4
convient de ne pas ignorer pour ne pas les induire voire les renforcer. Ces conceptions spontanées
ne sont pas l'apanage des élèves. La présentation de quelques expériences « déroutantes » hors du
canevas classique donne parfois aux jeunes enseignants l’occasion d’analyser, a posteriori, leurs
propres conceptions spontanées par rapport à l’approche d’un problème de physique.
Par exemple, il est possible de dérouter facilement des enseignants novices par des expériences mêlant
habilement différents domaines de la physique. Ainsi en est-il de l’interaction entre l’électrostatique et le
magnétisme. De fait, si on approche un bâton électrisé d’une aiguille aimantée, celle-ci se met à tourner
autour de son axe. Bien orchestrée par le formateur, cette expérimentation incite le public à penser à la
fameuse expérience d’Oersted prouvant l’interaction entre un courant électrique et une boussole. Or, ici,
point d’interaction électromagnétique, mais seulement une mise en évidence du pouvoir des pointes de
l’aiguille de la boussole… Le décodage de cette expérience permet aux participants de se rendre compte
de l’importance du contexte dans l’acceptation ou l’induction des idées.
Nous constatons, avec bonheur, que ces approches pédagogiques des enseignants novices se
complexifient au fur et à mesure de la prise de conscience de la variété des relations entre élèves et
professeur, qu'elles soient implicites ou non. Ainsi, l’idée que les élèves entrent en classe avec des
connaissances et des conceptions spontanées issues de leur expérience quotidienne, modifie
progressivement la manière du professeur d’organiser les échanges au sein de la classe.
Sur le plan épistémologique, il nous appartient de resituer la démarche initiée par le futur
enseignant dans un cadre plus large. À côté des démarches néopositivistes suivant lesquelles
l'observation attentive d'un phénomène devrait suffire à le comprendre, il existe bien d'autres
options épistémologiques5. L’option épistémologique choisie par le professeur peut d'ailleurs
avoir de sérieuses incidences sur les aspects pédagogiques et didactiques envisagés.
Par exemple, l’option néopositiviste suivant laquelle l’observation attentive d’un phénomène peut en
permettre la compréhension, fait privilégier, par l'enseignant, les activités procédurales au sein du cours.
En effet, dans une telle option, ce sont les qualités d’expérimentateur qui sont valorisées. Cela induit de
favoriser les séances de laboratoire aux dépens d’approches plus conceptuelles… d'ailleurs souvent moins
appréciées par les élèves. De là à croire que pour être un bon scientifique, il faut posséder des
compétences d'observateur hors de portée du commun des mortels...
C’est peut-être sur le plan épistémologique que les avancées nous semblent être les plus
prometteuses. De fait, la prise de conscience progressive de conceptions épistémologiques
alternatives constitue, à nos yeux, la base de réflexions essentielles permettant l’évolution des
pratiques pédagogiques et didactiques de ces futurs pédagogues.
L’évolution des représentations des futurs maîtres n’est donc pas le résultat d’un transfert de
connaissances. Il ne s’agit certainement pas, pour nous, de donner une leçon (une de plus) sur la
manière d’organiser un cours ou de préparer une leçon mais bien d’outiller, au sens étymologique
du terme, ces étudiants de manière à ce qu’ils puissent disposer d’un cadre pluridisciplinaire pour
analyser ultérieurement des séquences d’enseignement. L’intérêt de cette nouvelle représentation
complexe est de présenter un ensemble de liens entre les différents aspects pédagogiques,
didactiques et épistémologiques.
Théoriser sa pratique d’enseignement
Les représentations complexes, produites lors de réflexions interdisciplinaires menées au
laboratoire de didactique de la physique, constituent un cadre nouveau permettant aux futurs