Elaboration et caractérisation de céramiques ferroélectriques de

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Chapitre I. Généralités
17
CHAPITRE I
GENERALITES
Ce chapitre rassemble des généralités sur la piézoélectricité et la
ferroélectricité. Il comprend également une partie sur les céramiques ferroélectriques
de structure perovskite et sur les solutions solides PZT en particulier.
Enfin, une étude bibliographique concernant les céramiques PZT à fréquence
de résonance et à coefficient de charge d33 stable respectivement en température et
sous contrainte mécanique uniaxiale est présentée.
18
Chapitre I. Généralités
19
I.1. Introduction et définition de la piezoélectricité
La piézoélectricité est l'aptitude de certains matériaux cristallins à produire une
charge électrique proportionnelle à la contrainte mécanique qui les déforme. C'est
l'effet piézoélectrique direct et ce phénomène est réversible: l'application d'un champ
électrique externe provoque une déformation mécanique (effet piézoélectrique
inverse). Ce sont les frères Pierre et Jacques Curie qui expliquent l'effet direct en
1880 [1]. L'existence de l'effet inverse fut suggéré théoriquement par Lippmann
l'année suivante et confirmée expérimentalement par les frères Curie.
I.2. Les matériaux piézoélectriques
L'effet piézoélectrique dans un cristal résulte essentiellement de l'existence de
dipôles électriques internes. Ces dipôles sont crées par la séparation à l'échelle de la
maille du centre de gravité des charges positives de celui des charges négatives
sous l'effet d'une contrainte externe. Parmi les 32 classes cristallines existantes, 20
présentent l'effet piézoélectrique. Elles sont toutes dépourvues de centre de
symétrie.
Dix des vingt classes cristallines piézoélectriques présentent une polarisation
électrique spontanée – ou moment dipolaire permanent – en l'absence de contrainte
ou champ extérieur: elles sont dites polaires. Les cristaux appartenant à ces 10
classes sont appelés pyroélectriques en raison de la variation de la polarisation
spontanée avec la température.
I.3. Les matériaux ferroélectriques
I.3.1. Définition
Les cristaux ferroélectriques forment un sous-groupe des cristaux
pyroélectriques (Fig. I.1) pour lesquels la direction de la polarisation spontanée peut
être réorientée ou même renversée sous l'action d'un champ électrique externe.
20
32 classes cristallines
21 non centrosymétriques
11 centrosymétriques
non piézoélectriques
20 piézoélectriques
10 pyroélectriques
1 non piézoélectrique
10 non pyroélectriques
ferroélectriques
non ferroélectriques
non ferroélectriques
Figure I.1. Classes cristallines.
A l'origine, le choix du terme ferroélectricité par Muller en 1935 a pour but de
rappeler l'analogie entre le comportement hystérétique de la polarisation électrique
macroscopique en fonction du champ électrique appliqué (Fig. I.2) et celle de
l'aimantation en fonction du champ magnétique dans les substances
ferromagnétiques.
Le champ coercitif Ec est le champ électrique externe nécessaire pour la
réorientation des dipôles du matériau ferroélectrique et sa direction d'application
définit le nouvel axe de polarisation. La polarisation rémanente est la valeur de la
polarisation à champ nul.
Ps
-Ec
Ps: Polarisation spontanée
Pr: Polarisation rémanente
Ec: Champ coercitif
EcEc
Ps
Figure I.2. Cycle d'hystérésis d'un matériau ferroélectrique.
Chapitre I. Généralités
21
Par opposition, il existe également des cristaux antiferroélectriques. Ce sont
des cristaux anti-polaires, c'est-à-dire que les dipôles élémentaires sont antiparallèles entre eux contrairement aux cristaux polaires dont les dipôles s'orientent
spontanément parallèlement aux dipôles des mailles voisines. L'application d'un
champ électrique suffisamment intense peut induire une transition de phase
antiferroélectrique – ferroélectrique (Fig. I.3) qui correspond à une orientation
parallèle des dipôles. Ea est la valeur du champ externe pour laquelle cette transition
réversible se produit.
P
-Ea
Ea
E
Figure I.3. Cycle d'hystérésis d'un matériau antiferroélectrique. Représentation
schématique des dipôles élémentaires.
I.3.2. Polarisation d'un matériau ferroélectrique
Un matériau ferroélectrique est divisé en régions dans lesquelles les dipôles
sont orientés de façon unidirectionnelle. Chaque région appelée domaine présente
donc une polarisation spontanée homogène et uniforme. Comme la répartition des
domaines est aléatoire, le matériau est globalement non polaire et possède une
symétrie sphérique ∞ ∞ m. La frontière entre deux domaines est appelée mur de
domaines. Les axes de polarisation des domaines forment entre eux des angles
bien définis.
Lorsqu'on applique un champ externe, les domaines dont la direction de
polarisation est voisine de celle du champ vont croître en volume au détriment des
autres domaines moins favorablement orientés. Ce processus s'appelle la
polarisation du matériau. Celui-ci présente alors une polarisation macroscopique, il
devient anisotrope et possède une symétrie conique ∞ m.
La réorientation des domaines dépend donc de leur configuration initiale.
D'après Berlincourt [2], dans les matériaux de structure perovskite, le basculement
des domaines à 180° est total car il ne nécessite pas de déformations structurales,
contrairement aux réorientations des domaines à 71°, 90° et 109° dits ferroélastiques
qui entraînent des distorsions importantes de la maille. La figure I.4 donne une
description qualitative du processus de réorientation des domaines lors de la
polarisation d'une céramique ferroélectrique.
22
Céramique non polarisée
Céramique polarisée
Figure I.4 Représentation planaire du processus de polarisation dans une céramique
polycristalline. (Ep :champ polarisant et PR : polarisation rémanente).
I.3.3. Vieillissement
ferroélectriques
et
champ
interne
dans
les
matériaux
Le vieillissement est défini comme étant le changement des propriétés d'un
matériau avec le temps et il peut être provoqué par des sollicitations externes
mécaniques, électriques ou thermiques. Dans les matériaux ferroélectriques, la
variation d'une propriété p avec le temps t peut généralement être décrite sur
plusieurs décades de temps par la dépendance logarithmique suivante:
p(t) = p(to) + A ln(t/to)
(I.1)
où to est le point de départ de la mesure de p. La constante A, qui donne la vitesse
de vieillissement peut être positive ou négative. La relation (I.1) n'est pas valable
indéfiniment, sinon p prendrait une valeur infinie ou nulle.
Le vieillissement est généralement relié à la variation progressive de la
configuration de domaines avec le temps. Ainsi, les matériaux vieillis présentent une
configuration de domaines stabilisée qui peut se traduire par la présence d'un champ
interne. Ce champ interne Ei vient s'ajouter au champ coercitif et se manifeste par un
déplacement du cycle d'hystérésis le long de l'axe du champ externe dans le cas
d'un matériau polarisé ou sinon par un cycle d’hystérésis non saturé (Fig. I.5).
Chapitre I. Généralités
23
(a)
(b)
Champ interne Ei
Figure I.5. Cycle d’hystérésis de matériaux ferroélectriques vieillis : (a) polarisé, (b)
non polarisé.
I.4. Transition de phase d'un matériau ferroélectrique
I.4.1. Définition
La transition de phase d'un matériau ferroélectrique correspond à un
changement dans la structure cristalline, qui se produit généralement à une
température bien définie et qui s'accompagne d'une modification de l'orientation et\ou
de l'amplitude de la polarisation électrique.
I.4.2. Le point de Curie ferroélectrique Tc
Le point de Curie Tc est la température à laquelle un matériau ferroélectrique
subit une transition de phase structurale vers un état où la polarisation spontanée
disparaît. Au point de Curie, la permittivité diélectrique relative εr (εr =
ε
) atteint une
ε0
valeur maximale. Au delà de Tc, le matériau ferroélectrique devient paraélectrique et
εr suit la loi de Curie: εr = C
(I.2)
T − To
avec C: constante de Curie
T: température absolue (K)
To: température de Curie-Weiss (K).
24
grandeur physique
εr
1/εr
To Tc
T
Figure I.6. Evolution de la permittivité diélectrique d'un ferroélectrique en fonction de
la température.
La phase paraélectrique a toujours une symétrie cristallographique plus
grande que celle de la phase ferroélectrique et elle est généralement non polaire.
I.4.3. Type et ordre de la transition ferroélectrique – paraélectrique
Quand un matériau est refroidi à une température inférieure à Tc, la transition
de phase qui se produit peut être de type ordre – désordre et\ou de type displacif.
Dans le premier cas, les dipôles permanents sont d'amplitude fixe et à T≤ Tc,
ils s'orientent selon les axes préférentiels de la structure basse température.
Dans le second cas, les dipôles sont d'orientation fixe. A T≤ Tc, les ions
s'écartent de leur position d'équilibre occupée dans la phase haute température pour
créer une polarisation spontanée; c'est le cas des matériaux de structure perovskite
(Fig. I.7).
Ti4+
Ba2+
O2-
T ≥ Tc
T ≤ Tc
Figure I.7 Transition de phase de type displacif dans BaTiO3 de structure perovskite.
Le déplacement relatif des ions Ti4+ et O2- dans des directions opposées est à
l'origine de la polarisation spontanée.
Chapitre I. Généralités
25
La transition de phase ferroélectrique – paraélectrique est dite du 1er ordre
quand le volume, l'entropie et la polarisation spontanée varient de façon discontinue
au point de Curie et du 2nd ordre quand ces grandeurs varient de façon continue au
point de Curie et leurs dérivées premières présentent une discontinuité. Par
exemple, la transition de phase du titanate de baryum est du 1er ordre alors que celle
du niobate de lithium est du 2nd ordre.
I.5. Les équations de la piézoélectricité
La piézoélectricité étant un phénomène de couplage entre l'énergie électrique
et l'énergie mécanique, les équations de l'état piézoélectrique, si on néglige les effets
thermiques, relient une variable mécanique – déformation S ou contrainte T – et une
variable électrique – champ électrique E ou induction électrique D. Selon le choix de
ces variables indépendantes (imposées par les conditions aux limites de la
sollicitation extérieure sur l'échantillon étudié), les équations peuvent se présenter
sous les formes suivantes [3] :
D = dT + ε T E
S = s ET + d t E
E = β T D − gT
S = s DT + g t D
D = ε S E + eS
T = c ES − et E
E = β S D − hS
T = c DS − ht D
(I.3)
[ ]t est la transposée de la matrice [ ].
( )x indique que la grandeur est considérée à X constant ou nul.
En raison de la dépendance directionnelle des propriétés du matériau
(anisotropie), les paramètres de l'équation (I.1) doivent être représentés par des
tenseurs.
I.5.1. Les coefficients piézoélectriques
On dénombre quatre tenseurs de rang 3 des différents coefficients
piézoélectriques formant une matrice (3 x 6) et traduisant le couplage entre les
grandeurs mécaniques et les grandeurs électriques.
En fait, le nombre de coefficients composant ces tenseurs peut être réduit par
des considérations de symétrie du matériau. Des équations précédentes, nous
pouvons déterminer les relations entre les coefficients piézoélectriques [4] :
26
d mi = ε Tnm g ni = e mj S Eji
T
g mi = β nm
d ni = hmj S D
ji
(I.4)
S
e mj = ε nm
hni = d mj c Eji
avec i, j = 1 à 6 et m, n = 1 à 3
T
hmi = β nm
e ni = g mj c D
ji
Les deux indices des coefficients piézoélectriques désignent respectivement
la direction de l'axe de polarisation et celui de la déformation de l'échantillon. Les
indices i, j, m et n respectent la notation tensorielle de la Figure I.8.
3
6
5
2
4
Polarisation
1
Figure I.8. Notation tensorielle utilisée dans les équations (I.4)
(axe de polarisation suivant l'axe 3).
définition des coefficients piézoélectriques:
La constante de charge d.
Elle traduit la proportionnalité entre la contrainte et l'induction électrique à champ nul
ou constant (en C/N ou m/V).
La constante de tension g.
Elle traduit la proportionnalité entre la contrainte mécanique et le champ électrique à
induction nulle ou constante (en Vm/N ou m 2/C).
La constante piézoélectrique e.
Elle traduit la proportionnalité entre la déformation et l'induction électrique à champ
nul ou constant (en C/m2 ou N/Vm)
La constante piézoélectrique h.
C'est le coefficient piézoélectrique traduisant la proportionnalité entre la déformation
et le champ électrique à induction nulle ou constante (en V/m ou N/C).
Chapitre I. Généralités
27
définition des coefficients mécaniques et électriques
Grandeur
Termes
Définition
Matrice
D
Déplacement électrique ou induction (C/m2)
(3 x 1)
E
Champ électrique (V/m)
(3 x 1)
ε
Permittivité électrique (F/m)
(3 x 3)
β
Constante d'imperméabilité diélectrique
(m/F)
(3 x 3)
S
Déformation relative
(6 x 1)
T
Contrainte (N / m2)
(6 x 1)
s
Compliance ou susceptibilité (m2/N)
(6 x 6)
c
Raideur ou constante élastique (N/m2)
(6 x 6)
ELECTRIQUE
MECANIQUE
Tableau I.1. Grandeurs électriques et mécaniques.
I.5.2 Quantification du couplage électromécanique
A chacune des fréquences d'excitation d'une céramique piézoélectrique est
associé un mode de vibration. La nature de ces modes autrement dit la distribution
géométrique selon laquelle se déforme la céramique
considérée, dépend de
&
& ses
dimensions, de la direction du champ d'excitation E et du vecteur polarisation P .Les
principaux modes sont illustrés dans la Figure I.9.
P
P
P
mode longitudinal
mode latéral
mode de cisaillement
P
P
mode épaisseur
mode radial
Figure I.9. Modes de vibrations fondamentaux d'une céramique piézoélectrique.
28
Le couplage électromécanique est défini comme étant l'aptitude de la
céramique piézoélectrique à transformer l'énergie électrique en énergie mécanique
(ou inversement), il est caractérisé par un coefficient de couplage [5].
En accord avec les normes I.R.E. [4, 6], nous utiliserons la définition suivante :
k=
Um
(I.5)
U EU D
où UE, UD, et Um sont respectivement l’énergie élastique, l’énergie électrique et
l’énergie d'interaction (ou mutuelle) élastoélectrique.
Ce coefficient de couplage est obtenu à partir d'une étude thermodynamique
du système considéré comme linéaire en négligeant les effets thermiques.
Ainsi, on peut quantitativement écrire :
k2 =
énergie transformée
énergie fournie
L'expression du coefficient de couplage dépend de la forme de la céramique
et de son mode de vibration.
Le tableau I.2. donne la définition des principaux coefficients de couplage
utilisés en fonction des coefficients élastiques, diélectriques et piézoélectriques.
Les coefficients k sont calculés à partir des courbes d’admittance en fonction
de la fréquence (cf Chapitre IV).
Coefficient de surtension mécanique
Le coefficient de surtension mécanique appelé aussi facteur de qualité
mécanique, traduit les pertes mécaniques dans la céramique. Ce facteur est défini
de la façon suivante :
Q=
énergie maximale emmagasiné e pendant une période
énergie dissipée pendant une période
Chapitre I. Généralités
Forme
de l'éprouvette
29
Sens de
polarisation
Direction
de vibration
Coefficient de
couplage
k31 =
d 33
E
E
s11
ε 33
Transversal
k33 =
d 33
E
T
s11
ε 33
Longitudinal
k p = k31
2
1 +
s12
s11
Planaire
kt =
e33
S
c11D ε 33
En épaisseur
k15 =
d15
E
T
s44
ε11
En cisaillement
Tableau I.2. Définition des coefficients de couplage électromécanique.
I.6. Classification et applications des matériaux piézoélectriques
Il est possible de distinguer trois grandes classes d'application des matériaux
piézoélectriques selon qu'il s'agisse de l'effet piézoélectrique direct et/ou inverse qui
est mis en jeu (Tableau I.3).
30
Applications basées sur
l'effet piézoélectrique direct
Applications basées sur
l'effet piézoélectrique
inverse
Applications basées sur les
deux effets
Générateurs
d'impulsion
haute tension:
- allumage des gaz,
- briquets,
- allumage des explosifs.
Transducteurs ultrasonores Transducteurs ultrasonores
de faible puissance:
de puissance:
- nettoyage ultrasonore, - contrôle non destructif,
- perçage et soudage par - diagnostic médical,
ultrasons,
- lignes à retard.
- projecteur sonar en
acoustique sous-marine
Capteurs
Dispositifs de
Filtres électromécaniques
- microphones,
positionnement
hydrophones,
- contrôle des petits
- accéléromètres,
mouvements en
- jauges de dureté, de
mécanique,
contraintes,
- actuateurs pour le
- télécommande.
positionnement des
miroirs.
Moteurs piézoélectriques
Capteur sonar
Imprimante jet d’encre
Tableau I.3. Applications des matériaux piézoélectriques.
Depuis de nombreuses années, les applications industrielles de la
piézoélectricité sont réalisées au travers de matériaux ferroélectriques. La plupart
des matériaux ferroélectriques sont élaborés et utilisés industriellement sous la forme
de céramiques massives, polymères composites ou encore de couches minces à
une échelle moindre. Il est en effet très difficile de synthétiser des monocristaux
ferroélectriques contrairement aux céramiques polycristallines qui, de surcroît, offrent
une large variété de compositions facilement réalisables et permettent donc d'obtenir
une gamme importante de propriétés (Tableau I.4). Enfin, les céramiques présentent
l'avantage de s'usiner facilement et il est donc possible d'obtenir des formes
géométriques particulières destinées à des applications spécifiques. Pour ces
diverses raisons, la suite de l'étude est consacrée uniquement aux céramiques
ferroélectriques dont l'élaboration sera décrite ultérieurement.
Matériau
εr
sαβ (10-12 m2.N-1)
diβ (pC/N)
kiβ
monocristaux
Quartz
5
10
2.3
0.1
LiNbO3
30……80
6
2
20
0.03
0.3
Céramiques
ferroélectriques 200
5000
10
20
100
1000
0.3
0.8
Pb(Zr, Ti)O3
Polymères
10
400
20
0.15
PVDF
Tableau I.4. Caractéristiques principales des plus importants groupes de matériaux
piézoélectriques.
Chapitre I. Généralités
31
I.7. Les céramiques ferroélectriques de structure perovskite. Cas
particulier des céramiques PZT
I.7.1. Introduction
Le matériau ferroélectrique de structure perovskite le plus connu est le titanate
de barium (BaTiO3). Sa très grande permittivité fut mise en évidence en 1941 par
Thurnauer [7] et il fut reconnu comme étant ferroélectrique en 1945. Les zirconotitanates de plomb (PZT) apparus en 1954 [8] constituent maintenant la première
grande source de ferroélectriques de structure perovskite.
I.7.2. Description de la structure perovskite
La formule générale d'une perovskite est ABO3, où la valence des cations A
est comprise entre +1 et +3 et la valence des cations B entre +3 et +6. Dans le cas
d'une symétrie cubique, les cations A sont situés aux sommets du cube, les cations
B au milieu du cube et les atomes d'oxygène au centre des faces. La structure
perovskite est ainsi constituée d'un réseau d'octaèdres BO6 reliés entre eux par les
sommets et entourés par les cations A (Fig. I.10).
O
A
B
Figure I.10. Structure perovskite cubique.
I.7.3. Critères de stabilité de la structure perovskite
Il existe deux paramètres principaux qui rendent compte de la stabilité de la
structure perovskite. Le premier est le facteur de tolérance t défini par Goldschmit :
t=
Ra + Ro
2 ( Rb + Ro )
(I.6)
32
avec Ra, Rb et Ro les rayons ioniques respectifs des cations A, B et de l'oxygène.
Le facteur de tolérance t quantifie globalement la compacité de la perovskite
et la liberté de mouvement des cations A et B. Si t est compris entre 0.88 et 1.09, la
structure perovskite est stable et elle l'est d'autant plus que t est proche de 1. Le
second paramètre qui définit un critère de stabilité est l'ionicité de la liaison anion –
cation. Le caractère ionique d'une composition ABO3 est quantifié d'après l'échelle
de Pauling [9] à partir de la différence d'électronégativité
∆E = (ΧA-O + ΧB-O)/2
(I.7)
où ΧA-O et ΧB-O sont respectivement les différences d'électronégativité entre A
et O et B et O.
La structure perovskite est d'autant plus stable que les liaisons mises en jeu
présentent un fort caractère ionique. Ainsi, les perovskites à base de plomb de type
covalent sont moins stables que des perovskites plutôt ioniques comme BaTiO3 ou
SrTiO3 [10].
I.7.4. Les solutions solides PZT à base de PbTiO3 et PbZrO3
Le titanate de plomb PbTiO3 est un composé ferroélectrique de structure
perovskite qui forme des solutions solides avec de nombreux autres matériaux de
même structure. C'est le cas notamment du zirconate de plomb PbZrO3, matériau
antiferroélectrique qui est soluble en toutes proportions avec PbTiO3.
La solution solide résultante est le zircono-titanate de plomb, de formulation générale
Pb(ZrxTi1-x)O3. Il présente des propriétés diélectriques et piézoélectriques
remarquables [11].
I.7.4.1. Diagramme de phase du système binaire PbTiO3 – PbZrO3
La figure I.11 montre le diagramme de phase du mélange PbTiO3 – PbZrO3 en
fonction du pourcentage de mole de PbTiO3 et de la température proposé par Jaffe
[11].
Chapitre I. Généralités
33
Pc
500
450
Température (°C)
Pc
220
FR(HT)
210
400
350
230
AO
0
300
200
4
2
AQ
FQ
250
FR(HT)
200
150
100
AO
FR(BT)
50
10
20
30
40
50
60
70 80
90
% PbTiO3 (molaire)
Figure I.11. Diagramme de phase du mélange PbTiO3 – PbZrO3 d'après [11].
Nature des phases : Pc Paraélectrique cubique, FQ: Ferrolélectrique quadratique,
FR(HT): Ferroélectrique rhomboédrique (haute température), FR(BT): Ferroélectrique
rhomboédrique (basse température), AO Antiferroélectrique orthorhombique, AQ
Antiferroélectrique quadratique.
La structure perovskite de la phase haute température est de symétrie
cubique quelle que soit la composition. En dessous de Tc, les compositions riches en
titane adoptent une symétrie quadratique (groupe spatial 4 mm) alors que le
changement de symétrie des compositions riches en zirconium avec la température
est plus complexe. Néanmoins, une symétrie rhomboédrique est observée pour la
majeure partie de ces compositions.
Les mélanges binaires des phases quadratiques et rhomboédriques sont
ferroélectriques. Ces phases sont séparées par une frontière appelée Frontière de
Phase Morphotropique (FPM). La FPM correspond en fait à un mélange biphasique
quadratique/ rhomboédrique comme le montre le diagramme de phase proposé par
Mishra [12, 13] pour un taux de zirconium compris entre 49 et 55% (Fig. I.12). On
peut remarquer que la FPM s'incline vers les compositions riches en zirconium
quand la température augmente.
La largeur de la zone morphotropique dépend fortement du procédé de
fabrication des céramiques [14]. Certains auteurs considèrent qu'il est également
possible de modifier cette largeur en introduisant des impuretés dans le réseau
cristallin [15].
34
400
Température (°C)
300
200
Q
100
49
50
R
Q
+
R
51
52
53
54
55
% PbZrO 3 (molaire)
Figure I.12. Diagramme de phase du mélange PbTiO3 – PbZrO3 au voisinage de la
FPM d'après [13]. Q :phase quadratique et R :phase rhomboédrique.
I.7.4.2. Les domaines ferroélectriques dans les PZT
Dans le cas des matériaux PZT, la transition de phase ferroélectrique –
paraélectrique est de type displacif (cf § I.4.3.). En dessous de Tc, la distortion de la
structure perovskite s'accompagne d'un déplacement relatif des ions qui entraîne
l'apparition de la majeure partie de la polarisation spontanée à l'échelle de la maille.
Le reste de la polarisation spontanée est dû au caractère très covalent de la liaison
Pb-O.
La direction de la polarisation spontanée dépend à la fois de la symétrie de la
phase paraélectrique et de celle de la phase ferroélectrique (Fig. I.13).
Ainsi, dans la phase quadratique, la polarisation spontanée Ps se développe
suivant un axe parallèle à cQ joignant les milieux des deux faces opposées de la
maille et comme les six directions (100) suivant les trois axes ac de la maille cubique
sont équivalentes, Ps peut se développer de manière équiprobable le long de ces six
directions quand la température est inférieure à Tc.
Dans la phase rhomboédrique, Ps se développe suivant les diagonales
joignant deux sommets opposés (direction (111)) de la maille cubique. Il existe donc
huit directions possibles de la polarisation spontanée. En conséquence, les
domaines ferroélectriques qui se forment pour minimiser l'énergie élastique associée
aux contraintes mécaniques subies par le matériau à la transition de phase forment
entre eux des angles de :
Chapitre I. Généralités
-
35
90° et 180° dans la phase quadratique,
71°, 109° et 180° dans la phase rhomboédrique.
Phase ferroélectrique rhomboédrique
Phase paraélectrique cubique
Phase ferroélectrique quadratique
aR
CQ
aC
aR
aC
aQ
Figure I.13. Distortions de la structure perovskite. Représentation des axes de
polarisation dans les deux phases ferroélectriques.
La polarisation rémanente maximale (Pr)max qui peut être obtenue après
polarisation du matériau dépend du nombre de directions possibles de Ps. Ainsi,
pour un PZT rhomboédrique, (Pr)max = 0.87Ps et pour un PZT quadratique, (Pr)max =
0.83Ps [16].
Les compositions incluses dans
la FPM présentent une polarisation
rémanente importante car il existe 14 directions possibles de Ps en raison du
mélange de phase rhomboédrique/quadratique. En fait, les coefficients
piézoélectriques, les coefficients de couplage électromécanique, la permittivité
diélectrique et la polarisation rémanente des céramiques PZT passent par un
maximum dans la région de la FPM mais pas nécessairement pour le même rapport
Zr4+/Ti4+ [16]. Mishra [17] considère que la réponse électromécanique maximale est
obtenue pour des compositions monophasiques quadratiques et des températures
juste à l'extérieur de la FPM. Quoiqu'il en soit, les compositions PZT de la zone
morphotropique ou proches de celle-ci sont d'un grand intérêt sur le plan
technologique car elles présentent des fortes activités diélectriques et
piézoélectriques.
I.7.4.3. La substitution cationique ou dopage dans les PZT
Les céramiques PZT sont rarement utilisées pour des applications techniques
dans leur formulation simple. Elle est généralement modifiée par l'ajout d'un ou
plusieurs cations étrangers qui vont se substituer au Pb2+ en site A de la perovskite
ou au couple (Zr4+/Ti4+) en site B. On parle alors de dopage du matériau. Le rayon
ionique du dopant doit être voisin de celui de l'ion auquel il se substitue.
Les dopants sont généralement classés en trois catégories selon leur valence
et celle de l'ion substitué [11, 18] :
• Les dopants de valence égale à celle de l'ion substitué (dopants isovalents):
C'est le cas par exemple de Ba2+, Sr2+, Ca2+ en site A et Ce4+ en site B de la
perovskite. Ces dopants augmentent le caractère ionique de la maille, ce qui se
36
traduit par une diminution du point de Curie et une augmentation de la permittivité
diélectrique du PZT à température ambiante.
• Les dopants de valence inférieure à celle de l'ion substitué (dopants
accepteurs) :
On peut citer K+ et Na+ en site A et Fe2+/3+ et Ni2+/3+ en site B.
L'électroneutralité du PZT est assurée par l'apparition de lacunes d'oxygène qui
rendent le matériau non stoechiométrique. Ainsi, la formulation d'un PZT dopé avec
du fer(II) (y % molaire) devient Pb[(ZrxTi1-x)1-yFey2+]O3-y y si on considère que les
lacunes d'oxygène sont doublement chargées positivement (VO.. d’après la notation
de Kröger [19]). Les dopants accepteurs entraînent un vieillissement des propriétés
du PZT et donc la présence d'un champ interne.
Ils provoquent également une augmentation :
- du facteur de qualité mécanique,
- du champ coercitif,
- de la conductivité
et une diminution :
- de la permittivité,
- des pertes diélectriques,
- des coefficients de couplage,
- de la taille des grains de la céramique.
Les matériaux PZT dopés avec des accepteurs sont dits durs car ils se
dépolarisent difficilement sous l’action d’une contrainte . Le rôle essentiel joué par les
lacunes d'oxygène dans les céramiques PZT dur sera présenté ultérieurement.
• Les dopants de valence supérieure à celle de l'ion substitué (dopants
donneurs) :
L'excès de charge positive apporté par les dopants donneurs comme La3+
(site A) ou Nb5+ et W 6+ (site B) est compensé par des lacunes cationiques comme
''
des lacunes de plomb (VPb
) ou un changement de valence de Ti4+ en Ti3+. Par
exemple, la formulation d'un PZT dopé avec y % molaire de Nb5+ devient :
Pb1-y/2 y/2[(ZrxTi1-x)1-yNby5+]O3. Les dopants donneurs entraînent généralement une
augmentation :
- de la permittivité,
- des pertes diélectriques,
- des coefficients de couplage,
- de la compliance élastique.
On observe également une diminution:
- du facteur de qualité mécanique,
- du champ coercitif,
- de la conductivité,
- du point de Curie.
De plus, les matériaux PZT dopés avec des donneurs ne sont pas ou peu
affectés par le viellissement. Ils sont dits doux car facilement dépolarisables et les
dopants donneurs entraînent des effets opposés à ceux induits par les dopants
accepteurs. On peut également noter que les substituants donneurs ont en général
une solubilité plus grande dans les matériaux PZT que celle des substituants
accepteurs [20].
Chapitre I. Généralités
37
Enfin, il est aussi possible de doper une céramique avec plusieurs
substituants donneurs et/ou accepteurs. L'influence globale du dopage sur les
propriétés du matériau dépend alors de la concentration et de la valence de chaque
substituant.
I.8. Contribution des murs de domaines ferroélectriques aux propriétés
des céramiques PZT
I.8.1. Contribution intrinsèque et extrinsèque dans les matériaux
ferroélectriques
On appelle contribution intrinsèque du matériau la part des propriétés
diélectriques, élastiques et piézoélectriques due à la polarisation spontanée à
l'échelle de la maille élémentaire. Le reste des propriétés est la contribution
extrinsèque du matériau. Elle est principalement due aux mouvements des murs de
domaines auxquels on attribue plus de la moitié des réponses diélectriques et
électromécaniques du PZT à la température ambiante [21]. Ces mouvements
peuvent être la vibration ou rotation autour d'une position d'équilibre ou des petits
déplacements vers un nouvel état d'équilibre sous champ faible ou modéré.
Les murs de domaines à 90°, 71° et 109° ferroélastiques affectent à la fois les
propriétés diélectriques et piézoélectriques alors que les murs de domaines à 180°
non ferroélastiques affectent uniquement la réponse diélectrique du matériau.
Comme la mobilité des parois de domaine est un phénomène thermiquement
activable, il est possible de distinguer les deux types de contribution – intrinsèque et
extrinsèque – en mesurant les coefficients du PZT à très basse température. En
effet, à des températures voisines de 0 K les murs de domaines sont figés et les
valeurs des grandeurs mesurées sont celles correspondant à la réponse intrinsèque.
Ainsi, dans le cas des PZT dopés, l'effet du dopage qui influe principalement
sur la réponse extrinsèque disparaît à très basse température [22]. La figure I.14
montre que les différentes valeurs de d31 aux températures élevées sont dues aux
différents dopants qui affectent les mouvements des murs de domaines. Aux basses
températures, la contribution extrinsèque disparaît; seule la contribution intrinsèque
subsiste et est indépendante du type de dopant.
38
Figure I.14. Evolution de la constante de charge du mode transversal d31 de
céramiques PZT avec la température. Chaque PZT est dopé avec un dopant
différent (Type I, II, III et IV) mais le rapport Zr/Ti est fixe. D'après [22].
I.8.2. Stabilisation de la configuration
ferroélectriques dans les céramiques PZT dur
des
domaines
Dans les céramiques PZT dur, la contribution extrinsèque des murs de
domaines est considérablement réduite par les défauts anisotropiques que sont les
lacunes d'oxygène. On parle alors de stabilisation de la configuration des domaines
ou des murs de domaines car leur mobilité est beaucoup moins grande. Dans la
littérature [20, 23, 24], trois mécanismes différents sont proposés pour expliquer le
phénomène de stabilisation qui est à l'origine du vieillissement et du champ interne :
-
L'effet de volume :
Les lacunes d'oxygène forment avec les dopants accepteurs des dipôles
électriques et élastiques anisotropiques (ou défauts dipolaires) initialement orientés
de façon aléatoire. En raison de la mobilité des lacunes d'oxygène dans le réseau
cristallin, ces dipôles s'orientent progressivement avec le temps vers des positions
énergétiquement plus favorables qui sont dictées par la direction de la polarisation
spontanée Ps à l'intérieur de chaque domaine. Les défauts dipolaires sont alors
alignés dans la direction de Ps et la stabilise.
-
L'effet de murs de domaines :
Les lacunes d'oxygène diffusent jusqu'aux murs de domaines et les piègent c'està-dire fixent leur position. La neutralisation de contraintes mécaniques ou la
compensation de charges électriques dans la région des murs de domaines sont à
l'origine de cette diffusion de lacunes d'oxgène.
Chapitre I. Généralités
-
39
L'effet de joints de grains :
La présence de phases secondaires contenant ou pas des dopants ségrégés aux
joints de grains de la céramique entraîne l'apparition de charges surfaciques. Ces
charges d'espace créent un champ qui stabilise la configuration de domaines dès
lors que celle-ci a été établie après vieillissement. Dans ce mécanisme, la
polarisation spontanée d’un grain est majoritairement orientée dans une direction
cristallographique privilégiée mais les murs de domaines restent mobiles [24].
Quel que soit le mécanisme considéré, les dopants et les lacunes d'oxygène
jouent un rôle essentiel dans la stabilisation de la configuration de domaines dans les
PZT durs. Thomann [23] et Härdtl [24] pensent que les trois effets peuvent se
produire en même temps dans un matériau; néanmoins, l'effet de volume semble
être le plus important. Les travaux de ces auteurs laissent donc penser que la
présence et la stabilité des lacunes d’oxygène sont une condition nécessaire pour la
stabilité des murs de domaines. Cependant, Eyraud [25-27] considère que cette
condition n’est pas suffisante. Elle doit s’accompagner de la stabilité des charges des
ions de constitution ou des dopants comme Ti3+/4+ ou Fe2+/3+.
I.9. Etude bibliographique
I.9.1. Céramiques PZT à fréquence de résonance stable en température
Un des objectifs de l'étude est l'élaboration de céramiques PZT dont la
fréquence de résonance du mode longitudinal varie linéairement et de façon non
hystérétique en fonction de la température.
I.9.1.1. Cas des matériaux PZT non dopé
Durant les trente dernières années de nombreux travaux ont été réalisés pour
obtenir des céramiques ferroélectriques ayant une fréquence de résonance fr peu
dépendante de la température [15, 23, 28]. Cette spécificité est surtout requise pour
des applications comme les filtres fréquentiels mécaniques, capteurs de vibration ou
capteurs de direction dans les systèmes de navigation de voiture. Dans la littérature,
on définit généralement un coefficient de température de la fréquence de résonance
TCF par
TCF =
1
fr
 dfr 


 dT 
(I.8)
avec T: Température (en °C ou K).
Par exemple, on trouve couramment [23, 29]: TCF =
fr ( 60 °C ) − fr ( 20 °C )
.
fr ( 20 °C )x 40
Une valeur de TCF proche de zéro est souhaitée pour toutes les applications
citées ci-dessus. Il est possible de contrôler le signe et la valeur de TCF en modulant
40
le rapport Zr/Ti qui détermine la proportion des phases quadratique et
rhomboédrique dans le matériau.
La majeure partie des compositions du type Pb(ZrxTi1-x)O3 présente un TCF
négatif, caractéristique de la plupart des corps solides en raison de l'effet de
D
dilatation thermique qui augmente la compliance s33
telle que :
fr =
1
D
2 l s33
ρ
(I.9)
(en mode longitudinal)
l et ρ étant respectivement la longueur et la densité de la céramique.
Toutefois, des anomalies élastiques sont observées pour des compositions
dans la phase quadratique proches de la frontière de phase morphotropique ou
encore à la transition de phase rhomboédrique (Basse Température)/ rhomboédrique
(Haute Température) (FR(BT)/ FR(HT) dans le diagramme Figure I.11): la fréquence de
résonance de ces compositions augmente avec la température, c'est-à-dire TCF est
positif (Fig. I.15).
T
Q
FPM
R
PbZrO3
PbTiO3
fr
fr
T
fr
T
T
Figure I.15. Représentation schématique de l'évolution de la fréquence de résonance
en fonction de la température au voisinage de la FPM. Les mêmes types de courbes
sont observées à la transition FR(BT)/ FR(HT).
L'anomalie élastique au voisinage de la FPM est induite par une anomalie
diélectrique d'après Mishra [13] et Thomann [23] qui observent une réponse
diélectrique maximale dans cette gamme de composition. Ce n'est pas le cas de
Chapitre I. Généralités
41
l'anomalie élastique à la transition FR(BT)/ FR(HT) qui est la conséquence de la rotation
alternative des octaèdres d'oxygène le long de l'axe polaire.
Le signe de TCF change donc avec la composition d'une part dans la phase
quadratique au voisinage de la FPM et d'autre part aux deux transitions de phase
structurales ferroélectrique/ ferroélectrique. Il y a ainsi trois façons possibles d'obtenir
TCF ≈ 0. Toutefois, le minimum atteint par la fréquence de résonance à la FPM est
communément utilisé en raison des propriétés intéressantes des compositions dans
cette région.
I.9.1.2. Cas des matériaux PZT dopé
Les propriétés électromécaniques et le TCF des céramiques PZT sont
généralement améliorés par des substitutions cationiques en site B de la perovskite.
Les principaux dopants utilisés sont Cr3+ et Mn2+ et sont communément appelés
stabilisateurs [15] (Fig. I.16a). De plus, des matériaux à fréquence de résonance
stable en température sont également développés en utilisant des couples de
dopants
–
appelés
aussi
dopants
complexes
–
comme
5+
( Mn12 /+ 3 , Sb2/3
)
5+
) , parfois associés à Fe3+ ou Sm3+ [28] (Fig.I.16b).
ou ( Mg 12 /+ 3 , Nb2/3
800
(a)
(b)
10000
5000
400
200
∆fr (ppm)
TCF (ppm.°C)-1
600
0
0
-5000
-200
-10000
-400
-15000
46
48
50
52
54
% Zr4+ (molaire)
56
-40 -20 0
20
40
60
80
100
T (°C)
Figure I.16. (a) Evolution du coefficient TCF de céramiques PZT non dopé (•) et
dopé avec Cr3+ (ο) en fonction du taux de zirconium.
5+
(b) Evolution du ∆fr de céramiques PZT dopé avec ( Mn12 /+ 3 , Sb2/3
) (ο)
5+
et avec ( Mn12 /+ 3 , Sb2/3
) et Sm3+ (▲) en fonction de la température.
Toutes les études référencées ci-dessus concernent des matériaux PZT dont
la fréquence de résonance varie peu avec la température. Toutefois, les différents
auteurs ne tiennent pas compte d'une possible réponse non linéaire de fr. En effet,
une céramique PZT peut présenter simultanément un TCF très faible et une variation
42
non linéaire de fr dans la gamme de température considérée. De plus, un éventuel
comportement hystérétique observé au cours d’un cycle de température n'est jamais
évoqué. Cet hystérésis thermique peut être désastreux pour des applications comme
les gyroscopes vibrants.
I.9.2. Céramiques PZT à constante de charge d33 stable sous contrainte
mécanique uniaxiale
Le présent travail est également consacré à la recherche de matériaux PZT
dont la constante de charge d 33 varie linéairement et sans hystérésis en fonction de
la contrainte mécanique uniaxiale. Il existe peu d'études concernant la stabilité des
caractéristiques diélectriques, piézoélectriques et mécaniques des PZT sous
contrainte uniaxiale [30-32].
On peut citer les récents travaux de Damjanovic [33, 34], qui observe une
réponse linéaire et hystérétique du coefficient d33 de céramiques PZT doux dopé
avec du niobium sous faible contrainte uniaxiale. Il interprète le phénomène en
appliquant la loi de Rayleigh [35] à l'effet piézoélectrique mais ne propose pas de
solutions pour obtenir une variation de d33 non hystérétique.
Dans les années 90, les études menées au Laboratoire par Eyraud [36-39] et
Audigier [40] sur les céramiques PZT fluoré montrent à partir d’un modèle simplifié
que la fluoration permet d’obtenir une composition PZT dure et stable. Ces matériaux
présentent en particulier une grande stabilité sous forte contrainte mécanique
uniaxiale. C'est la raison pour laquelle notre travail porte sur l'élaboration et la
caractérisation d'une famille de PZT fluorés, ainsi que sur l'étude de leur stabilité en
température et sous contrainte mécanique uniaxiale.
La substitution de l'oxygène par le fluor est réalisée sur une composition du
type Pb0.89(Ba, Sr)0.11(ZrxTi1-x)O3 dopée avec du magnésium. Les raisons du choix de
tels dopants seront explicitées ultérieurement.
L'influence du dopage avec du fluor – ou fluoration – sur les différentes
caractéristiques des poudres ou céramiques PZT sera discutée à chaque chapitre.
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