Développements récents des Lasers à Electrons Libres

Principe du LEL
Un laser est un amplificateur d’ondes électromagné-
tiques. Le milieu amplificateur d’un LEL est constitué d’un
faisceau d’électrons de haute énergie, soumis à une force
périodique transverse à sa direction de propagation. Cette
perturbation périodique est réalisée par ce que l’on appelle
un « onduleur », constitué d’un champ magnétique trans-
verse alterné. La fréquence des ondes à laquelle il peut y
avoir amplification ne dépend que de l’énergie des électrons
et de la période de l’onduleur. On peut comprendre son
mécanisme comme résultant de la somme des ondes émises
par l’ensemble des électrons : à chaque oscillation dans
l’onduleur, un électron émet du rayonnement dit « synchro-
tron » et, à la fin de son passage dans l’onduleur, il a émis
un train d’onde. Si tous les électrons sont en phase, tous les
trains d’onde émis le sont également et le rayonnement
devient cohérent : on obtient une émission laser.
Un amplificateur d’ondes électromagnétiques peut sou-
vent être traité en mécanique classique comme pour les
tubes électroniques, tels le klystron ou le magnétron qui ali-
mente notre four à micro-ondes. Une telle analyse est pos-
sible avec le LEL, car le système a accès à un quasi-conti-
nuum d’états (certains effets quantiques peuvent néanmoins
apparaître, que nous ne discuterons pas ici). « L’inversion de
population », caractéristique des lasers et qui permet l’exis-
tence d’un gain d’amplification supérieur à 1, est toujours
réalisée puisque les électrons ont accès à ce quasi-conti-
nuum d’états libres d’énergies inférieures à la leur. En fait,
le LEL est très proche de la physique des accélérateurs.
L’approche classique permet également de bien comprendre
physiquement les concepts en jeu.
Voyons maintenant un peu plus en détail le principe de
son fonctionnement, illustré en figure 1. Le LEL possède
trois particularités essentielles : a) Le LEL utilise des élec-
trons de haute énergie qui produisent un considérable effet
Doppler (décalage vers le « bleu ») ce qui permet de rac-
courcir la longueur d’onde émise. b) Le couplage entre le
champ électromagnétique et les électrons est assuré par une
structure périodique transverse (« onduleur »). c) La mise
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Développements récents
des Lasers à Electrons Libres
Le Laser à Electrons Libres (LEL) est apparu il y a une vingtaine d’années, suscitant un vif intérêt de la part de
la communauté scientifique : son milieu actif, des électrons libres, différent de ceux des lasers habituels
(atomique & moléculaire), rend possible une variation continue de la longueur d’onde et permet aussi d’envisager
des puissances très élevées. Aujourd’hui, les LEL émettant dans l’infrarouge sont utilisésquotidiennement, tandis
que les recherches se poursuivent pour couvrir le domaine spectral qui s’étend de l’ultraviolet aux rayons X. Le
LEL pourrait ainsi succéder aux anneaux de stockage dédiés au rayonnement synchrotron et constituer les sources
dites de 4ème génération, la 3ème génération étant constituée des anneaux les plus récents tels que SOLEIL.
Article proposé par :
Jean-Michel Ortega, orte[email protected], Laboratoire pour l'utilisation du rayonnement électromagnétique (LURE), CNRS/Université
Paris Sud.
Quanta et photons
Figure 1 - Principe du LEL et de la cohérence du rayonnement par la for-
mation des micropaquets : un faisceau d’électrons (en bleu) de forte éner-
gie parcourt une structure magnétique périodique (« l’onduleur ») dont le
champ magnétique périodique, de période λ0, (en vert) fait osciller les par-
ticules autour de leur axe de propagation (ligne bleue) et leur fait émettre
de la lumière synchrotron (en rouge). Grâce à un processus complexe
détaillé dans l’encadré, une modulation périodique de densité d’électrons
se forme progressivement le long de l’onduleur conduisant à une mise en
phase des trains d’onde émis par chaque électron. Un rayonnement lumi-
neux cohérent est ainsi obtenu par addition des amplitudes des trains d’on-
de individuels.
phase, nécessaire au LEL, des trains d’onde émis par les dif-
férents électrons est assurée par le groupement en micro-
paquets des électrons, provoqué par l’action conjuguée de
l’onduleur et de l’onde stimulatrice. Les deux premiers
points (a&b) s’appliquent aussi bien au rayonnement syn-
chrotron qu’au LEL. En fait, le LEL n’est rien d’autre que
du rayonnement synchrotron « cohérent ». Cette cohérence
apparaît (point c) sous l’influence du groupement des élec-
trons.
L’effet Doppler relativiste : l’antenne en mouvement
On peut comprendre qualitativement le rayonnement
synchrotron à partir du concept de l’antenne « relativiste » :
une antenne fixe, vibrant à une fréquence νi, émet à une
longueur d’onde : λi=ci. Pendant un temps Tdéterminé,
cette antenne émet donc un train d’onde composé d’un cer-
tain nombre de périodes. Ce train est localisé dans la zone
de l’espace comprise entre l’extrémité de l’antenne et le
« mur » situé à une distance de l’antenne égale à cT
(c, vitesse de la lumière). Imaginons que cette antenne se
déplace. Elle vibre toujours à la même fréquence et, donc, le
nombre de longueurs d’onde émises durant le temps Tne
varie pas. Le train d’onde commence toujours à la position
de l’antenne et finit sur le mur puisque la vitesse de la
lumière est restée égale à cdans le référentiel de l’observa-
teur (hypothèse relativiste) : ceci signifie que le train
contient toujours le même nombre de périodes quelle que
soit la position de l’antenne. Lorsque la vitesse de l’antenne
devient très proche de celle de la lumière, le train d’onde est
littéralement « écrasé » sur le mur relativiste... et la longueur
d’onde émise peut devenir arbitrairement petite. Elle dépend
de la vitesse de l’antenne (antenne constituée en pratique
dans le LEL par un électron), laquelle va tendre asymptoti-
quement vers clorsqu’on l’accélère (dans le cas du
synchrotron SOLEIL, par exemple, la vitesse des électrons
s’approche de celle de la lumière à environ
108=1/100000000 près !). On peut ainsi produire du
rayonnement à des longueurs d’onde très courtes, dans les
rayons X, par exemple : c’est le principe du rayonnement
synchrotron (lequel se produit aussi pour toute trajectoire
non uniforme d’un électron relativiste).
L’onduleur
On ne sait pas réaliser des antennes émettant à des fré-
quences très élevées (dans la gamme du visible ou pour celle
des rayons X). En revanche, on sait propager une antenne à
une vitesse relativiste en accélérant des électrons libres,
donc extrêmement légers, à une vitesse très proche de c, puis
en les faisant osciller transversalement autour de leur trajec-
toire moyenne au moyen d’un onduleur (de période λO=
quelques cm en pratique). Dans celui-ci, il est possible de
calculer la valeur de la longueur d’onde émise λR:
λR=λO(c/vz1)
=λO(1vz/c) vzest la vitesse
longitudinale de la particule.
Cette expression est similaire à celle obtenue dans le
cas de l’antenne (figure 2). On exprime souvent λRen
fonction du paramètre γ(γ =E/mc2
=E(MeV)/0.511
pour un électron) et du paramètre Kcaractérisant le
champ de l’onduleur (K= Cste Boλo
=Boλo Boest le
champ magnétique exprimé en Tesla et λOen cm) :
λR
=λO(1+K2/2)2γ2.
Pour des énergies allant de 5 à 5000 MeV, le terme γ2
varie entre 102et 108. Donc, l’utilisation de faisceaux
d’énergie élevée permet de déplacer la longueur d’onde
émise, des quelques cm de période de l’onduleur à quelques
Angströms ou moins ! Le domaine spectral que l’on peut
balayer est déterminé par l’énergie et le paramètre K. Ce
paramètre Kvarie typiquement de 1 à quelques unités. Le
domaine spectral dépend donc en premier lieu de l’énergie et
les variations de K(champ magnétique) permettent d’effec-
tuer les changements continus et fins de longueur d’onde.
Les énergies vont de quelques MeV pour l’infrarouge à
quelques GeV pour les rayons X. On utilise donc des accé-
lérateurs de taille importante : typiquement 10 m pour l’in-
frarouge, plusieurs centaines de mètres pour les anneaux de
rayonnement synchrotron ou les projets de lasers à rayons X.
Leur coût est élevé mais est justifié par leurs performances
exceptionnelles (accordabilité en longueur d’onde sur une
grande gamme et brillance spectrale).
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Figure 2 - Principe de l’effet Doppler relativiste : la lumière se propage à
la même vitesse, c, dans tout référentiel, en particulier celui de l’observa-
teur. La longueur d’onde devient : λ
=λι(1v/c).
Condition d’accord de phase et groupement
des électrons
Nous venons de décrire le processus d’émission de rayon-
nement synchrotron par des électrons se propageant dans un
onduleur. Les centres de rayonnement synchrotron exploi-
tent ainsi des accélérateurs circulaires de quelques GeV, sur
lesquels on insère le plus de sections droites possibles conte-
nant des onduleurs (un rayonnement de même type, quoique
moins brillant, est émis également dans les aimants de cour-
bure qui défléchissent la trajectoire des électrons dans l’an-
neau). Dans le LEL on produit, en plus, du rayonnement sti-
175
Quanta et photons
mulé. La stimulation peut être due au rayonnement syn-
chrotron lui-même, éventuellement stocké dans une cavité
optique, ou obtenue grâce à un laser extérieur. Il est alors
possible d’obtenir une amplification très importante du
rayonnement synchrotron : de 6 à 8 ordres de grandeurs.
Grâce à ce mécanisme d’amplification par stimulation, le
LEL apparaît donc comme une source d’avenir même si sa
réalisation est délicate comparativement au rayonnement
synchrotron. Il nécessite des accélérateurs spécialement
conçus et construits à cet effet. A l’heure actuelle, le rayon-
nement synchrotron est en phase d’exploitation alors que le
LEL (sauf dans l’infrarouge) en est plutôt au stade de la
recherche et du développement.
Revenons sur le processus de stimulation. Il faut se rap-
peler que dans tout laser, « stimuler » l’émission de lumière
revient à mettre en phase les différents émetteurs (atomes ou
ici électrons) de manière à ce que les amplitudes émises
s’additionnent. Un tel rayonnement est souvent appelé
« émission cohérente ». La cohérence est obtenue en grou-
pant les électrons en petits paquets, séparés chacun par une
distance égale à la période de l’onde électromagnétique que
l’on veut amplifier. Lorsque ce « micro-groupement » est
réalisé, tous les électrons sont en phase, la différence de
phase entre 2 paquets quelconques étant alors un multiple
de 2π(voir figure 1). Une particularité du LEL réside dans
le fait que les électrons ne gardent pas une phase fixe par
rapport à la lumière : celle-ci se propage dans le vide et sa
vitesse est donc toujours supérieure à la vitesse de l’élec-
tron. Il se produit ainsi un glissement perpétuel de phase
entre les paquets d’électrons émettant le rayonnement syn-
chrotron et ce dernier. Cependant, il est possible de fixer ce
glissement à une valeur égale à un multiple de 2πlorsque
l’électron a parcouru une distance égale à un nombre entier
de périodes de l’onduleur. On peut montrer qu’il se produit
alors une auto-organisation du paquet conduisant au grou-
pement désiré (voir encadré). Ce point est un peu subtil,
mais possède le mérite de pouvoir être compris « classique-
ment ». Deux cas sont possibles suivant la valeur du gain
optique que l’on sait produire : a) Le gain n’est pas suffisant
pour obtenir la saturation de l’amplification en un seul pas-
sage dans l’onduleur : on a recours à une cavité optique,
c’est-à-dire à de l’amplification multi-passages. On réalise
un oscillateur laser (cas du LEL proprement dit). b) Le gain
est suffisant pour obtenir le meilleur groupement possible
en 1 seul passage (« SASE = Self Amplification of Sponta-
neous Emission »)
Physiquement, le LEL et le SASE sont des phénomènes
identiques. Cependant le SASE demande un faisceau
d’électrons de plus haute qualité et un onduleur plus long
afin d’obtenir la saturation de l’amplification en un seul pas-
sage. Il tend également à être beaucoup plus instable qu’un
oscillateur car la cavité optique dans un LEL permet d’al-
longer considérablement la longueur de cohérence du laser
et d’obtenir une bonne stabilité en longueur d’onde et en
intensité. En revanche, le SASE ne nécessite pas de miroirs,
ce qui est un énorme avantage dans le domaine des courtes
longueurs d’onde (domaines XUV et X), où l’on ne sait pas
réaliser de miroirs performants.
Etant donné que les longueurs d’onde harmoniques du
fondamental sont également résonnantes, on peut utiliser cet
effet, soit, pour obtenir le laser à ces longueurs d’ondes plus
courtes sans avoir à augmenter l’énergie des particules (dif-
ficile en pratique), soit, recueillir et éventuellement ré-
amplifier le rayonnement des harmoniques, rendu cohérent
par un LEL ayant réalisé le groupement des électrons : cette
technique semble la plus prometteuse à l’heure actuelle
pour réduire la bande passante à une valeur plus intéressante
(celle du SASE est limitée à environ 1% au minimum).
Conditions d’obtention du LEL
Bien que le processus d’amplification tende à se produire
spontanément, il faut préparer le faisceau d’électrons, l’on-
duleur et la cavité optique avec un soin particulier si l’on
veut obtenir un LEL. En pratique, il faut le plus souvent
construire une installation spécialement conçue à cet effet,
dont le coût augmente avec l’énergie des photons que l’on
veut produire. Plus la longueur d’onde que l’on veut
atteindre est courte et meilleure doit être la « qualité » du
faisceau d’électrons : grossièrement, son étendue (dSd
dS représente l’élément de surface et dl’élément angu-
laire) doit être sensiblement égale à celle du faisceau
optique (
=λ2) que l’on veut produire. Cette condition
devient très difficile à remplir dans le domaine des rayons X
et a contribué à stimuler la recherche sur les faisceaux
d’électrons de haute énergie. La présentation détaillée des
accélérateurs utilisés pour le LEL sort néanmoins du cadre
de cet article.
Historiquement, la faisabilité du LEL a été démontrée
par l’équipe de J. Madey à Stanford en 1978 et a entraîné un
grand enthousiasme dans la communauté des chercheurs
travaillant sur accélérateurs. Dans la décennie 1980, les
USA ont énormément investis dans le LEL dans la perspec-
tive de la « guerre des étoiles » avec fort peu de résultats. En
parallèle, un certain nombre d’équipes, notamment celle de
J. Madey, réalisaient les premiers centres serveurs dans le
domaine spectral de l’infrarouge. D’autres équipes poursui-
vaient la réalisation de prototypes aux courtes longueurs
d’onde en utilisant soit des cavités optiques sur accéléra-
teurs circulaires soit du SASE sur accélérateurs linéaires. La
situation et les perspectives du LEL dans les différents
domaines spectraux sont maintenant plus claires. C’est ce
que nous allons résumer maintenant.
Les différents types de LEL
Le LEL infrarouge
Un LEL est plus facile à réaliser à grandes longueurs
d’onde et il est moins coûteux, car les énergies de faisceaux
sont plus basses : 5 à 50 MeV pour l’infrarouge. Ceci peut
être réalisé avec un accélérateur de quelques mètres de lon-
gueur, mais qui doit néanmoins être blindé vis à vis des
radiations ionisantes. De fait, il existe un manque évident de
lasers puissants et accordables en longueur d’ondes dans
l’infrarouge (voir figure 3). C’est pourquoi un certain
nombre de LEL infrarouge fut construit dans le monde et
une petite dizaine d’entre eux constituent des centres ser-
veurs pour l’utilisation. En Europe, FELIX et CLIO offrent
plus de 2500 heures/an de faisceau, attribués par des comi-
tés de programme selon le mérite scientifique des projets
proposés.
Ces LELs offrent une large gamme spectrale, une accor-
dabilité aisée ainsi que de fortes puissances crêtes et des
impulsions courtes temporellement. En utilisant des miroirs
métalliques, ces LEL sont continûment accordables, d’un
facteur 2 à 3, pour chaque énergie des électrons (laquelle
peut être changée par « sauts »). La durée d’impulsion peut
être ajustée entre typiquement 0,5 et 5 ps, selon que l’on
désire effectuer des expériences de « spectroscopie » ou des
expériences « résolues en temps ». Ce réglage, qui est une
caractéristique particulière du LEL sur accélérateur linéaire
pulsé, est obtenu en modifiant la longueur de la cavité
optique, qui détermine le retard entre l’impulsion lumineuse
stockée dans la cavité optique et le paquet d’électrons.
Les applications de ces lasers sont très variées. Elles
incluent notamment des études de surfaces et d’interfaces
par des techniques non-lineaires (voir l’article sur la somme
de fréquences dans Images de la Physique 2001), des études
de dynamique moléculaire et de dynamique de nanostruc-
tures (article dans Images de la Physique 1997). Une des
applications les plus récentes est la spectroscopie d’ions
moléculaires en phase gazeuse par dissociation multiphoto-
nique (MPD). Cette technique permet l’identification d’une
absorption par la mesure des produits de dissociation avec
des spectromètres de masse ultrasensibles. La non-linéarité
du processus requière la forte puissance d’un LEL. Plu-
sieurs centaines de publications décrivent les résultats obte-
nus dans ces centres serveur. A l’heure actuelle, les centres
serveurs LEL dans le domaine infrarouge tendent à devenir
des centres « multilasers », où divers types de lasers à
impulsions courtes synchronisés avec le LEL permettent des
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L'onduleur assure le couplage et la mise en phase des électrons avec la lumière
1. Il assure le couplage de l’onde optique avec les particules en
imprimant à celles-ci une vitesse transverse périodique, paral-
lèle au champ électrique de l’onde (voir figure). Ainsi l’électron
va pouvoir travailler dans le champ électrique de l’onde et lui
céder de l’énergie lorsqu’un accord de phase est réalisé.
2. Il assure l’accord de phase entre l’électron et l’onde à cer-
taines longueurs d’onde ainsi que la mise en phase (groupe-
ment) de l’ensemble des électrons. La longueur d’onde, λR,
décrite précédemment, correspond en fait à l’accord de phase
entre les particules et l’onde : lorsque l’électron décrit une
période de l’onduleur il a été dépassé par exactement une
période lumineuse et par les N périodes du train à la fin de
l’onduleur de N périodes. Donc, lorsque s’inverse la vitesse
transverse de l’électron, acquise dans l’onduleur, le champ
électrique de l’onde s’inverse également et le produit des deux
garde un signe constant ! Autrement dit, le travail de l’électron
dans le champ électrique de l’onde conserve le même signe
dans tout l’onduleur, ce qui réalise bien la condition de phase,
sans qu’il y ait synchronisme. Ceci est vrai pour les longueurs
d’onde harmoniques égales à λR/n(n impair). Il s’ensuit deux
conséquences :
Les longueurs d’onde où l’émission synchrotron est maxima-
le sont λRet ses harmoniques (l’électron travaille dans son
propre champ). Cet effet est utilisé dans les centres de rayon-
nement synchrotron pour obtenir un spectre de rayonnement
relativement étroit à des longueurs d’onde que l’on peut
choisir.
– Le rayonnement synchrotron émis à ces longueurs d’onde
produit un effet sur le paquet d’électrons. Pour mieux com-
prendre, imaginons que l’on envoie un rayonnement à la lon-
gueur d’onde λRsur le paquet d’électrons circulant dans
l’onduleur : chaque électron va perdre ou gagner de l’éner-
gie selon sa phase initiale par rapport à ce rayonnement. Les
électrons plus rapides vont tendre à rejoindre ceux qui ont été
ralentis qui se trouvent devant eux. On obtient ainsi progres-
sivement une modulation de densité longitudinale du fais-
ceau d’électrons à la période λR: cet effet est le processus
d’émission stimulée du LEL. En pratique, c’est le rayonne-
ment synchrotron émis par les électrons qui va initier le pro-
cessus : les électrons sont soumis au champ du rayonnement
synchrotron émis par ceux qui sont derrière et qui se propa-
ge plus vite qu’eux. Comme dans tout laser, c’est bien le bruit
de photons qui déclenche le phénomène « d’avalanche »
qu’est l’émission stimulée.
Encadré
Figure - Dans l’onduleur, à la résonance, lorsque l’électron a parcou-
ru une période λode l’onduleur, l’onde lumineuse a parcouru
o+λR): l’électron a donc acquis un déphasage de 1 période
( =2π) par rapport à l’onde lumineuse. Le travail de la particule
dans le champ est proportionnel à E·vx=Cste ·cos(2πziR)zi
est la position d’un électron donné, E, le champ électrique de l’onde et
vx, la vitesse transverse de l’électron.
=> Les électrons subissent une modulation de vitesse, à cause de leur
propre travail dans le champ électromagnétique qu’ils ont émis, avec la
périodicité λR, ce qui provoque leur groupement avec cette périodicité.
expériences du type « pompe-sonde » en associant les
domaines spectraux de l’ultraviolet, du visible et de l’infra-
rouge proche et lointain.
Le LEL sur anneau de stockage
Dans les débuts du laser à électrons libres, les LELs sur
anneaux apparurent comme très prometteurs car ils permet-
tent d’utiliser des accélérateurs construits pour le rayonne-
ment synchrotron (RS). Ceci réduit considérablement l’in-
vestissement nécessaire, et permet de coupler le LEL avec le
RS pour des expériences pompe-sonde pour suivre la dyna-
mique des systèmes excités. Dans de tels accélérateurs, le
faisceau d’électrons est recirculé tour à tour. L’efficacité du
système d’accélération est donc plus élevée, car on a peu
d’énergie à fournir au faisceau, comparé à un accélérateur
linéaire. C’est sur l’anneau ACO d’Orsay que fut réalisé le
premier LEL sur anneau et dans le visible en 1983 par une
équipe franco-américaine. Cependant, l’onde lumineuse
n’interagit pas avec un paquet « neuf » comme pour les
LELs implantés sur accélérateur linéaire, mais avec le même
paquet qui garde la mémoire de l’interaction laser sur un
bon nombre de tours, ce qui réduit le rendement du laser et
augmente la durée de l’impulsion. Le LEL sur anneau a été
limité jusqu’à présent au domaine UV, mais les premiers
résultats à longueur d’onde plus courte (80 nm) commen-
cent à apparaître. Cependant, c’est sur les accélérateurs
linéaires que le LEL à courte longueur d’onde est le plus
prometteur et fait l’objet de nombreux projets à travers le
monde.
Le LEL sur accélérateurs linéaires
A coté des LEL infrarouge fonctionnant sur des petits
accélérateurs linéaires, la communauté scientifique s’inté-
resse maintenant au LEL à courte longueur d’onde fonction-
nant sur des machines de beaucoup plus haute énergie : 500
MeV à 20 GeV, selon l’objectif. Il existe deux principales
difficultés à l’obtention de LEL à courtes longueurs d’onde :
a) L’absence de miroirs possédant une réflectivité suffisante
couvrant une large gamme spectrale. b) La difficulté de réa-
liser des faisceaux d’électrons de qualité suffisante.
Pour résoudre la première difficulté, on a imaginé de réa-
liser des LEL fonctionnant sans cavité optique (donc sans
miroirs), c’est à dire en mode SASE. L’idée est séduisante
sauf que la qualité du faisceau d’électrons doit être d’autant
meilleure, ce qui augmente la deuxième difficulté : en parti-
culier il faut un courant d’électrons d’intensité crête très éle-
vée (> 1 kA), une divergence très faible du faisceau d’élec-
trons (de l’ordre de 0.1 µrad) et un onduleur très long,
jusqu’à une centaine de mètres, et d’une précision inégalée.
Seuls les accélérateurs linéaires sont éventuellement
capables de performances compatibles avec le SASE. En
effet, les excitations dues à l’émission de grandes quantités
de rayonnement synchrotron dans les anneaux de stockage
limitent les performances de ceux-ci. En revanche, les per-
formances des accélérateurs linéaires peuvent être « arbi-
trairement » bonnes (en théorie) même si celles demandées
constituent déjà un véritable défi technologique. Ce défi est
particulièrement important dans le domaine des rayons X
pour lesquels on doit atteindre des énergies de 10 à 20 GeV,
ce qui rend l’accélérateur très coûteux. De plus, ces accélé-
rateurs peuvent fournir des impulsions d’électrons d’une
durée de l’ordre de quelques centaines de femtosecondes, ce
qui est particulièrement intéressant pour de nombreuses
applications. Certaines « astuces » proposées pourraient
même permettre de réaliser des impulsions « attosecondes »
(longueur du train d’onde inférieure à 0,3 µm).
Des progrès notables ont été accomplis ces dernières
années, qui ont permis à une expérience menée à Hambourg
(laboratoire DESY) d’atteindre la saturation de l’amplifica-
tion à la longueur d’onde de 80 nm. Cette expérience résulte
de la construction d’un prototype d’accélérateur financé par
les deux communautés de physique des particules et rayon-
nement synchrotron. Le laboratoire DESY a actuellement
les moyens de prolonger l’accélérateur et l’onduleur afin de
tenter d’atteindre la longueur d’onde de 6 nm. Quoiqu’il en
soit, il ne fait pas de doute que le domaine VUV est d’ores
et déjà accessible par le SASE et des expériences d’applica-
tion sont en cours. Il reste à voir dans quelle mesure on peut
atteindre une stabilité suffisante avec une telle source. C’est
pourquoi beaucoup de travaux portent sur la possibilité
« d’injecter », c’est-à-dire de démarrer, le SASE avec un
premier faisceau très monochromatique : ce pourrait être un
premier faisceau SASE que l’on aurait filtré (« self-see-
ding »), les harmoniques d’un SASE que l’on aurait lui-
même injecté avec un laser « classique » (par exemple des
177
Figure 3 - Domaine spectral du LEL CLIO et d’Oscillateurs
Paramétriques Optiques – lasers infrarouge « classiques » – (des OPA –
Amplificateurs Paramétriques Optiques – pompés par Ti :S existent jusqu’à
environ 20 µm avec des puissances plus faibles). A une énergie donnée, le
laser est accordable en longueur d’onde de façon continue par balayage du
champ magnétique de l’onduleur. Un changement d’énergie demande envi-
ron 1 heure.
Quanta et photons
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