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ADAM SMITH
(1723-1790)
Pol-1900
« On a longtemps confondu la Politique proprement dite, la science de
l'organisation des sociétés, avec l'Économie politique, qui enseigne comment se
forment, se distribuent et se consomment les richesses qui satisfont aux
besoins des sociétés. Cependant les richesses sont essentiellement
indépendantes de l'organisation politique. […]
« En confondant dans les mêmes recherches les principes qui constituent
un bon gouvernement, et ceux sur lesquels se fonde l'accroissement des
richesses, soit publiques, soit privées, il n'est pas étonnant qu'on ait
embrouillé bien des idées au lieu de les éclaircir. […] Il me semble que
depuis Adam Smith on a constamment distingué ces deux corps de doctrine,
réservant le nom d'Économie politique à la science qui traite des richesses, et
celui de Politique seul, pour désigner les rapports qui existent entre le
gouvernement et le peuple, et ceux des gouvernements entre eux. »
Jean-Baptiste Say, Traité d’économie politique. Discours préliminaire, 1803
Le point sur le premier cours
L’économie politique est née à l’époque où les États se constituent en nations
mais aussi où les marchands commencent à développer leurs réseaux à travers
la planète.
1.
1.
La puissance et la richesse sont étroitement associés.
2.
Les marchands sont reconnus et jouissent d’importants privilèges
L’économie politique est associée aux premiers développements de
l’économie nationale et à la puissance économique de la nation
2.
1.
La création de l’espace économique national : impôt, monnaie, règlementations …
2.
Le monde s’ouvre : temps des empires et des compagnies
La critique de ce système, qualifié par Smith de « mercantile »
3.
1.
Confusion entre l’intérêt privé et l’intérêt public
2.
Vision étroite de la richesse : accumulation d’or et d’argent
3.
Guerres commerciales et pirates
Le contexte
Le temps des révolutions (Hobsbawm)
Révolution industrielle
1.
1.
L’industrie a besoin de débouchés et de matières premières
2.
Les premières manufactures et la division du travail
3.
L’Angleterre devient le berceau de la révolution industrielle et bientôt l’atelier du monde
Révolution dans les idées (les Lumières)
2.
1.
Individu et ses droits (sécurité et propriété)
2.
Ordre de nature et ordre social
3.
Le contrat social : John Locke
4.
La liberté économique et politique : David Hume
Révolution politique
3.
1.
Le parlementarisme
2.
Le pouvoir, de droit divin ou du « peuple »
3.
Le modèle britannique
Révolution scientifique
4.
1.
Le cartésianisme et la raison
2.
Newton et l’ordre de nature : les lois gouvernent l’univers
3.
Les lois économiques
la naissance de l’économie politique
Le doux commerce de Montesquieu (commerce civilisateur)
1.
1.
Laissez faire, laissez passer
2.
Les revendications des marchands
3.
Le débat sur les grains
Première figure : l’administrateur savant – finances
La science du commerce
La production de la richesse (l’industrieux : le fermier ou/et
l’artisan)
2.
1.
La liberté économique vs la réglementation économique
2.
Qui produit la richesse ? La nature ou le travail
3.
La morale et la richesse
Seconde figure : le philosophe – bonheur
La science du gouvernement fondée sur une théorie de l’action humaine :
raison
3. Le circuit économique
Le circuit économique
Pierre Boisguilbert (1646 – 1714)
Richard Cantillon (1689 – 1734)
Essai sur la nature du commerce en général
François Quesnay (1694 – 1774)
Adam Smith (1723 – 1790)
Deux approches du circuit
Trois idées
1.
L’argent circule
2.
L’interdépendance des acteurs économiques. Les hommes sont liés entre eux
3.
Équilibre – harmonie économique
Deux visions :
1. Quesnay : ordre naturel
2.
1.
« Le fondement de la société est la subsistance des hommes »
2.
Lois économiques naturelles.
3.
Produit net : agriculture, assise de l’économie
Smith : ordre social – la méthode inductive
1.
« Donnez-moi ce dont j'ai besoin, et vous aurez de moi ce dont vous avez besoin vousmêmes »
2.
Lois économiques, confrontation des intérêts
3.
Tout objet qui passe par le marché a de la valeur, un prix
Adam Smith et l’école classique
Œuvres de Smith


Théorie des sentiments moraux. 1759
Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations.
1776
Les disciples
L’école classique
Jean-Baptiste Say (1767 – 1832)
Thomas Malthus (1766 – 1834)
David Ricardo (1772 – 1823)
John Stuart Mill (1806 - 1873
Les grands thèmes
•
La richesse, le commerce et le travail
•
L’échange et l’intérêt
•
La division du travail
•
La concurrence
•
Le prix « naturel » et la valeur travail
•
Le commerce
•
Le spectateur impartial
L’échange
Les fondements de l’échange
Le besoin et l’intérêt
1.
1.
Échange : intérêt mutuel et complémentarité
2.
Prix qui se dégage est le résultat d’une tractation. C’est le meilleur prix possible ; pas
nécessairement le plus juste, mais cela importe peu
3.
La répétition des échanges et la concurrence font en sorte que les prix, résultat d’une
multitude de transactions individuelles, convergent vers un prix unique, sorte de prix naturel
La concurrence est essentielle au bon fonctionnement du marché : agit
comme une sorte de « main invisible »
2.
Le prix devient un indicateur de rationalité économique, de choix économiques :
1.
-
Si les prix montent, il y a demande, et donc intérêt à produire plus
-
Si les prix montent, le coût pour me procurer le bien s’élève ; il y a intérêt à acheter moins
2.
La concurrence créée un ordre social ; elle assure l’autorégulation et l’autonomie du marché
3.
L’État devient le garant de la propriété et des institutions, mais reste hors du marché
L’échange entraîne la spécialisation
3.
1.
Smith et la division du travail : entre les métiers, dans l’atelier
2.
Plus il y a d’échanges, plus il y a spécialisation, plus il y a interdépendance
L’échange et l’intérêt
« On n'a jamais vu de chien faire de propos délibéré l'échange d'un os avec un
autre chien. On n'a jamais vu d'animal chercher à faire entendre à un autre par
sa voix ou ses gestes : Ceci est à moi, cela est à toi; je te donnerai l'un pour l'autre.
Quand un animal veut obtenir quelque chose d'un autre animal ou d'un
homme, il n'a pas d'autre moyen que de chercher à gagner la faveur de celui
dont il a besoin. Le petit caresse sa mère, et le chien qui assiste au dîner de son
maître s'efforce par mille manières d'attirer son attention pour en obtenir à
manger. […]
Mais l'homme a presque continuellement besoin du secours de ses semblables,
et c'est en vain qu'il l'attendrait de leur seule bienveillance. Il sera bien plus sûr
de réussir, s'il s'adresse à leur intérêt personnel et s'il leur persuade que leur
propre avantage leur commande de faire ce qu'il souhaite d'eux. C'est ce que fait
celui qui propose à un autre un marché quelconque; le sens de sa proposition est
ceci : Donnez-moi ce dont j'ai besoin, et vous aurez de moi ce dont vous avez besoin vousmêmes; et la plus grande partie de ces bons offices qui nous sont nécessaires s'obtiennent de cette façon. Ce n'est pas de la bienveillance du boucher, du
marchand de bière et du boulanger, que nous attendons notre dîner, mais bien
du soin qu'ils apportent à leurs intérêts. Nous ne nous adressons pas à leur
humanité, mais à leur égoïsme; et ce n'est jamais de nos besoins que nous leur
parlons, c'est toujours de leur avantage. »
La division du travail
« Puisque c'est la faculté d'échanger qui donne lieu à la division du travail,
l'accroissement de cette division doit, par conséquent, toujours être limité
par l'étendue de la faculté d'échanger, ou, en d'autres termes, par l'étendue
du marché. Si le marché est très petit, personne ne sera encouragé à
s'adonner entièrement à une seule occupation, faute de pouvoir trouver à
échanger tout le surplus du produit de son travail qui excédera sa propre
consommation, contre un pareil surplus du produit du travail d'autrui qu'il
voudrait se procurer. »
« La division du travail une fois généralement établie, chaque homme ne
produit plus par son travail que de quoi satisfaire une très petite partie de
ses besoins. La plus grande partie ne peut être satisfaite que par l'échange
du surplus de ce produit qui excède sa consommation, contre un pareil
surplus du travail des autres. Ainsi, chaque homme subsiste d'échanges et
devient une espèce de marchand, et la société elle-même est proprement
une société commerçante. »
La concurrence
L’intérêt arrête l’intérêt
La dispersion des intérêts, garante de l’intérêt général
La concurrence impose, généralise et équilibre les rapports réciproques (harmonie des
intérêts). Elle sépare le général du particulier, en assurant la dispersion des intérêts
particuliers
«
Tout en ne cherchant que son intérêt personnel, il travaille
souvent d'une manière bien plus efficace pour l'intérêt de la
société, que s'il avait réellement pour but d'y travailler. je n'ai
jamais vu que ceux qui aspiraient, dans leurs entreprises de
commerce, à travailler pour le bien général, aient fait beaucoup
de bonnes choses. Il est vrai que cette belle passion n'est pas très
commune parmi les marchands, et qu'il ne faudrait pas de longs
discours pour les en guérir. »
La valeur des choses
La théorie de la valeur travail
Rappel : Locke et l’origine de la propriété privée. Travail
créateur de richesses
Distinction entre
1.
2.
1.
2.
valeur d’échange : mesure des choses dans l’échange
et valeur d’usage : satisfaction que l’on tire de l’usage d’une chose
Le travail : unité de mesure
3.
1.
« Le travail est donc la mesure réelle de la valeur échangeable de toute
marchandise »
2.
Prix naturel : prix autour duquel gravitent tous les prix
3.
Le prix naturel reflète la valeur d’échange
Pa = 5 $
Pb = 50 $
Pb/Pa = 50 $ / 5 $ = 10
Le bien b incorpore 10 fois plus de travail que le bien a
La valeur (1)
« Un homme est riche ou pauvre, suivant les moyens qu'il a de se
procurer les choses nécessaires, commodes ou agréables de la vie.
Mais la division une fois établie dans toutes les branches du travail, il
n'y a qu'une partie extrêmement petite de toutes ces choses qu'un
homme puisse obtenir directement par son travail; c'est du travail
d'autrui qu'il lui faut attendre la plus grande partie de toutes ces
jouissances; ainsi, il sera riche ou pauvre, selon la quantité de travail
qu'il pourra commander ou qu'il sera en état d'acheter.
Ainsi, la valeur d'une denrée quelconque pour celui qui la possède et
qui n'entend pas en user ou la consommer lui-même, mais qui a
intention de l'échanger pour autre chose, est égale à la quantité de
travail que cette denrée le met en état d'acheter ou de commander.
Le travail est donc la mesure réelle de la valeur échangeable de toute
marchandise.
La valeur (2)
« Il faut observer que le mot valeur a deux significations
différentes; quelquefois il signifie l'utilité d'un objet
particulier, et quelquefois il signifie la faculté que donne la
possession de cet objet d'en acheter d'autres marchandises.
On peut appeler l'une, Valeur en usage, et l'autre, Valeur en
échange. - Des choses qui ont la plus grande valeur en usage
n'ont souvent que peu ou point de valeur en échange; et au
contraire, celles qui ont la plus grande valeur en échange n'ont
souvent que peu ou point de valeur en usage. Il n'y a rien de
plus utile que l'eau, mais elle ne peut presque rien acheter; à
peine y a-t-il moyen de rien avoir en échange. Un diamant,
au contraire, n'a presque aucune valeur quant à l'usage, mais
on trouvera fréquemment à l'échanger contre une très grande
quantité d'autres marchandises. »
Le prix et la valeur (2)
« Le prix réel de chaque chose, ce que chaque chose coûte réellement à
celui qui veut se la procurer, c'est le travail et la peine qu'il doit s'imposer
pour l'obtenir. Ce que chaque chose vaut réellement pour celui qui l'a
acquise et qui cherche à en disposer ou à l'échanger pour quelque autre objet,
c'est la peine et l'embarras que la possession de cette chose peut lui épargner
et qu'elle lui permet d'imposer à d'autres personnes. Ce qu'on achète avec de
l'argent ou des marchandises est acheté par du travail, aussi bien que ce que
nous acquérons à la sueur de notre front. Cet argent et ces marchandises nous
épargnent, dans le fait, cette fatigue. Elles contiennent la valeur d'une certaine
quantité de travail, que nous échangeons pour ce qui est supposé alors
contenir la valeur d'une quantité égale de travail. Le travail a été le premier
prix, la monnaie payée pour l'achat primitif de toutes choses. Ce n'est point
avec de l'or ou de l'argent, c'est avec du travail que toutes les richesses du
monde ont été achetées originairement; et leur valeur pour ceux qui les
possèdent et qui cherchent à les échanger contre de nouvelles productions, est
précisément égale à la quantité de travail qu'elles les mettent en état d'acheter
ou de commander. »
Prix réel et prix nominal/
valeur travail et valeur d’usage (3)
« Ainsi, le travail, ne variant jamais dans sa valeur propre, est
la seule mesure réelle et définitive qui puisse servir, dans tous
les temps et dans tous les lieux, à apprécier et à comparer la
valeur de toutes les marchandises. Il est leur prix réel; l'argent
n'est que leur prix nominal. »
La séparation du marché et du gouvernement
Trois séries de principes
Distinction entre intérêt privé et intérêt public
1.
1.
Du bon gouvernement
2.
Les principes de l’impôt : les 4 maximes
1.
Justice : imposer tous les revenus en fonction de la capacité de chacun
2.
La stabilité et la certitude de l’impôt
3.
La commodité dans la collecte de l’impôt
4.
Économie dans le prélèvement
L’action économique individuelle conduit aux meilleurs
choix économiques sous trois conditions
2.
1.
Rationalité : prix critère de décision
2.
Concurrence : multiplicité des vendeurs et des acheteurs / aucune influence sur le marché
3.
Information et mobilité des ressources
La modération du philosophe, la sagesse de l’homme
d’État
3.
1.
Le spectateur impartial
2.
Sens du devoir et de l’équité
L’intérêt privé et l’intérêt public
•« Il est rare que des gens du même métier se trouvent réunis,
fût-ce pour quelque partie de plaisir ou pour se distraire, sans
que la conversation finisse par quelque conspiration contre le
public, ou par quelque machination pour faire hausser les prix.
Il est impossible, à la vérité, d'empêcher ces réunions par une
loi qui puisse s'exécuter, ou qui soit compatible avec la liberté
et la justice; mais si la loi ne peut pas empêcher des gens du
même métier de s'assembler quelquefois, au moins ne devraitelle rien faire pour faciliter ces assemblées, et bien moins
encore pour les rendre nécessaires. »
Adam Smith, An Inquiry into the Nature and Causes of The Wealth of Nations, 1776, Livre 1, chapitre 10.
« quatre maximes sur les impôts en général »
Première maxime. - Les sujets d'un État doivent contribuer au soutien du gouvernement, chacun le plus possible en proportion de ses facultés, c'est-à-dire en proportion du revenu dont il jouit sous la protection de l'État. (…) Observer cette maxime ou
s'en écarter, constitue ce qu'on nomme égalité ou inégalité dans la répartition de
l'impôt. […]

Deuxième maxime. - La taxe ou portion d'impôt que chaque individu est tenu de
payer doit être certaine, et non arbitraire. L'époque du paiement, le mode du paiement,
la quantité à payer, tout cela doit être clair et précis, tant pour le contribuable qu'aux
yeux de toute autre personne. […].

Troisième maxime. - Tout impôt doit être perçu à l'époque et selon le mode que
l'on peut présumer les moins gênants pour le contribuable. […]

Quatrième maxime. - Tout impôt doit être conçu de manière à ce qu'il fasse sortir
des mains du peuple le moins d'argent possible au-delà de ce qui entre dans le Trésor
de l'État, et en même temps à ce qu'il tienne le moins longtemps possible cet argent
hors des mains du peuple avant d'entrer dans ce Trésor.[…]


Richesse Livre 5, p. 122
Le commerce
« La maxime de tout chef de famille prudent est de ne jamais
essayer de faire chez soi la chose qui lui coûtera moins à acheter
qu'à faire. [….] Ce qui est prudence dans la conduite de chaque
famille en particulier, ne peut guère être folie dans celle d'un
grand empire. Si un pays étranger peut nous fournir une
marchandise à meilleur marché que nous ne sommes en état de
l'établir nous-mêmes, il vaut bien mieux que nous la lui
achetions avec quelque partie du produit de notre propre
industrie, employée dans le genre dans lequel nous avons
quelque avantage. »
Adam Smith, La richesse des nations, Livre 4, Chapitre 2. 1776
Conclusion
Un libéralisme de principe, mais tempéré
l’économie une science expérimentale : observation des
faits et lois (maximes)
Un monde en progrès, mais limites à la « croissance »
1.
2.
Demande et marché (Marx) - Rendements décroissants (Ricardo) Population (Malthus) - État stationnaire (Stuart Mill)
Une vision pessimiste et calculatrice de l’homme : intérêt
La sagesse du philosophe, la cupidité de « l’homme aux
écus »
La critique
3.
4.
5.
1.
La critique sociale et les lois sociales : C. Fourier
2.
La nation et l’économie nationale : F. List
3.
L’accumulation du capital et ses lois : K. Marx
4.
La valeur et le calcul à la marge : L. Walras
Adam Smith est associé au néolibéralisme.
C’est une grave erreur
Il est libéral, croit en l’harmonie des
intérêts, aux vertus de la concurrence et en
la sagesse du gouvernement.
La morale est très présente. L’intérêt est un
comportement
1.
L’État est présent : concurrence et collusion
2.
Le marché reste imparfait. Les comportements
individuels peuvent avoir des conséquences inattendues
3.
Voir à ce sujet : Michaël Biziou
Notes finales
« Le libéralisme ne veut pas le gouvernement pour la liberté,
mais la liberté comme gouvernement »
Arnault Skornicki, L’économiste, la cour et la patrie, Paris, CNRS éditions, 2011, p. 377.
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