GB_TALBI

publicité
8ème Journée Pédiatrique de Mascara
Dr N.TALBI
20/02/2015
Introduction
Le syndrome de Guillain, Barré reste toujours d’actualité, les progrès
scientifiques ont permis de le faire évoluer dans quatre directions :
 La discussion nosologique et les définitions diagnostiques.
 Les connaissances épidémiologiques et pronostiques.
 Les aspects physiopathologiques et électro physiologiques
 La stratégie thérapeutique.
Définition
Le syndrome de Guillain-Barré(SGB) ou syndrome de Guillain-Barré-Strohl est
une maladie auto-immune inflammatoire acquise du système nerveux périphérique.
On l'appelle également :
polyneuropathie aiguë inflammatoire démyélinisante,
polyradiculonévrite aiguë idiopathique,
polynévrite aiguë idiopathique
paralysie ascendante de Landry.
Il se caractérise principalement par :
- un déficit moteur bilatéral, symétrique, ascendant, avec abolition des ROT
- des troubles sensitifs,
- une dissociation albumino-cytologique dans le LCR.
Historique
En 1859, le médecin français Jean Landry a décrit pour la
première fois ce syndrome.
Jean Landry
En 1916, George Guillain, Jean Alexandre Barré et André
Strohl ont diagnostiqué deux soldats d’une paralysie généralisée
transitoire qui avaient dans la liquide céphalo-rachidien une
concentration augmentée des protéines, avec un tissu cellulaire
normal.
Cette découverte a été la clef du diagnostic de ce syndrome.
George Charles Guillain
André Strohl
Jean-Alexandre Barré
Intérêt
 Syndrome de Guillain-Barré = principale cause de paralysie motrice
aiguë chez l’enfant.
 Possibilité de complications respiratoires et/ou dysautonomiques,
pouvant être à l’origine du décès.
 Urgence pédiatrique diagnostique et thérapeutique.
 Prise en charge doit être effectuée par une équipe pluridisciplinaire et
expérimentée.
Epidémiologie
Incidence:
0.6 à 1,1pour 100.000 enfants de moins de 15 ans par an.
Arch Dis Child, 1997 ; 76 :526-8.
Age : 12 mois à 15ans avec un pic à 05ans.
Sexe : pas de prédominance de sexe.
Race et climat : aucune prédominance.
Epidémiologie
Facteurs déclenchants:
Dans 60 à 80% des cas, il est de nature infectieuse, à type :
 Syndrome grippal.
 Infection des voies aériennes supérieures: rhinopharyngite, angine.
 Infection respiratoire: bronchite, plus rarement pneumopathie.
 Infection digestive: diarrhée.
Agents pathogènes : CMV, Herpès virus, virus d’Epstein Barr, Mycoplasme et
surtout Campylobacter Jéjuni (CJ) ( le + fréquemment retrouvé dans 17 à 55% des cas).
Encycl Méd Chir (Paris) 1998 ; 5-0930.
Dans 10% des cas, le SGB survient au décours d’une vaccination
Et dans 3% suite à une intervention chirurgicale, sans qu’une relation de cause à effet ne
soit clairement établie.
Encycl Med Chir (Paris France), Neurologie, 2002
Anatomie pathologique
 Lésions inflammatoires aigues périvasculaires.
 Démyélinisation segmentaire de même topographie.
 Atteinte diffuse, multifocale du SNP.
Physiopathologie
 Production et passage dans les espaces endo neuraux d’anticorps, de cytokines
et de protéinases, la démyélinisation étant effectuée par le macrophage.
 Réaction d’immunité croisée est vraisemblable entre le Campylobacter jejuni et
des gangliosides constitutifs de la myéline
 Démyélinisation aigue  bloc de la conduction nerveuse troubles cliniques.
 Lorsque le processus causal cesse d’être actif  remyélinisation par les cellules
de Schwann  régression des troubles.
 Si atteinte des axones  séquelles car la régénération axonale est lente ou
absente.
Présentation clinique
Phase d’invasion ou d’extension
Précédée par un épisode infectieux d’allure virale (respiratoire ou digestif) de
quelques jours à 2 semaines.
Début : faiblesse musculaire des membres inférieurs avec troubles de la
marche.
 Troubles sensitifs : sensation d’engourdissement des mains et pieds,
douleur (myalgie, rachialgie), céphalées.
 Paralysies : débutent aux membres inférieurs :
- Peuvent y rester localisées.
- Le + souvent ; extension ascendante.
- Paralysie des membres inférieurs ou des 4 membres, bilatérale,
diffuse, parfois prédominance proximale de type périphérique (flasque,
diminution ou abolition des ROT, pas d’amyotrophie ni fasciculation, pas
de signes de Babinski).
 Atteinte des muscles du tronc : inconstante, imprévisible, d’importance
variable :
- Muscles abdominaux : faiblesse de la toux.
- Muscle intercostaux : expansion thoracique incomplète à l’inspiration.
- Diaphragme (surtout si atteinte du deltoïde et biceps) : dépression
inspiratoire de l’épigastre avec anoxie et hypercapnie  surveillance
régulière et stricte.
 Atteinte des nerfs crâniens :
- Diplégie faciale périphérique : fréquente, caractéristique, pas
obligatoirement symétrique.
- Atteinte motrice du IX, X : voix nasonnée, troubles de la déglutition,
encombrement pharyngé et fausses routes (à l’examen : paralysie du
voile de palais, abolition du réflexe vélo-palatin).
- Paralysie des nerfs oculomoteurs : III, VI : très rare.
- Paralysie bilatérale du nerf optique : troubles de l’accommodation.
 Troubles neurologiques associés :
- Troubles sensitifs : inconstants, surtout subjectifs (paresthésie,
douleur à l’élongation)
- Troubles neurovégétatifs ou dysautonomique : HTA ou hypo TA
orthostatique, tachycardie, troubles de la sudation, troubles vasomoteurs
des extrémités, rétention urinaire, troubles du rythme cardiaque…
risque de bradycardie et/ou collapsus brutal.
 Evolution :
- Complications ou décès par : troubles de la déglutition,troubles
dysautonomiques.
- Le plus souvent : l’extension des paralysies cesse au bout de 8-10j (3j
à 1 mois).
Phase de plateau ou stationnaire
 Stabilisation du déficit.
 Atténuation progressive des troubles dysautonomiques mais une poussée
évolutive est à craindre tant qu’ils persistent.
 Cette phase dure : 1-4semaines.
Evolution :
 Les complications respiratoires et végétatives peuvent encore survenir mais
moins fréquentes.
 Les malades ventilés sont exposés aux complications de la VA et du
décubitus.
 Surveillance stricte+++
Phase de récupération
Modalités :
 Régression des troubles surtout des paralysies avec une vitesse variable
(1semaine à 28mois).
 Récupération se fait dans l’ordre inverse de l’installation des paralysies.
Séquelles : 5-10% des cas.
 Parésies amyotrophiques des extrémités distales des membres.
 Rarement, déficit moteur marqué gênant la marche (steppage).
Données paracliniques
1/ LCR :
 Dissociation albumino-cytologique, apparait entre 2-10j :
 Protéinorachie : 0,8-1,5g/l .
 Cellules <10/mm3, rarement <50/mm3.
 Retour à la normale après plusieurs mois.
2/ EMG : NP sensitivomotrice démyélinisante :
 Ralentissement de la VC motrice.
 Augmentation de la latence motrice distale.
 Blocs de conduction proximaux
Diagnostic positif
Critères requis pour le diagnostic
 Déficit progressif de plus d’un membre en rapport avec
la neuropathie.
 Aréflexie tendineuse.
Classification d’Asbury et Cornblath
Arch.Dis.Child.Ed.Pract.2007 ;92 ;161-168
Diagnostic positif
Critères en faveur du diagnostic
Clinique:
 Durée de la phase d’extension
 à 4 semaines.
 Déficit relativement symétrique.
 Signes sensitifs relativement discrets.
 Atteintes des nerfs crâniens, spécialement
le nerf facial.
 Dysautonomie: instabilité vasomotrice
 Absence de fièvre au début de la
symptomatologie
 Début de la récupération 2 à 4 semaines
après l’arrêt de la progression des
symptômes, sans recours au traitement
spécifique
Anomalies du LCR:
 Hyperprotéinorachie,  à 0,45g/L
(après la 1ère semaine).
 Nombre de cellules normal ou
peu élevé (<10GB/mm)
Anomalies électrophysiologiques
 Réduction de la vitesse de
conduction
 Bloc de conduction Ou ondes F
anormales
 Latences distales allongées dans
plus d’un territoire
Sd de Guillain-Barré
Douter…
 Atteinte respiratoire initiale dont sévèrité > déficit moteur
 Signes sensitifs initiaux dont sévérité > signes moteurs
 Troubles vésico-sphinctériens d’emblée
 Fièvre inaugurale
 Asymétrie persistante
 Hypercellularité: >50.106/l, cellules anormales
 Ophtalmoplégie complète externe et interne.
VARIANTES CLINIQUES DU SGB
A- Syndrome de MiIler-Fisher:
 Décrit en 1956 , c’est une forme rare du SGB,
 Triade classique : ophtalmoplégie, ataxie proprioceptive et aréflexie ostéotendineuse.
 Installation en 5 à 10 jours et récupération en 10 semaines en moyenne.
 Dans 90 % des cas, présence d’ anticorps antigangliosides antiGQ1b
B- Formes axonales:
• Représente 5% des SGB. C’est une forme sévère
 Forme sensitivo-motrice (AMSAN).accute motor and sensory axonal
neuropathy
 Forme motrice pure (AMAN) : caractérisée par l’absence de trouble sensitif
subjectif ou objectif.
VARIANTES CLINIQUES DU SGB
C- Formes sensitives pures:
• Elles sont rares. Pas de faiblesse musculaire
 Vitesses de conduction sont diminuées, alors que les conductions motrices
sont peu ou pas touchées.
D-Pandysautonomie aiguë idiopathique:
 Caractérisée par une atteinte limitée aux fibres du système nerveux végétatif
avec une intégrité relative des fonctions sensitives et motrices.
E- Polyradiculonévrite aiguë avec atteinte du système nerveux central
(SNC):
Association des signes cliniques d’atteinte périphérique à des signes
d’encéphalite ( somnolence, irritabilité, anxiété majeure, stupeur voire même
un véritable état confusionnel)
F-Formes ataxiques.
Diagnostic différentiel
1/ Origine centrale:
 Myélite aigue transverse.
 Malformation vasculaire rapide.
 Compression médullaire d’origine tumorale ou non.
2/ Origine périphérique:
 Porphyrie aigue intermittente à sa 1ère poussée.
 Polymyosite (si déficit à prédominance proximale, pas de dissociation
albumino-cytologique).
 Poliomyélite antérieure aigue : si pas de troubles sensitifs.
Diagnostic différentiel
 Maladie de Lyme : piqure de tique, tableau d’un SGB mais LCR :
pléiocytose faite de cellules mononuclées.
 Neuropathies infectieuses :
Paralysie diphtérique, botulique.
 Neuropathies toxiques et médicamenteuses : vincristine,
chloroquine, toxicomanie… : éliminées par l’anamnèse.
Diagnostic étiologique
 Infection virale: CMV, hépatite, rougeole, rubéole,
oreillons, coxsackie
 Infection bactérienne : mycoplasme pneumoniae,
Campylobacter Jejuni.
 Rarement : vaccination (DT).
Principes de prise en charge
Mesures symptomatiques
Mesures spécifiques
Déficit
moteur
diminuer la gravité et la durée de la phase aiguë
diminuer la fréquence
des séquelles
Plateau
Séquelles
Evénements
prodromiques
Extension
Récupération
J0
Temps
Prise en charge
Modalités :
 Hospitalisation si possible en milieu spécialisé à proximité d’un service
de réanimation médicale jusqu’à la fin de la phase de plateau.
 Expliquer aux parents (la maladie, ses modalités évolutives, la
possibilité des complications, les principes du TRT) et que la durée
d’hospitalisation sera variable.
 Déclaration de la maladie
Prise en charge
Mise en condition :
 Repos au lit.
 Position de sécurité.
 Liberté des VAS + aspiration  canule de Guedel si nécessaire.
 O2 si besoin : 3L/mn pour maintenir une SaO295%.
 2 voies d’abords périphériques pour le bilan et le traitement.
 Sachet collecteur d’urines pour diurèse, CU, ECBU.
 Monitoring cardio-respiratoire et oxymétrie de pouls.
 Feuille de surveillance.
Prise en charge
Traitement symptomatique :
Traitement de la douleur:
 Antalgiques standards : paracétamol : 15mg/kg/6h en IVL).
 Au besoin, les opiacés, les antiépileptiques.
Nursing pluriquotidien :
 Matelas anti escarre.
 Changement de position toutes les 03heures.
 Vérification fréquente des points d’appui avec friction, talcage et
bandage.
 Mobilisation et massage des masses musculaires.
 Aspirations douces et répétées si besoin.
Prise en charge
 Apport nutritionnel normo calorique, normo protidique sous forme
liquide ou semi liquide et sous surveillance, par sonde naso-gastrique dès
qu’apparaissent les troubles de la déglutition
 Apport hydrique suffisant : sous forme orale ou parentérale.
 Lovénox : dose préventive pour prévenir les complications
thromboemboliques.
 Kinésithérapie : le plus tôt possible, bien sur à éviter à la phase algique
(pour le bien de l’enfant) passive au début puis active avec la participation
de l’enfant et la présence des parents pour les apprendre comment en faire
pour éviter l’amyotrophie et les rétractions tendineuses.
Traitement spécifique :
 Immunoglobulines:
0,4g/kg/j pendant 5j ou 1g/kg/j pendant 2j.
 Permettent d’atténuer la sévérité, de raccourcir la durée de la maladie
et de l’hospitalisation.
 Indiquées dans les formes graves :
- Perte de la marche autonome.
- Atteinte bulbaire ou respiratoire avec nécessité de ventilation.
 L’indication est discutée dans les formes légères.
 Attention, « la simplicité apparente du traitement ne doit pas inciter des
services ne disposant pas de réanimation à prendre en charge ces
patients… »
FC Hughes
Immunoglobulines
Contre-indications :
 Hypersensibilité au
produit.
Effets secondaires :
 Déficit en Ig A.
 Réaction anaphylactique.
 Précoces :
 Céphalées, lombalgies, vomissements.
 Insuffisance rénale
 Fièvre, frissons.
 Pic hypertensifs.
 Tardifs : transmission de maladies virales.
Traitement spécifique:
 Corticoides: aucune efficacité.
 Echanges plasmatique (plasmaphérèse) : indication chez l’enfant mal
définie avec des risques importants.
Syndrome de Guillain-Barré et Echanges plasmatiques
CONTRE
C-I: infection, hémodynamique instable
Effets II: hypotension, septicémie, hypocalcémie, thrombose, hémorragie
Difficulté de mise en œuvre, équipe entraînée, apprentissage de la méthode
Abord veineux central souhaitable, anticoagulation du circuit…
Mauvaise compliance chez les enfants
Pronostic
Facteurs de mauvais pronostic :
Immédiat :
 Recours à la VA.
 Complications respiratoires.
 Phase d’extension courte et rapidité
 Complications
neurovégétatives.
 Complications
thromboemboliques.
 Mortalité < 3%
d’installation des déficits.
 Importance et durée des paralysies de la
phase de plateau.
 Amyotrophie précoce.
Long terme :
 Risque de séquelles (5 à
10%): déficit distal,
amyotrophie
 Atteinte axonale à l’EMG.
 Infection à Campylobacter Jejuni.
Conclusion
 Malgré des traitements spécifiques et les progrès de la réanimation, le SGB
reste une affection sévère,
 3 à 10 % des patients décèdent.
 20 % sont incapables de marcher à 6 mois .
Hughes RA, Immunotherapy for Guillain-Barre syndrome: a systematic review. Brain 2007
 La précocité du diagnostic et une prise en charge spécialisée rapide
contribuent à un meilleur pronostic.
 Un retard diagnostique ou la méconnaissance des diagnostics différentiels
peuvent avoir des conséquences dramatiques.
 Le rôle du médecin des Urgences est donc essentiel dans cette pathologie.
MERCI DE VOTRE ATTENTION
Téléchargement