de la Fondation de la Résistance
Reconnue d'utilité publique par décret du 5 mars 1993. Sous le Haut Patronage du Président de la République
n° 85 – juin 2016 – 5,50
Dossier thématique
La Résistance
alsacienne
2La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 85 - juin 2016
2
En couverture : Photographie réunissant quatre Alsaciens incorporés de force dans la Wehrmacht. De gauche à droite : Charles Kuchel, Eugène Ortlieb, Jean-Jacques Berger
(tous trois de Beblenheim dans le Haut-Rhin) et un inconnu. Elle semble avoir été prise à l’été 1943 pendant qu’ils faisaient leurs classes à Dirschau (Pologne), avant de
rejoindre le front de l’Est. L’inscription peinte sur la valise dit leur désir d’une victoire alliée (cf. la croix de Lorraine) et, indirectement, le tragique de leur situation.
La désertion était alors quasiment la seule forme de résistance envisageable. Archives privées de la famille Kuchel-DR
Les liaisons radios clandestines permettent de
transmettre à Londres puis à Alger libérée les ren-
seignements militaires, politiques et économiques
urgents collectés par les réseaux de Résistance en
France. Elles permettent également l’organisation
des opérations maritimes et aériennes par les-
quelles transitent les courriers (informations moins
urgentes) et certains agents des réseaux mais aussi
les parachutages, tout en coordonnant les différents
groupes de résistants.
Ces liaisons s’établissent entre un émetteur fixe
appelé « la centrale » installée en territoire libre
(Angleterre ou Algérie libérée) et un émetteur-
récepteur mobile appelé « la station », fonctionnant
en territoire contrôlé par l’ennemi.
De nombreuses difficultés existent pendant les
deux premières années pour organiser les liaisons
radios clandestines.
En 1941-1942, les postes émetteurs-récepteurs
sont rares. Lourds, encombrants, fragiles, ils sont
facilement repérables lors de contrôles. Leur manie-
ment est complexe et aléatoire : difficultés à déter-
miner la bonne fréquence, opérateurs des centrales
anglaises difficilement joignables par pénurie de
personnel, procédure de codage (système de « double
transposition ») longue et complexe
(1)
.
Formés en Angleterre pour le compte du
BCRA
(2)
ou du SOE
(3)
, les opérateurs radios sur-
nommés « pianistes », agents hautement spécialisés,
sont parachutés ou déposés par Lysander.
Progressivement, d’autres radios sont formés en
France occupée après avoir été recrutés parmi des
opérateurs civils ou militaires
(4).
Le matériel de transmission (émetteurs-récep-
teurs, dispositifs d’alimentation, quartz,…) est quant
à lui parachuté séparément par containers pour être
réparti ensuite entre les utilisateurs.
À chaque contact avec sa centrale anglaise, le
radio clandestin s’expose aux recherches des Alle-
mands qui tentent de le localiser grâce à un procédé
de recherche d’ondes : la radiogoniométrie.
Le radio a bien conscience de ce risque et doit,
malgré tout, être en mesure de garder son calme
pour enchaîner la transmission en morse des
messages codés.
Le respect de règles de sécurité strictes, pour
garantir la sécurité des radios, limite encore l’effica-
cité des émissions clandestines : ne pas émettre plus
de 10 minutes sur la même fréquence, changer de
fréquence pendant une émission (en changeant de
quartz fixant la longueur d’onde prévue) qui ne doit
pas excéder 20 à 30 minutes, utiliser une puissance
L’augmentation des liaisons perturbe les moyens
de repérage et égare les recherches ennemies. Entre
juillet 1943 et juillet 1944, le taux de perte des
opérateurs radios tombe en dessous de 25 %.
Frantz Malassis
(1) 15 minutes sont nécessaires pour chiffrer un mes-
sage de 140 lettres. Ce système, qui perdure jusqu’en
septembre 1943, demande une attention soutenue. La
moindre erreur commise au codage rend le message indé-
chiffrable par le correspondant.
(2) Comme Pierrette Louin.
(3) Comme Georges Begué ou Yvonne Cormeau.
(4) Comme René Bouvret. Repéré lors d’une émission, il
tombe les armes à la main le 4 janvier 1944 dans la région
d’Hauteville (Ain) après avoir détruit son poste.
(5) Sur l’histoire et les techniques des liaisons radio clan-
destines, on pourra consulter :
- « Liaisons radios », article de Robert Belot in Dictionnaire
historique de la Résistance, Robert Laffont, 2006.
- Jean-Louis Perquin, Les opérateurs radio clandestins. SOE,
BCRA, OSS, Histoire et Collections, 2011. Ce livre traite
de l’aspect matériel des radios clandestins avec un pano-
rama complet des différents postes utilisés.
- Amicale des réseaux action de la France combattante,
Les réseaux action de la France combattante 1940-1944,
1986. Ce livre, téléchargeable depuis ce lien : http://
www.fondationresistance.org/pages/accueil/les-reseaux-
action-france-combattante_publication6.htm, aborde de
façon très claire les techniques utilisées par les réseaux
de résistance : codage, formation des radios mais aussi les
techniques de repérage de l’ennemi…
Les postes émetteurs-récepteurs, des liens
vitaux mais périlleux pour la Résistance
Mémoire et réflexions
dondes réduite, placer des guetteurs autour du lieu
démission qui doit changer le plus souvent possible.
Lors de leurs multiples déplacements, les radios ne
doivent transporter ni poste, ni quartz, ni message,
ni arme afin de limiter les risques d’arrestations lors
de fouilles fréquentes dans les gares, les transports…
Durant la période 1941-1942, la répression
allemande est redoutable. Lespérance de vie d’un
radio nest que de 6 mois. Le pourcentage de
pertes des radios du BCRA s’élève à 75 % pour les
années 1941 et 1942 et à 50 % au cours du premier
semestre de l’année 1943.
Fin 1942, afin de mieux contrôler l’utilisation
du matériel et sécuriser les transmissions, Jean
Moulin, met en place le service Wireless Trans-
mission pour les réseaux action et les missions. En
juillet 1943, une vague d’arrestations s’abat sur ce
service désorganisant totalement les transmissions
avec Londres. C’est alors qu’est mis en place le plan
Électre. Jean Fleury, chef du réseau Électre, après
avoir réussi à convaincre le BCRA de la fiabilité de
son organisation, réorganise les liaisons radios sur
la base de centres régionaux capables d’échanger
leurs fréquences et leurs indicatifs entre plus de 100
opérateurs pour tromper les recherches ennemies.
En 1944, le plus grand nombre d’émetteurs-récep-
teurs, les améliorations techniques et l’organisation
des émissions clandestines permettent aux Alliés
de recevoir un flot de renseignements stratégiques
mais surtout tactiques. Ainsi, en juin 1944, près de
1 000 télégrammes (sur plus de 3 300) sont envoyés à
Londres par les réseaux de renseignement du BCRA.
DR
Histoire d’objets de la Résistance
Cette nouvelle rubrique de La Lettre présentera, chaque trimestre, l’histoire d’un objet
emblématique de la Résistance. Elle montrera comment ces objets ont marqué dura-
blement l’histoire et la mémoire de la Résistance.
Poste émetteur récepteur AMKII
Entre le début et la fin de la guerre, les émetteurs-récepteurs
utilisés pour les liaisons radios clandestines bénéficient de
perfectionnements techniques considérables (utilisation de
quartz, miniaturisation, fabrication en série…).
Leur poids passe de 20 kg, pour le modèle MD XV, mis en
service en 1941, nécessitant deux grosses valises pour son
transport, à 9 kg pour le poste type AMKII utilisé à la fin de
l’année 1942 et de loin le plus employé par la Résistance
lequel tient dans une petite valise (38 X 24 X 10 cm).
De plus, ce dernier modèle est composé de trois modules
séparés (récepteur, émetteur et alimentation) facilitant son
camouflage. Possédant un fil d’antenne de plus de 10 mètres, les appareils peuvent tous être alimentés par
une prise de courant du réseau électrique en usage en France sous l’occupation. Pour parer aux coupures
d’électricité fréquentes les postes sont aussi équipés de batteries. Ci-contre : scène reconstituée d'un opérateur
radio clandestin transmettant des messages à l’aide d’un poste émetteur-récepteu.
Coll. musée de l’Ordre de la Libération/
photographe J. Redouane
L
e Conseil d’administration de la Fondation de la Résistance
qui s’est tenu le 8 juin dernier, constatant l’empêchement du
président Jacques Vistel d’exercer ses fonctions, et en accord avec
lui, m’a confié la responsabilité de le remplacer durant toute la durée
de son indisponibilité. Attaché familialement aux résistants qui ont
créé cette institution pour perpétuer l’histoire et la mémoire de leur
engagement, j’ai accepté cet honneur et cette mission.
J’avais déjà, en son absence, été conduit le 27 mai dernier à
co-présider la cérémonie de ravivage de la Flamme sur la tombe du
soldat inconnu au côté du vice-président de la Fondation le docteur
Pierre Morel.
Cette cérémonie rappelle en effet un événement majeur. Le 27 mai
1943, au cœur de Paris occupé par les Allemands, Jean Moulin, seul
représentant du général de
Gaulle en France, réunissait
le Conseil national de la
Résistance. Cette initiative
audacieuse venait renforcer
la légitimité du général de
Gaulle dans son rôle de chef politique à la tête de la France libre dans le contexte de rivalité qui
l’opposait au général Giraud, soutenu par les Alliés.
Réunissant les principaux mouvements de Résistance, les partis politiques et les syndicats
clandestins, ce « parlement clandestin » incarnait l’unité de la Résistance dans sa lutte pour la
Libération et l’indépendance nationale.
Quelques mois plus tard, le 15 mars 1944, le Conseil national de la Résistance adoptera un
programme dont la deuxième partie « mesures à appliquer dès la libération » jettera les bases
d’une refondation économique et sociale de la France. Ce texte, qui faisait consensus au sein
des partis, syndicats et mouvements de la Résistance, se concrétisera, entre décembre 1944 et
les élections législatives du 2 juin 1946, par des réformes structurelles majeures (nationalisation
d’entreprises, sécurité sociale, comités d’entreprise…) qui marqueront fortement notre Pays.
Depuis douze ans, chaque 27 mai, la Fondation de la Résistance commémore l’anniversaire
de la séance constitutive du Conseil national de la Résistance en ravivant la Flamme sous l’Arc
de Triomphe après une cérémonie très sobre au monument Jean Moulin.
Depuis 2013, ces initiatives prennent place dans le cadre de la journée nationale de la
Résistance instaurée par la loi du 19 juillet 2013.
Par cette commémoration, il ne s’agit pas de conserver pieusement et de façon immuable
cet héritage, mais bien de s’inspirer de son esprit pour qu’il nourrisse la pensée et l’action des
décideurs et des citoyens français d’aujourd’hui.
Sommaire
Éditeur :
Fondation de la Résistance
Reconnue d’utilité publique par décret
du 5 mars 1993. Sous le Haut Patronage
du Président de la République
30, boulevard des Invalides – 75007 Paris
Téléphone : 01 47 05 73 69
Télécopie : 01 53 59 95 85
Site internet : www.fondationresistance.org
Directeur de la publication : Jacques Vistel,
Président de la Fondation de la Résistance
Directeur délégué de la publication :
François Archambault
Rédacteur en chef : Frantz Malassis
Comité de rédaction : Fabrice Bourrée,
Marie-Noèl Diener-Hatt, Mireille Hincker,
Éric Le Normand, Bruno Leroux, Frantz Malassis,
Jean-Baptiste Metz, Jean Novosseloff, Jacque-
line Pfohl, Édith Robin, Hélène Staes,
Frédéric Stroh, Manuel Valls-Vicente,
Marie-Claire Vitoux.
Fichier des abonnés : Amélia Polonia-Vaz
Maquette, photogravure et impression :
humancom, 48 rue de Dantzig 75015 Paris.
Revue trimestrielle. Abonnement pour un an : 20 .
n° 85 : 5,50
Commission paritaire
n° 1120 A 07588 – ISSN 1263-5707
Dépôt légal : mars 2016
Mémoire et réflexions
- Histoire d’objets de la Résistance .............p. 2
La vie de la Fondation
de la Résistance
- Activités du département
recherche et pédagogie ......................p. 4 et 6
- Activités du département
documentation et publications ................. p. 7
- Activité du département AERI ................ p. 8
Les activités de MER
Association des amis
de la Fondation de la Résistance .................p. 5
Livres ........................................................p. 6
Malgré toutes les démarches entreprises, la Fondation
de la Résistance n’a pas pu retrouver les ayants droits
de certaines photographies. Les personnes disposant
de ces droits peuvent prendre contact avec la Fondation
de la Résistance.
Monument Jean Moulin, dit le glaive brisé à Chartres. Œuvre conçue et réalisée par le sculpteur Marcel Courbier (DR)
3
La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 85 - juin 2016
DR
Le mot du Président
DOSSIER THÉMATIQUE
La Résistance alsacienne
L’Alsace à l’épreuve du nazisme ...................p. I
La Résistance alsacienne
et son rôle dans la Libération ...................p. II
Le Front de la Jeunesse d’Alsace
(FJA) ............................................................. p. V
Le drame de Ballersdorf ........................p. VI
Bernard Metz ........................................ p. VII
Pour en savoir plus ............................. p. VIII
Le mot du Président
Coll. musée de l’Ordre de la Libération/
photographe J. Redouane
Le thème 2016-2017 retenu par le jury national est le suivant : « La négation de l’Homme
dans l’univers concentrationnaire nazi ». Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’Éducation
nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, a salué, dans un communiqué de
presse daté du 13 mai 2016, le choix du jury national du Concours national de la Résistance
et de la Déportation (CNRD) pour le thème de l’année 2016-2017.
Un arrêté et une note de service précisant la nouvelle organisation du Concours seront publiés
avant la fin de l’année scolaire.
Pour plus d’informations, consulter la rubrique «Actions pédagogiques» de notre site
Internet : www.fondationresistance.org
Concours national de la Résistance et de la Déportation 2016-2017
Gilles Pierre LEVY
Président de la Fondation de la Résistance
La vie de la Fondation de la Résistance
4La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 85 - juin 2016
suite en page 6
Georges Boutillier/SNAPP reportages
Frantz Malassis
Jérémy Cuenin/ Archives départementales de la Seine-Saint-Denis
Activités du département recherche et pédagogie
La Fondation de la Résistance soutient l’éducation artistique et culturelle
La Fondation de la Résistance et la Maison
des écrivains et de la littérature
(1)
(mél) ont
soutenu activement un parcours artistique
et culturelle choisi par une équipe pluridis-
ciplinaire du collège Pierre-André Houël
à Romainville et financé par le Conseil
départemental de la Seine-Saint-Denis. Les
parcours « La Culture et l’Art au Collège »
(CAC) sont des dispositifs départementaux
déducation artistique et culturelle soutenus
par le département de la Seine-Saint-Denis,
en partenariat avec l’Éducation nationale et la
Direction Régionale des Affaires Culturelles
(DRAC) d’Île-de-France. Cette année, 300
parcours menés par 99 structures culturelles et
artistiques se sont déroulés dans 122 des 125
collèges publics du département.
D'une approche historique…
Garance Mouriaux, professeure de français,
Mathilde Iung, professeure d’histoire-géogra-
phie et Contance Ouvrard, professeure d’arts
plastiques, avec l’accord du chef d’établisse-
ment, ont engagé leurs élèves d’une classe de
troisième dans un projet intitulé « Les traces
des femmes résistantes dans le fort de Romain-
ville durant la Seconde Guerre mondiale ».
Le parcours de quarante heures est composé
de diverses sorties ou rencontres, de temps de
concertation pour l’équipe et de vingt heures
d’atelier d’écriture avec un auteur contempo-
rain. D’octobre 2015 à mai 2016, les élèves
se sont ainsi familiarisés avec l’histoire de la
Seconde Guerre mondiale en découvrant des
acteurs, des archives et des objets qui leur ont
permis de comprendre les raisons, les enjeux
mais aussi les risques de l’engagement résistant.
Frantz Malassis et Hélène Staes, de la Fon-
dation de la Résistance, ont organisé et guidé
la visite du fort de Romainville avec l’aide de
Joël Clesse des Archives départementales de la
Seine-Saint-Denis, fin connaisseur des graffitis
de la casemate 17 et le soutien de Madame Parra
du ministère de la Défense. Les élèves ont ainsi
découvert sur leur territoire l’histoire d’un lieu
emblématique de la répression allemande (pho-
tos 1 et 2). Après avoir écouté une conférence
donnée par Bruno Leroux, directeur historique
de la Fondation de la Résistance, ils ont assisté
au cinéma Le Trianon de Romainville à la pro-
jection du film L’Armée du crime du réalisateur
Robert Guédiguian. Quelques semaines plus
tard, Frantz Malassis et Hélène Staes les ont
guidés dans l’espace Seconde Guerre mon-
diale du Musée de l’Armée à l’Hôtel national
des Invalides (photo 3), avant de les inviter à
prendre part au ravivage de la flamme sous l’Arc
de Triomphe aux côtés du Secrétaire d’État
auprès du ministre de la Défense chargé des
anciens combattants et de la mémoire Jean-
Marc Todeschini, présent ce jour. Des élèves ont
déposé des iris sur la tombe du soldat inconnu
(photo 4) quand d’autres portaient des drapeaux
d’associations de résistants aujourd'hui dissoutes
(photo 5).
… à des travaux d'écriture
L’auteure Christine Deroin
(2)
, qui s’intéresse
tout particulièrement à la question de la Résis-
tance et de l’oppression, a accompagné durant
plusieurs semaines les élèves dans leur travail
décriture, soutenue en cela par Nathalie Lurton
de la Maison des écrivains et de la littérature. Un
corpus documentaire (textes littéraires, lettres) a
été rassemblé par Hélène Staes grâce au pré-
cieux travail de collecte réalisé par l’historien
Thomas Fontaine
(3)
et à la vidéothèque de la
Fondation pour la mémoire de la Déportation
qui a été mise à la disposition de la Fondation
Enseigner la Résistance
À l’initiative de l’Inspection générale de l’Éducation nationale et avec le soutien de la Fonda-
tion de la Résistance, la publication transmédia Enseigner la Résistance paraîtra en septembre
2016 dans l’univers « Maîtriser » aux éditions Canopé. Sous la direction de Laurent Douzou,
professeur des universités, et Tristan Lecoq, Inspecteur général de l’Éducation nationale, un
livre et un espace pédagogique en ligne vont ainsi voir le jour. Des historiens ont accepté de
faire état de leurs recherches les plus récentes dans un ouvrage et des enseignants ont, quant à
eux, relevé le défi de proposer des éléments de mise en œuvre des programmes et de concevoir
des études de documents librement accessibles en ligne sur des thèmes aux enjeux complexes.
Nous vous tiendrons informés de cette parution dans La Lettre de septembre prochain.
1 2
3 4 5
SOMMAIRE
I
La Lettre de la Fondation de la Résistance n° 85 - juin 2016
La Résistance alsacienne
Dossier thématique
suite en page 6
Affiche allemande
Hinaus mit dem Welschen Plunder
Dehors le fatras français »).
Cette célèbre affiche apposée en Alsace en
mai 1941, résume tout le projet nazi concernant
les deux départements annexés, symbolisés
par la flèche de la cathédrale de Strasbourg.
C’est d’une part la germanisation, qui implique
la disparition de toute trace de la culture
française : le coq gaulois, le béret basque,
l’armée française (casque du poilu, képi de
l’officier) et la littérature, représentée par deux
ouvrages antigermaniques qui ont décrit l’Alsace
au temps de la première annexion : le roman
de René Bazin Les Oberlé, publié en 1901 et
le plus connu des albums pour la jeunesse de
Jean-Jacques Waltz, dit Hansi. Mais c’est aussi,
implicitement, la nazification, avec l’abolition
de la République (buste de Marianne) et de la
presse de gauche : L’œuvre était entre les deux
guerres un des principaux titres de la presse
française radicale socialiste.
L’Alsace à l’épreuve du nazisme
Par Marie-Claire Vitoux, maître de conférences émérite
à l’université de Haute-Alsace
Ce dossier thématique est une étude régionale de la Résistance dans un territoire
au régime d’occupation très spécifique par rapport au reste du territoire français.
Il traite de la « résistance alsacienne » au sens collectif, celle des Alsaciens qui se
sont consacrés à la libération de leur région annexée, en Alsace mais aussi, parfois, de
l'extérieur. Bien d’autres Alsaciens ont œuvré sur le reste du territoire français dans
les grands mouvements ou réseaux de résistance.
E
n juin 1940, l’annexion de fait de l’Alsace à
l’Allemagne est accomplie. L’imposition de l’ordre
nazi y est immédiate, brutale et globale. Il s’agit de
réaliser non pas une simple occupation militaire mais
bien la nazification d’une province allemande. Le sort
de l’Alsace est ainsi radicalement différent de celui
imposé au reste de la France : les nazis ne veulent pas
obtenir la simple obéissance des Alsaciens, ils veulent
emporter leur adhésion.
Administrativement, les deux départements
alsaciens sont intégrés, avec le Land allemand de Bade,
dans le Gau Oberrhein placé sous l’autorité du gauleiter
Robert Wagner, tandis que le département de la
Moselle, qui avait formé le Reichsland avec l’Alsace
de 1871 à 1918, est rattaché au Gau Westmark avec
le Palatinat et la Sarre (gauleiter Bürckel).
Les expulsions des Français de l'intérieur, des
francophiles, des communistes et des juifs durant l’été
et l’automne 1940 privent la province d’une bonne
partie de ses cadres. La prise en mains de ceux qui
restent et de ceux qui sont revenus après l’évacuation
de 1939 se déploie immédiatement et dans tous les
aspects de la vie quotidienne.
Une région germanisée et nazifiée
Le réseau du parti nazi (NSDAP) contrôle de
façon particulièrement serrée les Alsaciens : l’Opferring
(organisation de solidarité) qui prépare l’ouverture
du parti aux Alsaciens, le maillage de surveillance
des habitants par le réseau des Blockleiter, Zellenleiter,
Ortsgruppenleiter, le serment de fidélité à Hitler
imposé à tous les fonctionnaires et qui provoque une
grave crise de conscience chez beaucoup, etc. La lutte
contre l’influence française va jusqu’au ridicule mais
s’appuie sur une brutale répression : germanisation
des noms et prénoms, interdiction du port du béret
basque, interdiction de parler français, pour ne citer
que quelques exemples de ces mesures vexatoires.
Les fautes sont punies lourdement, en particulier
par l’internement au camp de « rééducation » de
Schirmeck-Vorbrück. En complément de cette lutte
anti-française, la propagande germanique et nationale-
socialiste se déploie dans les défilés où la participation
est obligatoire, dans les « cours de nazisme »
dispensés dans les associations nazies qui encadrent
la vie quotidienne et bien évidemment, à l’école, dans
la censure de la presse (le Tagsblatt de Mulhouse est
surnommé « le tas de blagues »), dans le contrôle des
loisirs et de la culture, etc. Pour marquer de façon
indiscutable l’appartenance de l’Alsace à l’espace
allemand, le gauleiter Wagner y ouvre le camp
de concentration le plus occidental du système
concentrationnaire nazi, celui du Struthof.
La mesure la plus douloureusement vécue par la
province est, cela ne fait aucun doute, l’enrôlement
des jeunes gens des deux sexes, voire des très
jeunes, dans l’effort de guerre allemand : la Hitler
Jugend (obligatoire à partir de janvier 1942) et
le Bund Deutscher Mädel (association des jeunes
filles allemandes) préparent le Reichsarbeitsdienst
(obligatoire à partir de mai 1941) qui, lui-même,
débouche, pour les garçons, sur l’incorporation
dans la Wehrmacht (août 1942) voire dans la Waffen
SS (surtout à partir de 1944) et, pour les jeunes
filles, sur leur transplantation dans l’Allemagne
bombardée et, très souvent, dans la défense anti-
aérienne.
Conséquences sur la nature`
de la résistance alsacienne
La société alsacienne subit donc, à partir de
l’été 1940, la poigne de fer du système nazi. C’est
donc par comparaison avec la situation allemande
qu’il faut analyser les réactions de la société civile,
depuis l’adhésion à l’idéologie nazie jusqu’à son
refus absolu. L’historiographie allemande a forgé le
double concept de Widerstand ou résistance armée/
active et de Resistenz pour la résistance civile
(1)
. Les
réseaux de passeurs et de résistants sont, en Alsace,
particulièrement fragiles et rapidement démantelés.
Archives nationales, 72AJ/921
L’Alsace à l’épreuve du nazisme ................p. I
Par Marie-Claire Vitoux, maître de conférences
émérite à l’université de Haute-Alsace
La Résistance alsacienne .......................... p. II
et son rôle dans la Libération
Par Éric Le Normand, historien, coordinateur
du DVD-Rom La Résistance des Alsaciens
Le Front de la Jeunesse d’Alsace (FJA) ....p. V
Par Mireille Hincker, déléguée générale
honoraire du Souvenir Français pour le Bas-Rhin,
avec la collaboration de Jacqueline Pfohl
Le drame de Ballersdorf .......................... p. VI
Par Frédéric Stroh, doctorant
en histoire contemporaine
Bernard Metz .........................................p. VII
Par Marie-Noèl Diener-Hatt,
avec la collaboration de Jean-Baptiste Metz
Pour en savoir plus ................................p. VIII
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