quotidienne de 60 mg/jour)
7 000 en CSST // 33 000 en ville (relais après primo-prescription).
Près de 110 000 patients traités par BHD.
Pour la méthadone, on peut noter une pratique de relais croissante
(2 000 patients en ville en 1999 pour 33 000 en 2010).
Indications préférentielles
Buprenorphine
Methadone
Agoniste partiel avec effet plafond =
risque d’overdose nul en mono-thérapie
Agoniste pur = dose létale 1 mg/kg/jour
pour des patients non-dépendants
Effet opiacé limité :
effet plafond thérapeutique (ex : douleur)
Effet opiacé plus prononcé :
effet dose-dépendant, climat morphinique
Biodisponibilité aléatoire 15 à 60 %
Biodisponibilité élevée 80 %
Métabolisme peu variable
Forte variation du métabolisme =
pratique des méthadonémies
Comprimé hydrosoluble (sublingual) =
détournement par voie IV possible
Sirop non injectable
Méthadone et Traitement de Substitution aux
Opiacées
Partenariat Public – Privé :
Statut du médicament Chlorhydrate de méthadone AP-HP® :
L’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris, titulaire de l’AMM depuis
1995 (préparation magistrale hospitalière de 1972 à 1995).
Les Laboratoires Bouchara-Recordati exploitent l’AMM depuis 1999 pour
la France.
Présentations:
-Sirop: flacons de 5, 10, 20, 40 et 60 mg
-Comprimés: 5, 10, 20 et 40 mg
Méthadone et Traitement de Substitution aux
Opiacées
Efficacité pour l’individu :
Rester en vie
Parvenir à l’abstinence ou à un mode de consommation stable
Stabiliser sa vie sociale
Améliorer sa santé physique
Diminuer son activité délictueuse
Indications préférentielles de la méthadone
Éléments pouvant inciter au choix de la méthadone :
- Antécédents lourds de toxicomanie : poly-consommations, poly-dépendances
- Période d’addiction longue
- Problèmes affectifs et sociaux graves
- Co-morbidités psychiatriques ou infectieuses importantes
Indications préférentielles de la méthadone
Indications préférentielles :
- Pérennisation du mésusage et/ou détournement d’un autre traitement
de substitution
- Recherche d’effets (climat morphinique, effet de relaxation opiacée)
- Compulsion à l’injection (tous produits)
- En cas de douleur nécessitant la prescription d’un opiacé
- En cas d’échec avec un autre MSO
Mise en place du traitement
jour
Posologie de méthadone
1
30 mg
2
40 mg
3
50 mg/jour pendant 4 à 10 jours en moyenne
7 à 13
60 mg/jour pendant 5 jours
12 à 18
70 mg/jour pendant 5 jours
Tous les
4 à 10 jours
+ 10 mg/jour
si nécessaire
Clinical Concepts – Guidance on Optimal Methadone Dosing. Peter L. TENORE, Division of Substance Abuse,
Albert Einstein College of Medicine, Bronx, NY. A.T.F. Volume XII-2, spring 2003
Mise en place du traitement
1.
2.
3.
4.
5.
6.
‘Commencer bas et augmenter doucement’ *
La première prescription ne doit pas excéder 40 mg/jour
L’apparition d’une forte sédation dans les 3 à 4 heures qui suivent la prise de
méthadone est le signe d’alerte d’un surdosage
La quasi-totalité des signes physiques de manque disparaît à 40 mg/jour
A partir de 40 mg, la posologie doit être augmentée par palier de 10 mg. Ces
paliers doivent durer de 4 à 10 jours (nécessaires pour atteindre le steadystate), pour éviter le risque d’accumulation de la méthadone *
En cas de prises connues ou suspectées de benzodiazépines et/ou d’alcool, une
surveillance renforcée des effets de la prise de méthadone doit être envisagée
dans les heures qui suivent (3 à 8 heures notamment).
*: Clinical Concepts – Guidance on Optimal Methadone Dosing. Peter L. TENORE, Division OF Substance Abuse,
Albert Einstein College of Medicine, Bronx, NY. A.T.F. Volume XII-2, spring 2003
Mise en place du traitement
Les patients pour lesquels on connaît un haut niveau de dépendance et de tolérance
doivent bénéficier d’une posologie à l’induction de 25 à 40 mg/jour, et d’une
adaptation de posologie par palier de 10 mg.
A l’inverse, à ceux pour qui le niveau de dépendance et de tolérance est présumé
faible ou difficile à apprécier, la posologie à l’induction ne doit pas dépasser 10 à
20 mg/jour, et les augmentations de posologie doivent se faire par palier de 5 mg
Methadone Dosing & Safety in the Treatment of Opioid Addiction, Stewart B. Leavitt, on www.atforum.com
Mise en place du traitement
D’après Preston, 1999
Score médecin
Score patient
La cotation se fait pendant que le patient
remplit son auto questionnaire, en l’observant
sur une période de 5 minutes et non en lui
posant des questions :
Veuillez répondre aux questions suivantes en
cochant pour chaque item la case qui vous
paraît le mieux correspondre à votre état en ce
moment :
Cocher 0 si absent
1 si présent
• Bâillement (1 ou plus pendant la période
d’observation)
• Rhinorrhée (3 reniflements ou plus pendant la
période d’observation)
• Piloérection (observée sur le bras du patient)
• Transpiration
1. Je suis anxieux
2. Je baille
3. Je transpire
4. Mes yeux larmoient
5. J’ai le nez qui coule
6. J’ai la chair de poule
• Larmoiement
7. J’ai des tremblements
• Mydriase
8. J’ai des frissons chauds
• Tremblement (mains)
9. J’ai des frissons froids
• Frissons (le sujet grelotte et se recroqueville)
10. Mes os et mes muscles me
font mal
• Agitation (changement fréquent de position)
• Vomissements
11. Je me sens nerveux
12. J’ai des nausées
• Fasciculations musculaires
13. J’ai des vomissements
• Crampes abdominales (le sujet se tient le ventre)
• Anxiété (le sujet pianote, tape du pied, se plaint de
difficultés à respirer ou de palpitations, etc)
SCORE TOTAL
14. Mes muscles tressautent
15. J’ai des crampes d’estomac
16. Je suis à bout de nerfs
SCORE TOTAL
0
1
Pas du tout
Léger
2
Modér
é
3
Intense
4
Extrêm
e
Recherche de la posologie adéquate
Phase 1 : disparition des signes physiques du manque, obtenue dès les premiers
jours (baillements, rhinorrhée, mydriase, larmoiement, agitation, douleurs
abdominales…)
Phase 2 : rechercher la réduction maximale des symptômes cliniques subjectifs
(anxiété, irritabilité, réveil précoce, pulsion pour les drogues – craving…)
Phase 3 : obtenir l’arrêt de la consommation d’opiacés illicites
« L’usage continu d’opiacés illicites est une indication absolue à augmenter
le dosage de la méthadone »
* : Importance d’un dosage de méthadone individuellement adapté pour un suivi efficace des héroïnomanes
polytoxicomanes, Dr Jean-Jacques DEGLON, THS 3 Nice, 15/11/1997
Posologie de méthadone et consommations
d’héroïne
L’objectif d’un traitement par la méthadone est une réduction, puis une
abstinence aux opiacés illicites (Guidelines d’Euromethwork).
La persistance d’une consommation d’héroïne est un facteur de mauvaise
rétention dans un programme de maintenance à la méthadone. Mieux
comprendre pourquoi des patients continuent à utiliser des opiacés pendant le
traitement est essentiel. *
Le sous-dosage a pour conséquence la persistance d’un craving et des prises
compensatrices d’opiacés.
MAGURA and al. Pre- and in-treatment predictors of retention in methadone treatment using survival analysis.
Addiction 1998, 93(1), 51-60
Adaptation de la posologie : en résumé
Facteurs déterminants
Facteurs influents
Les comorbidités psychiatriques
La situation clinique du patient ;
disparition des signes objectifs et
subjectifs du sevrage aux opiacés *
L’absence de forte sédation dans les
3 à 4 heures qui suivent la prise
L’arrêt de la consommation d’opiacés
illicites
Le poids des patients
Les facteurs génétiques et le
métabolisme
Le statut sérologique pour l’hépatite
C
La consommation d’alcool
Le niveau de dépendance
Grossesse et méthadone
La méthadone est un médicament de substitution dont
l’utilisation est possible chez la femme enceinte (A.M.M.).
La méthadone n’est pas contre-indiquée en cas d’allaitement.
Le risque de syndrome de sevrage du nouveau-né existe et
peut être facilement pris en charge.
Le sevrage des opiacés pendant la grossesse, même s’il est
possible, entraîne un risque important de souffrance fœtale, et
ne doit être entrepris qu’exceptionnellement.
D’autres facteurs peuvent conduire à des adaptations de la
posologie :
 La grossesse et les modifications physiologiques et métaboliques qu’elles
entraînent : les femmes enceintes peuvent avoir des signes de manque, notamment
pendant le 3ème trimestre. Le syndrome de manque aux opiacés peut alors avoir
pour conséquence des complications maternelles et fœtales : avortement spontané,
prématurité,…
Les posologies doivent être augmentées, avec possibilité de bi-prise, si les
symptômes persistent.
*: JARVIS MAE et al., Altérations in methadone metabolism during late pregnancy. J Addict Dis. 1999; 18(4)51-60
Méthadone et allongement du QT
Précaution :
« En raison des risques de troubles du rythme cardiaque (torsades de pointe),
nous formulons la recommandation de ne pas prescrire un dosage entraînant
une méthadonémie à 24 heures de plus de 1000 ng/ml, ce taux ayant fait la
preuve de son innocuité cardiaque toutes ces dernières années chez de très
nombreux patients ».
Il peut être utile de préconiser un ECG à l’initiation du traitement (notamment
en cas de co-prescriptions avec des médicaments allongeant le QT), ou en cas
de posologie inhabituelle.
BOURQUIN et al., Méthadone à haut dosages et risque de torsade de pointe, FLYER 8, Juin 2002
Les méthadonémies
Méthadonémie
résiduelle
Signes cliniques
Inf. à 200 ng/ml
Signes de manque probables, inefficacité
thérapeutique
200 à 400 ng/ml
Peu ou disparition des signes de manque,
blocage des récepteurs opiacés incomplet
400 à 500 ng/ml
Optimal : habituellement plus de signes de
manque, blocage des récepteurs opiacés effectif
500 à 700 ng/ml
Signes de manque improbables, monitoring
clinique (risque d’overdose)
Sup. à 700 ng/ml
Signes de manque improbables, rechercher les
raisons d’une posologie/méthadonémie élevée,
monitoring clinique (/OD)
Clinical Concepts – Guidance on Optimal Methadone Dosing. Peter L. TENORE, Division OF Substance Abuse,
Albert Einstein College of Medicine, Bronx, NY. A.T.F. Volume XII-2, spring 2003
La bi-prise quotidienne
Quand ?:
Signes cliniques : patients hyper-sédatés dans les 3 heures qui suivent
la prise, avec apparition de signes de manque avant la prise suivante
Confirmation : la méthadonémie au pic est 2 fois supérieure à la
méthadonémie résiduelle
*: Clinical Concepts – Guidance on Optimal Methadone Dosing. Peter L. TENORE, Division OF Substance Abuse,
Albert Einstein College of Medicine, Bronx, NY. A.T.F. Volume XII-2, spring 2003
Règles de prescription et de délivrance

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Indication : « traitement substitutif des pharmacodépendances
majeures aux opiacés dans le cadre d’une prise en charge
médicale, sociale et psychologique ».
Adultes et adolescents volontaires.
Posologie moyenne : 60 à 100 mg/j (en phase d’entretien). Des
doses supérieures ou inférieures peuvent être nécessaires.
Contres-indications :
 Age < 15 ans.
 Insuffisance respiratoire grave.
 Hypersensibilité à la méthadone.
 Traitement concomitant par un antagoniste ou un agonisteantagoniste morphinique
Règles de prescription et de délivrance
PRESCRIPTION :
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Stupéfiant - ordonnance « sécurisée »
Rédaction en toutes lettres
Limitée à 14 jours - non renouvelable
Nom du pharmacien ou de la pharmacie
Chevauchement possible si mention
Prescription initiale réservée aux médecins exerçant en C.S.S.T. et
aux médecins exerçant dans un établissement de santé (primoprescripteur)
Relais possible par tout médecin (médecin-relais) après stabilisation
du patient - posologie modifiable (à la hausse ou à la baisse)
Changement de médecin-relais possible avec nouvelle prescription
d’un médecin primo-prescripteur
Règles de prescription et de délivrance
DELIVRANCE A L’OFFICINE :
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Fractionnement par périodes de 7 jours maximum, sauf mention
du prescripteur : « à délivrer en une fois » (14 jours maximum)
1ère délivrance : ordonnance du médecin du CSST ou du
médecin exerçant en établissement de santé (primoprescripteur) + ordonnance du médecin-relais.
Au delà de 72h, délivrance des jours restants
Original de l’ordonnance pour le patient, duplicata pour la CPAM
Copie gardée 3 ans, classée par prescripteur et
chronologiquement
Mentions réglementaires à apposer :
 timbre de l’officine
 N° d’enregistrement à l’ordonnancier
 date d’exécution
 quantités délivrées
Interactions médicamenteuses
Contre-indications strictes :
SUBUTEX®, NUBAIN®, FORTAL®,
REVIA®, NALOREX®
Médicaments dont l’association potentialise les effets sédatifs centraux
et/ou dépresseurs respiratoires :
ANTI-H1
BARBITURIQUES
NEUROLEPTIQUES
ANTI-DEPRESSEURS TRICYCLIQUES CARBAMATES
BENZODIAZEPINES ANALGESIQUES MORPHINIQUES
ANTI-TUSSIFS MORPHINIQUES
Effets indésirables
Bonne tolérance globale (moins de 20 % d’effets indésirables en phase
d’entretien- Swiss Méthadone report, 96)
En phase d’entretien, principalement :
HYPERSUDATION
CONSTIPATION
VARIATION DE POIDS
TROUBLES DU SOMMEIL
TROUBLES DE LA SEXUALITE
Pour les autres effets indésirables, notamment ceux qui surviennent lors de la mise en
place du traitement, se reporter au RCP (Résumé des Caractéristiques du Produit).
Arrêt de traitement
Il est préférable que chaque personne continue à recevoir le traitement tant
qu’elle en retire des avantages,
ce qui constitue, pour cette personne, la durée optimale.
Le traitement d’entretien à la méthadone pour une période indéfinie, ou même
pendant la vie entière, est une possibilité pour certain(e)s client(e)s ou
patient(e)s.
Extrait de « Meilleures pratiques – Traitement d’entretien à la méthadone »
Préparé par Jamieson, Beals, Lalonde & Associates, Inc.
pour le Bureau de la Stratégie canadienne antidrogue Santé Canada
Arrêt de traitement
Il est recommandé de diminuer les posologies de 10 mg chaque semaine,
jusqu’à la posologie de 40 mg par jour, et ensuite de continuer à diminuer de
5 mg par semaine. La vitesse de réduction doit être discutée avec les patients,
et les changements de posologie ne doivent pas survenir plus d’une fois par
semaine.
Plus la consommation d’opiacés avant le traitement est importante et ancienne,
plus la probabilité de rechuter après l’arrêt du traitement est grande.
Les chances de maintenir l’abstinence sont accrues pour les patients qui ont
établi des liens sociaux à l’écart de la drogue, qui ont une situation familiale
stable, qui ont du travail et une bonne stabilité psychologique.
Extrait de ‘Clinical Guidelines and Procedures for the Use of Methadone in the Maintenance Treatment of
Opioid Dependence’ (Australie).
Le Subutex (Buprénorphine)

Présentation:
Comprimés non sécables de 5, 10, 20 et 40 mg en boite de 7 cps.

Indications:
Traitement substitutif des pharmacodépendances majeures aux
opiacées dans le cadre d’une thérapeutique globale de prise en
charge médicale, sociale et psychologique.
Réservé aux adultes et aux enfants de plus de 15 ans et volontaires.

Prescription:
Ordonnance sécurisée limitée à 28 jours et fractionnée à 7 jours.
Le Subutex (Buprénorphine)
 Contre-indications:
Hypersensibilité à la Buprénorphine
Enfant de moins de 15 ans.
Insuffisance respiratoire sévère
Insuffisance hépatique sévère
Intoxication alcoolique aïgue
 Interactions:
Alcool: majoration de l’effet sédatif.
Benzodiazépines, morphiniques, neuroleptiques, barbituriques,
antidépresseurs, anxiolytiques,…
Le Subutex (Buprénorphine)
 Effets indésirables:
Insomnie, céphalées, vertiges, malaise
Hypotension orthostatique
Constipation, nausée, vomissement
Asthénie, somnolence, sueur
 Surdosage:
Dépression respiratoire pouvant entrainer un arrêt cardio-respiratoire
Mettre en position latérale de sécurité et alerter les secours
Soins intensifs:
Surveillance de la ventilation contrôlée ou assistée
Utilisation d’un antagoniste aux opiacées (Naloxone)
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