La plus longue bataille : la Bataille de l’Atlantique La Bataille de l’Atlantique est la plus longue bataille de la Seconde Guerre mondiale. Elle dure de septembre 1939 jusqu’à la fin de la guerre en Europe en mai 1945. Trois éléments de cette phase de la guerre sont inséparables : le port d’Halifax, les convois et la Marine royale du Canada. Contexte historique Lorsque le Canada entre en guerre en septembre 1939, sa marine n’est pas prête pour le combat. La Marine royale canadienne ne compte que 1800 hommes et 11 navires dont seulement deux sont modernes. Les convois sont utilisés pendant la Première Guerre mondiale dans le but de protéger les navires marchands traversant l’Atlantique contre la menace des sous-marins allemands. Le port d’Halifax bénéficie d’un mouillage profond pour près de 150 navires, ne gèle jamais et peut être facilement défendu contre des attaques venant de l’Atlantique. Pendant la guerre de 1418, il avait démontré son importance pour approvisionner la Grande-Bretagne en nourriture et en matériel de guerre et comme principal port d’embarquement pour la Force expéditionnaire canadienne qui est envoyée combattre en France et en Belgique. Pays insulaire, la Grande-Bretagne dépend du commerce extérieur même en temps de paix. En temps de guerre, elle a besoin d’un million de tonnes de produits importés par semaine pour survivre. Le maintien de la route maritime dans l’Atlantique Nord est essentiel à sa survie. La première phase de la bataille : septembre 1939 à septembre 1940 Le but de la marine de guerre allemande, la Kriegsmarine, et de ses sous-marins est de perturber les lignes d’approvisionnement entre les Amériques et l’Angleterre. Quelques submersibles allemands partis de ports du nord de l’Allemagne rejoingnent l’Atlantique au cours de cette période. Ils doivent s’échapper par la mer du Nord qui est aggressivement patrouillée par la marine britannique. La Royal Navy est la plus importante marine au monde à l’époque. Les sous-marins allemands réussissent à couler quelques douzaine de navires au cours de cette première année de guerre. La petite flotte de la marine canadienne se joint aux groupes d’escortes de la Royal Navy. Il faudra attendre un bon moment avant que de nouveaux navires soient mis en service. La seconde phase de la bataille : septembre 1940 à avril 1943 En mai 1940, l’Allemagne attaque l’Europe de l’Ouest. C’est le blitzkrieg et plus de 338,000 soldats anglais, français et belges sont évacués de Dunkerque à la fin du mois (du 27 mai au 4 juin). Avant la fin juin, la France capitule et l’Angleterre est le seul pays d’Europe encore en guerre contre l’Allemagne. La chute de la France marque le début de la seconde phase de la Bataille de l’Atlantique. L’occupation de la France permet à la marine allemande d’avoir un accès direct à l’océan. Des bases de sous-marins sont établies à Lorient, Brest et Saint-Nazaire. De leurs ports allemands, les U-boote (Unterseeboot) peuvent maintenant passer par la Manche où la Royal Navy ne veut pas risquer ses navires de guerre aux attaques de l’aviation ou aux batteries côtiéres ennemies le long de la côte occupée de la France. Les pertes de navires marchands montent en flèche dès septembre 1940. Plus de 150 sont coulés en un peu plus de trois mois. Du 20 au 22 septembre, 14 des 43 vaisseux du convoi HX-72 parti sous escorte d’Halifax pour l’Angleterre sont envoyés par le fond. Avant la fin de l’année près de 150 navires voguant vers l’Angleterre ou vers des ports nord-américains sont coulés dans l’Atlantique Nord. La marine allemande a adopté une nouvelle tactique. Un groupe de dix sous-marins ou plus forme une « meute de loups » (Wolf pack) et patrouille un large secteur d’océan où l’on croit que les convois escortés vont passer. Dès qu’un submersible voit les navires, il contacte les autres sousmarins qui se dirigent à toute vitesse, souvent en surface, afin d’attaquer le convoi. Peu d’attaques ont lieu le jour. La plupart se font la nuit parce que les sous-marins au profil bas peuvent facilement infiltrer le convoi. Les commandants allemands ont des cibles préférées : les pétroliers. Lorsqu’un pétrolier est frappé par une torpille et explose, ça éclaire une bonne partie du convoi. Les convois ne naviguent jamais en ligne droite. Ils zigzaguent à des moments précis déterminés avant le départ. Les navires qui sont lents ou qui ont des problèmes mécaniques sont laissés à eux-mêmes. Les escortes ne peuvent pas abandonner un convoi de 40 vaisseaux ou plus pour aider un retardataire. Ce sont ces navires marchands qui sont victimes des U-boote le jour. Si vous ne pouvez suivre, vos chances de vous rendre à destination diminuent grandement. Pour les marins, les chances de survie dans les eaux froides de l’Atlantique Nord sont peu élevées. Les navires allant vers l’Angleterre ne sont pas les seules proies des submersibles allemands. Plus de 250 navires marchands, la plupart en lest, voguant vers les eaux nord-américaines sont victimes des U-boote. La logique est simple : s’ils ne peuvent se rendre à leurs ports pour prendre leur cargaison, ce sont des milliers de tonnes qui ne se rendront pas en Angleterre. Les sous-marins allemands connaissent leur période de gloire de septembre 1940 à avril 1943. Pendant cette période, ils coulent plus de 575 navires marchands partis d’Amérique du Nord pour l’Angleterre ou partis du Royaume-Uni vers des ports canadiens, américains ou des Caraïbes. C’est au cours de cette phase de la Bataille de l’Atlantique que la Marine royale canadienne prend son envol. De quelques vaisseaux affectés comme d’escortes en 1939, la flotte canadienne grandit de façon dramatique avec la mise en service de nouveaux navires de guerre construits en vertu d’un ambitieux programme de contruction navale enterepris par le gouvernement. La troisième phase de la bataille : avril 1943 à mai 1945 Au fur et à mesure que les nouveaux navires de guerre rejoignent la flotte, le rôle de la Marine royale canadienne grandit. En 1942, environ 40 pourcent des escortes sur l’Atlantique Nord sont canadiennes. En 1945, ce chiffre est de 80 pourcent. C’est au cours de cette période que la bataille contre les U-boote est gagnée. La victoire n’est pas seulement attribuable à la marine canadienne, mais aussi aux avancées technologiques dont le radar aérien et l’arrivée de nouveaux avions capables de patrouiller la zone morte dans l’Atlantique Nord au sud de l’Islande qui est le terrain de chasse préféré des sous-marins. Entre avril 1943 et la fin de la guerre en Europe, peu de navires marchands sont perdus dans l’Atlantique Nord. En 1944, seulement 4 des 6,200 vaisseau des convois HX sont coulés alors que les Canadiens sont à la barre. L’amiral britannique Percy Noble, premier commandant-en-chef des Western Approaches qui est responsable de l’Atlantique Nord conclut : « La Marine Royale du Canada a résout le problème des convois nord-américains. » La marine canadienne perd 31 navires de guerre dans l’Atlantique Nord dont 16 coulés par des sous-marins allemands. Elle coule 24 U-boote dans ces mêmes eaux. Le port d’Halifax Dans ses communiqués de guerre, le gouvernement canadien ne mentionne jamais le nom du port d’Halifax. On parle d’un « port de l’est du Canada ». Cette désignation ne trompe probablement pas l’ennemi. Halifax est le principal point de rassemblement pour les convois trans-atlantiques pour la plus grande partie de la guerre. La plupart des 160 millions de tonnes de cargo, de vivres et d’armes envoyés en Angleterre transitent par le port. La grande majorité des quelque 360 mille Canadiens qui servent et combattent outre-mer partent d’Halifax. Les soldats qui reviennent de la guerre en 1945 et 1946 débarquent à Halifax. C’est aussi le port d’entrée pour la plupart des 100 mille britanniques, australiens, néozélandais et autres aviateurs des pays alliés qui sont entraînés au Canada dans le cadre du Plan d’entraînement aérien du Commonwealth britannique. Plus de 33 mille invités récalcitrants débarquent aussi à Halifax. Il s’agit de militaires allemands envoyés au Canada pour passer le reste de la guerre dans des camps de prisonniers. La Marine royale du Canada La Marine royale du Canada connait une croissance extraordinaire au cours de la guerre. De 1800 hommes et 11 navires en 1939, elle compte 98,000 matelots et près de 500 navires de guerre modernes en 1945. C’est la troisième plus grande marine des pays alliés de l’Ouest. Peu de francophones, qu’ils soient des Acadiens ou d’ailleurs au pays, servent dans la marine au cours de la guerre. Ce n’est pas un service accueillant pour eux. Sur la plupart des bases navales, il est interdit de parler français. Des mesures disciplinaires peuvent être prises contre ceux qui défient ce règlement non écrit. Le chef de l’état-major naval, l’amiral Percy Nelles, ne fait rien pour remédier à la situation. Un seul sous-marin allemand est entré dans le port d’Halifax. Le U-889 se rend formellement à Shelburne, en Nouvelle-Écosse, le 13 mai 1945. Le lendemain, arborant les couleurs canadiennes, il est escorté jusqu’à Halifax. Il est mis en service dans la marine canadienne et reste avec la flotte jusqu’à la fin de l’année. Le premier ministre britannique, Winston Churchill, qui a crée l’expression « Bataille de l’Atlantique » affirme que c’était « la seule chose dont il avait eu peur » pendant la guerre. Si on perdait la bataille, l’Angleterre serait perdue. Aujourd’hui, il reste peu de navires pour nous rappeler le rôle de la Marine royale canadienne pendant la plus longue bataille de la Seconde Guerre mondiale. Il est appropiré que la dernière corvette, la Sackville, soit ancrée dans le port d’Halifax pour symboliser la participation du Canada à la Bataille de l’Atlantique.