Édition 2015 www.bestofveterinaire.com Proceedings -2- Sommaire / Vendredi 13 mars NAC 6 Christophe Bulliot : Principales chirurgies du furet. 6 Charly Pignon : Principales chirurgies du lapin. 6 Florent Modesto : Principales chirurgies des rongeurs. Médecine interne 6 Patrick Lecoindre : Cas cliniques en gastroentérologie du chien et du chat : quelques aspects des maladies de l’estomac. 6 Suzy Valentin : Les pièges à éviter en gastroentérologie canine et féline. 6 Patrick Lecoindre : Cas cliniques en hépatologie féline et canine: échographie/cœlioscopie : deux examens complémentaires en hépatologie. / Samedi 14 mars P.04 P.06 P.09 P.11 6 Patrick Devauchelle : Radiothérapie: quelles options pour quelles indications ? 6 Pierre Moissonnier : Règles de la chirurgie oncologique. 6 Stéphane Doliger : Stratégies anti-cancéreuses par ciblage du métabolisme énergétique : applications chez l’homme et en médecine vétérinaire. Symposium 6 Dr Pierre May : Cas Cliniques en Phytothérapie Médecine interne P.13 P.14 Ophtalmologie Gestion / management Cancérologie 6 Minh Huynh : Principales chirurgies chez les oiseaux. 6 Lionel Schilliger : Principales chirurgies chez les squamates. 6 Norin Chai : Principales chirurgies chez les tortues. 6 Pauline De Fornel : Hyperthyroïdie féline : quels traitements choisir ? 6 Ghita Benchekroun et Olivier Dossin : Pancréatite et diabète sucré autour de cas cliniques. Symposium CEVA 6 Marie-Laure Brongniart : Les facteurs de perturbation de la communication interpersonnelle 6 Christian Iehl : La communication clinique : théorie et pratique ; application à l’exercice en clientèle. 6 Marie-Laure Brongniart : Gestion de 2 types de personnalités difficiles au sein de l’équipe : le passif agressif et l’anxieux agressif. NAC P.20 P.21 P.22 P.26 P.29 P.32 6 Hervé Laforge : Urgences oculaires, ce qu’il faut savoir pour une bonne prise en charge de son patient. 6 Laurent Bouhanna : Luxation de la glande nictitante : traitement chirurgical. 6 Thierry Azoulay : Protocoles de prise en charge d’une cataracte, d’une luxation du cristallin et d’un glaucome. Comportement 6 Valérie Dramard : Comment gérer les chiens agressifs : éléments diagnostiques, thérapies comportementales, traitements (hors évaluation comportementale et aspect juridique). 6 Muriel Alnot : Pour une optimisation optimale des phéromones chez les carnivores domestiques. 6 Jean-François Quinton & Valérie Dramard : Diminuer les signes de stress en organisant mieux l’environnement de vie chez le chat et les NAC « à poils » (lapin, cochon d’inde, hamster...) P.34 P.36 P.43 P.45 P.49 P.54 P.55 P.58 P.61 P.62 P.63 -3- Sommaire / Vendredi 13 mars Anesthésie réanimation 6 Paul Coppens : Conduites à tenir pour se sentir à l’aise lors d’une anesthésie Dermatologie 6 Dominique Heripret : Conduite à tenir face à une suspicion de dermatite atopique chez le chien Neurologie 6 Laurent Cauzinille : Attitude à avoir devant un épileptique qui ne répond pas correctement à la mise en place d’un traitement NAC 6 Christophe Bulliot : Conduite à tenir lors d’un larmoiement chez un lapin 6 Charly Pignon : Conduite à tenir face à une parésie des postérieurs chez un furet 6 Florent Modesto : Conduite à tenir en cas de crises convulsives sur un oiseau Biologie clinique 6 Cathy Trumel & Ghita Benchekroun : Les anémies hémolytiques à médiation immune primaire du chat / Samedi 14 mars P.64 P.74 P.77 P.79 Chirurgie 6 Pierre Moissonnier : Vidéo et discussion Les boiteries orthopédiques et neurologiques 6 Claude Carozzo : TD pratique La thérapeutique des plaies par utilisation du pansement moderne NAC 6 Minh Huynh : Conduite à tenir en cas de détresse respiratoire aiguë chez un oiseau 6 Lionel Schilliger : Conduite à tenir face à une dyspnée chez un reptile 6 Norin Chai : Conduite à tenir face à une anorexie chez un reptile P.80 Cardiologie P.82 Médecines alternatives P.84 6 Valérie Chetboul : La PCA : synthèse et actualités 6 Michel Bolzinger & Philippe Zeppa : Approche des médecines alternatives au travers de conduites à tenir et de cas cliniques. P.85 P.86 P.89 P.91 P.99 P.101 P.104 Conférences sur la Grande Piste -4- Vendredi 13 mars 2015 Les principales chirurgies du furet Dr Christophe Bulliot Exercice Exclusif NAC Nandy (77) Les techniques chirurgicales utilisées chez le furet sont souvent analogues à celles pratiquées chez le chien et le chat mais de nombreuses interventions sont spécifiques à cette espèce. LA CHIRURGIE CUTANÉE Elle est moins fréquente que pour les autres espèces et repose sur des techniques analogues. Les principales indications sont le parage de plaie de morsure et l’exérèse de mastocytome, tumeur cutanée fréquente dans cette espèce. LA CHIRURGIE DE LA RATE La splénomégalie est fréquente chez le furet. Elle peut être d’origine physiologique ou réactionnelle suite à une infection ou une inflammation en relation avec le rôle dans l’hématopoïèse de cet organe dans cette espèce. Des tumeurs de la rate sont également rencontrées. La splénectomie est indiquée lors de tumeur et rupture de la rate notamment voire en cas de splénomégalie conséquente ne rétrocédant pas au traitements médicaux et induisant une gène pour l’animal par compression des autres organes abdominaux. Une incision sur la ligne blanche est pratiquée autour de l’ombilic, La rate est délicatement extériorisée, les vaisseaux sont ligaturés individuellement ou en plusieurs groupes. LA CHIRURGIE DU PANCRÉAS Elle est indiquée lors d’insulinome, tumeur fréquente chez le furet au-delà de l’âge de 4 ans. Un bilan préopératoire par échographie est indiqué pour repérer les principaux nodules mais une limite technique implique que la constatation de la réelle localisation et extension des tumeurs se fera lors de l’intervention par observation et palpation douce de l’organe. Une nodulectomie peut être réalisée à l’aide d’un ciseau à iridectomie. La pancréatectomie partielle de l’extrémité d’un lobe pancréatique est préférable. La glycémie doit être monitorée attentivement en per et post opératoire. LA CHIRURGIE DU FOIE Les lobectomies hépatiques sont indiquées lors de suspicion de tumeur hépatique, de cirrhose ou de polykystose avec une hypertrophie conséquente d’un lobe et à l’origine d’une compression des organes abdominaux. Un repérage de la vascularisation du lobe est effectué pour sa ligature en masse avant incision et exérèse du lobe. Une attention doit être portée à l’hémostase. La cholécystotomie est indiquée lors de calcul biliaire et la cholécystectomie lors de cholécystite importante ne rétrocédant pas aux traitements médicaux ou de suspicion de tumeur. Une dissection mousse permet d’individualiser la vésicule par rapport au foie. Le canal cystique est doublement ligaturé avant sa jonction avec le canal hépatique central. Canal et vésicule sont incisés et retirés. LA CHIRURGIE DES GLANDES SURRÉNALES Elle est indiquée lors de maladie surrénalienne avec suspicion de tumeur d’une glande surrénale. La glande surrénale gauche est positionnée dans la graisse rétro péritonéale médialement et crânialement au rein gauche. La glande surrénale droite est positionnée contre la veine cave caudale. Un bilan échographique de qualité est nécessaire pour mettre en évidence une éventuelle infiltration de la glande surrénale droite dans la veine cave. La chirurgie consiste en une dissection mousse autour de la glande et une ligature de la vascularisation. Lors d’atteinte bilatérale, l’exérèse totale d’une glande et partielle de la seconde est décrit. LA CHIRURGIE DE L’APPAREIL DIGESTIF Elle est avant tout représentée par la gastrotomie. Le furet est coutumier de l’ingestion de corps étrangers divers mais le faible diamètre de l’intestin est souvent un obstacle au passage de ces corps étrangers au-delà de l’estomac. La fréquence des occlusions digestives est relativement faible au regard de celle des corps étrangers. Les chirurgies digestives pour le traitement de tumeur sont plus rares. Les techniques de gastrotomie, entérotomie et entérectomie sont analogues à celles pratiquées chez le chat. Des cas de prolapsus rectaux sont rapportés notamment chez les jeunes lors de parasitisme digestifs (coccidiose et giardiose). En l’absence de lésion de la partie prolabée, une laparotomie est nécessaire pour la réduire par une traction douce et pour pratiquer une colopexie. Pour la réaliser, il convient de pratiquer 2-3 petites incisions de la couche séromusculeuse du colon descendant et du péritoine en regard pour ensuite les réunir face à face par des points simples (fil monofilament). Lors de lésions importantes du colon prolabé, une ablation des tissus nécrosés est nécessaire. il est possible d’introduire dans la lumière digestive un corps de seringue à insuline qui servira d’appui durant l’intervention. Pour limiter le glissement des tissus sur le corps de seringue, il est possible de traverser de part en part l’ensemble à l’aide d’aiguilles. Une incision est pratiquée sur une zone saine en s’appuyant sur le corps de l’aiguille. Les deux abouts de la muqueuse sont suturés par des points simples sur toute la circonférence du colon. Les aiguilles et le corps de seringue sont délicatement retirés et le colon réintroduit. Une colopexie peut compléter cette intervention notamment en cas de récidive. Conférences sur la Grande Piste -5- LA CHIRURGIE DE L’APPAREIL URO-GÉNITAL Il convient de rappeler le lien entre stérilisation chirurgicale et maladie surrénalienne dans cette espèce. La stérilisation de convenance du furet doit idéalement être pratiquée par des procédés chimiques (implant contraceptif). La stérilisation par ovariohystérectomie et castration seront essentiellement réalisées dans un cadre pathologique (métrite, tumeur ovarienne ou utérine, tumeur testiculaire). Les techniques sont analogues à celles employées chez la chatte. Pour la castration, une ligature en masse de la vascularisation et du conduit spermatique sur testicule découvert est réalisée ainsi qu’une suture cutanée de l’unique incision pratiquée entre les deux testicules. Les cas de cryptorchidie sont rares chez le furet et elle est généralement inguinale. Une exérèse de reliquat ovarien est parfois pratiquée chez des furets stérilisés très jeunes (avant l’âge de deux mois). Le reliquat se situe sur une corne utérine généralement laissée en place (ovariectomie seule souvent constatée sur les furets d’importation issus d’animalerie) ou dans la graisse caudale au rein. Le praticien doit rechercher la présence éventuelle de reliquats ovariens sur les mignons des deux cornes et dans la graisse caudalement aux deux reins. Une dissection mousse et une ligature de la graisse et de la vascularisation sont pratiquées. Les cystotomies sont rarement pratiquées chez le furet, peu prédisposé aux calculs urinaires. La technique chirurgicale est identique à celle utilisée chez le chat. Plusieurs types d’interventions peuvent parfois être pratiqués sur le pénis : urétrostomie en arrière de l’os pénien pour l’exérèse de calculs urinaires, réduction chirurgical d’un phimosis ou d’un paraphimosis, ablation d’une tumeur préputiale. La néphrectomie est indiquée lors de polykystose massive avec Vendredi 13 mars 2015 néphrommégalie, d’hydronéphrose et de tumeur rénale. La capsule rénale est délicatement incisée. Une dissection mousse permet de la séparer du rein. Une ligature de la vascularisation est pratiquée et le rein est retiré. L’ablation de l’uretère et sa ligature juste avant la vessie pour limiter le risque de mégauretère par reflux d’urine sont recommandés si réalisables. LES CHIRURGIES DIVERSES La caudectomie est indiquée lors de tumeur de l’extrémité de la queue (chordome et chondrosarcome). L’exérèse d’une glande anale pathologique (abcédée ou tumorisée) est parfois réalisée (l’ablation de convenance est interdite). Une incision cutanée avec précaution pour ne pas léser la glande est pratiquée verticalement sur 1 cm de longueur et à un demi centimètre latéralement à l’anus. Une dissection mousse est pratiquée autour de la glande pour l’individualiser. Le canal excréteur est repéré et ligaturé avant l’exérèse de la glande. Bibliographie Chai N., Beaufrere H., Bulliot C., Huynh M., Pignon C., Roman Y. et Schilliger L., Guide pratique de chirurgie des NAC, Ed Med Com 2014. Lewington J.H., Ferret husbandry, medicine and surgery. Ed Saunders, 2007. Quesenberry K and Carpenter J., Ferrets, rabbits and rodents clinical medicine and surgery. Ed Saunders, 2012. Conférences sur la Grande Piste -6- Vendredi 13 mars 2015 Chirurgie du lapin Charly Pignon DMV, Dip ECZM (Small Mammal) Chef du Service NAC d’Alfort Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort [email protected] Ablation partiel de canal auriculaire et trépanation de la bulle tympanique (PECALBO) INDICATIONS Une otite externe peut progresser et atteindre l’oreille moyenne. Cette infection inclus le tympan et la bulle tympanique. Une otite moyenne est très douloureuse pour le lapin. Celui-ci peut être présenté à la consultation pour abattement et anorexie. Une palpation de la base de l’oreille peut mettre en évidence une douleur aigue. Le diagnostic d’une otite moyenne s’effectue à l’aide d’un examen endoscopique. On note l’accumulation de pus dans le canal horizontal. Dans des cas plus grave, la radiographie ou mieux l’examen tomodensitométrique peut montrer une ostéolyse de la bulle tympanique. Le traitement médical est bien souvent décevant, nécessitant le recours à la chirurgie. TECHNIQUE CHIRURGICALE L’animal est anesthésié et placé en décubitus latéral. La base de l’oreille est tondue et préparée chirurgicalement. La peau est incisée à la base de l’oreille et la paroi latérale du conduit verticale est disséquée. Dans la plupart des cas, le conduit auditif est facilement identifié car il est déformé par la présence de pus. Le canal vertical est disséqué précautionneusement afin de ne pas le perforer et éviter de contaminer le site opératoire. Le canal vertical est complètement individualisé et séparé du pavillon auriculaire. La dissection au plus près du cartilage scutiforme prévient de la rupture accidentelle de la veine auriculaire rostrale et caudale. Un clamp est posé à l’ouverture du canal vertical pour éviter tout déversement de pus sur le site opératoire. Le canal horizontal est alors disséqué minutieusement jusqu’à sa jonction avec la bulle tympanique. Cette opération demande de la patience et du doigté car le nerf facial, les artères et veines auriculaires rostrales et caudales courent à la base du conduit auditif horizontal. Il est conseiller d’utiliser des « lone star retractors » afin d’écarter la peau et de faciliter la visualisation des tissus à disséquer. Le conduit auditif horizontal est sectionné à sa base. L’ostium de la bulle tympanique est visualisé et élargi en pratiquant une ostéotomie à l’aide d’un porte-aiguille où à l’aide d’une pince gouge (figure 6). Une fois que la bulle tympanique a été suffisamment ouverte, celle-ci est curetée doucement afin d’enlever le plus de pus possible. La bulle tympanique est ensuite flushée à l’aide de sérum physiologique tiédi. Le tissu cutané et sous cutané entourant le canal vertical est alors suturé avec des points simples au PDS 4.0. Les tissus entourant l’ouverture de la bulle tympanique sont marsupialisés en réalisant des points simples au PDS 4.0. SOINS POST OPÉRATOIRES L’animal est maintenu hospitalisé afin de le maintenir sous opioïdes. Il est rendu lorsqu’il présente une prise alimentaire spontanée, sous antibiotiques et analgésiques par voie systémique. Il est demandé au propriétaire de flusher la bulle tympanique deux fois par jour jusqu’à cicatrisation complète. L’animal est revu en visite de contrôle à une et deux semaines après la chirurgie. Les points sont retirés au cours du deuxième contrôle s’ils ne se sont pas résorbés. COMPLICATIONS Les risques liés à cette chirurgie sont une lésion du nerf facial, entrainant une hémiparalysie de la face, une lésion de l’appareil vestibulaire au cours du curetage de la bulle tympanique entrainant un syndrome vestibulaire et une hémorragie par lésion des veines ou artères auriculaire rostrales et caudales. Lobectomie hépatique INDICATIONS Mise à part les coccidioses, les pathologies hépatiques sont peu décrites sont peu décrites dans la littérature. Cependant des études d’autopsies mettent en évidence un certain nombre de néoplasies hépatiques, et récemment des torsions de lobe hépatiques ont été décrites. Dans le cas de néoplasie, les singes clinique sont souvent non spécifique (abattement, dysorexie) et bien souvent le diagnostic est orienté par la découverte d’élévation des paramètres hépatiques. Il est important de préparer sa chirurgie en réalisant une échographie abdominale permettant de bien mettre en évidence l’extension de la tumeur. Un bilan d’extension (radiographie thoracique et visualisation échographique des nœuds lymphatiques) est aussi essentiel dans la prise en charge médicale. La présentation clinique d’une torsion de lob hépatique est bien souvent celle d’un état de choc survenu de façon aigue. Dans ce cas aussi les paramètres hépatiques sont bien souvent élevés, et la réalisation d’une échographique permettra de mettre en évidence l’absence de vascularisation (utilisation du mode doppler) du lobe atteint. D’après les cas publiés aujourd’hui, l’atteinte du lobe caudé semble la plus fréquente. Dans ce cas, la réalisation d’une lobectomie totale est une urgence chirurgicale. Conférences sur la Grande Piste -7- TECHNIQUE CHIRURGICALE LOBECTOMIE PARTIELLE L’abdomen et la moitié du thorax du lapin sont tondus et préparés chirurgicalement. Une laparotomie crâniale est réalisée en initiant l’incision au niveau de l’appendice xyphoïde et en prolongeant cette incision sur environ 10cm afin de bien pouvoir écarter les bords de la paroi abdominale est de bien visualiser l’ensemble du foie. Celui-ci est inspecté dans son ensemble jusqu’à la base des différents lobes. Si une masse est mise en évidence à l’extrémité d’un lobe, alors une lobectomie partielle est indiquée. Celle-ci peut être réalisée avec une pince à agrafes automatiques. Cet instrument aussi utilisé pour la réalisation d’enterectomie permet de placer une double rangée d’agrafes de part et d’autre du trait de section qu’elle réalise, évitant ainsi tout saignement. Une autre technique appelée la technique de la guillotine consiste à poser une ligature avec un fil résorbable en amont de la partie du lobe à retirer, le sérer progressivement afin de réaliser une hémostase, et inciser l’extrémité du lobe à 5mm de la ligature afin que celle-ci ne glisse pas. Cette technique n’est possible que pour les masses présentes à l’extrémité d’un lobe hépatique. Pour des masses se localisé en bordure de lobe mais non à l’extrémité, il est possible d’utiliser une technique dérivée de la technique de la guillotine en utilisant plusieurs sutures se chevauchant les unes aux autres et qui traversent le parenchyme hépatique. Lorsque l’incision doit se faire sur une partie du lobe relativement épaisse, la capsule est incisée. Le parenchyme hépatique est lui aussi inciser sur sa circonférence mais l’incision est superficielle. L’extrémité du lobe hépatique est ensuite fracturée avec les mains ce qui permet de mettre en évidence les vaisseaux hépatiques qui sont généralement profonds. Ceux-ci sont coagulés à l’aide d’un électro-coagulateur bipolaire. Il est conseillé de positionner une éponge hémostatique sur le parenchyme sectionné afin de limiter les pertes sanguines. Cette technique cependant peut entrainer d’importantes pertes sanguines, il est donc recommandé de la réaliser uniquement sur des lapins pour lesquels lesquels un cathéter intraveineux a été placé et dont la pression sanguine peut être monitorée. La paroi musculaire est ensuite refermée à l’aide d’un surjet monobrin résorbable, puis d’un surjet intradermique et la peau est refermée avec de la colle cutanée. LOBECTOMIE TOTALE Lorsqu’une masse envahie la majorité d’un lobe hépatique ou lors d’une torsion de lobe hépatique, alors l’ensemble du lobe doit être retiré. Dans le cas d’une torsion hépatique, le lobe atteint ne doit surtout pas être détordu sous peine de voir les toxines accumulées dans le lobe être déverser dans la circulation générale et créer un choc endotoxémique. La préparation est la voie d’abord est la même que celle décrite précédemment. La technique la plus rapide consiste à utiliser une pince à agrafe automatique et positionner les agrafes au niveau du hile du lobe atteint. Une seconde technique consiste à utiliser un fil monobrin Vendredi 13 mars 2015 résorbable de for diamètre (PDS 1-0) au niveau du hile. La difficulté consiste à réussir à bien positionner la ligature. Il est conseillé de faire au préalable le nœud, de le faire glisser jusqu’au hile, et de le sérer en utilisant des pinces longues ou des porte aiguilles assez fin car le nœud se fait à l’intérieur de la cavité abdominale. Le hile est ensuite sectionné avec des ciseaux fins atraumatique (ciseaux de Stevens). La cavité abdominale est refermée comme décrit précédemment. SOINS POST-OPÉRATOIRE Le réveil d’un animal ayant subi une lobectomie peut être plus lent car un certain nombre de molécules anesthésiques possèdent une excrétion hépatique. Le lapin est maintenu sous perfusion et analgésie (opioïde et AINS) au moins 48 heures. Il est recommandé de réaliser un hématocrite toutes les 12 heures afin de vérifier l’absence de saignement au niveau du site chirurgical. L’animal est rendu au propriétaire à partir du moment où il est capable de s’alimenter tout seul sous analgésique et antibiotiques. COMPLICATIONS La plus fréquente des complications des chirurgies est l’hémorragie qui peut subvenir sur le site chirurgical ou si des lésions iatrogènes ont été faites par inadvertance. Il est donc important de surveiller l’hématocrite de l’animal et de réaliser une échographie abdominale de contrôle à la moindre chute d’hématocrite. Des bactéries anaérobiques peuvent se développer sur le moignon, dans le parenchyme hépatique devenu hypoxique, pouvant créer des péritonites. Il est donc recommandé de mettre les lapins ayant subi une chirurgie hépatique sous antibiotique. Ostéosynthèse tibiale : technique du tie-in INDICATION CHIRURGICALE Un traitement d’ostéosynthèse est indiqué pour toutes fractures du tibia surtout si les abouts osseux sont déplacés. Même si une fracture tibiale se diagnostique lors de l’examen clinique, il est important de réaliser deux clichés radiographiques orthogonaux afin d’apprécier la fracture et de pouvoir préparer la chirurgie. Les contrindications de l’utilisation du tie-in sont la présence d’ostéomyélite, d’une fracture ouverte, et l’absence de nociception et/ou de vascularisation du membre. TECHNIQUE CHIRURGICALE L’animal est placé en décubitus latéral, tondu sur toute la longueur du membre (en évitant de tondre la face plantaire de l’extrémité de la patte) puis la zone est préparée chirurgicalement. L’extrémité de la patte est recouverte de Vetrap stérile de façon à pouvoir la manipuler facilement sans risque septique. Le drapage est effectué à l’aide d’un champ transparent qui est maintenu à l’aide de points d’appui cutanés placés autour de la partie proximale du membre, moins traumatiques que des pinces à champs. Le membre est ainsi aisément mobilisable. La peau est ensuite incisée en regard du trait de fracture de façon à visualiser les éventuels traits de refend et esquilles et à réduire la fracture. Un clou centro medullaire est mis en place par un abord rétrograde. Une courte incision cutanée au point d’entrée de la broche peut faciliter sa mise en place. L’extrémité libre de la broche est repliée à sa sortie de la peau Conférences sur la Grande Piste -8- à 90° puis une deuxième fois à 90° de façon à rendre la partie extérieure parallèle à sa portion intra medullaire. Les broches trans-corticales sont alors mises en place. Les broches sont introduites perpendiculairement à l’os de part et d’autre à un centimètre environ du trait de fracture. Ces broches sont pliées à 90° au mêm niveau que le clou de l’enclouage centro médullaire. Après avoir vérifié le bon alignement des abouts osseux et des structures articulaires, l’incision cutanée en regard du trait de fracture est suturée puis les broches trans-corticales et le clou centro medullaire sont solidarisés par de la pâte polymère (polyméthylméthacrylate). SOINS POST OPÉRATOIRE Une fois le montage en place, une radiographie de contrôle (face et profil) est réalisée pour vérifier sa bonne mise en place et un pansement protécteur est apposé. L’animal est gardé en hospitalisation sous analgésie (opioïde et AINS) jusqu’à reprise du transit (prise alimentaire spontanée et émission de selles). Il est ensuite rendu à ses propriétaires sous couverture antiinflammatoire et sous une application de bétadine gel deux fois par jour. Des rendez-vous pour effectuer les soins de plaie aux points d’insertion des broches sont prévus une à deux fois par semaine. Le pansement est également changé à cette occasion. Des contrôles radiographiques sont réalisés tous les 15 jours. La dynamisation du fixateur est réalisée à l’occasion de ces contrôles, lorsque l’aspect radiographique du membre le permet. Le retrait du fixateur est effectué une fois la fracture cicatrisée (continuité radiographique des 4 corticales). Le retrait est réalisé sous anesthésie dite flash à l’isoflurane. Il consiste à couper les broches proximalement à la pâte polymère puis à les extraire de leur logement par traction. Les points d’entrée des broches ne sont pas suturés. COMPLICATIONS Les complications sont celles que l’on peut retrouver lors de toute ostéosynthèse : défaut de cicatrisation, ostéomyélite, séquestre osseux (lorsqu’un fragment non vitalisé n’est pas retiré), rupture du montage (lorsque la cageothérapie n’est pas respectée). Vendredi 13 mars 2015 Conférences sur la Grande Piste -9- Vendredi 13 mars 2015 Principales chirurgies des rongeurs Florent Modesto Service des Nouveaux Animaux de Compagnie Clinique Vétérinaire Brasseur 6 rue Dechamps 7170 Manage, Belgique [email protected] Les rongeurs comme le cochon d’Inde, le chinchilla, le hamster, l’octodon et le rat sont des animaux de compagnie populaires. Malgré leur petite taille et leur faible prix d’achat, les propriétaires se montrent souvent très attachés à leur compagnon et n’hésitent pas à demander des traitements chirurgicaux ou médicaux dont le coût dépasse celui de l’animal. Il est donc important de connaître les particularités anatomo-physiologiques et pathologiques de ces espèces pour pouvoir effectuer une intervention adaptée. Trois des principales chirurgies rencontrées chez les rongeurs seront abordées dans ce texte. I. STÉRILISATION : VOIES PARTICULIÈRES 1. CASTRATION VOIE ABDOMINALE Chez les rongeurs, la castration est principalement réalisée pour contrôler la reproduction. Elle peut également être intéressante pour diminuer l’agressivité, prévenir ou traiter les obstructions urétrales par un bouchon de liquide séminal (principalement cochon d’inde et rat) ou pour traiter les tumeurs testiculaires. Une fois que l’animal est anesthésié, ce dernier est positionné en décubitus dorsal pour être rasé et préparé. Un champ stérile (transparent ou tissu) est fixé à l’aide de fines pinces à champs ou par des points de suture, moins traumatiques (Monofilament 5.0). L’incision s’effectue entre l’ombilic et le pubis, sur 1-2 cm selon l’espèce, avec une lame de bistouri. La paroi musculaire est ensuite maintenue au niveau de la ligne blanche, avec une pince atraumatique (type Adson sans dents de souris). L’ouverture de la paroi s’effectue à l’aide de la lame de scalpel. L’incision se fait avec précaution afin d’éviter de léser le tissu digestif ou vésical sousjacent. L’utilisation d’une sonde cannelée s’avère intéressante pour minimiser ce risque. Une fois dans la cavité abdominale, une pression sur le scrotum à travers le champ stérile permet de mettre en évidence l’épididyme ainsi que le tissu graisseux associé au testicule. L’extériorisation du testicule par l’incision se fait à l’aide de la pince atraumatique ou par simple pression de part et d’autre de l’abdomen. Lorsque cette manipulation est réalisée, on détache le ligament fibro-épididymaire par simple traction. Une pince hémostatique est ensuite placée afin de faciliter et sécuriser la pose d’une ligature proximalement avec un fil résorbable 3.0 ou 4.0 sur le plexus pampiniforme et le canal déférent. L’incision du cordon testiculaire est effectuée avec la lame de bistouri sur la pince, du côté du testicule. Après vérification de l’hémostase, la fermeture du plan musculaire s’effectue par un surjet simple à l’aide d’un fil résorbable 3.0 ou 4.0. L’utilisation d’un surjet intradermique est privilégiée pour effectuer la fermeture du plan cutané (fil résorbable 4.0). L’utilisation d’une colle chirurgicale est également possible après réalisation de points cutanés. 2. OVARIECTOMIE PAR LES FLANCS Compte-tenu de la position dorsale des ovaires, du risque d’iléus post-opératoire que suscite une laparotomie par voie abdominale et de l’apparition de kystes ovariens chez les femelles non stérilisées, cette technique s’avère très intéressante chez les jeunes cochons d’Inde. Malgré la nécessité de changer de position l’animal pour retirer chaque ovaire (décubitus gauche puis droit), cette technique est rapide et présente moins de risque de lésion des tissus intra-abdominaux. On notera cependant qu’elle ne peut être effectuée en cas de pathologie utérine ou lorsqu’il y a des kystes ovariens. L’animal est préalablement rasé des 2 côtés et placé en décubitus latéral (gauche ou droit) pour être préparé. La voie d’abord est la suivante : incision verticale de 1cm de long, sur l’axe reliant la pointe du grand trochanter à la pointe de la dernière côté, 5-10 mm en arrière de cette dernière (et soit 1-1.5cm sous les apophyses transverses des vertèbres lombaires). Après avoir effectué l’incision cutanée à l’aide d’une lame de bistouri, une dissection mousse des plans musculaires est réalisée avec des ciseaux de Metzenbaum ou d’Iris, jusqu’au péritoine. Ce dernier est ponctionné à l’aide des ciseaux. L’ouverture du péritoine doit être faite avec précaution afin de ne pas léser les tissus sousjacents. Une fois dans la cavité péritonéale, le tissu graisseux péri-ovarien est saisi avec une pince d’Adson atraumatique puis extérioriser par l’incision. L’ovaire est aisément mis en évidence par cette action. Deux pinces hémostatiques courtes sont placées de part et d’autre de l’ovaire afin de faciliter la pose de ligature (fil résorbable 3.0). L’hémostase est contrôlée lors du retrait des pinces. Il est a noté que chez le cochon d’inde, l’oviducte doit être également retiré afin d’éviter la formation ultérieure de structure kystique. Le plan musculaire est ensuite fermé par des points simples ou un surjet. L’utilisation d’un surjet intradermique est privilégiée pour effectuer la fermeture du plan cutané (fil résorbable 4.0). L’utilisation d’une colle chirurgicale est également possible après réalisation de points cutanés. Le rongeur est ensuite changé de décubitus pour pouvoir retirer l’ovaire controlatéral. Conférences sur la Grande Piste -10- II. KYSTES OVARIENS : RETRAIT PAR OVARIOHYSTÉRECTOMIE Le cystadénome séreux ovarien, plus communément appelé kyste ovarien, est souvent diagnostiqué chez les cochons d’inde. Selon la littérature, 66-75% des femelles entre 3 mois et 5 ans peuvent être affectés. Celles de 2 à 4 ans sont le plus souvent touchées. Dans la plupart des cas, la présence de ces kystes est asymptomatique. Cependant, à partir d’une certaine taille, l’animal peut présenter des troubles digestifs ou urinaires. Lorsque que le kyste est sécrétant (kyste folliculaire principalement), les propriétaires observent une perte progressive de poils au niveau de la région des flancs et de l’abdomen, associée ou non à du prurit et des troubles dermatologiques. Une déformation de la silhouette abdominale est parfois notée. Dans ces cas, la chirurgie constitue le traitement de choix. Compte-tenu de la difficulté de l’intervention, le praticien doit être familier avec les protocoles anesthésiques, l’anatomie du patient ainsi que le management particulier pré- et postopératoire. L’animal est placé en décubitus dorsal après avoir été rasé, puis préparé stérilement. Le champ stérile est fixé à l’aide de fines pinces à champs ou par des points de suture, moins traumatiques (Monofilament 5.0). L’incision cutanée, de 2 à 3cm, est réalisé sur l’axe médian à mi-chemin entre l’ombilic et le pubis. Cette ouverture devra parfois être élargie selon le diamètre des kystes. La paroi musculaire est ensuite maintenue au niveau de la ligne blanche, avec une pince atraumatique (type Adson sans dents de souris). L’ouverture de la paroi s’effectue à l’aide de la lame de scalpel. La proximité du caecum et de la vessie implique une attention particulière lors de cette action pour éviter les lésions de ces organes. L’utilisation d’une sonde cannelée s’avère sécuritaire pour l’ouverture de cette paroi. Dans un premier temps, localiser l’utérus entre le colon et la vessie, afin de trouver plus facilement les ovaires anormaux se trouvant sous la masse digestive. Dans certains cas, il est plus simple de localiser d’abord les kystes ovariens lorsque leur diamètre est fortement augmenté. Le recours à un « Lone star Retractor » ou à des écarteurs manuels (avoir une seconde main) facilite l’extériorisation des structures. Compte-tenu de la finesse et de la fragilité des tissus dans ce type de pathologie, les manipulations se feront avec douceur afin d’éviter les tractions supplémentaires pouvant conduire à des ruptures de kystes ou de vaisseaux sanguins. Placer ensuite une pince hémostatique médialement à l’ovaire afin de ligaturer l’artère et la veine ovarienne à l’aide d’un fil résorbable 3.0 (polytressé si du tissu graisseux est présent en quantité importante). Disséquer le ligament du mésovarium pour dégager ensuite le kyste et la corne utérine. Vérifier l’hémostase au retrait de la pince et procéder de la même manière pour le 2ème kyste. Mettre en évidence les 2 vaisseaux adjacents aux cols de l’utérus et ligaturer ces derniers séparément avec un fil résorbable 3.0. L’utérus sera ligaturé au niveau de ses cols par une suture transfixante ou en masse selon la taille de ce dernier. Retirer l’ensemble des structures. Après vérification de l’hémostase, la paroi musculaire est fermée par un surjet simple à l’aide d’un fil résorbable 3.0 ou 4.0. L’utilisation d’un surjet intradermique est privilégiée pour effectuer la fermeture du plan cutané (fil résorbable 4.0). Des points simple ou en « U » peuvent également être effectués chez le cochon d’inde qui a moins tendance à retirer ses points. L’adjonction d’une colle chirurgicale permettra de sécuriser la suture. Vendredi 13 mars 2015 III. CHIRURGIE DE LA REGION SOUS-MANDIBULAIRE : ABCÈS ET MASSES 1. ABCÈS SOUS-MANDIBULAIRE : MARSUPIALISATION Les nombreux défauts dans l’alimentation des rongeurs et les malocclusions dentaires consécutives impliquent une prévalence importante d’abcès sous-mandibulaire chez les hystricomorphes que sont les cochons d’inde et chinchillas. Un corps étranger ou une contamination par voie hématogène peut également être une autre source d’infection. Ces abcès ont la particularité d’avoir une coque très développée et épaisse qui implique idéalement une résection complète. Cependant, la position et les fistules mandibulaires souvent associées ne permettent parfois pas de réséquer totalement la coque. Une technique de marsupialisation est alors privilégiée. L’animal est placé en décubitus dorsal, oblique ou latéral selon la position de l’abcès. Un coussin à vide (matériel de chirurgie ophtalmologique) peut être utilisé pour stabiliser la tête de l’animal dans la meilleure position. Une fois l’animal préparé et le champ stérile mis en place, une incision en côte de melon du plan cutané est effectuée. La peau est retirée puis une dissection mousse est pratiquée délicatement afin de vérifier si la masse infectée peut être dégagée dans sa totalité. En cas de fistule profonde (ou de rupture), on ouvrira la coque afin de vidanger l’abcès et retirer le maximum de paroi infectée. La marsupialisation consiste ensuite à fixer, par des points simples de fil résorbable 3.0, les bords de la coque restante de l’abcès avec la peau de la région céphalique environnante. Il est important de veiller à l’intégrité des vaisseaux avoisinants, important dans le processus de cicatrisation de la plaie. L’excès de peau distendue peut préalablement être réséqué pour faciliter la marsupialisation. Des soins locaux journaliers ainsi qu’une antibiothérapie adaptée permettront rapidement la destruction complète de la coque et la cicatrisation de la plaie. 2. MASSES SOUS-CUTANÉES : LYMPHADÉNITE CERVICALE ET TUMEURS Dans le cas d’atteinte ganglionnaire ou de processus tumoraux (carcinome thyroïdien, lymphome anaplastique,…), il est important de réséquer totalement la structure atteinte. La voie d’abord est similaire à la technique précédente. Cependant, une attention particulière sera portée aux structures proches de la masse (veine jugulaire, artère carotide, nerf vagal). Une évaluation préopératoire par échographie ou tomodensitométrie est hautement recommandée. L’utilisation de ciseaux d’iris, d’instruments ophtalmologiques ainsi que de cotons-tiges stériles s’avère très utile pour effectuer une dissection fine et atraumatique des structures. Une suture du plan sous-cutané et cutané (surjet intradermique) à l’aide de fil résorbable 4.0 sera privilégiée. RÉFÉRENCES BENNETT RA. Soft tissue surgery. In: Quesenberry KE, Carpenter JW, editors. Ferrets, rabbits, and rodents clinical medicine and surgery. St. Louis (MO): Elsevier; 2012. p. 326-338. PILNY A. Ovarian Cystic Disease in Guinea Pigs. Vet Clini Exot Anim 2014; 17 (1): 69-75 MAYER J, DONNELLY TM, Clinical veterinary advisor birds and exotic pets. St. Louis (MO): Saunders; 2013. p. 269–71 CAPELLO V. Common Surgical Procedures in Pet Rodents. J Exo Pet Med 2011, 20 (4): p294-307 Conférences sur la Grande Piste -11- Vendredi 13 mars 2015 Quelques aspects des maladies de l’estomac Patrick Lecoindre Spécialiste en Médecine Interne Dip ECVIM(CA) Les anomalies de vidange gastrique sont relativement fréquents chez nos carnivores domestiques et sont la conséquence d’anomalies fonctionnelles ou de phénomènes mécaniques d’obstruction. Au travers de 3 cas cliniques nous illustrerons plusieurs aspects de ces obstructions pyloriques. PRINCIPALES AFFECTIONS RESPONSABLES D’UNE OBSTRUCTION PYLORIQUE La CHPG ou «Chronic Hypertrophic Pyloric Gastropathy» encore appelée par certains auteurs AAPHS ou «Acquired Antral Pyloric Hypertrophy Syndrome» est une des causes les plus fréquentes d’obstruction pylorique dans l’espèce canine et plus particulièrement chez les races brachycéphales. Ce syndrome peut être congénital ou acquis bien qu’il soit possible chez certains animaux que la forme acquise traduise une évolution chronique d’une forme incomplète d’hypertrophie pylorique congénitale. Les formes congénitales s’observent surtout chez le Boxer et le Bouledogue Français et plus rarement chez le Boston Terrier. Sur le plan anatomique, cette sténose correspond à une hypertrophie de la couche musculaire du pylore. Les formes acquises désignent un processus hyperplasique bénin de la muqueuse antro-pylorique, associé dans certain cas à une hypertrophie de la musculeuse. Cette affection, évoluant généralement selon un mode chronique, est surtout décrite chez des chiens plus souvent de sexe mâle, de races naines brachycéphales (Shihtzu, Lhassa apso, Pékinois), adultes ou agés (moyenne 8-10 ans). Il existe d’autres causes de sténose pylorique chez les carnivores domestiques. Des lésions granulomateuses ou cicatricielles peuvent entraîner à terme une sténose du pylore. Des processus tumoraux bénins ou malins développés dans le canal pylorique, sont responsables d’une obstruction intraluminale. Enfin des lésions inflammatoires, abcédatives ou tumorales d’organes voisins du pylore (foie, pancréas, ganglions) peuvent provoquer une compression extrinsèque voire un envahissement secondaire du canal pylorique et une sténose de sa lumière. DIAGNOSTIC CLINIQUE Les signes cliniques associés à une sténose pylorique sont classiquement désignés sous les termes de syndrome de rétention gastrique. Le syndrome de rétention gastrique est caractérisé par des vomissements d’aliments digérés ou partiellement digérés survenant plus de 12 heures après le repas. Dans près de 25% des cas les vomissements ne sont pas précédés de prodromes. Ils peuvent contenir une grande quantité de liquides et d’aliments et présenter un caractère très expulsif (“ projectile vomiting ”). Des régurgitations associées aux vomissements, un amaigrissement, une anorexie, une distension abdominale due à la dilatation de l’estomac sont fréquemment observés. Une hématémèse peut caractériser une lésion ulcérée souvent associée à une rétention gastrique chronique. La survenue brutale d’un abdomen aigu doit faire suspecter une perforation gastrique. Toutefois les causes de rétention gastrique sont nombreuses (tableau). Elles peuvent être de nature mécanique (sténose pylorique, corps étranger…) mais aussi fonctionnelles (dysmotilité gastrique…). Le diagnostic différentiel nécessite souvent une investigation radiologique, échographique et endoscopique. EXAMENS COMPLÉMENTAIRES Une azotémie prérénale, une hypokaliémie, une hypochlorémie, une anémie, une hypoalbuminémie, une deshydratation sont les signes hémato-biochimiques les plus fréquemment observés lors d’obstruction gastrique grave. Le diagnostic de sténose pylorique était ces dernières années surtout radiologique : dilatation modérée ou sévère de l’estomac, rétention anormale de produits barytés, aspect anormal de la région pylorique (signe du bec de perroquet : «parrot beak»). L’échographie permet aujourd’hui une approche diagnostique très intéressante. Cet examen montre généralement une distension gastrique, un hyperpéristaltisme, un épaississement pariétal du canal pylorique et dans certains cas de la muqueuse antrale, une dédifférentiation des couches lors de processus infiltrant néoplasique. Le développement des techniques endoscopiques permet aujourd’hui un diagnostic fiable, précoce et non invasif. Il est possible de décrire et de reconnaître assez précisément les différents aspects endoscopiques caractérisant une CHPG congénitale ou acquise. On observe dans la plupart des cas une hypertrophie des plis muqueux circulaires qui entourent le canal pylorique. L’un de ces plis hypertrophiés peut pénétrer dans le canal pylorique et l’obstruer. La muqueuse de l’antre pylorique est souvent hypertrophique et inflammatoire. La présence de Conférences sur la Grande Piste -12- débris alimentaires est significative d’un retard et d’une anomalie de la vidange gastrique. Lors de CHPG, l’histologie des biopsies endoscopiques montre en général, une muqueuse d’aspect normal, siège dans certain cas d’un infiltrat inflammatoire non spécifique. C’est l’étude microscopique des pièces chirurgicales qui a permis d’identifier et de décrire les anomalies discrètes mais réelles de la muqueuse lors de CHPG ou d’AAPHS. On observe dans les formes acquises de l’adulte un épaississement de la muqueuse par hyperplasie de la couche des glandes qui apparaissent profondes et sinueuses, d’aspect papillaire en surface. La musculaire muqueuse est souvent hypertrophique. On observe dans les formes congénitales de CHPG, une hypertrophie de la couche musculaire ; la muqueuse est en général normale, dans certain cas fibrosée et atrophique. Enfin des tumeurs de type adénomateuse peuvent entraîner une sténose pylorique. Ces tumeurs ont un haut potentiel de transformation carcinomateuse et le diagnostic précoce permet d’intervenir chirurgicalement avec un meilleur pronostic. L’histologie permet par ailleurs de faire un diagnostic différentiel entre un processus néoplasique, une sténose cicatricielle du pylore (cicatrice d’ulcère, maladie inflammatoire chronique intestinale), une polypose antrale bénigne. L’échoendoscopie est un examen intéressant pour identifier et apprécier la nature de l’hypertrophie de la zone pylorique. TRAITEMENT Le traitement des sténoses pyloriques est chirurgical. Plusieurs techniques en fonction de l’importance du processus hypertrophique sont décrites. La pyloroplastie de HeinekeMikulicz sera réservée aux cas simples localisés au canal pylorique. Les techniques de pyloroplastie en Y ou U ou la pyloroplastie de Finey sont les techniques les plus fréquemment utilisées lors d’hyperplasie plus étendues. Les gastrectomies sont dans certain cas nécessaires pour restaurer une continuité gastroduodénale. L’utilisation des pinces mécaniques Autosutures ND a considérablement amélioré le pronostic de ces chirurgies qui est excellent lorsque l’animal est opéré précocément. Un traitement médical des dysmotricités gastriques parfois associées à une sténose pylorique, est nécessaire dans certains cas après la chirurgie et fait appel aux prokinétiques. Vendredi 13 mars 2015 Conférences sur la Grande Piste -13- Vendredi 13 mars 2015 Pièges à éviter en gastro-entérologie canine et féline Suzy Valentin DMV, MS, Dip ACVIM, Dip ECVIM-CA Clinique Vétérinaire Advetia 5, Rue Dubrunfaut, 75012 PARIS Les vomissements et diarrhée chroniques sont des motifs fréquents de consultation en médecine vétérinaire. Les causes sous-jacentes sont multiples et variées et souvent bien connues. Cependant, ce ne sont pas les seuls manifestations de ces maladies digestives, et d’autres signes cliniques, parfois plus frustres, peuvent également être les seuls présents. Ils sont les suivants : • • • • • Léchage des babines, du sol Déglutitions excessives, hors repas Bâillements Pica (l’ingestion régulière d’herbe, méprise à tort pour une « purge » bénigne par les propriétaires en fait partie) Position du prieur ou position allongée en post-prandial Tous ces signes cliniques peuvent être le reflet d’une maladie digestive sous-jacente, et souvent d’un reflux gastro-oesophagien. Le reflux gastro-oesophagien, à l’origine d’une oesophagite, peut lui-même résulter de reflux chroniques, d’une atonie cardiale, d’une hernie hiatal ou d’une maladie inflammatoire chronique de l’intestin (d’autres causes, moins fréquentes telles que les tumeurs oesophagiennes, les sténoses oesophagiennes, les corps étrangers etc…). Ces signes cliniques sont évocateurs d’une lésion digestive qu’il convient d’explorer. Ils peuvent être les seuls signes présents. L’absence de diarrhée ou de vomissements n’exclut en rien une maladie digestive et sont des indicateurs de la nécessité d’explorer cette dernière. Le cas des corps étrangers gastriques sur pica sont plus fréquents qu’il n’y paraît, et les cas cliniques présentés lors de cette conférence visent à montrer l’importance du recueil de l’anamnèse et des commémoratifs dans ce genre de situation. Il est très important de poser des questions claires et directes aux propriétaires sur la présence des signes cliniques évoqués ci-dessus. Par exemple, l’ingestion de plusieurs corps étrangers sur plusieurs années, chez un animal adulte, associé à des bâillements et/ou léchage de babines et/ou abdominal postprandial doivent évoquer une maladie digestive sous-jacente. Il convient alors, au moment du retrait de ce corps étranger de prélever des biopsies digestives. Si le corps étranger est retiré par voie per-endoscopique, il est recommandé d’examiner le duodénum ainsi que l’ensemble de l’estomac, et de prélever des biopsies à tous ces endroits. Si le corps étranger est retiré par voie chirurgicale, il faut prendre des biopsies étagées. Lors de CHPG, l’histologie des biopsies endoscopiques montre en général, une muqueuse d’aspect normal, siège dans certain cas d’un infiltrat inflammatoire non spécifique. C’est l’étude microscopique des pièces chirurgicales qui a permis d’identifier Conférences sur la Grande Piste -14- Vendredi 13 mars 2015 Cas cliniques en hépatologie féline et canine : échographie/ cœlioscopie Deux examens complémentaires en hépatologie. Patrick Lecoindre Spécialiste en Médecine Interne Dip ECVIM(CA) Conférences sur la Grande Piste -15- Vendredi 13 mars 2015 Conférences sur la Grande Piste -16- Vendredi 13 mars 2015 Conférences sur la Grande Piste -17- Vendredi 13 mars 2015 Conférences sur la Grande Piste -18- Vendredi 13 mars 2015 Conférences sur la Grande Piste -19- Vendredi 13 mars 2015 Conférences sur la Grande Piste -20- Vendredi 13 mars 2015 La communication clinique Christian Iehl MBA Petfood Veterinary Consulting SAS La relation interpersonnelle que le praticien établit – ou pas – avec le patient est évidemment un élément clé de l’exercice libéral. Tandis que les compétences techniques des praticiens évoluent constamment, on a identifié depuis longtemps en médecine humaine un déficit de communication entre le médecin et son patient. Plus exactement, la communication se fait à sens unique et l’homme de l’art passe plus de 80% du temps de la consultation à parler au malade… Alors qu’il suffirait souvent d’écouter pour mieux comprendre les motifs de consultation et analyser les symptômes. Les patients s’en plaignent qui ne se sentent pas, à juste titre, entendus. Fort de ce constat, la communication clinique est une discipline qui s’est d’abord développée en médecine humaine, notamment en Amérique du Nord, avant de s’appliquer à l’activité vétérinaire. Car la consultation vétérinaire souffre aussi d’une carence de communication; une thèse de doctorat de 2007, confirmée par de nombreuses enquêtes, nous rappelle que le ‘relationnel’ compte pour 44% dans les raisons qui poussent un client à quitter son vétérinaire… Les compétences techniques ou scientifiques sont très rarement mises en cause, tandis que la communication vers le client est considérée comme ‘importante’ ou ‘assez importante’ pour pratiquement 100% des personnes interrogées. De son côté le praticien évoque un manque de temps pour écouter son client… au risque d’en perdre finalement beaucoup si une information essentielle n’a pas été enregistrée lors de la consultation. Il s’agit donc d’une discipline clinique à part entière, dont les bénéfices sont multiples, et transversaux à tous les autres enseignements. Si certains vétérinaires peuvent avoir des aptitudes plus développées que d’autres, être bon communicant n’est pas un don du ciel, mais s’apprend au même titre que la médecine interne ou la chirurgie. La communication clinique s’appuie donc sur des méthodes simples mais rigoureuses, comme l’utilisation des questions ouvertes, de l’écoute active ou de la reformulation. Cette discipline est enseignée dans ce sens, avec des études, des recherches, des articles publiés dans des revues à comité de lecture et maintenant des thèses de 3ème cycle. Comme tout enseignement clinique, elle fait aussi l’objet de travaux pratiques avec des études de cas et des consultations simulées pour parfaire l’entrainement des étudiants. En France, c’est notamment le cas à Oniris où les étudiants nantais bénéficient de sessions enregistrées avec des comédiens professionnels pour améliorer leurs aptitudes à bien communiquer avec leurs patients. C’est cette expérience et ses applications pratiques en clientèle qui seront présentées lors de la conférence. Conférences sur la Grande Piste -21- Vendredi 13 mars 2015 Gestion de 2 types de personnalités difficiles au sein de l’équipe : le passif agressif et l’anxieux agressif Marie-Laure Brongniart Une équipe est un ensemble de personnalités diverses appelées à travailler ensemble dans un but commun. Elle est plus que la somme des membres qui la composent. Certains types de personnalités peuvent être des freins à la cohésion de l’équipe et à la bonne marche de l’Entreprise, et viennent alourdir l’atmosphère de travail. Les reconnaître et savoir comment mieux les gérer est un savoir-faire très important pour un dirigeant. Nous verrons aujourd’hui 2 types de ces personnalités. MIEUX GÉRER LE PASSIF-AGRESSIF PROFIL Une personnalité de type passif-agressif ne dit jamais non, mais résiste de manière détournée. SA LOGIQUE COMPORTEMENT PIÈGES À ÉVITER STRATÉGIES À ADOPTER MIEUX GÉRER L’ANXIEUX-AGRESSIF PROFIL La personnalité anxieuse –agressive veut toujours gagner SA LOGIQUE COMPORTEMENT PIÈGES À ÉVITER STRATÉGIES À ADOPTER Conférences sur la Grande Piste -22- Vendredi 13 mars 2015 Radiothérapie : quelles options pour quelles indications ? Patrick Devauchelle Dip ECVIM-onco MICEN VET 58, rue Auguste Perret 94000 Créteil [email protected] La radiothérapie est une thérapeutique de choix dans la stratégie anticancéreuse humaine et vétérinaire. Elle consiste en un traitement local de la maladie cancéreuse et s’envisage le plus souvent en association avec l’exérèse chirurgicale et/ la chimiothérapie. Elle fait appel à des radiations ionisantes pour détruire les cellules tumorales tout en protégeant les tissus sains environnants. Ces radiations doivent donc transporter une énergie suffisante pour ioniser une molécule organique et modifier ainsi la biologie cellulaire. EFFETS DES RAYONNEMENTS ET NOTION DE DOSE BIOLOGIQUE 1.1. EFFETS PHYSIQUES DES RAYONNEMENTS Les sources ionisantes produisent des photons ou des électrons en fonction de leurs origines et de leur condition d’utilisation. 1.1.1. PHOTONS Il n’y a pas de différence de nature ni d’énergie entre les photons X ou g, seules leurs origines sont différentes : • les photons X sont issus d’un tube à rayons X soit de basse énergie (orthovoltage), soit de haute énergie (accélérateur de particules) ; • les photons gamma proviennent de la désintégration nucléaire d’une substance radioactive (cobalt, iridium…). • Les photons sont indirectement ionisants car électriquement neutres. Il y a interaction avec la matière par l’intermédiaire d’électrons secondaires d’effets différents en fonction de l’énergie : • effet photoélectrique (inférieur à 300 keV) ; • effet Compton (de 0,3 MeV à 10 MeV) ; • effet de création de paires (supérieur à 10 MeV). 1.1.2. ELECTRONS Particules chargées négativement, les électrons ionisent directement la matière. Ils sont produits essentiellement par des accélérateurs de particules. Leur activité homogène et superficielle en fait un atout de choix dans la radiothérapie externe. 1.2. EFFETS BIOLOGIQUES DES RAYONNEMENTS La mort différée de la cellule irradiée est la base biologique de l’effet des radiations ionisantes sur la tumeur. En effet, les modifications apportées à la structure de l’ADN sous l’action des photons et des électrons entraînent une incapacité, pour la cellule concernée, à se diviser, d’où la notion de mort différée. La cellule garde donc, en grande partie, sa physiologie, mais perd la capacité de se reproduire. Les cellules qui se divisent sont donc radiosensibles, et elles le sont d’autant plus qu’elles se divisent rapidement. L’appréciation du pourcentage de cellules en cycle par le pathologiste (le plus simplement par l’index mitotique mais également grâce aux marqueurs de prolifération Ki 67…) constitue donc un des facteurs permettant d’évaluer la radiosensibilité d’une tumeur donnée. Il en découle que le temps contrôle toute la radiobiologie : • les effets immédiats et à court terme contrôlent les réactions précoces ; • les effets à long terme contrôlent les réactions tardives ; • La restauration cellulaire est différente selon que la cellule est saine ou cancéreuse. • Cette restauration est plus satisfaisante pour les cellules saines. C’est pour cette raison que l’on fractionne la dose en plusieurs séances pour favoriser la récupération cellulaire des tissus sains et diminuer les réactions tardives du rayonnement. L’activité du rayonnement dépend de la multiplication cellulaire, donc de la rapidité des cellules à se multiplier. C’est l’étalement de la dose qui permet de contrôler cette multiplication cellulaire et donc de diminuer les réactions précoces du rayonnement. On distingue ainsi deux compartiments tissulaires : • des tissus à temps de renouvellement rapide, dont l’irradiation entraîne des réactions précoces (muqueuse, peau, intestin, sphère ORL, ovaire, moelle osseuse…) ; • des tissus à temps de renouvellement lent, dont l’irradiation entraîne des réactions tardives (os, muscle, foie, rein, tissu nerveux…). Fractionnement et étalement de la dose sont donc les garants de l’efficacité et de l’innocuité d’un traitement radiothérapique. 1.2.1. NOTION DE DOSE BIOLOGIQUE L’unité de dose absorbée est la gray (Gy), soit 1 joule absorbé dans 1 kilogramme de matière. Par rapport à l’ancienne unité, le rad, 1 Gy équivaut à 100 rad. Cette dose n’a de valeur que rattachée à une notion de temps. La dose qui permet de « stériliser » un processus tumoral dépend Conférences sur la Grande Piste -23- de plusieurs paramètres : • l’aspect de la tumeur : une tumeur circonscrite et bien vascularisée est toujours plus radiosensible qu’une tumeur infiltrante ou nécrosée (effet oxygène : une tumeur bien oxygénée donc, bien vascularisée, est trois fois plus radiosensible qu’une tumeur hypoxique) ; • le type histologique ; la notion classique de radiorésistance des épithéliomas, sarcomes conjonctifs et autres tumeurs bien différenciées n’est plus d’actualité, mais il s’avère que certains types histologiques nécessitent des doses thérapeutiques plus faibles car ils sont plus radiosensibles (sarcome de sticker, mastocytome, lymphomes…) ; • le volume tumoral ; cette notion est capitale en médecine vétérinaire ; plus le volume tumoral est grand, plus la dose pour le stériliser sera importante ; bien souvent, le volume tumoral est même trop important pour que soit envisagé un recours à la radiothérapie curative ou adjuvante. La dose est donc une donnée assez subjective, dont les limites dépendent principalement de la tolérance des organes critiques, environnant la tumeur. La radiothérapie sera donc continuellement limitée par le sous-dosage, qui conduit à la récidive, et le surdosage, qui aboutit à des complications tardives irrécupérables. 2. TECHNIQUES DE RADIOTHERAPIE ET METHODOLOGIE THERAPEUTIQUE 2.1. TECHNIQUES DE RADIOTHÉRAPIE Ces techniques dépendent des sources utilisées et de la localisation du processus tumoral. Trois grands types de modalités sont à la disposition des radiothérapeutes : la radiothérapie externe ; la curiethérapie et la radiothérapie métabolique. 2.1.1. RADIOTHÉRAPIE EXTERNE C’est de loin, en thérapeutique, la plus utilisée. Les appareils diffèrent en fonction du niveau d’énergie qu conditionne leur utilisation. Radiothérapie par orthovoltage : elle fait appel à des appareils de basse énergie, entre 50 et 250 keV. Ces appareils ne sont pratiquement plus utilisés en raison des complications qu’ils occasionnent (radio-dermites exsudatives, ostéoradionécrose…). Une utilisation reste cependant valable chez le chien et le chat : la radiothérapie de contact (50 à 100 keV) pour des tumeurs superficielles de petite taille muqueuses ou cutanées. Pour toute autre indication, ces appareils ne peuvent que conduire à des sous-dosages (donc défaut d’efficacité) si les effets secondaires à la peau veulent être minimisés. Téléradiothérapie ou cobaltothérapie : Elle utilise une source de cobalt (60Co) émettant des rayons gamma de 1,25 MeV dont l’activité maximale se situe à 0,5 cm sous la peau ce qui diminue d’autant les risques de complications classiques (radiodermite, ostéoradionécrose…). Son rendement en profondeur (50 % à 10 cm), permet d’atteindre toutes les localisations tumorales du chien et du chat. Accélérateurs de particules : Ces appareils très performants émettent des électrons accélérés d’une énergie très élevée ; de 4 à 25 MeV. Ces électrons sont utilisés de deux manières : • sous forme de faisceaux d’électrons de 4 à 25 MeV, très adaptés aux irradiations superficielles ou de grande précision (utilisation intéressante chez le chat) ; • sous forme de rayon X ; les électrons sont alors transformés Vendredi 13 mars 2015 en photons X de haute énergie par projection sur une cible (rayons X de 4 à 6 MeV) ; leur utilisation est alors absolument identique à celle d’une bombe au cobalt. 2.1.2. CURIETHÉRAPIE C’est une technique opposée à la radiothérapie externe puisque les sources sont situées à l’intérieur du patient. Elle a fait appel pendant des années aux aiguilles de radium. Plus moderne, elle utilise maintenant des radio-éléments moins dangereux (iridium, césium…). On distingue 2 types de curiethérapie. Curiethérapie interstitielle ou endocuriethérapie : les radioéléments sont mis en place dans le site chirurgical à l’aide d’une aiguille vectrice. On l’utilise surtout pour les tumeurs sous-cutanées et récidivantes (type fibrosarcome du chat) mais également lors de carcinome épidermoïde félin. Pour améliorer la radioprotection du personnel soignant, les fils d’iridium 192, initialement utilisés, sont remplacés depuis quelques années par l’iridium haute énergie (High Dose Radiation) : la source d’iridium stockée dans un container blindé, transite dans des mandrins vecteurs implantés sous anesthésie sur le site chirurgical sous la peau pour une durée de 4 jours. La dose totale délivrée localement en 4 séances peut alors être de 60 Gray, comme cela est nécessaire aux tumeurs sous-cutanées récidivantes de type fibrosarcome. La radioactivité en profondeur est très faible, ce qui limite considérablement les complications médullaires ou pulmonaires dans cette indication. En effet, à dose égale délivrée, les complications de la radiothérapie externe seraient bien plus importantes. En revanche, cette technique ne permet de traiter que des volumes de petite taille. Curiethérapie endocavitaire ou plésiocuriethérapie : l’implant radioactif (iridium ou césium) est mis en place dans les cavités naturelles (vagin, utérus) à l’aide d’applicateur spécifique. Très utilisée dans l’espèce humaine (cancer du col ou du vagin), quelques descriptions avec des résultats intéressants sont à notées chez l’animal (tumeurs nasales, tumeurs cérébrales en particulier). Pour les mêmes notions de radioprotection, cette technique est remplacée par l’iridium haute énergie. 2.1.3. RADIOTHÉRAPIE MÉTABOLIQUE Elle utilise des sources radioactives non scellées généralement injectables (type iode 131) qui vont grâce à leur métabolisme se fixer sur des cellules cibles (thyroïde). Elle est du secteur de la médecine nucléaire et n’appartient pas au sens strict à la radiothérapie. De plus, son utilisation nécessite une radioprotection très délicate. 2.2. MÉTHODOLOGIE THÉRAPEUTIQUE Un simulateur permet de reproduire les conditions de l’irradiation et de définir les points suivants : • la distance source-peau et source-tumeur • le volume irradié comprenant la tumeur primitive, les tissus environnants et les nœuds lymphatiques satellites • les tissus sains situés sur le passage des faisceaux d’entrée et de sortie. Le radiothérapeute peut limiter l’irradiation des tissus sains par la technique des champs croisés (recoupement de multiples faisceaux au sein de la tumeur limitant ainsi la dose délivrée dans les tissus normaux). • L’isodose de référence qui correspond à la surface enveloppant le volume cible où la dose de rayonnement est identique en tous points. Conférences sur la Grande Piste -24- La dose totale est choisie en fonction du volume tumoral et de sa radiosensibilité supposée (voir notion de dose biologique). Pour des raisons de tolérance et d’efficacité, il est indispensable d’étaler dans le temps des fractions de la dose totale. L’étalement est la durée entre la première et la dernière séance et le fractionnement correspond au nombre de séances. Chez l’animal, le recours obligatoire à l’anesthésie générale oblige à réduire le nombre de séances. En pratique, une dose totale de 15 à 55 Gy est généralement administrée en 2 ou 3 fractions hebdomadaires de 2 à 4 Gy pendant 3 à 5 semaines. A dose égale, plus le fractionnement est important, moins la toxicité pour les tissus normaux est grande. 3. INDICATIONS ET RESULTATS DE LA RADIOTHERAPIE 3.1. INDICATIONS DE LA RADIOTHÉRAPIE La radiothérapie ne peut se définir qu’à travers une stratégie thérapeutique anti-cancéreuse associant la chirurgie, la radiothérapie et la chimiothérapie. Seule une démarche diagnostique rigoureuse conduisant à la connaissance parfaite de la nature histologique de la tumeur, de son bilan d’extension local, régional et général, de son volume cible et des organes critiques environnants peut permettre d’envisager un choix thérapeutique et de le proposer au propriétaire. Dans cette stratégie, la radiothérapie peut être utilisée selon plusieurs protocoles, mais deux grandes méthodes se distinguent : radiothérapie seule ou radiothérapie à visée curative ou palliative. Les modalités d’utilisation pour résoudre ces problèmes sont essentiellement au nombre de trois : la radiothérapie curative, la radiothérapie adjuvante et la radiothérapie palliative. 3.1.1. RADIOTHÉRAPIE CURATIVE Elle a pour objectif la guérison du cancer par stérilisation du volume irradié. Sa réussite dépend de la précocité du diagnostic, de la taille de la tumeur, de sa nature histologique. Ses cibles principales sont le sarcome de sticker, les mastocytomes de localisation délicate (oreille, truffe, extrémités, paupière, lèvre…), l’épulis acanthomateuse, les améloblastomes, les adénocarcinomes des cavités nasales, et les adénocarcinomes des glandes anales. 3.1.2. RADIOTHÉRAPIE ADJUVANTE Elle est associée à d’autres thérapeutiques (chirurgie et/ou chimiothérapie), pour améliorer la réussite du traitement. Radiothérapie et chirurgie : cette association est parfaitement justifiée puisque la radiothérapie ne peut contrôler une tumeur de plus de 4 cm et que la chirurgie ne peut éradiquer avec certitude un envahissement local infraclinique. Trois possibilités découlent de cette association. Radiothérapie préopératoire : Elle permet de réduire le volume tumoral avant l’intervention et de limiter la diffusion métastatique lors de celle-ci. La dosimétrie du volume cible doit être bien établie et limitée pour ne pas nuire ensuite à la cicatrisation. Radiothérapie postopératoire : c’est l’association idéale du traitement des tumeurs récidivantes ou métastatiques diagnostiquées précocement. Les cibles de la radiothérapie postopératoire sont principalement : • les tumeurs conjonctives récidivantes (hémangiopéricytome, Vendredi 13 mars 2015 fibrohistiocytome malin, neurofibrosarcome, fibrosarcome, schwanomme) ; • les tumeurs épithéliales ou glandulaires métastatiques (adénocarcinome mammaire ou thyroïdien, épithélioma spinocellulaire des doigts, des lèvres, des narines, des amygdales). Radiothérapie peropératoire : Elle est utilisée en flash lors d’une laparotomie exploratrice pour traiter les carcinomes de la vessie, de la prostate ou du pancréas. Radiothérapie et chimiothérapie : cette association est valable pour des processus tumoraux à grand pouvoir de dissémination. Chez l’animal, son utilisation est souvent différée et séquentielle. Elle augmente l’activité locorégionale (lymphome médiastinal, tumeur osseuse, carcinome pulmonaire…) et l’activité thérapeutique à distance dans la lutte contre la diffusion métastatique (tumeurs mammaires, mélanome malin, carcinome amygdalien…). 3.1.3. RADIOTHÉRAPIE PALLIATIVE Très utilisée chez l’homme pour lutter contre la douleur, elle l’est également chez l’animal pour le contrôle des processus tumoraux trop évolués ou diagnostiqués trop tardivement. Elle est portant très intéressante à envisager comme thérapeutique des tumeurs intracrâniennes ou des tumeurs nerveuses périphériques. 3.2. RÉSULTATS DE LA RADIOTHÉRAPIE À PARTIR D’EXEMPLES 3.2.1. UTILISATION DE LA RADIOTHÉRAPIE EXTERNE Le mastocytome est probablement l’une des tumeurs les plus radiosensibles et la radiothérapie externe peut être prescrite comme traitement de première intention dans les localisations difficilement accessibles en chirurgie. La radiothérapie est également intéressante en traitement adjuvant après exérèse chirurgicale lors de mastocytome de grade II selon Patnaik et vient également compléter la chimiothérapie dans les formes les plus agressives (grade III ou II avec indice de prolifération Ki 67 > 10 %). Plus de 60 % des sujets sont vivants 1 an après exérèse chirurgicale et radiothérapie adjuvante . Les tumeurs naso-sinusales sont une indication très intéressante de la radiothérapie externe. Elle peut alors être curative sur les formes strictement nasales et devient adjuvante lorsqu’une extension sinusale est présente. La moyenne de survie atteint 32 mois dans le premier cas et environ 15 mois dans le second. La réponse thérapeutique peut être encore meilleure chez le chat. La radiothérapie externe est aussi préconisée dans le traitement local des tumeurs buccales. Lors d’épulis acanthomateuse en particulier, la radiothérapie peut permettre un contrôle définitif de la tumeur, au même titre qu’une chirurgie large (mandibulectomie) mais de façon moins délabrante. Les carcinomes épidermoïdes buccaux, rencontrés chez le chien et le chat, sont une indication quasi systématique de radiothérapie en association avec une chirurgie large et le plus souvent avec une chimiothérapie. La réponse thérapeutique est considérée comme modérée à bonne chez le chien (médiane de survie de 12 à 20 mois) et plus modeste chez le chat (6 mois dans les meilleurs cas). La localisation amygdalienne est de pronostic nettement plus sombre. Les fibrosarcomes buccaux présentent une importante agressivité locale mais métastasent plus rarement que les carcinomes épidermoïdes. Ils sont donc une Conférences sur la Grande Piste -25- indication de radiothérapie externe mais demeurent toutefois moins radiosensibles que les carcinomes épidermoïdes et les épulis. La radiothérapie permettrait un contrôle durant 1 an dans la moitié des cas. Les mélanomes buccaux, radiorésistants et plus agressifs au plan général que local, nécessitent de fortes doses de rayonnement et présentent une survie souvent décevante en raison d’une flambée métastatique rapidement fatale. La radiothérapie externe trouve une indication dans les tumeurs cérébrales, et en particulier les macroadénomes hypophysaires ou les lymphomes malins très radiosensibles. Lors de gliome ou de méningiome infiltrant, la radiothérapie peut compléter la chirurgie pour limiter les risques de récidives locales. Les tumeurs osseuses sont un bon exemple de radiothérapie externe palliative, pour soulager la douleur. Elle permet alors d’améliorer la qualité de vie de ces patients pour lesquels l’amputation n’est pas ou plus envisageable. 3.2.2. UTILISATION DE LA CURIETHÉRAPIE Les principales indications de la curiethérapie ou radiothérapie interstitielle se retrouvent dans l’espèce féline. La plus classique est les sarcomes des tissus mous qui récidivent systématiquement après exérèse en raison de nombreux prolongements tumoraux qui infiltrent les tissus sous-jacents. Cette radiothérapie associée à une exérèse chirurgicale large et réalisée dès le premier geste chirurgical améliore notablement le pronostic de ces tumeurs (une guérison peut être obtenue dans 80 % des cas). Une autre indication est le carcinome épidermoïde félin pour lequel la radiothérapie interstitielle est une solution élégante seule ou en complément de la chirurgie. Notons que la chimiothérapie intra-lésionelle (au cisplatine) donne également de bons résultats dans cette indication. 3.2.3. UTILISATION DE LA RADIOTHÉRAPIE MÉTABOLIQUE L’indication de choix, à l’heure actuelle, sont les adénomes thyroïdiens sécrétants du chat. La radiothérapie métabolique à l’iode 131 permet en effet un traitement définitif de l’hyperthyroïdie, même s’ils existent plusieurs nodules sécrétants (ce qui est souvent le cas) ou si une localisation ectopique est Vendredi 13 mars 2015 rapportée. Elle est dans ce sens bien supérieure à la chirurgie. 4. COMPLICATIONS DE LA RADIOTHERAPIE Elles peuvent être précoces ou tardives selon la rapidité de renouvellement du tissu concerné. Les complications précoces peuvent survenir dès la fin de la période de radiothérapie et se prolonger durant plusieurs semaines. Les complications tardives apparaissent de 6 mois à plusieurs années après la fin du traitement. 4.1. COMPLICATIONS PRÉCOCES Leurs cibles essentielles sont les tissus de renouvellement rapide : • réactions cutanées ; érythème fugace, épidermite sèche, épidermite exsudative (rare avec les techniques modernes) ; • réactions muqueuses ; surtout les muqueuses buccales (mucite…) ; • réactions thoraciques ; oesophagite, poumon radique aigu (œdème pulmonaire, épanchement) ; • réactions abdominales ; cystite aiguë, rectite aiguë Il convient de porter une particulière attention à la sensibilité spécifique des gonades (stérilité avec des doses de 10 à 20 Gy). 4.2. COMPLICATIONS TARDIVES Elles varient avec le territoire irradié et sont l’expression des tissus de renouvellement lent : • poumon radique ; fibrose pulmonaire avec insuffisance respiratoire grave ; • myélite radique ; évolution redoutable vers la tétraplégie ; • vessie radique ; • ostéoradionécrose ; rare avec les nouvelles techniques, elle est à l’origine de fractures spontanées. Conférences sur la Grande Piste -26- Vendredi 13 mars 2015 Les marges de résection : clefs de la réussite en oncochirurgie Pr. Pierre Moissonnier DMV, MS, PH.D, Diplom ECVS Service de chirurgie, Centre Hospitalier Vétérinaire d’Alfort, Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort, 7 avenue du général de Gaulle, 94700 Maisons Alfort Malgré l’émergence de nouvelles approches thérapeutiques et diagnostiques en oncologie ces dernières années, la chirurgie conserve un rôle prépondérant dans la prise en charge tant diagnostic que thérapeutique des tumeurs et ce autant pour augmenter la durée de vie de l’animal que pour améliorer sa qualité de vie. Chez l’Homme, il est considéré que 60% des cancers guéris, le sont par le seul geste chirurgical. Encore faut-il que ce dernier soir maîtrisé et réalisé dans les meilleures conditions. Une étude (Hershey et al. J Am Vet Med Assoc 216, 58, 2000) portant sur des fibrosarcomes félins a mis en évidence que le taux de récidive est significativement supérieur quand la chirurgie est effectuée par un chirurgien non spécialiste. La médiane de rémission est de 66 ou 79 jours quand l’intervention est réalisée respectivement par un vétérinaire généraliste ou en zone marginale et ce quelque soit l’opérateur. Au contraire la médiane de rémission est de 274 ou 325 à 429 jours quand l’intervention est réalisée respectivement par un vétérinaire spécialiste ou en zone large (2 à 3 cm de marges) et ce quelque soit l’opérateur. Cette présentation a pour objectif de démontrer toute l’importance du « bien opérer le cancer », mais également de vérifier la qualité de son exérèse pour intégrer au mieux la chirurgie au sein d’une démarche thérapeutique globale. 1. PRÉALABLES CHIRURGICAUX RAPPORTS ENTRE CHIRURGIE ET CANCER : • toute anesthésie facilite la croissance du cancer • toute chirurgie « à distance » d’un cancer favorise sa croissance • toute manipulation tumorale (y compris la biopsie) favorise sa métastase • toute cicatrisation par seconde intention favorise la récidive locale Le geste chirurgical doit se placer dans la continuité d’une approche diagnostique globale incluant la détermination du type de tumeur, de son grade, la réalisation d’un bilan d’extension complet locorégional et à distance (en fonction du type de tumeur) et une évaluation complète du patient. Au delà de cette approche scientifique, il est capital d’expliquer aux propriétaires ce que l’on souhaite faire dans le cadre d’un plein accord éclairé : chirurgie curative, palliative ou de cytoréduction. La chirurgie du cancer peut également être prophylactique ou simplement diagnostique. • Quelques exemples de chirurgie « prophylactique » : • stérilisation, castration (notamment des testicules cryptochides), paniculites post-vaccinales, polypes rectaux, lésions inflammatoires chroniques … Definir le type de biopsie à réaliser et quand le faire : cytoponction, aiguille de biopsie (sous contrôle échographique, scanner ou IRM), Biopsie incisionnelle ou excisionnelle. 2. L’EXÉRÈSE CHIRURGICALE EN ONCOLOGIE La meilleure exérèse est la première et cette exérèse doit être la plus large possible pour permettre une guérison complète. CONSTITUTION GÉNÉRALE D’UNE TUMEUR • Pseudocapsule: membrane macroscopiquement visible autour de la tumeur qui comprend une couche de cellules normales et une couche de cellules tumorales comprimées par la croissance. • Zone réactionnelle: couche de tissus inflammatoires entourant la pseudo-capsule comprenant des cellules mésenchymateuses prolifératives, des néovaisseaux et des cellules inflammatoires. • Métastases satellites : extension par contigüité de la tumeur dans les zones réactionnelles. • Métastases de proximité («skip métastases»): nodules tumoraux séparés de la tumeur primitive, localisées dans le tissu normal hors de la zone réactionnelle mais dans le même compartiment tissulaire (rare chez le chien et le chat). • Compartiment tissulaire: formation anatomique définie par des barrières résistant habituellement à l’invasion tumorale. La résistance de ces barrières varie en fonction de l’agressivité de la tumeur et du type tissulaire. Ainsi le compartiment tissulaire peut varier d’un lobe à l’organe entier (foie, poumon), du muscle isolé à l’ensemble des fascias ou d’un os tout entier au membre en totalité. SUR QUEL TISSU APPUYER SES MARGES ? Selon le type de tumeur, la marge d’exérèse est capitale à définir. Les tissus graisseux, sous-cutanée, ou parenchymateux s’avèrent être des tissus propices à une invasion tumorale aisée, au contraire de tissus riches en fibres de collagène et peu vascularisés, tel que les fascia ou le cartilage, qui s’avèrent au contraire eux être des barrières naturelles à la dissémination et à l’envahissement tumoral. Inclure un fascia dans une marge de résection est une sécurité et limite la distance entre tumeur et marge d’excision. Pour mémoire, on se rapportera aux formations anatomiques suivantes. -27- Conférences sur la Grande Piste Vendredi 13 mars 2015 REGION CORPORELLE STRUCTURES ANATOMIQUES Avant-bras Fascia antébrachial Tête Fascia recouvrant les muscles temporaux Paroi thoracique latérale Muscle grand dorsal Paroi abdominale latérale Muscle transverse, muscle oblique interne, muscle oblique externe (Rq. si une seule des trois couches musculaires est réséquée il n’est pas nécessaire de combler le déficit pariétal) Paroi abdominale ventrale Tendon du muscle droit de l’abdomen et ligne blanche Région dorsale Fascia spinal dorsal, musculature paralombaire, épineuse vertébrale Cuisse Fascia lata Cette évaluation topographique étant faite, reste à définir dans l’idéal, à quelle distance doit se situer la marge chirurgicale. TYPE TUMORAL ET GRADE MARGES LATERALES Carcinome (foie, poumon, rate…) MARGES PROFONDES 1 cm 1 cm Mastocytome cutanée de grade I Sarcome osseux 1 fascia macroscopiquement sain 1 à 3 cm 1 fascia macroscopiquement sain Tumeurs cavités buccale type fibrosarcome, ostéosarcome, carcinome épidermoïde 2 cm à 3 cm 1 fascia macroscopiquement sain (ou 2 cm pour les tumeurs buccales) Sarcome sous-cutané (chien) 3 cm 1 fascia macroscopiquement sain Fibrosarcome 3 cm (à 5cm) 1 fascia (à 2) macroscopiquement sain Mastocytome de grade III 3 cm ?? 1 fascia macroscopiquement sain Tumeurs intestinales 8 cm Mastocytome cutané de grade II TYPE D’EXERESE TECHNIQUE DE DISSECTION EXEMPLE ORIGINE DES RECIDIVES LOCALES Intra-capsulaire Retrait de la tumeur par fragments. Plan de clivage intra-capsulaire Lésions bénignes ex : kyste osseux Persistance de tissu tumoral Marginale Résection de la tumeur et de la pseudocapsule. Plan de clivage représenté par la pseudocapsule et la dissection a lieu dans la zone réactionnelle Tumeurs bénignes ex : lipome Métastases satellites et à proximité Large Résection en bloc de la tumeur, de la pseudocapsule, de la zone réactionnelle et d’une partie des tissus sains. Plan de dissection dans le compartiment tissulaire à travers le tissu sain Tumeur bien localisée (ou de faible degré de malignité) ex : mastocytome Métastases de proximité Tumeur très envahissante ou à fort degré de malignité. ex : amputation Métastases à distance Radicale Résection en bloc de la tumeur et de tout le compartiment tissulaire. Plan de clivage à la limite du compartiment en tissu sain. Conférences sur la Grande Piste -28- RÈGLES TECHNIQUES SIMPLES • • • • • • • • Préparation de la région sans manipulation excessive Ligature « première » dans les région où cela est possible Dissection à distance par incision franche plutôt que par dissection mousse Fulguration des effractions tumorales Retrait des nœuds lymphatiques « en bloc » lors d’envahissement évident Rinçage des cavités en cas d’effractions tumorales ou de rupture de la tumeur Changement du jeu d’instrument et des gants (comme si il s’agissait d’un foyer septique) avant reconstruction. Comblement des espaces morts L’ANALYSE DES MARGES : TRAVAILLER AVEC LE LABORATOIRE D’ANALYSE Une étude portant sur 31 chiens atteints de mastocytome cutanés de grade II traités chirurgicalement et présentant des marges saines a mis en évidence une récidive chez 11% des animaux (Weisse C et al. J Am Anim Hosp Assoc 38, 71, 2002). La question ouverte par cette étude porte à la fois sur la détermination du grade tumoral concvernant les mastocytomes que sur l’origine de cette “récidive”, en d’autre terme la marge a-t-elle été correctement définie et analysée. Une analyse histopathologique de l’ensemble de la tumeur mais surtout des marges de résection est donc indispensable. Elle permet notamment de connaître l’infiltration de la zone réséquée et éventuellement de ré-intervenir ou de prévoir une thérapeutique adjuvante ciblée pour obtenir une élimination totale de la tumeur. Il est donc important de faire analyser l’ensemble des marges de la tumeur en reconstruisant le plus anatomiquement possible l’aspect de la partie réséquée (points de suture), en procurant au laboratoire un schéma de la résection, et en marquant les marges latérales et profondes douteuses de manière séparées et bien identifiées (fils de suture, clips vasculaires, encre de Chine…). Vendredi 13 mars 2015 Dans ce cadre, une réelle collaboration avec l’anatomopathologiste est essentielle. A la différence de la pratique hospitalière humaine où une pièce d’exérèse complète peut être fournie au pathologiste qui réalise lui-même le prélèvement, voire analysée en « extemporanée » afin que le chirurgien poursuive sa résection tumorale, c’est généralement le praticien vétérinaire qui assure le prélèvement, le conditionnement et fournit les informations à l’anatomopathologiste. Il est donc essentiel de donner toutes les informations possible à l’anatomopathologiste afin qu’en retour il donne toutes les informations dont nous avons besoin pour poursuivre le traitement. L’analyse des marges doit donc comporter plusieurs points essentiels : • orienter correctement son prélèvement • insister dans les commémoratifs sur les régions où l’exérèse n’a pu se faire selon une norme chirurgicale correcte • encrer les marges Sur ce dernier point, une étude récente vétérinaire stipule que les encres bleues ou noires sont les plus aisément reconnues sur les lames et doivent être choisies (Milovancev et al. Veterinary Surgery 42 (2013) 901–908). Pour se placer dans les meilleures conditions, il faut encrer la pièce après exérèse en respectant le recouvrement des plans, quitte à placer des sutures afin que ces plans ne se déplacent pas entre eux. L’encrage se fait alors sur toute la surface en incluant bien la tranche de la peau. Le prélèvement est laissé en séchage 5-10 mn avant d’être placé dans le formol. Bibliographie Sur demande ([email protected]) Conférences sur la Grande Piste -29- Vendredi 13 mars 2015 Stratégies anti-cancéreuses par ciblage du métabolisme énergétique : Applications chez l’homme et en médecine vétérinaire Dr Stéphane Doliger Centre Hospitalier Vétérinaire Saint Martin 74370 St MARTIN BELLEVUE Dès les années 1920, Otto Warburg a découvert que les mitochondries des cellules cancéreuses ne fonctionnaient normalement : il reçut pour cette découverte le prix Nobel de physiologie et de médecine en 1931. Mais cette particularité métabolique était jusque-là tombé en désuétude, au profit des thérapies cytotoxiques ou de la radiothérapie. Depuis 5 à 10 ans, des chercheurs s’y intéressent de nouveau, en recherche fondamentale surtout. Les publications sur les applications cliniques sont encore rares, et portent principalement sur des séries de cas cliniques. Les molécules concernées étant soit des médicaments anciens ayant des AMM dans d’autres domaines, ou des molécules faisant parties des compléments alimentaires, les laboratoires n’engagent malheureusement pas de recherche pour leurs applications potentielles en cancérologie. En contrepartie, ce sont des molécules peu couteuses et leurs effets secondaires sont bien connus et la plupart du temps peu importants. des cellules cancéreuses. De nombreuses molécules ont été testées in vitro par le Dr Schwartz et son équipe : les essais thérapeutiques de certaines molécules ont commencé chez l’homme et des essais préliminaires sont en cours chez l’animal. L’acide alpha-lipoïque (ALA) agit sur le métabolisme du glucose. Il est utilisé en médecine pour le traitement des neuropathies diabétiques. En tant que co-facteur de la pyruvate déshydrogénase (PDH), il intervient dans la transformation du pyruvate en acétyl-coA, ce qui évite son accumulation dans le cytoplasme et bloque la glycolyse. La cellule cancéreuse utilise alors la voie aérobie et la rend plus dépendante de l’apport en oxygène. Les effets secondaires possibles de l’ALA sont l’anorexie, la diarrhée, les vomissements et l’amaigrissement (effets moindres si le repas est concomitant de la prise et en cas d’augmentation progressive de la dose). Cette molécule se trouve sur internet comme complément alimentaire. Une cellule cancéreuse n’a pas le même métabolisme qu’une cellule saine. Dans cette dernière, le principal mécanisme pourvoyeur d’énergie est la phosphorylation oxydative (cycle de Krebs). Le glucose entre activement dans la cellule, il est transformé en pyruvate dans le cytoplasme (glycolyse aérobie) puis pénètre dans la mitochondrie où le cycle de Krebs (encore appelé cycle du citrate) produit des molécules d’ATP par dégradation aérobie. Dans une cellule cancéreuse, le pyruvate rentre difficilement dans la mitochondrie, il est converti en lactate dans le cytoplasme et ces lactates sont éliminés dans le micro-environnement tumoral. Ce phénomène de glycolyse aérobie est moins performant en termes de rendement énergétique. Par contre, l’effet Warburg favorise la formation de précurseurs d’acides nucléiques (voie des pentoses phosphates), de lipides (synthèse de novo de phospho-lipides membranaires grace à l’ATP citrate lyase) ou de protéines : ces synthèses sont utilisées pour la prolifération cellulaire. L’effet Warburg permet également la croissance cellulaire en situation d’hypoxie (fréquente au sein des tumeurs). L’hydroxycitrate (HCA) agit sur le métabolisme des lipides. Cette molécule est extraite d’un fruit asiatique (Garcinia cambogia). Il inhibe l’ATP citrate lyase, une enzyme hyperactive dans les cellules cancéreuses, qui permet de fabriquer des phospholipides à partir du glucose. Cette molécule est souvent utilisée en association avec l’acide alpha-lipoïque. L’acide lactique produit en excès est éliminé activement de la cellule cancéreuse et induit une acidification du microenvironnement tumoral à l’origine de chimio-résistance ou encore d’inhibition des lymphocytes infiltrants les tumeurs (TIL) entrainant une moindre efficacité de l’immunité anti-tumorale. Le ciblage de l’effet Warburg a potentiellement des applications thérapeutiques intéressantes, en bloquant l’apport énergétique Le dichloroacétate (DCA) est utilisé depuis longtemps chez l’homme dans le traitement de l’acidose lactique congénitale pour diminuer la production d’acide lactique. Il permet la transformation du pyruvate en acétyl-coA en activant la pyruvate déshydrogénase qui est dysfonctionnelle dans les cellules cancéreuses. Le DCA a été utilisé chez le chien à la dose de 5 à 10 mg/kg matin et soir avec un repas. On peut observer des effets secondaires neurologiques tels que de l’abattement, une plantigradie ou une mydriase qui sont dose-dépendants et réversibles en 24h après l’arrêt du traitement. Les inhibiteurs de la pompe à proton (IPP) présentent également un intérêt en cancérologie. La cellule cancéreuse produit des lactates en excès et les évacue activement afin de ne pas s’acidifier, grâce à des pompes à protons de type V-ATPase. Le micro-environnement tumoral s’acidifie alors, ce qui active des métallo-protéases qui facilitent la diffusion métastatique et stimulent l’angiogenèse. Ce pH acide du micro-environnement tumoral gêne la pénétration dans la cellule des agents de chimiothérapie, (qui sont généralement des bases faibles). Des Conférences sur la Grande Piste -30- études utilisant les inhibiteurs de la pompe à proton à des doses de trois à cinq fois supérieure à la dose thérapeutique (3 à 5mg/kg/j de lansoprazole) ont montré une réversion de la chimio-résistance, ou une augmentation de l’activité de la chimiothérapie métronomique. Une alcalinisation de l’eau de boisson avec du bicarbonate de sodium peut aussi être utilisée pour renforcer cette activité des IPP. La metformine, un antidiabétique oral très utilisé lors de diabète de type II chez l’homme, a montré dans une étude qu’elle diminuerait le risque de cancer chez les patients traités (mécanisme d’action mal connu). Elle est bien tolérée chez le chien et ne provoque pas d’hypoglycémie. Il convient cependant d’augmenter les doses progressivement afin d’éviter un effet anorexigène. On peut l’utiliser en adjuvant de beaucoup de chimiothérapies pour diminuer la chimio-résistance et cibler les cellules souches cancéreuses à la dose de 10 à 15mg/kg BID. Certaines formes de chimiothérapies utilisant des inhibiteurs du métabolisme des bases puriques ou pyrimidiques (5 fluorouracil, metotrexate) ou encore des synthèses protéiques (L asparaginase), peuvent être également considérées comme une forme d’approche métabolique du traitement des cancers. De nombreuses autres molécules sont utilisables et de plus en plus de chercheurs en cancérologie humaines pensent que le ciblage du métabolisme particulier des cellules cancéreuses pourrait être à l’origine d’un nouveau paradigme dans le traitement des cancers. BIBLIOGRAPHIE (non exhaustive) Sutendra G & Michelakis ED. Pyruvate dehydrogenase kinase as a novel therapeutic target in oncology. Frontiers in Oncology, mars 2013, vol 3, N° 38, pp 1 - 11. Michelakis ED, Sutendra G et al. Metabolic Modulation of Glioblastoma with Dichloroacetate. Sci Transl Med 2, 31ra34 (2010); DOI: 10.1126/scitranslmed.3000677 Michelakis ED, Webster L and Mackey JR. Dichloroacetate (DCA) as a potential metabolic-targeting therapy for cancer. British Journal of Cancer, 2008, 99 : 989-994. Bonnet S, Archer SL, Allalunis-Turner J, Haromy A, Beaulieu C, Thompson R, Lee CT, Lopaschuk GD, Puttagunta L, Harry G, Hashimoto K, Porter CJ, Andrade MA, Thebaud B, Michelakis ED. A mitochondria-K+ channel axis is suppressed in cancer and its normalization promotes apoptosis and inhibits cancer growth. Cancer Cell. 2007; 11(1):37–51. Vendredi 13 mars 2015 Screening of well-established drugs targeting cancer metabolism: Reproducibility of the efficacy of a highly effective drug combination in mice. Invest New Drugs (4): 1331- 1342, 2012 Guais A, Baronzio G, Sanders E, Campion F, Mainini C, Fiorentini G, et al. Adding a combination of hydroxycitrate and lipoic acid (METABLOC TM) to chemotherapy improves effectiveness against tumor development: experimental results and case report. Invest New Drugs.;30(1):200211,2012. Baronzio, G., Schwartz, L., Crespi, E., Guais, A., Sanders, E., Delépine, N., & Fiorentini, G. Early clinical and toxicological results of a combination of natural glycolysis inhibitors (METABLOC™) on cancer patients. Biomedical Research - India (no pubmed indexation), 23, 219-223,2012 Zagon IS, McLaughlin PJ. Naltrexone modulates tumor response in mice with neuroblastoma. Science (NY), 1983, 221 : 671–3 Abou-Issa H, Tejwani GA. Antitumor activity of naltrexone and correlation with steroid hormone receptors. Biochemical and Biophysical Research Communications, 1991, 175 : 625–630 Koo KL, Tejwani GA, Abou-Issa H. Relative efficacy of the opioid antagonist, naltrexone, on the initiation and promotion phases of rat mammary carcinogenesis. Anticancer Res, 1996, 16(4A) : 1893–1898 Berkson BM, Rubin DM, Berkson AJ. The long-term survival of a patient with pancreatic cancer with metastases to the liver after treatment with the intravenous alpha-lipoic acid/lowdose naltrexone protocol. Integr Cancer Ther., 2006 March, 5 (1) : 83–89 Berkson BM, Rubin DM, Rubin AJ. Revisiting the ALA/N (alpha-lipoic acid/low dose naltrexone) protocol for people with metastatic and nonmetastatic pancreatic cancer: a report of three new cases. Integr Cancer Ther., 2009 Dec, 8 (4) : 416–422 Donahue RN, McLaughlin PJ, Zagon IS. Low-dose naltrexone suppresses ovarian cancer and exhibits enhanced inhibition in combination with cisplatin. Exp Biol Med (Maywood), 2011 Jul, 236 (7) : 883 - 895 Donahue RN, McLaughlin PJ, Zagon IS. The opioid growth factor (OGF) and low dose naltrexone (LDN) suppress human ovarian cancer progression in mice. Gynecologic Oncology 122:382–8,2011 Michelakis ED, Webster L and Mackey JR. Dichloroacetate (DCA) as a potential metabolic-targeting therapy for cancer. British Journal of Cancer, 2008, 99 : 989-994. McLaughlin PJ, Zagon IS. The opioid growth factor-opioid growth factor receptor axis: homeostatic regulator of cell proliferation and its implications for health and disease. Biochemical Pharmacology 84:746-756, 2012 Schwartz L, Abolhassani M, Guais A, Sanders E, Steyaert JM, Campion F and Israel M : A combination of alpha-lipoic acid and calcium hydroxycitrate is efficient against mouse cancer models: Preliminary results. Oncol Rep 23: 1407-1416, 2010. Zagon IS, Donahue R, McLaughlin PJ. Targeting the opioid growth factor: opioid growth factor receptor axis for treatment of human ovarian cancer. Exp Biol Med (Maywood), 2013 May ; 238(5) : 579-87 Abolhassani M, Guais A, Sanders E, Campion F, Fichtner I, Bonte Jacques, Baronzio G, Fiorentini G, Israel M and Schwartz L : Evans JM, Donnelly LA, Emslie-Smith AM et coll. Metformin and reduced risk of cancer in diabetic patients. BMJ. 2005 Jun 4; Conférences sur la Grande Piste -31- 330 (7503) : 1304-1305. Libby G, Donnelly LA, Donnan PT et coll. New users of metformin are at low risk of incident cancer: a cohort study among people with type 2 diabetes. Diabetes Care 2009 Sep; 32(9):1620-5. Heather A. Hirsch, Dimitrios Iliopoulos, Philip N. Tsichlis, et al. Metformin Selectively Targets Cancer Stem Cells, and Acts Together with Chemotherapy to Block Tumor Growth and Prolong Remission. Cancer Res 2009 ; 69 : 7507-7511. Begoña Martin-Castillo, Alejandro Vazquez-Martin, Cristina Oliveras-Ferraros and Javier A. Menendez : Metformin and cancer : Doses, mechanisms and the dandelion and hormetic phenomena. Cell Cycle 2010, March 15, 9:6, 1057-1064 Dowling RJO, Goodwin PJ and Stambolic V. Understanding the benefit of metformin use in cancer treatment. BMC Medicine 2011, 9:33 Vendredi 13 mars 2015 Conférences sur la Grande Piste -32- Vendredi 13 mars 2015 Cas cliniques de Phytothérapie Dr Pierre May La phyto thérapie n’est pas une médecine “parallèle” ou secondaire. Elle constitue une véritable thérapie, validée par l’expérience et de nombreuses études publiées et reconnues. Elle peut être utilisée seule, c’est le cas le plus fréquent mais aussi, bien sur, en complémentarité de l’allopathie la plus dure : c’est le cas en cancérologie ou actuellement les chimiothérapies sont très souvent accompagnées par la phyto et la nutrithérapie. QUELQUES CAS CLINIQUES POUR ÉTAYER CETTE AFFIRMATION 1. LYMPHOME GASTRIQUE Comme c’est souvent le cas la chimio proposée est refusée par le propriétaire par peur d’une part et par économie ensuite. Nous proposons donc un protocole à plusieurs cibles : a. Diminuer l’inflammation gastrique et calmer les vomissements : Mélisse (antispasmodique majeur) Réglisse (anti ulcéreux et effet cortisone like par stimulation des récepteurs au cortisol) Canneberge (anti bio film des cavités buccale, gastrique et vésicale et anti oxydante majeure : ici pour lutter contre HP le germe de complication des lésions gastriques) Curcuma (anti inflammatoire N°1 de la pharmacopée mondiale et anti cancéreux validé) b. Stimuler l’immunité : systématiquement devant tout cancer. Utilisation ici de deux champignons immunostimulants majeurs de la pharmacopée : Ganoderma Lucidum associé à Coryolus Versicolor. Avec redirection de l’immunité vers les lignées Th1 au détriment des Th2 ou Th 17. Nous avons déjà là une des clefs anti cancéreuses de ces actions. c. Drainer le foie, protéger le Vésicule Biliaire et limiter les toxines digestives : association de Zéolite et de Curcuma pour les toxines et le complexe du Foie : Desmodium Chardon Marie, Artichaut. d. Permettre l’adaptation au traitement et entretenir le combat immunitaire : Ginseng Rhodiola et Vit D3. Au bout d’une année, ce chien dont le pronostic vital était de quelques semaines est toujours là et en rémission clinique. 2. INFECTIOLOGIE COMPLEXE ET CHRONIQUE Ce cas de broncho pneumonie résistante aux antibiotiques et aux corticoïdes, sur un jeune chien de 8 mois, était un défi thérapeutique. La stratégie a été la suivante : a. Stopper la toux : Pin Plantain Desmodium Réglisse. Pin : antiseptique et anti tussif + expectorant ; Plantain : anti tussif, anti spasmodique bronchique ; Desmodium : anti allergique et spasmolytique ; Réglisse : anti inflammatoire essentiel des voies respiratoires et immunomodulateur. b. Stimuler l’immunité : le choix est vaste, nous aurions pu à la place des champignons utiliser : l’Echinacée, probablement la plante la plus immunostimulante de la pharmacopée Européenne, mais aussi L’argent colloïdal, très intéressant bien que non végétal, l’extrait de pépin de pamplemousse qui a beaucoup défrayé la chronique mais qui s’avère un puissant anti infectieux ou les algues immunomodulatrices telles que l’algue Klamath ou la Spiruline. c. Drainer le Foie après la poly médication chimique délirante que cet animal avait subi malgré son très jeune âge : Chardon Marie la plante de la fonction hépatique et le Radis Noir l’hépato protecteur type qui active les deux cycles de détoxications. d. Soutenir et relancer la croissance mise à mal par ce long épisode infectieux : les bourgeons sont ici très bien indiqués car efficaces à très faible dose et très faciles à administrer. Les bourgeons de Sapin et Sequoia sont ici parfaitement complémentaires et très performants. 3. DERMATOLOGIE : L’ATOPIE Ce casse tête absolu réfractaire à presque tous les traitements, peut trouver des solutions originales et fort bien venues en complémentation des classiques mais bien décevants : Antibiotiques /Corticoïdes/ Cyclosporines. Les cibles sont encore une fois multiples et variées : a. Drainer le foie : Fumeterre : ampho cholérétique très fiable mais aussi anti prurigineuse b. Plantes de type corticoïdes ; Réglisse et bourgeons de cassis c. Plantes anti septiques de la peau : La Bardane, qui est absolument incontournable en dermato, et la Pensée sauvage qui s’adressera aux dermatites prurigineuses et squameuses sèches. d. Plantes reconstructrices de la peau et du conjonctif: l’Ortie partie aérienne ou la Prêle. e. Plantes anti prurigineuses : encore la Bardane et la Fumeterre. On associera à ce traitement par voie buccale, bien sur des topiques dans lesquels on retrouvera les Huiles végétales les plus classique du revêtement cutanée : Rose musquée du Chili, Calendula, Millepertuis, Macadamia associée bien sur à la Propolis, au gel d’Aloe Vera et aux Huiles essentielles de la peau. 4. GÉRIATRIE Nous avons en phyto thérapie toute une série de plantes très utiles pour traiter les associations pertes de cognitions, AVC, dépression d’involution et troubles du sommeil. Conférences sur la Grande Piste -33- a. Plantes vasculaires : l’association Ginkgo Biloba et Pervenche de Madagascar sont parfaitement complémentaires pour lever les ischémies et rétablir une vascularisation normale de l’encéphale. Nous complétons toujours cette formule par trois bourgeons très efficaces dans ce cas : Aulne Glutineux, Ronce et Cassis b. La dépression, si difficile à soigner en allopathie, répond très bien au Millepertuis qui s’avère un anti dépressif majeur et validé par des centaines d’études. Avec, en association : Si la dépression est plutôt liée à un déficit en sérotonine elle répondra mieux au Griffonia, si elle est liée à un déficit en Dopamine elle répondra au Mucuna. c. Les troubles du sommeil : dans ce cas de déficit en sérotonine, le Griffonia associé à l’Eschscholtzia préparera très efficacement au sommeil et permettra une nuit réparatrice. d. Les adaptogène : là aussi il faudra relancer les cortico surrénales chez cet animal âgé : le Ginseng et la Rhodiole seront les deux booster de cette petite glande épuisée par le stress chronique. e. Quelques huiles essentielles en massage ou en diffusion atmosphérique permettent de reconnecter ce sénior et aident bien la récupération des fonctions cognitives. 5. NOUS TERMINONS PAR UN CAS CLINIQUE SURPRISE Spectaculaire mais à l’issue malheureusement dramatique, sans rapport avec la thérapeutique. Vendredi 13 mars 2015 Conférences sur la Grande Piste -34- Samedi 14 mars 2015 Chirurgie des oiseaux Minh Huynh DVM, MRCVS Diplomate of European College of Zoological Medicine (Avian) I. CHIRURGIE ORTHOPÉDIQUE INDICATION : FRACTURE TRAUMATIQUE Avant d’envisager toute procédure orthopédique une évaluation attentive du patient est nécessaire. L’évaluation radiographique doit pousser le clinicien à s’interroger sur les causes de la fracture notamment si celle-ci est pathologique. Un bilan biochimique ou radiographique est toujours recommandé. La fracture n’est jamais une urgence, de ce fait, il est impératif de stabiliser l’état du patient. Cela passe par une gestion de l’état de choc et l’analgésie. La première analgésie sera délivrée par immobilisation du membre concerné. A minima, une cageothérapie stricte est impérative. Eventuellement un bandage en 8 peut être réalisé sur l’aile ou une attelle sur le membre postérieur. Comme chez les carnivores, pour immobiliser un about osseux, il est nécessaire de bloquer l’articulation distale et proximale. Si cette condition n’est pas remplie, il est préférable de ne pas faire de bandage. FRACTURES DU TIBIOTARSE Les fractures du tibiotarse sont de loin les plus fréquentes chez les oiseaux, du fait du faible rapport muscle/os de ce segment osseux. Les contraintes possibles sont nombreuses (bague, jets de fauconnerie) et incite à la plus grande prudence lors de leur mise en place. Le tibiotarse est un os triangulaire avec une cavité médullaire qui se réduit distalement. La plupart des fractures sont obliques. L’oiseau est placé en décubitus dorsal pour pouvoir manipuler la face interne et la face externe du membre. L’approche médiane est classique car il permet d’épargner les masses musculaires latérales. L’incision cutanée est réalisée le long de l’about fracturaire en avant de la veine métatarsienne médiale. Le fibularis longus et le gastrocnemien sont retractés cranialement et caudalement respectivement. La technique de choix est dite en « Tie-in » combinaison d’un enclouage interne et d’un hémi-fixateur externe. Idéalement l’abord est normograde en avant de la crête tibiale pour éviter d’endommager les ligaments croisés, le menisque et la capsule articulaire. L’insertion du clou centromédullaire est réalisée craniomédialement. Une fois que le forage est réalisé, le clou utilisé pour l’insertion est remplacé par un clou dont l’extrémité distale est coupée, de façon à ce que celui vienne buter contre la médullaire de l’os de l’about distal sans le percer. Des barres de fixation sont ensuite placées sur la face latérale du tibiotarse, idéalement sans les aligner pour augmenter la stabilité. Il est préférable d’utiliser des broches à filetage positif. Les différentes barres sont ensuite reliées entre elle avec une résine de polyméthylmétacrylate ou avec une résine industrielle (type PATTEX ND). La solidité du montage réside en l’épaisseur de la barre de connection en résine et l’épaisseur des broches utilisées. Idéalement deux barres de fixation sont nécessaires sur chaque about fracturaire. COMPLICATION Infection du site, avulsion de l’articulation du genou, du tarse, avulsion neurologique. II. CHIRURGIE DE L’ARBRE RESPIRATOIRE INDICATION : OBSTRUCTION DES VOIES RESPIRATOIRES HAUTES, STÉNOSE TRACHÉALE. L’oiseau est placé en décubitus dorsal à 45°. L’anesthésie est délivrée par une canule latérale. Le cou est placé en extension forcée vers le bas, exposant l’entrée thoracique face à l’opérateur. La peau est incisée longitudinalement. L’œsophage est repéré et séparé du plan cutané. Le jabot est également séparé et récliné vers la droite. La trachée est alors isolée. En fonction du site d’obstruction l’abord est différent. Lorsque le site de l’obstruction est haut, la trachée est incisée simplement après l’incision cutanée. Lorsque le site d’obstruction est intra-thoracique, il est nécessaire de couper les muscles sternotrachéaux pour permettre la manipulation de la trachée. Si le site d’obstruction est syringeal, une ostéotomie claviculaire peut être pratiquée pour améliorer l’accès à cette région. L’incision cutanée est étendue au-delà du sternum et les muscles pectoraux sont légèrement désinsérés. Le coracoïde est sectionné et élevé de quelques millimètre. TRACHÉOTOMIE Un point d’appui est posé distalement au site d’obstruction. La trachée est alors incisée de 50% transversalement dans sa partie ventrale pour exposer sa lumière. La fermeture de la trachée est réalisée en prenant au moins deux anneaux cartilagineux avec une ou deux sutures aposantes simples. RÉSECTION ANASTOMOSE TRACHÉALE Dans le cas d’une résection, deux points d’appuis sont posés distalement et proximalement au site d’incision. Le ligament qui court de part et d’autre de la trachée est préservé de façon à assurer la vascularisation du segment distal. Le segment trachéal Conférences sur la Grande Piste -35- est coupé sur tout son diamètre, idéalement sur moins de 4 à 6 anneaux trachéaux. Les segments sont par la suite réinsérés à l’aide de 4 sutures placés à 45° les une des autres en prenant au moins 2 anneaux trachéaux. Complication : Infection du site, avulsion des bronches, sténose cicatricielle. La manipulation de la trachée, particulièrement autours de la syrinx doit se faire de façon la plus délicate possible dans la mesure ou une avulsion et un arrachement de la bronche souche est aisément réalisé. De la même façon, une sténose cicatricielle est souvent constatée sur le site opératoire, il est nécessaire quand cela est possible de travailler avec des fils monofilament résorbable de décimale très fin (5-0 à 8-0). L’ensemble de ces procédures bénéficie largement de l’utilisation d’un endoscope per-opératoire. III. CHIRURGIE DE L’APPAREIL REPRODUCTEUR INDICATION : SALPINGITE, RÉTENTION D’ŒUF, PÉRITONITE Une antibioprophylaxie per-opératoire est conseillée. Les tissus sont particulièrement fins et friables, l’utilisation d’instruments de microchirurgie atraumatique est conseillée. De la même manière, l’utilisation d’un bistouri bipolaire est indispensable (de préférence par radiochirurgie) ainsi que l’utilisation d’un lone star retractor et d’hémoclips. Pour aborder la chirurgie coelomique deux abords sont classiquement considérés : ABORD LATÉRAL DROIT L’oiseau est plumé sur toute la cavité coelomique en avant de la 6eme côte jusqu’au cloaque, la cuisse adjacente est également plumée. La patte gauche est retractée en arrière et fixée en abduction. Une incision en demi-lune est pratiquée en avant de l’articulation coxo-fémorale. L’artère fémorale superficielle médiale est repérée en avant de l’articulation coxo-fémorale et est cautérisée. Une incision rectiligne est réalisée au niveau de la 6eme côte perpendiculaire au plan costal, légèrement au dessus des processus uncinés. La 7eme et la 8eme côte sont cautérisées puis coupées et réclinées. Le sac aérien thoracique latéral caudal est récliné dorsalement si cela est possible ou perforé. Des compresses humides sont insérées cranialement et caudalement. ABORD MÉDIAN L’oiseau est placé en décubitus dorsal. La cavité coelomique ventrale est plumée et préparée aseptiquement. La peau est incisée ainsi que le plan musculaire au niveau de la ligne blanche. Les oiseaux n’ont pas d’omentum, les anses intestinales sont donc en contact étroit avec le plan musculaire, une élévation exagérée doit être exercée lors de l’incision du plan musculaire. Lors d’un abord latéral, un emphysème sous cutané est couramment constaté en période post-opératoire, sa résolution est généralement spontanée. Il n’est pas possible de rincer la cavité coelomique si un des sacs aériens a été perforé. Pour aborder le salpinx, le sac aérien abdominal gauche est perforé. L’oviducte et l’ovaire sont généralement visible dans cet Samedi 14 mars 2015 espace. L’oviducte cranial est saisi avec des pinces atraumatiques et le ligament suspenseur est cautérisé avec un bistouri bipolaire. Généralement,l’artère craniale, moyenne et/ou caudale de l’oviducte doit être clippée. La base de l’oviducte est ensuite repérée pour être ligaturée ou clipée. La paroi musculaire est fermée de manière routinière ainsi que la peau. COMPLICATION Déhiscence de plaie, septique. emphysème sous cutané, péritonite Conférences sur la Grande Piste -36- Samedi 14 mars 2015 Principales chirurgies chez les squamates Lionel Schilliger Dip. ECZM (Herpetology) Dip. ABVP (Reptile and Amphibian Practice) Les squamates (Squamata, du latin squama : écaille), reptiles à écailles, ou saurophidiens est un vaste ordre de reptiles (Oppel, 1811) qui comprend tous les lézards, serpents et amphisbènes. En fait cet ordre regroupe les reptiles qui changent régulièrement de peau. C’est un clade qui compte actuellement 6 850 espèces répertoriées. Il est divisé en 3 sous-ordres : • Amphisbaenia : les lézards-vers, • Sauria • • Autarchoglossa : les lézards • • Gekkota : les geckos • • Iguania : les iguanes et les caméléons • Serpentes : les serpents. derme contient également des cellules pigmentaires (chargées de pigments colorés), appelées chromatophores, présentes en quantité abondante chez les espèces capables de changer rapidement de couleur de robe (ex : Anolis, caméléons…). L’activation de ces chromatophores est sous dépendance neurohormonale. La peau des reptiles est dénuée de glandes cutanées (ce qui lui confère son aspect particulièrement sec), à l’exception des pores fémoraux ou pré-cloacaux présents chez de nombreux sauriens (glandes holocrines sécrétant du musc, particulièrement développées chez les mâles). Parmi les chirurgies les plus couramment pratiquées chez ces animaux, les chirurgies sur abcès, les ovariectomies, les salpingotomies-salpingectomies, et les amputations d’hémipénis sont indéniablement les plus représentées d’un point de vue numérique en clientèle spécialisée. CONSIDÉRATIONS PRE-OPERATOIRES UN TEGUMENT PAS COMME LES AUTRES ! La peau des reptiles présente la principale particularité d’être recouverte d’écailles, c’est-à-dire de formations fortement kératinisées (béta-kératine), plus ou moins épaisses, issues de la couche cornée superficielle de l’épiderme. Elle constitue une barrière naturelle contre les agressions extérieures : les traumatismes physiques ou chimiques, la déshydratation ou l’envahissement de l’organisme par des agents pathogènes (bactéries, virus, champignons et parasites). Le tégument de ces animaux est classiquement constitué de deux structures tissulaires superposées : l’épiderme en superficie, et le derme en profondeur. L’épiderme est une véritable couverture écailleuse constituée de kératine, dont l’épaisseur, la rigidité et l’aspect sont variables sur la surface corporelle (Photo 1). Les écailles sont jointes par un tissu conjonctif finement kératinisé qui confère à la peau des reptiles un caractère particulièrement élastique. Les casques, les cornes, les crêtes, les griffes et les épines sont des excroissances épidermiques utiles pour intimider et dissuader d’éventuels prédateurs, ou pour marquer le dimorphisme sexuel. Chez les tortues, l’épiderme est composé, sur la dossière et sur le plastron de la carapace, de grandes écailles kératinisées disposées les unes à côté des autres en cartes de géographie, et en quinconce sur les ostéodermes. Le derme, sous-jacent à l’épiderme, est principalement composé de tissu conjonctif richement vascularisé et innervé. Il joue un rôle nourricier pour le tégument. Il contient parfois des plaques osseuses métaboliquement actives, appelées ostéodermes. Le Photo 1 : Ecailles ventrales de boïdé en coupe longitudinale : noter l’épaisseur du tégument et la disposition particulière de ces écailles qui se chevauchent. LA PEAU DOIT ÊTRE REFERMÉE PAR DES POINTS (OU SURJETS) ÉVERSANTS Compte tenu de la présence de béta-kératine sur la surface du tégument, l’affrontement cutanéo-dermique doit être réalisé par des points en « U » éversants (Photo 2). A défaut, la pose de points de sutures d’apposition aboutit à une déhiscence de plaie. Photo 2 : Surjet de points en « U » éversants chez un iguane vert (Iguana iguana). Conférences sur la Grande Piste -37- À L’OUVERTURE DE LA CAVITÉ CŒLOMIQUE : PEU DE DISSOCIATION « TÉGUMENT - MUSCULATURE SOUSJACENTE » Chez beaucoup de squamates (et en particulier chez les sauriens), lorsque l’on incise le tégument pour effectuer une cœliotomie, on aborde directement l’intérieur de la cavité cœlomique sans avoir à inciser les muscles sous-jacents comme on le ferait chez un mammifère (Photo 3). En effet, cette couche musculaire est généralement très fine et adhérente à la face viscérale du tégument. Cette particularité peut être surprenante de prime abord. Samedi 14 mars 2015 CHIRURGIES SUR ABCES Comme chez les mammifères, les abcès des reptiles sont des amas de pus collectés dans des cavités néoformées aux dépens des tissus environnants, détruits ou refoulés. Chez les animaux ectothermes, les abcès sont «froids» : ils se forment lentement, sans réaction inflammatoire (comme dans la tuberculose) et renferment généralement un pus ferme, grisâtre ou jaunâtre, caséeux, de structure lamellaire concentrique et circonscrit par une coque souvent épaisse de tissu conjonctif fibreux. Ce caractère solide du matériel purulent est inhérent à l’absence, dans le cytoplasme des granulocytes des reptiles, d’enzymes lysosomiales normalement responsables de la dégradation et de la liquéfaction des débris cellulaires. Cependant, il peut arriver, notamment chez les ophidiens, que ce pus soit plus fluctuant, parfois légèrement hémorragique, d’odeur alors particulièrement nauséabonde. ÉTIOLOGIE Les abcès sous-cutanés et intra-articulaires sont toujours secondaires à des traumatismes septiques perforants et provoqués : • • Photo 3 : Visualisation directe de l’intérieur de la cavité cœlomique après incision cutanée chez un iguane vert (Iguana iguana). DES PROBLÈMES DE MUE AU NIVEAU DES POINTS DE SUTURE… Comme leur nom d’Ordre l’indique, les squamates (les lézards et les serpents) sont les reptiles qui muent de la façon la plus spectaculaire, en totalité, de manière discontinue et en peu de temps. Certes, les tortues et les crocodiliens muent également, mais cette mue s’effectue chez eux de manière plus discrète et continue dans le temps. La fréquence des mues dépend de nombreux facteurs : l’espèce, la température ambiante, l’hygrométrie, le statut hormonal, l’état de nutrition, l’intégrité cutanée et l’âge. L’épiderme assure son renouvellement grâce à la fabrication de cellules neuves par sa portion germinative profonde (le stratum germinativum). Cette partie de l’épiderme synthétise, par réplication, une nouvelle génération de cellules épidermiques qui chasse alors l’ancienne génération de cellules mortes, par clivage, grâce à l’action combinée d’enzymes lytiques et à la propriété lubrifiante d’une fine couche de lymphe interposée entre ces deux feuillets. Lorsque la peau est suturée, l’exuvie ne se décolle pas au niveau de la cicatrice, elle reste adhérente aux points de sutures. Cela ne pose aucun problème particulier car ces fragments de mue se détachent en même temps que les fils et les croûtes cicatricielles au moment de leur retrait (au bout de 45 jours). Le saviez-vous ? La peau des reptiles cicatrise beaucoup plus lentement que celle des mammifères, en six semaines environ, en moyenne. Les cicatrisations par seconde intention peuvent nécessiter plusieurs mois. Cette durée de cicatrisation est d’autant plus courte que le reptile est placé à une température ambiante proche de la limite supérieure de sa Température Moyenne Préférentielle (30-32°C pour la majorité des espèces). chez les sauriens par des morsures entre congénères, liées à des conflits de dominance ou de territorialité, à de la compétition alimentaire ou aux parades nuptiales. chez les ophidiens par des morsures de rongeurs et d’ectoparasites ou par des frottements répétés contre les parois du terrarium. Les abcès profonds peuvent aussi être l’expression d’une maladie générale. Les bactéries incriminées dans la formation des abcès sont généralement des bacilles Gram négatifs (ex : Pseudomonas, Aeromonas, Actinobacillus, Klebsiella, Serratia, Pasteurella, Citrobacter, Proteus, Salmonella …), des bactéries anaérobies (ex : Clostridium, Fusarium, Bacteroïdes) et plus rarement des cocci Gram positifs (Staphylococcus, Streptococcus). SYMPTOMATOLOGIE La présence d’un abcès provoque souvent une asymétrie et un gonflement nodulaire de la région corporelle concernée. En cas d’abcès articulaire, on parle d’arthrite septique. • chez les ophidiens, les abcès, parfois multiples, peuvent être localisés en divers endroits de la surface corporelle, mais ils siègent le plus souvent au niveau de la tête, en région rostrale, ou au niveau de la base de la queue, en région cloacale. Ils peuvent aussi concerner l’espace précornéen. • chez les sauriens, les abcès sont fréquemment mandibulaires et digités. DIAGNOSTIC CLINIQUE Les abcès des reptiles se diagnostiquent à l’inspection visuelle du tégument. Ils sont généralement indolores à la palpationpression. RADIOGRAPHIQUE Un examen radiographique de la région corporelle concernée est recommandé si l’abcès se trouve au voisinage d’un os ou d’une articulation. Microbiologique. Un prélèvement pour mise en culture par écouvillonnage permet d’identifier l’agent causal (avec recherche éventuelle de mycobactéries si abcès multiples et internes). Conférences sur la Grande Piste -38- DIFFÉRENTIEL Un abcès peut être confondu avec : • une tumeur (Cf analyse anatomo-pathologique). • un mycétome (Cf analyse microbiologique). • une sialocoele si présent au niveau de la tête (Cf aspect macroscopique au moment de l’excision). • une parasitose larvaire sous-cutanée (ex : filariose des caméléons, sparganose des ophidiens). • une dermatophilose (Cf analyse microbiologique), • une papillomatose cutanée (ex : papillomatose du lézard vert européen (Lacerta viridis) (Cf analyse anatomopathologique). • une goutte articulaire et péri-articulaire, si présent dans une articulation et uricémie supérieure à 80 mg/l. THÉRAPEUTIQUE Le traitement des abcès des reptiles est chirurgical : il consiste à effectuer, sous anesthésie générale, une exérèse complète, à la curette, du pus et de sa coque, ou le cas échéant, un débridement assez large pour en extraire le magma purulent in toto. Un abcès de reptile s’opère comme une tumeur de mammifère. Un flushage du site opératoire est toujours indispensable. La plaie peut ne pas être suturée en totalité, elle peut être refermée partiellement si la béance de la zone curetée est excessive (Photo 4). Un traitement local à l’aide d’un topique antibiotique (ex : Fucidine Léo N.D, Flammazine N.D, Sulmidol N.D) est généralement suffisant. Cependant, un traitement bactéricide par voie générale (ex : enrofloxacine 5-10 mg/kg/j pendant 3040 jours) est indispensable en cas d’atteinte osseuse. Samedi 14 mars 2015 CŒLIOTOMIES La coeliotomie est aux reptiles ce que la laparotomie est aux mammifères. Cette incision de la cavité coelomique permet un abord chirurgical de tous les organes internes : le tube digestif et ses glandes annexes, l’appareil génital, le tractus urinaire, mais aussi, du fait de l’absence de diaphragme chez ces animaux, le cœur, les poumons et les sacs aériens. De ce fait, ses indications sont nombreuses : chirurgie exploratrice, rétentions d’œufs, coelomite, occlusion intestinale, colopexie, cystotomie ou biopsies. TECHNIQUE DE CŒLIOTOMIE CHEZ LES OPHIDIENS Chez les serpents, l’incision de coeliotomie doit être réalisée : • sur le côté gauche du corps, de manière à éviter de ponctionner les sacs aériens situés dans le prolongement du poumon droit, • en regard du (ou des) organe(s) à opérer, • à la jonction entre les écailles ventrales et la première rangée d’écailles latérales ou entre la première et la deuxième rangée d’écailles latérales (Photo 5). Cette voie d’abord de la cavité coelomique présente trois principaux avantages par rapport à une incision ventrale médiane : les écailles ventrales ne sont pas déformées, plissées par les points éversants de la suture cutanée, la plaie chirurgicale n’est pas souillée par le sol du terrarium et l’incision ne risque pas d’endommager la veine abdominale ventrale qui court le long des dernières portions du corps. Une fois la peau incisée, l’abord des viscères s’effectue après avoir récliné la paroi costale et disséqué la fine cloison conjonctivale qui recouvre les organes internes. Les sutures se font ensuite plan par plan, muscle puis peau, sauf chez les petits serpents pour lesquelles bien souvent seule une suture cutanée, toujours éversante, est suffisante. Photo 4 : curetage d’abcès multinodulaire au niveau de l’mémimaxillaire droit chez un python réticulé (Python reticulatus). PROPHYLAXIE La prévention des abcès consiste à : • lutter contre les ectoparasites. • éviter la cohabitation et la surpopulation dans un même terrarium, source conflits entre congénères de même sexe ou de sexes différents au moment des accouplements et de compétition alimentaire au moment des repas. • ne nourrir les ophidiens qu’avec des proies mortes, congelées, réchauffées ou fraîchement sacrifiées pour éviter les morsures. • assurer une bonne hygiène du terrarium. TECHNIQUE DE CŒLIOTOMIE CHEZ LES SAURIENS. Chez les lézards dont le corps est comprimé dans le sens dorsoventral (ex : iguane vert, téjus, varans, crocodiliens…), l’incision de coeliotomie doit être ventrale médiane ou para-médiane. L’incision paramédiane présente l’avantage de préserver la veine abdominale ventrale (le gros vaisseau appendu dans une fine membrane de conjonctif située dans le plan médian), mais elle est plus délabrante pour la paroi musculaire. Si l’incision est pratiquée par voie médiane et si la veine abdominale ventrale est endommagée, celle-ci doit être simplement ligaturée. A la fin du temps opératoire, la plaie de coeliotomie est refermée par un surjet de points en «U» éversants. Chez les espèces dont le corps est comprimé dans le sens latérolatéral (ex : caméléons), une incision para-lombaire intercostale est préconisée (Photo 6). Conférences sur la Grande Piste -39- Photo 5 : plaie de cœliotomie suturée chez un python royal (Python regius). Photo 6 : plaie de cœliotomie suturée chez un caméléon casqué (Chamaeleo calyptratus). OVARIECTOMIES Les ovariectomies des reptiles se pratiquent très rarement pour des raisons de convenance mais plutôt dans un but thérapeutique, en particulier chez les sauriens en cas de rétention folliculaire pré-ovulatoire. Cet acte chirurgical est aussi le prolongement de la salpingectomie en cas de rétention post-ovulatoire car il a été démontré que l’ablation des oviductes sans ovariectomie risque d’exposer la femelle à des pontes d’ovules ectopiques par la suite. La réalisation d’une ovariectomie chez un reptile exige bien sûr, au préalable, une parfaite connaissance de la position anatomique des gonades. MANUEL OPÉRATOIRE PRÉPARATION DE L’ANIMAL ET ANESTHÉSIE PLAIE DE COELIOTOMIE Voir Coeliotomie. Notons que chez les grands serpents (ex : boïdés), il peut s’avérer nécessaire de réaliser plusieurs petites incisions de coeliotomie en regard de l’aire de projection des ovaires (au niveau du tiers crânial de la distance reins-pancréas). Chez l’iguane vert (Iguana iguana), la plaie de coeliotomie doit être très longue de l’appendice xyphoïde jusqu’au pubis. OVARIECTOMIE. Samedi 14 mars 2015 En cas de rétention folliculaire préovulatoire et/ou d’oophorite (Photo 7), les ovaires sont les premiers organes visibles à l’ouverture de la cavité coelomique tant ils sont volumineux. Ils doivent être délicatement extériorisés hors de la cavité coelomique. Chez les sauriens, au cours de l’ablation de l’ovaire gauche, il faut prendre garde, lors de la ligature de l’ovaire, à ne pas léser la glande surrénale gauche qui est interposée entre la veine rénale et l’ovaire. Du côté droit, la glande surrénale est séparée de l’ovaire par la veine cave. Elle a, de ce fait, beaucoup moins de risques d’être lésée. Chez les ophidiens, les ovaires sont constitués d’un fin chapelet de follicules qu’il faut veiller à retirer en totalité. En cas d’ovario-salpingectomie sur une rétention d’œufs postovulatoire, les ovaires sont de taille normale et doivent être recherchés contre la face dorsale de la cavité coelomique. Ils doivent alors être reséqués en suivant la même technique que lors d’une rétention pré-ovulatoire. Photo 7 : aspect d’oophorite (complication de stase folliculaire. Ovariectomie. FERMETURE DE LA CAVITÉ COELOMIQUE Lorsque l’hémostase est bien contrôlée, la cavité coelomique est refermée par un surjet éversant de points en «U» à l’aide de fil irrésorbable. Chez l’iguane vert (Iguana iguana), en cas d’incision médiane ventrale, le tégument et la paroi musculaire sont indissociables et sont suturés simultanément. Les sutures doivent être laissées en place pendant 6 à 8 semaines minimum. RÉVEIL. Le réveil doit avoir lieu dans un environnement calme, dans un terrarium sans substrat ou sur un tapis chauffant dont la température est égale à la limite supérieure de la zone de neutralité thermique propre à cette espèce. Une assistance respiratoire à l’air ambiant doit être maintenue via la sonde d’intubation jusqu’à ce que l’animal respire seul : la reprise de la respiration spontanée peut être obtenue en pinçant le doigt ou la queue de l’animal. Le cas échéant, le doxapram (DOPRAM N.D) peut être injecté ou instillé sur les muqueuses buccales en cas d’apnée à raison de 5 mg/kg. En cas de chirurgie particulièrement longue ou sanglante, une réhydratation par voie intracoelomique, intraveineuse ou intra-osseuse devra être instaurée à raison de 20 ml/kg/24h. Un reptile ne doit jamais être considéré comme réveillé de son anesthésie si son réflexe de retournement n’est pas rétabli. Conférences sur la Grande Piste -40- SALPINGOTOMIES-SALPINGECTOMIES Les chirurgies des oviductes se pratiquent toujours, chez les reptiles, pour des raisons thérapeutiques, en cas de rétention d’œufs post-ovulatoire. En cas de salpingectomie, il est recommandé de procéder également à une ovariectomie car il a été démontré que cette précaution permet de pallier d’éventuelles pontes d’ovules ectopiques libres dans la cavité coelomique par la suite. MANUEL OPÉRATOIRE SALPINGECTOMIE OU SALPINGOTOMIE En cas de rétention post-ovulatoire, les oviductes gravides apparaissent d’emblée à l’ouverture de la cavité coelomique. Ils doivent être extériorisés avec précaution depuis l’infundibulum (la trompe) jusqu’au cervix (la jonction entre les oviductes et l’urodeum). La décision de salpingotomie ou de salpingectomie doit alors être prise en fonction de deux principaux facteurs: l’aspect macroscopique des oviductes et l’usage auquel la femelle était destinée par son propriétaire. En cas de salpingite, les oviductes et les ovaires doivent être réséqués. Si les oviductes paraissent sains et si le propriétaire ne souhaite pas stériliser son animal, alors seule une salpingotomie peut être effectuée. En cas de salpingectomie, la résection des oviductes est pratiquée comme lors d’une hystérectomie chez un carnivore domestique (ligature par transfixion des vaisseaux du mesosalpinx). Chez les serpents, les oviductes peuvent être réséqués par «morceaux» en regard de chaque incision de coeliotomie. Chez les tortues, le tractus génital est très vascularisé et une grande attention doit être portée à l’égard de l’hémostase per-opératoire. En cas de salpingotomie une incision est effectuée sur chaque oviducte (comme lors d’une opération césarienne de chatte ou de chienne) et les œufs sont acheminés par taxis vers la plaie de salpingotomie. Lorsque les oviductes sont collabés sur les œufs, il est parfois indispensable de réaliser plusieurs incisions. Ces incisions sont ensuite refermées à l’aide d’un surjet de fil résorbable. Un surjet enfouissant est généralement irréalisable du fait de l’extrême finesse de la paroi des oviductes. SUTURES DE FERMETURE DE LA CAVITÉ COELOMIQUE Voir Ovariectomie. Photo 8 : extériorisation des oviductes gravides pour réalisation d’une double salpingectomie (Iguana iguana). AMPUTATION D’UN HEMIPENIS (PARAPHIMOSIS) Les mâles squamates (les lézards et les serpents) possèdent tous deux hémipénis, érectiles qui sont logés, au repos, dans des culs Samedi 14 mars 2015 de sacs situés caudalement par rapport au cloaque et appelés poches hémipéniennes. Les mâles chéloniens et crocodiliens ne sont dotés, quant à eux, que d’un seul pénis (très peu érectile chez les crocodiliens) situé, au repos, sur la plancher du proctodeum du cloaque. Les paraphimosis sont assez fréquents chez les lézards et les tortues pendant la saison des amours. Ils sont rarissimes chez les serpents et les crocodiles. Comme chez les mammifères, le paraphimosis correspond chez les reptiles à l’incapacité, définitive ou transitoire, pour un mâle de faire réintégrer son (ou ses) organe(s) copulateur(s) à l’intérieur de son (ou de leurs) logement(s). ÉTIOLOGIE Un paraphimosis est généralement lié au rut et secondaire à une hyperexcitation sexuelle. Il peut aussi être favorisé par une inflammation de l’organe copulateur (cloacite, morsure, infection bactérienne ou mycosique des poches hémipéniennes, bouchons hémipéniens de sperme solidifié, dont la présence est souvent liée à une hypocalcémie), par une traction excessive exercée sur l’organe pendant la copulation ou par des troubles neurologiques (atonie des muscles rétracteurs ou du sphincter cloacal). SYMPTOMATOLOGIE Chez les chéloniens, cette anomalie se caractérise par la présence d’une masse volumineuse et luisante de couleur noire au niveau du cloaque. Chez les sauriens, elle se manifeste par une (ou deux) masse(s) oblongue(s) de couleur violacée dirigées caudo-crânialement (Photo 9). Fréquemment, l’organe prolabé est victime de traumatismes (frottements sur le sol du terrarium ou sur de la terre, morsures de congénères), puis de nécrose. DIAGNOSTIC CLINIQUE Le diagnostic clinique du paraphimosis ne pose pas de problème particulier. DIFFÉRENTIEL C’est en mobilisant le pénis ou l’hémipénis prolabé que l’on distingue un paraphimosis d’un prolapsus du côlon terminal ou de tout autre organe de la cavité coelomique. Le paraphimosis se différencie du prolapsus du côlon terminal par le fait que les tissus prolabés ne proviennent pas de l’intérieur du cloaque, mais de la région ventro-latérale de la base de la queue chez les sauriens ou de la portion ventrale de l’orifice cloacal chez les chéloniens. THÉRAPEUTIQUE Dans les cas les plus précoces, l’application de compresses d’eau glacée et d’un gel lubrifiant sur le pénis protrus suffit à faire réintégrer l’organe copulateur à l’intérieur de son logement. Une suture en bourse partielle du cloaque pendant une à deux semaines prévient alors les récidives. Généralement, le pénis est ischémié, endommagé par la striction liée à son hyperhémie ou mordu, et seule une amputation est envisageable. Cette amputation se pratique très simplement par suture transfixiante (le pénis ou les hémipénis sont très richement vascularisés et une très bonne hémostase doit être effectuée). Dans la mesure où les voies urinaires et spermatiques sont distinctes chez les reptiles, cette amputation n’empêche absolument pas, par la suite, l’émission d’urine. De même, chez les squamates, l’amputation d’un hémipénis ne compromet pas les capacités de reproduction de l’animal par la suite. Conférences sur la Grande Piste -41- PROPHYLAXIE Le paraphimosis est difficile à éviter. Les mâles victimes de surexcitation sexuelle (les tortues mâles notamment) peuvent être isolés des femelles et même maintenus à une température assez basse pour freiner leurs «ardeurs». La prévention des morsures du pénis ou des hémipénis consiste à éviter les conflits pendant les parades nuptiales en séparant les mâles. Photo 9 : paraphimosis chez un caméléon. Indication d’amputation de l’hémipénis concerné. PROLAPSUS DU COLON DISTAL ET COLOTOMIES/ ENTEROTOMIES/ TYPHLOTOMIES. Les prolapsus du côlon descendant (appelés aussi prolapsus du côlon terminal ou du côlon distal) sont malheureusement assez fréquents chez les reptiles en captivité et constituent un motif courant de consultation. Ce sont des affections graves et particulièrement choquantes pour les animaux qui en souffrent (mais aussi pour leurs propriétaires !) mettant toujours en jeu le pronostic vital et devant être considérées comme de véritables urgences. Chez les reptiles, on peut observer des prolapsus du côlon, de la vessie (sauf chez les ophidiens), des oviductes, ou encore du (ou des) organe(s) copulateur(s). Dans ce dernier cas, on parle alors de paraphimosis. RAPPELS ANATOMIQUES INTESTIN GRÊLE ET CÔLON. Le type de régime alimentaire des reptiles conditionne la morphologie relative des deux principaux segments du bas appareil digestif : l’intestin grêle et le côlon. Ainsi, chez les reptiles carnivores (ex: lézards insectivores, varans, tortues aquatiques, serpents), l’intestin grêle est relativement long et bien développé par rapport au côlon tandis que chez les reptiles herbivores (ex: Iguana iguana, Uromastyx), le côlon et le cæcum sont plus développés pour favoriser les phénomènes de fermentations microbiennes indispensables à la digestion de la cellulose des végétaux. Chez les tortues terrestres, l’intestin grêle débute par une anse duodénale qui se différencie de la portion qui lui fait suite par son calibre supérieur. C’est à son niveau que débouchent les voies biliaires et pancréatiques. Le reste de l’intestin grêle, de longueur réduite, décrit une anse en forme d’oméga, avec des plissements secondaires assez peu marqués. Ainsi, l’intestin grêle des tortues n’est pas nettement divisé, comme chez les mammifères, en un duodénum, un jéjunum et Samedi 14 mars 2015 un iléon. Le côlon est composé de trois parties successives : une portion ascendante, une portion transversale et une portion terminale, descendante. Il est rattaché au milieu du corps par le mésocolon qui abrite également la rate. A la jonction entre l’intestin grêle et le côlon, on trouve une dilatation excentrique, le caecum, situé dans le quart caudal droit de la cavité générale. La valvule iléo-caecale est inexistante chez les Squamates. Le caecum n’est pas présent chez tous les reptiles (par exemple, chez les serpents, il n’existe que chez les boïdés –pythons et boas). Chez toutes les espèces, la portion distale du côlon se jette dans le cloaque, une structure anatomique spécifique des reptiles et des oiseaux. CLOAQUE Les reptiles ne possèdent pas d’anus ni d’ampoule rectale. Leur tractus digestif se termine par un cloaque, un réceptacle dans lequel confluent et s’abouchent les voies urinaires, génitales et digestives. Ce cloaque est une « chambre » tri-compartimentée constituée de trois parties successives : • le coprodeum qui reçoit le bol fécal en provenance du côlon, • l’urodeum qui collecte l’urine (constituée, en proportions différentes selon le mode de vie des espèces, d’eau, d’ammoniaque, d’urée et principalement d’acide urique, le principal déchet azoté des reptiles issu du catabolisme protéique) et qui reçoit l’abouchement des oviductes et des uretères, • le proctodeum, le derniers compartiment du cloaque où se mélangent fécès et urine qui forment la fiente définitive. • La fréquence des défécations est très variable selon les espèces : les tortues défèquent généralement plusieurs fois par jour, les petits lézards insectivores en moyenne une fois par jour ou une fois tous les deux jours, les grands lézards seulement une ou deux fois par semaine, comme les serpents de petite taille. Les grands boïdés ne déféquent que toutes les deux semaines environ et les serpents arboricoles qu’une fois par mois, voire moins souvent. LES PROLAPSUS DU CÔLON DISTAL Un prolapsus du côlon descendant est toujours lié à du ténesme, c’est-à-dire à des tentatives infructueuses d’expulser, avec force et de façon répétitive, des matières fécales sans pouvoir déféquer normalement. Ce ténesme est généralement secondaire à une coprostase (une constipation), une occlusion intestinale, caecale ou colique par des corps étrangers ou, plus rarement, à une entérocolite bactérienne ou parasitaire. Les puissants efforts contractiles exercés au niveau de la musculature du côlon terminal aboutissent alors à une dévagination en doigt de gant de la muqueuse digestive hors du cloaque (Photo 10). Une hypocalcémie est un facteur favorisant le prolapsus par diminution du tonus musculaire des fibres lisses du tube digestif. Conférences sur la Grande Piste -42- Samedi 14 mars 2015 l’occlusion ou de la coprostase (généralement, ce sont des copeaux de bois, du sable, du gravier ou autres corps étrangers qui constituent l’obstacle), à réduire le prolapsus en tirant délicatement sur le côlon jusqu’à ce qu’il soit bien tendu, et à effectuer une incision de l’organe concerné par l’occlusion (colotomie, typhlotomie, entérotomie) pour en extraire les corps étrangers ou les fécalomes (Photo 11). Une fois l’obstruction intestinale levée et après avoir suturé la portion de tube digestif concernée à l’aide d’un surjet perforant puis enfouissant (caecum, intestin grêle ou côlon), il peut être utile de pratiquer une colopexie, intervention qui consiste à fixer le côlon terminal contre la paroi abdominale (en suturant sa paroi contre une des dernières côtes) afin d’éviter qu’il ne se dévagine de nouveau, même si le ténesme a disparu. La cavité cœlomique est ensuite refermée de manière conventionnelle. Photo 10 : Prolapsus du côlon distal chez un iguane vert (Iguana iguana). Un prolapsus du côlon distal est une affection aiguë particulièrement facile à identifier : il se manifeste par la présence d’une masse tissulaire anormale, dite ectopique car ressortant du cloaque. Cette masse prolabée présente une lumière pouvant être cathétérisée et la présence habituelle de matières fécales à l’intérieur de cette lumière permet d’être certain qu’il ne s’agit pas d’un prolapsus d’un oviducte, de la vessie ou encore d’un paraphimosis. Un examen radiographique du tube digestif est alors utile pour confirmer ou infirmer la suspicion d’occlusion intestinale et localiser le siège du bouchon fécal. Pendant longtemps, il était recommandé, dans les manuels de médecine vétérinaire herpétologique, de réintroduire délicatement la masse prolabée par taxis manuel à l’intérieur de la cavité coelomique, après l’avoir recouverte d’une compresse d’eau glacée et éventuellement d’adrénaline. Une suture en bourse du cloaque était alors pratiquée, totale ou partielle de manière à permettre l’évacuation de l’urine si besoin. Ce lien était laissé en place pendant quelques jours, durée pendant laquelle était instaurée une antibiothérapie à large spectre, associée éventuellement à une injection unique de corticoïde. En fait, on sait aujourd’hui que ce type de manœuvre n’est pas suffisamment interventionniste car elle expose l’animal à de fréquentes récidives. En effet, dans la mesure où l’on sait maintenant que ces prolapsus sont presque toujours liés à des phénomènes obstructifs dans l’intestin (et siégeant le plus souvent dans le caecum chez les espèces herbivores comme l’iguane vert et les tortues terrestres phytophages), il faut avoir quasi systématiquement recours à une coeliotomie pour traiter chirurgicalement le problème. La suture en bourse ne doit être entreprise que si l’on a écarté avec certitude l’hypothèse d’une occlusion cæcale et/ou colique (ex : prolapsus du colon terminal secondaire à un processus inflammatoire du tube digestif chez certains boïdés juvéniles comme les Morelia viridis). MANUEL OPÉRATOIRE L’intervention consiste alors à effectuer une incision de cœliotomie (Voir § Cœliotomies), à identifier la cause de Photo 11 : Typhlotomie chez un iguane cornu (Cyclura cornuta). PRÉVENTION Les prolapsus sont très généralement la conséquence d’ingestion de substrat en terrarium (sable, copeaux de bois, graviers, pierres, billes d’argiles…) ou de corps étrangers (feuilles de plantes décoratives en plastique). La meilleure façon de prévenir ce type de pathologie consiste donc à surveiller ces troubles du comportement alimentaire et, s’il y a lieu, à supprimer tout substrat pouvant être ingurgité par le reptile. Attention ! Les reptiles ingèrent souvent des substances minérales au sol lorsqu’ils manquent eux-même de minéraux, et en particulier de calcium. Veillez à leur fournir une supplémentation calcique lorsque cela est nécessaire (espèces végétaliennes et insectivores). De même, ils mangent du bois lorsque leur ration est trop pauvre en fibres cellulosiques. Références bibliographiques Disponibles auprès de l’auteur sur demande. Conférences sur la Grande Piste -43- Samedi 14 mars 2015 Principales chirurgies chez les tortues Norin Chai DVM, MSc, PhD Ménagerie du Jardin des Plantes, Muséum national d’Histoire naturelle Dans cette présentation, nous aborderons les procédures chirurgicales les plus pratiquées chez les tortues. La maitrise spécifique des temps préchirurgicaux est supposée acquise. La pharyngostomie est généralement indiquée lorsque l’anorexie perdure au delà de 5 jours ou si l’animal subit une perte de poids supérieure à 10 %. Elle est très couramment pratiquée chez les Chéloniens. Outre le traitement palliatif de l’anorexie, elle peut trouver son intérêt dans l’administration de médicaments PO sur des animaux difficiles. Au préalable, on estime la longueur suffisante pour atteindre l’estomac. La taille de la sonde dépend de l’animal (sonde naso-œsophagienne pour chat ou petit chien). Avant la pose, on estimera toujours le volume total de la sonde : point important pour le rinçage. Une fois le cou en extension, on introduit une pince hémostatique dans la bouche, qu’on fait saillir plus ou moins à mi chemin entre la mandibule et la carapace. Certains auteurs préfèrent à droite car la jugulaire est prise comme repère, d’autres à gauche. Fondamentalement, cela n’a aucune importance. Ensuite on ouvre légèrement la pince. On incise la peau entre les deux mors. On referme ensuite la pince et on la sort de l’œsophage pour saisir la sonde. Celleci est tirée jusqu’à la sortie de la cavité buccale. On la coude pour la repousser ensuite jusqu’au niveau de l’estomac. La sonde est ensuite suturée à la peau du cou par un laçage chinois puis fixée à la carapace (avec du sparadrap). Attention de bien «tendre» la sonde pour que l’animal ne puisse pas tirer dessus en passant ses pattes dans la boucle. Avant et après le gavage, la sonde est rincée à l’eau simple. Il est important d’insister sur ce point auprès des propriétaires. En cas d’obturation, on peut essayer de déboucher avec de l’eau chaude ou du coca, ou au pire, la reposer. La sonde peut être laissée à demeure pendant plusieurs semaines, jusqu’à la reprise de l’alimentation et même au-delà. Elle ne gêne absolument pas le comportement alimentaire normal. Elle sera retirée lorsque l’anorexie sera jugée complètement palliée. La sonde est simplement retirée sur animal maintenu vigile. Une suture de la plaie après le retrait de la sonde n’est pas obligatoire. Une simple désinfection locale suffit. Si besoin, un point cutané simple en U sera posé. La présence parfois de matériel (fortement) odorant est normale. La plaie restera néanmoins sous surveillance trois à six semaines. La cœliotomie est la base de toutes les chirurgies digestives, urinaires, de la très grande majorité des chirurgies reproductrices et de l’endochirurgie. Elle permet l’accès à la cavité cœlomique. D’une simple approche, la non compartimentation de la cavité pleuro-péritonéale chez les chéloniens, permet l’abord des gonades, reins, vessie, foie, rate et tractus intestinal. Elle peut s’effectuer ici, soit par plastrotomie, soit par la voie inguinale. La fenêtre de la plastrotomie est tracée à l’aide de la scie circulaire. Le tracé est doucement approfondi en biseau (biseautage vers l’intérieur pour bien recaler ultérieurement le volet osseux) jusqu’à l’atteinte des tissus mous. La poussière osseuse est régulièrement enlevée à l’aide d’une compresse humidifiée à la Vétédine diluée permettant parallèlement de dissiper la chaleur. Vu la très faible mobilité des viscères, cette fenêtre sera située en regards de l’organe visé. Pour une gastrotomie, une fenêtre rectangulaire enjambera les plaques humérales et pectorales. Pour une ovario-salpingectomie la fenêtre comprendra les plaques fémorales et abdominales, pour une cystotomie, les plaques fémorales et anales. Une fois la fenêtre de plastrotomie tracée et approfondi jusqu’au tissu mou (membrane cœlomique), le site est désinfecté et placé sous champs chirurgical. Le volet osseux est ensuite élevé par un mouvement de levier à l’aide d’une pince puis détachée de ses accroches musculaires. On placera ce volet dans une cupule remplie de Vétédine diluée. On peut également ne pas détacher toutes les accroches musculaires et laisser le bord ventral. La plaque ne sera donc pas totalement retirée mais restera liée au plastron. Le volet est alors dépliée délicatement pour découvrir la musculature abdominale et la membrane cœlomique (ce volet osseux sera d’ailleurs maintenu en flexion par un aide pendant toute l’opération). Dans les deux cas, on notera les deux larges veines abdominales de par et d’autre de la ligne médiane. Une incision ventrale de la membrane donne accès à la cavité cœlomique. Une fois la chirurgie des tissus mous terminée, la cavité cœlomique est refermée par un surjet avec du Vicryl ND. Si la membrane est trop abimée, on essaiera tant bien que mal de rapprocher les bords avec des points de traction. La plaque est replacée sur son site d’origine, l’ensemble est stabilisé simplement avec de la résine époxyde, colle Araldite ND, avec ou non application de lamelles fines en tissu de verre. La cœliotomie par la voie inguinale est une technique alternative à la plastrotomie. Ce site représente par ailleurs la voie d’abord par excellence de la cœlioscopie chez les Chéloniens. Cependant, la chirurgie des tissus mous par cette voie est réservée aux sujets déjà de bonne taille. Dans les temps pré-opératoires, une Conférences sur la Grande Piste -44- endoscopie nous semble très intéressante pour voir « l’état des lieux ». Le matériel d’endoscopie apportera d’ailleurs une aide non négligeable tout au long du temps opératoire : il permet de suivre et contrôler les dissections et coagulation. La chirurgie par la voie inguinale chez les Chéloniens est finalement un mixte entre l’endochirurgie et la chirurgie traditionnelle. Il reste également possible d’entreprendre cette chirurgie sans endoscopie. La tortue est « calée » en décubitus latéral avec un système de contention (matelas, cylindres), sur une source de chaleur. La table sera légèrement inclinée avec la tête surélevée : ceci par gravité, amènera les organes près de la fosse, facilitant l’accès aux organes. Les pattes arrière sont mises en extension et attachées l’une contre l’autre. Désinfection classique de la fosse préfémorale. L’incision est horizontale, à mi chemin entre le plastron et la carapace. Immédiatement sous la peau, on notera et disséquera le dépôt graisseux pour trouver deux plans musculaires, constitués respectivement de muscle oblique abdominal et du muscle abdominis transverse. Ces plans incisés, on découvre la membrane cœlomique qui est associée à la surface profonde du muscle abdominis transverse. Enfin, une ponction et dissection mousse permettent de pénétrer dans la cavité cœlomique. La topographie des organes peut être étudiée par une endoscopie préliminaire, avec ou sans insufflation. L’appareil reproducteur femelle est facilement rétractable. Une fois extériorisée, on peut avoir accès à la vessie (qui est bilobée chez les tortues). Pour une cystotomie, on peut extérioriser une portion de la vessie. Après le temps intracœlomique, la membrane cœlomique, les plans musculaires et le dépôt graisseux sont suturés en un seul plan. La peau est suturée, comme d’habitude avec des points en U éversants. Avec cette technique, on peut espérer une complète cicatrisation au bout de 1 mois. Par comparaison, avec une plastrotomie, il faut compter une convalescence complète de 1 à 2 ans. OTITE MOYENNE Les abcès de l’oreille moyenne sont fréquents chez les Chéloniens, répondent bien à la chirurgie et guérissent complètement. Les récidives résultent la plupart du temps de débridement incomplet ou d’une absence de correction des paramètres environnementaux prédisposant à ce syndrome. L’animal est placé en décubitus latéral. Une incision est effectuée sur la peau, puis sur toute l’épaisseur du tympan, le long de son bord ventral en partant à «9 heures». L’abcès est d’abord vidé par pressions : un pus solide bien caractéristique en sort assez facilement presque d’un seul tenant. La cavité tympanique est ensuite curetée. Après inspection de tous les recoins de la cavité, un flushing à base de chlorexidine en permet le rinçage et la désinfection. De même, la trompe d’Eustache est délicatement rincée pour enlever complètement tous les débris et éviter les récidives. Pendant le flushing, l’animal est positionné la tête vers le bas pour éviter une éventuelle ingestion voire une fausse déglutition de matières infectantes. Après curetage, aucune suture n’est effectuée, on obture la cavité avec une noisette de pommade cicatrisante, une cicatrisation de seconde intention permettra un recouvrement de la cavité au bout d’une dizaine de jours environ. Samedi 14 mars 2015 CHIRURGIE DE L’APPAREIL REPRODUCTEUR CHEZ LES TORTUES OVARIO-SALPINGECTOMIE PAR VOIE TRANSPLASTRALE Une foie la coeliotomie par plastrotomie effectuée, les mésovariums sont disséqués de proche en proche. La partie vaginale est ligaturée (fils résorbables décimale 2 à 3). La cavité cœlomique est fermée par un surjet (fils résorbables décimale 1,5 à 2). Attention ici la vascularisation plus importante du mésovarium par rapport à ce qui est observé chez les sauriens. OVARIECTOMIE OU OVARIO-SALPINGECTOMIE PAR LA VOIE INGUINALE La coeliotomie par la voie inguinale est une technique alternative à la plastrotomie. Ce site représente par ailleurs la voie d’abord par excellence de la cœlioscopie chez les Chéloniens. Cependant, la chirurgie des tissus mous par cette voie est réservée aux sujets déjà de bonne taille. TRAITEMENTS ORTHOPÉDIQUES DES TRAUMATISMES DE LA CARAPACE Le traitement orthopédique des fractures de la carapace fait ensuite appel à diverses techniques de stabilisation. Selon les cas, il pourra être nécessaire d’avoir recours à des plaques de contention et de vis de compression permettant une bonne coaptation des fragments d’ostéodermes. Conférences sur la Grande Piste -45- Samedi 14 mars 2015 Hyperthyroïdie féline : quel traitement choisir ? Pauline De Fornel Thibaud DESV Médecine Interne MICEN VET 58 rue Auguste Perret 94000 Créteil p.defornel&micen-vet.fr Le traitement de l’hyperthyroïdie a pour objectif de contrôler ou d’inhiber la production excessive et autonome d’hormones thyroïdiennes. Quatre types de traitement sont disponibles chez le chat, le traitement par anti-thyroïdiens oraux, l’alimentation spécifique, la thyroïdectomie et la radiothérapie métabolique (ou iodothérapie), chacun répondant à l’objectif précédent par un mécanisme d’action très différent : régulation de la sécrétion d’hormones thyroïdiennes tout en laissant le tissu anormal en place pour l’option médicale, inhibition de la production d’hormones thyroïdiennes par carence en iode pour l’option diététique, retrait du tissu thyroïdien anormal, par exérèse pour le geste chirurgical ou destruction pour la radiothérapie métabolique. Si chaque traitement a démontré largement son efficacité à travers de nombreuses publications portant sur de larges cohortes (à l’exception de l’alimentation pour laquelle le recul reste encore faible), la réussite globale du traitement repose sur l’adaptation au cas par cas de la stratégie thérapeutique. Le choix entre un traitement réversible (antithyroïdien oral, alimentation) ou irréversible (thyroïdectomie et iodothérapie), en première ou en seconde intention, dépends en effet de nombreux paramètres liés, certes à la disponibilité des traitements irréversibles, mais surtout au chat lui-même (âge, existence de complications de l’hyperthyroïdie ou d’affections concomitantes…) et à son propriétaire (disponibilité, aisance à administrer des comprimés…). 1. CHOIX D’UNE STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE Pour tout chat hyperthyroïdien, la prescription initiale d’un traitement réversible est préconisée. L’objectif est de vérifier le bénéfice pour le chat du retour à l’euthyroïdie. En effet, si traiter une hyperthyroïdie est toujours recommandé en première intention, certaines rares situations justifient l’arrêt du traitement, l’état du chat étant dégradé après normalisation de la concentration sérique en hormones thyroïdiennes. Il peut s’agir de chats présentant une affection grave concomitante à l’hyperthyroïdie, situation fréquente en gériatrie, pour laquelle l’hyperthyroïdie en stimulant par exemple l’appétit et l’activité apporte un bénéfice (tumeur, insuffisance organique et en particulier insuffisance rénale…). Une relation particulière existe en effet entre l’hyperthyroïdie et l’insuffisance rénale. Une élévation des paramètres rénaux est constatée chez les chats hyperthyroïdiens en parallèle d’une diminution des hormones thyroïdiennes et ce quel que soit le type de traitement utilisé. Ces paramètres restent dans les valeurs usuelles chez la majorité des chats, mais dépassent les valeurs usuelles chez environ 30% des chats. L’augmentation du débit de filtration glomérulaire accompagnant l’hyperthyroïdie et la baisse brutale de la perfusion rénale lors du retour à l’euthyroïdie semblent être les principaux facteurs incriminés. En effet, de par leurs effets ino- et chronotropes positifs, les hormones thyroïdiennes peuvent augmenter le débit cardiaque. De plus, elles diminuent la résistance vasculaire périphérique en dilatant les artérioles, stimulant le système rénine-angiotensinealdostérone, ce qui contribue à augmenter le débit cardiaque. L’augmentation du taux de filtration glomérulaire serait due à l’augmentation du débit cardiaque, combinée à une vasodilatation intrarénale. Une majoration d’une insuffisance rénale pré-existante est donc à craindre, et par des mécanismes similaires, la diminution des hormones thyroïdiennes sous traitement peut parfois révéler une insuffisance rénale jusque là masquée par l’hyperthyroïdie. Un tableau clinique d’hyperthyroïdie valant souvent mieux que celui d’une insuffisance rénale, ces observations appuient l’utilisation d’un traitement médical en première intention, autorisant si nécessaire le retour à la situation clinique initiale après quelques jours d’interruption. Cette précaution se justifie tout particulièrement chez les chats présentant une insuffisance rénale avérée (stades IRIS 3 et 4), des paramètres rénaux (urémie et créatininémie) proches de la limite supérieure des valeurs usuelles ou encore des signes cliniques ou biologiques pouvant laisser suspecter une fonction rénale imparfaite (polyuro-polydispie, reins de petite taille, protéinurie, isosthénurie…) (stades IRIS 1 et 2). Toutefois, aucun paramètre biologique, évaluable en routine, ne permet à ce jour d’évaluer de façon certaine, avant traitement de l’hyperthyroïdie, les chats qui verront leur fonction rénale se dégrader en euthyroïdie. La mesure du débit de filtration glomérulaire apparaît comme le paramètre le plus fiable. Dans toutes les autres situations, la nécessité d’un traitement réversible en première intention est largement controversée. En effet si les chats ayant une azotémie pré-existante au traitement de l’hyperthyroïdie ont une durée de vie incontestablement plus courte (178 jours dans une étude), les chats qui développent une azotémie après retour à l’euthyroïdie ne semblent pas à avoir de durée de survie diminuée comparativement aux chats qui ne développent pas d’azotémie (595 versus 584 jours). Il a été démontré que la fonction rénale est stabilisée un mois après iodothérapie, ce qui peut être extrapolé au traitement médical et justifier un suivi de la fonction rénale à un mois, avant toute décision thérapeutique définitive. Celle-ci pourra être Conférences sur la Grande Piste -46- proposée même si une azotémie s’installe à condition que de la qualité de vie du chat ne se soit pas dégradée. Deux options thérapeutiques peuvent alors être proposées au propriétaire : la poursuite d’un traitement médical à vie, imposant une prise quotidienne, sans oubli, du ou des comprimés, ou le recours à un traitement définitif. Cette seconde alternative est particulièrement conseillée aux chats « jeunes », aux chats tolérant imparfaitement les anti-thyroïdiens, aux propriétaires ayant des difficultés à faire avaler les comprimés ou encore aux propriétaires étourdis… Le choix entre une exérèse chirurgicale et une radiothérapie métabolique repose alors en priorité sur le nombre de nodules thyroïdiens toxiques et leur localisation. Les chats présentant deux nodules palpables constituent de moins bons candidats au geste chirurgical en raison du risque d’hypoparathyroïdie associée à une thyroïdectomie bilatérale. Ceux présentant un nodule palpable nécessitent une scintigraphie préalable si une option chirurgicale est souhaitée. Chez certains chats hyperthyroïdiens présentant des complications cardiovasculaires graves, la poursuite d’un traitement médical pendant quelques semaines est préconisée avant de recourir à un traitement définitif, afin de stabiliser le statut cardio-vasculaire de l’animal. A noter qu’il est rare qu’un traitement complémentaire à l’antithyroïdien (antihypertenseur par exemple) soit nécessaire. Seule une insuffisance cardiaque mettant en jeu à court terme le pronostic vital du chat justifie la prescription d’un traitement spécifique. Samedi 14 mars 2015 semaines et les deux tiers en quatre semaines). Un contrôle clinique et biologique (mesure de la thyroxinémie totale, examen biochimique et numération formule sanguine) est recommandé à l’issue de cette période initiale, dans le but de s’assurer de l’intérêt du traitement : amélioration clinique du chat (stabilisation ou reprise de poids et diminution de la fréquence cardiaque pour les signes les plus précoces, l’amélioration des autres symptômes pouvant être différée par rapport au retour à l’euthyroïdie) et absence de dégradation de la fonction rénale en parallèle d’une normalisation des hormones thyroïdiennes. L’objectif est d’atteindre une thyroxinémie comprise dans la moitié inférieure des valeurs de référence. A noter que le moment de la prise de sang par rapport à la dernière prise du méthimazole ou de carbimazole a peu d’importance, tant que le traitement a été régulièrement administré au cours des jours précédents le dosage. Lors d’hyperthyroxinémie persistante et une fois l’observance du traitement vérifiée auprès du propriétaire, les doses de méthimazole peuvent être augmentées par paliers de 2,5 mg (ou 5 mg), jusqu’à une dose quotidienne maximale de 20 mg. Parallèlement, les doses seront diminuées par paliers de 2,5 mg si la thyroxinémie est en deçà des valeurs de référence. Sous Vidalta ND, les doses seront modulées par paliers de 5 mg. Une administration de 10 mg un jour sur deux peut être envisagée en cas d’hypothyroxinémie. 2. LE TRAITEMENT MÉDICAL Deux antithyroïdiens oraux disposent aujourd’hui d’une Autorisation de Mise sur le Marché vétérinaire en France : le méthimazole (FélimazoleND), le carbimazole (VidaltaND). Le méthimazole, tout comme sa pro-drogue le carbimazole, bloque la synthèse d’hormones thyroïdiennes (par inhibition de l’oxydation des ions iodure en iode, de l’incorporation de l’iode à la thyroglobuline et du couplage des résidus thyrosine), sans effet cytotoxique sur le tissu thyroïdien. Sa durée de demie-vie est inférieure à cinq heures. La pharmacocinétique du carbimazole a été étudiée sur chats sains dans sa présentation à libération prolongée, le VidaltaND: pic plasmatique atteint à 6 heures après l’ingestion, pic peu marqué, persistance dans la circulation sanguine prolongée par comparaison à la présentation humaine (NéomercazoleND). Ces données justifient les posologies proposées : dose initiale de 10 à 15 mg par chat et par jour en une prise quotidienne (10 mg/jour lorsque la thyroxinémie est comprise entre 50 et 100 nmol/l et 15 mg/jour lorsque la thyroxinémie est supérieure à 100 nmol/l) ; contrôle après 10-15 jours. De nombreux protocoles sont décrits pour le méthimazoleND pour atteindre l’euthyroïdie : protocole à une administration quotidienne (5 mg par jour per os pendant 3 à 4 semaines) et protocole à deux administrations quotidiennes (2,5 ou 5 mg matin et soir pendant 10 jours). A ce jour, le protocole de référence repose sur l’administration de 2,5 mg matin et soir pendant deux semaines, conduisant à l’équilibration de neuf chats sur dix. Ce protocole apparaît plus actif que celui basé sur l’administration de la même dose totale en une seule prise (permettant d’équilibrer la moitié des chats traités en deux Les données récentes de la littérature invitent à ne pas négliger les hypothyroxinémies iatrogènes. Si peu de chats sont symptomatiques de l’hypothyroïdie (léthargie, baisse d’appétit, prise de poids, signes cutanés), l’hypothyroïdie semble par contre favoriser l’installation d’une azotémie. Une étude de 2010 identifie de plus des survies plus courtes chez les chats qui développent après traitement une hypothyroxinémie et une azotémie, comparativement aux chats en hypothyroxinémie mais non azotémiques, alors qu’il n’existe pas de différence significative de survie entre les chats azotémiques ou non azotémiques lorsqu’ils sont euthyroïdiens sous traitement. Cette donnée renforce notre conseil d’initier un traitement médical en première intention. Parfois, en dépit d’une normalisation de la thyroxinémie et d’une stabilisation des paramètres rénaux, l’apparition de signes cliniques non spécifiques (vomissements, dysorexie, apathie) est rapportée, attribués à une intolérance directe au médicament (environ 10% des cas) ou, rarement, à une hépatopathie induite (environ 2% des cas traités). Ces situations justifient une diminution de la dose ou l’arrêt du traitement et le recours à un traitement définitif de l’hyperthyroïdie. D’autres effets secondaires sont attribués: prurit facial (2 à 3% des cas), anomalies hématologiques (neutropénie, thrombocytopénie, dans 3 à 9% des cas). Ces effets secondaires justifient un arrêt du traitement, mais sont presque systématiquement réversibles alors. Ils sont communs aux deux principes actifs disponibles. Le traitement médical peut être poursuivi pour maintenir l’euthyroïdie, à vie ou en l’attente d’un traitement définitif. La plupart des chats sont équilibrés à la dose de deux comprimés de FélimazoleND à 2,5 mg par jour ou d’un comprimé de VidaltaND à Conférences sur la Grande Piste -47- 10 mg par jour. Des contrôle cliniques et biologiques trimestriels sont préconisés, dont un des principaux objectifs est de rappeler au propriétaire la nécessité d’une administration (bi)quotidienne du traitement, sous peine de difficultés d’équilibration. 3. LE TRAITEMENT DIÉTÉTIQUE Le principe du traitement diététique repose sur un apport alimentaire carencé en iode par la consommation unique de l’aliment y/d ND. Les cellules folliculaires thyroïdiennes sont ainsi limitées dans leur capacité à intégrer l’ion iodure pour être incorporé au sein des résidus tyrosine des thyroglobulines et former les hormones thyroïdiennes. La principale cause d’échec de ce traitement est l’apport dans le régime du chat d’un autre aliment, en aussi petite quantité soit-il, source d’iode. Le traitement diététique n’est donc pas envisageable chez les chats ayant accès à l’extérieur ou vivant avec des congénères nourris autrement. 4. LE TRAITEMENT CHIRURGICAL Le traitement chirurgical consiste à retirer le tissu thyroïdien à l’origine de la sécrétion autonome d’hormones thyroïdiennes et d’obtenir ainsi une guérison. Les meilleurs candidats à l’option chirurgicale sont les chats présentant une atteinte unilatérale confirmée par scintigraphie. Quelle que soit la technique chirurgicale employée, le risque d’hypoparathyroïdie est alors négligeable. Le traitement chirurgical des chats présentant une atteinte bilatérale (70% des cas) expose par contre à un risque d’hypoparathyroïdie, se manifestant par une hypocalcémie, essentiellement lorsque la thyroïdectomie bilatérale est pratiquée au cours d’une seule intervention. En effet, les parathyroïdes internes, incluses dans le parenchyme thyroïdien, sont fatalement retirées avec les thyroïdes et les parathyroïdes externes, localisées au pôle crânial de chaque thyroïde, peuvent être délicates à préserver ou ischémiées au cours de l’intervention. Le risque anesthésique lié à l’intervention justifie une équilibration médicale préalable du chat. Samedi 14 mars 2015 action spécifique sur la thyroïde sans léser de tissu environnant. Le tissu thyroïdien normal, périphérique aux nodules toxiques, mis au repos suite au rétrocontrôle négatif exercé par le tissu anormal, ne capte pas l’iode et est donc épargné, limitant ainsi le risque d’hypothyroxinémie post-traitement. A condition d’avoir pris les précaution évoquées précédemment (s’assurer des bénéfices du traitement de l’hyperthyroïdie), il s’agit d’un traitement très sûr : entre 95% et 98% des chats hyperthyroïdiens sont guéris après une seule administration, l’euthyroïdie étant progressivement atteinte dans les quelques semaines suivant l’injection : les quelques semaines suivant l’injection : 85% des chats environ dans les 2 semaines et 95% dans les 3 mois. Dans 2 à 5% des cas, une seconde injection est préconisée. Ses principaux inconvénients résident dans les contraintes inhérentes à l’emploi d’une substance radioactive : traitement réalisable dans un centre en France, hospitalisation du chat pendant 10 à 15 jours. Cette durée d’hospitalisation, définie en France par l’Autorité de Sureté Nucléaire, peut être aisément comprise par la lecture d’une récente publication, mesurant en quantité résiduelle la radioactivité des selles et urines des chats injectés à l’ode 131 au-delà de deux semaines post-injection. Les effets indésirables sont rares. Un changement de voix, le plus souvent transitoire, peut être observée de façon sporadique. Une complication plus importante est le développement d’une hypothyroïdie permanente, qui pourrait contribuer à l’apparition ou à l’aggravation d’une insuffisance rénale. Dans une étude récente, une hypothyroïdie iatrogène a été détectée entre 41 et 814 jours suite au traitement chez 7% des animaux traités, confirmée par dosage de la concentration sérique de cTSH, élevée (l’utilisation du dosage de la TSH canine a été validée chez le chat). Les chats qui développent une hypothyroïdie iatrogène suite au traitement ont besoin d’une administration de lévothyroxine biquotidienne qui pourrait contribuer à l’amélioration ou à la stabilisation des paramètres rénaux. Cette supplémentation peut n’être que transitoire, chez 16% des chats en hypothyroïdie dans l’étude citée précédemment, les concentrations de TSH se sont normalisées spontanément. 5. LA RADIOTHÉRAPIE MÉTABOLIQUE La radiothérapie métabolique, ou iodothérapie, est probablement le traitement le plus élégant de l’hyperthyroïdie féline. Elle peut être considérée à ce jour comme le traitement de choix de l’hyperthyroïdie féline. Tout comme la chirurgie, elle permet d’obtenir la guérison, mais quels que soient le nombre et la localisation des nodules et de façon non traumatique. Les rares chats hyperthyroïdiens présentant une tumeur maligne, tout particulièrement déjà métastasée, sont également des candidats à l’iodothérapie ; les carcinomes concentrent l’iode 131 moins efficacement que les adénomes et leur taille est souvent importante, des doses supérieures sont donc nécessaires pour atteindre l’euthyroïdie (10 à 30 mCi contre 3 à 5 mCi habituellement). L’association chirurgie puis radiothérapie métabolique adjuvante semble être une stratégie intéressante. Son principe repose sur l’injection intraveineuse d’iode 131I, qui capté et concentré par les thyréocytes fonctionnels, se désintègre et produit des photons gamma et des particules béta, responsable des effets cytotoxiques. Ces particules béta parcourent une distance très faible (400 µm), ce qui autorise une Lectures conseillées Becker TJ, Graves TK, Kruger JM et al. Effects of methimazole on renal function in cats with hyperthyroidism. J Am Anim Hosp Assoc 2000;36(3):215-23. Boag AK, Neiger R, Slater L et al. Changes in the glomerular filtration rate of 27 cats with hyperthyroidism after treatment with radioactive iodine. Vet Rec 2007;161:711-715. DiBartoloa SP, Broome MR, Stein BS et al. Effect of treatment of hyperthyroidism on renal function in cats. J Am Vet Med Assoc 1996;208(6):875-8. Feldman EC, Nelson RW. Feline hyperthyroidism. In: Canine and feline endocrinology and reproduction 3rd Ed. Saunders, Philadelphia. 2004:152-218. Fresnais R, Burgaud S, Horspool L. Pharmacokinetics of controlled-release carbimazole tablets support one daily dosing Conférences sur la Grande Piste -48- in cats. J Vet Pharmacol Ther 2008;31:213-9. Hibbert A, Gruffydd-Jones T, Day MJ et al. Feline thyroid carcinoma : diagnosis and response to high-dose radioactive iodine treatment. J Feline Med Surg. 2009;11:116-124. Hill’s Pet Nutrition 2012. Prescription Diet Y/D Feline Thyroid Health. http://www.hillspet.com/products/pd-feline-yd-dry. html. Lamb V, Gray J, Parkin R et al. Measurement of the radioactivity on the excreta of cats treated with iodine-131 for hyperthyroidism. Vet REc 1013 ;172 : Milner RJ, Channell CD, Levy JK et al. Survival times for cats with hyperthyroidism treated with iodine 131, methimazole, or both: 167 cases (1996-2003). J Am Vet Med Assoc 2006;228(4):55963. Naan EC, Kirpensteijn J, Kooistra HS et al. Results of thyroidectomy in 101 cats with hyperthyroidism. Vet Surg 2006;35(3):287-93. Peterson ME, Becker DV. Radioiodine treatment of 524 cats with hyperthyroidism. J Am Vet Med Assoc 1995;207(11):1422-8. Peterson ME and Guterl JN. Iatrogenic Feline Hypothyroidism : Challenges and complexities of thyroid hormone replacement in cats. Proceedings of ECVIM congress, 2014, Mainz (Germany). Riensche MR, Graves TK, Schaeffer DJ. An investigation of predictors of renal insufficiency following treatment of hyperthyroidism in cats. J Feline Med Surg 2007;doi:10.1016. Trepanier LA, Hoffman SB, Kroll M et al. Efficacy and safety of once versus twice daily administration of methimazole in cats with hyperthyroidism. J Am Vet Med Assoc 2003;222(7):954-8. Van Hoek I, Lefebvre HP, Kooistra HS et al. Plasma clearence of exogenous creatinine, exo-iohexol, and endo-iohexol in hyperthyroid cats before and after treatment with radioiodine. J Vet Intern Med 2008;22:879-885. Van Hoek I, Lefebvre HP, Peremans K et al. Short-and longterme follow-up of glomerular and tubular renal markers of kidney function in hyperthyroid cats after treatment with radioiodine. Domest Anim Endocrinol 2009;36:45-46. Williams TL, Elliott J, Syme HM. Association of iatrogenic hypothyroidism with azotemia and reduced survival time in cats treated for hyperthyroidism. J Vet Intern Med 2010;24:1086-1092. Williams TL et al. Effect on renal function of restoration of euthyroidism in hyperthyroid cats with iatrogenic hypothyroidism. J Vet Intern Med. 2014;28:1251-5. Samedi 14 mars 2015 Conférences sur la Grande Piste -49- Samedi 14 mars 2015 Pancréatites félines et insuffisance exocrine du pancréas Olivier Dossin Dr Vet, PhD, Diplomate ECVIM-CA Internal Medicine Université de Fédérale de Toulouse Midi-Pyrénées - École Vétérinaire. Contact : [email protected] La prévalence des affections du pancréas exocrine du chat a été récemment revue à la hausse grâce à la mise à disposition en routine d’outils diagnostiques plus précis comme l’échographie et certains test de biologie sanguine. PARTICULARITÉS DES PANCRÉATITES DU CHAT Le chat comme le chien sont deux espèces fréquemment atteintes par les pancréatites. Deux formes de pancréatites, aiguë et chronique sont observées chez le chat mais les formes chroniques semblent plus fréquentes en pratique. Les causes des pancréatites sont le plus souvent inconnues mais certains cas sont rattachés à une obstruction des canaux pancréatique ou une infection bactérienne (streptocoques spp, E coli en particulier dans jusqu’à 35% des cas) dont il est toujours difficile de dire si elle est une cause ou une conséquence. Chez le chat, les pancréatites sont parfois associées à une inflammation chronique intestinale et/ou une cholangite justifiant le terme de «triadite». Il est probable que l’état inflammatoire intestinal et biliaire favorise une inflammation pancréatique par reflux ou par localisation secondaire de bactéries par voie ascendante ou hématogène. ÉTUDE CLINIQUE La présentation clinique des pancréatites est peu spécifique dans l’espèce féline et en particulier ne permet pas facilement de différencier les formes aiguës des formes chroniques. Les signes cliniques dominants sont l’abattement, l’anorexie, la déshydratation, hypothermie. Environ 40 à 60% des chats atteints ont des vomissements, 10-30% de la diarrhée. Dans certains cas une masse abdominale crâniale peut être palpée. Enfin environ 25% des animaux peuvent développer une hyperthermie. La présence d’une douleur abdominale objectivable à la palpation est assez peu fréquente. Au bilan, une présentation peu spécifique qui conduit à inclure une pancréatite dans le diagnostic différentiel de nombreuses situations cliniques. APPROCHE DIAGNOSTIQUE La démarche diagnostique a pour but de confirmer la suspicion diagnostique et aussi d’en évaluer les possibles complications. Les outils de confirmation sont le dosage de la lipase pancréatique spécifique féline (fPL) et l’imagerie. Aucun des tests disponible n’a une sensibilité et une spécificité idéales et c’est la raison pour laquelle une approche diagnostique raisonnée, étayée et envisageant les autres hypothèses principales est la meilleure des démarches. Le dosage du fPL maintenant disponible en routine sous la forme quantitative (SPEC fPL) et semi-quantitative (SNAP fPL) a permis des progrès considérables dans le diagnostic des pancréatites félines. A l’image de ce qui est observé chez le chien ce test est très certainement plus sensible dans les formes aiguës que chroniques. La sensibilité varie de 55 à plus de 90% suivant les études avec une spécificité entre 65 et plus de 95%. La sensibilité et d’autant plus forte que l’on cherche à diagnostiquer une pancréatite sévère. L’échographie est le deuxième examen complémentaire de choix mais il est très fortement opérateur dépendant. Là encore les performances sont meilleures pour les pancréatites aiguës (augmentation de la taille du pancréas, hypoechogénicité hétérogène du pancréas avec hyperéchogénicité de la graisse environnante, réaction duodénale). Selon les études et l’expérience des opérateurs la sensibilité varie de 20 à 70-80%. L’échographie permet également la recherche de complications locales (abcès, kystes) ou à distance (obstruction des voies biliaires, épanchement abdominal) mais aussi d’anomalies associées (intestin, foie, voies biliaires). L’échographie peut permettre une cytoponction du pancréas pour analyse cytologique et bactériologique (aéro et anaérobie). En effet, jusqu’à 45% des pancréatites du chat sont associées à une infection bactérienne. La cytoponction doit toujours être réalisée après le prélèvement sanguin pour la mesure du fPL pour éviter une fausse augmentation secondaire à la lésion induite sur le pancréas. Le deuxième aspect de la prise en charge diagnostique d’une pancréatite comprend l’identification des complications. Un bilan biologique complet incluant une exploration rénale hépatique et électrolytique/acido-basique, une analyse d’urine et un hémogramme est nécessaire. Les hypokaliémie et hypocalcémie sont fréquentes. L’hypocalcémie ionisée <1 mmol/L peut avoir une valeur pronostique négative. La glycémie est variable mais les hypoglycémies sont plus fréquentes dans les pancréatites aiguës que dans les formes chroniques. Dans les formes sévères un bilan de coagulation doit être réalisé car une Conférences sur la Grande Piste -50- CIVD est possible et toute anomalie doit être corrigée. En cas d’épanchement abdominal, une analyse cyto-bactériologique est nécessaire car les complications septiques sont possibles et très graves. Il est recommandé de réaliser des radiographies thoraciques pour rechercher un œdème pulmonaire ou un épanchement pleural qui peuvent venir compliquer les pancréatites. Enfin, une évaluation de la pression artérielle est recommandée. Les complications locales (abcès ou kyste) sont recherchées par l’imagerie et enfin les complications à moyen et long terme (diabète sucré et insuffisance exocrine du pancréas) doivent rester présentes à l’esprit dans le suivi d’un animal atteint de pancréatite récidivante. Pour faire un diagnostic définitif de pancréatite une biopsie pancréatique peut être nécessaire mais du fait de la distribution parfois focale des lésions un résultat histopathologique normal ne permet en aucun cas d’exclure une pancréatite. Les biopsies pancréatiques sont plutôt réservées aux situations dans lesquelles des affections intercurrentes sont soupçonnées et que des biopsies intestinales ou hépatiques sont nécessaires. PRISE EN CHARGE La prise en charge est principalement symptomatique est doit reposer sur une fluidothérapie adaptée aux déficits (attention à l’hypokaliémie et l’hypomagnésémie mais aussi aux hypochlorémies en cas de vomissements sévères) et suffisante (le bas débit sanguin pancréatique est un facteur d’aggravation de l’autodigestion) et un traitement antalgique puissant. Il est recommandé de considérer les chats atteints de pancréatite comme nécessitants des antalgiques puissants de la famille des opioïdes (morphine, buprénorphine ou approche multimodale: morphine-lidocaïne-kétamine) même en l’absence de manifestations cliniques nettes. L’alimentation est un élément clef du traitement. Dans les formes aiguës, il faut réalimenter les animaux au plus vite avec un aliment de haute digestibilité en nombreux petits repas car c’est un facteur de guérison plus rapide et limitant des complications. Il ne faut pas hésiter à mettre en place une sonde pour alimentation entérale forcée si nécessaire. Le reste du traitement comprend principalement des antiémétiques qui sont à prescrire systématiquement en particulier chez les animaux ne mangeant pas même en l’absence de vomissements objectivés car parfois la nausée suffit à déterminer une anorexie persistante. Les médicaments de choix sont le métoclopramide en perfusion continue, le maropitant (utilisation hors AMM) qui présente l’avantage d’avoir un effet antalgique viscéral. Enfin, lors de pancréatite récidivante, il faut contrôler à la cobalaminémie et supplémenter en cas de besoin. Pour les pancréatites chroniques, l’aliment de choix est un aliment hyperdigestible à teneur en graisse modérée. La corticothérapie épisodique à dose anti-inflammatoire ou la complémentation en enzymes pancréatiques peuvent aider certains animaux même en l’absence de insuffisance pancréatique exocrine déclarée. Samedi 14 mars 2015 L’INSUFFISANCE EXOCRINE DU PANCRÉAS : MOINS RARE QU’ON NE LE CROIT.....! Des études récentes ont montré que le nombre de cas d’insuffisance exocrine de pancréas (IEP) diagnostiqués chez le chat avait considérablement augmenté au cours de la dernière décennie. La mise à disposition d’un test diagnostic spécifique et sensible, la meilleure médicalisation et l’augmentation de l’espérance de vie des chats expliquent sans doute ce changement. L’IEP féline est le plus fréquemment la conséquence de l’évolution d’une pancréatite récidivante qui détruit le tissu acinaire pancréatique. Il est possible d’observer dans ce contexte une destruction mixte du tissu exocrine et endocrine et d’avoir une association entre IEP et diabète sucré. Quelques rare cas d’atrophie ou d’hypoplasie ont été rapportés dans l’espèce féline mais cela reste anecdotique contrairement à ce qui est observé dans l’espèce canine. QUAND SUSPECTER UNE IEP? Il n’y a pas de prédisposition d’âge ou de race ni de sexe. Cependant, l’IEP est plutôt une maladie de chat adulte mais de rares cas sont décrits chez des animaux de moins de 6 mois et plus fréquemment chez des patients de plus de 12 ans. La présentation clinique est dominée par l’amaigrissement (90%) et la diarrhée chronique de type intestin grêle avec stéatorrhée (65%). Un aspect gras des poils en zone périnéale est parfois rapporté par les propriétaires. Des poussées de diarrhée de type colique sont également parfois observées. Les animaux atteints sont en mauvais état général avec souvent des troubles cutanés (alopécie, poils secs et cassants, syndrome kérato-séborrhéique) mais pas abattus. La polyphagie est rapportée dans environ 40% des cas. Parmi les symptômes observés chez le chat mais pas chez chien atteint d’IEP, on reconnait: dysorexie ou anorexie (45%), vomissements (20%). Ces derniers sont probablement à rattacher à la pancréatite qui évolue dans le contexte de l’IEP. Certains cas peuvent développer des complications acido-basiques très sévères et probablement liées à l’hypocobalaminémie concomitante et aussi la dysbiose intestinale qui accompagne fréquemment l’IEP. PRISE EN CHARGE DIAGNOSTIQUE DE L’IEP Le diagnostic différentiel devra comprendre insuffisances rénale chronique et hépatique, maladie tumorale et hyperthyroïdie (penser à palper la zone thyroïdienne). Il faut également rechercher les autres causes de diarrhée avec amaigrissement comme le parasitisme digestif, les entérites chroniques idiopathiques et les tumeurs intestinales. Un bilan nutritionnel doit être réalisé afin de vérifier que le régime alimentaire est correct. Puis un bilan biologique général (exploration hépatique et rénale) incluant aussi un dosage de T4 pour écarter une hyperthyroïdie sera réalisé. Une coproscopie parasitaire est indiquée en réalisant l’analyse sur 3 selles successives afin d’augmenter la sensibilité (inclure recherche de giardia et coccidies). Une alternative peut être de réaliser une vermifugation systématique à large spectre avec un produit efficace contre les giardia comme le fenbendazole. La seconde étape comprendra un bilan d’absorption des vitamines hydrosolubles (folates et cobalamine, attention exploration indispensable car la cobalamine sérique est effondrée chez pratiquement tous les chats atteints d’IEP) Conférences sur la Grande Piste -51- et une exploration échographique abdominale pour rechercher des éléments en faveur d’une atteinte intestinale (infiltration inflammatoire ou tumorale), hépatique ou une autre tumeur intra-cavitaire. Un dosage de l’immunoréactité trypsique sérique féline (fTLI) est le seul moyen de confirmer la suspicion d’IEP. C’est un test très sensible et très spécifique mais attention le test basé sur une reconnaissance antigénique est spécifique d’espèce. Il n’est donc pas possible de rechercher le fTLI avec un test canin ou humain. Un seul laboratoire réalise ce test (www. vetmed.tamu.edu/gilab) et tous les autres sous-traitent dans ce laboratoire. Le fTLI est stable dans le sérum et voyage bien. Il faut réaliser le prélèvement sur un animal à jeun depuis 12 heures. La supplémentation orale en enzymes pancréatiques ne modifie pas le test. Dans certains rares cas, le résultat du test est équivoque et il est alors recommandé de le répéter après 4 à 6 semaines en s’assurant que le chat est bien strictement à jeun depuis 12 heures car l’augmentation post-prandiale de fTLI peut conduire à des faux négatifs dans les cas limites. L’IEP est souvent associée à des maladies intercurrentes comme les entérites chroniques idiopathiques (20%), le diabète sucré (14%), les pancréatites (11%) et même la lipidose hépatique ou les cholangites. La démarche diagnostique et thérapeutique doit donc prendre en compte ces affections. CONDUITE THÉRAPEUTIQUE La conduite thérapeutique comprend trois volets: l’alimentation, l’enzymothérapie substitutive et la gestion de affections intercurrentes et complications L’alimentation doit être adaptée de bonne digestibilité en choisissant des aliments premium sans nécessairement choisir des produits spécifiques hyperdigestible sauf peut être à l’instauration du traitement. Il est idéal de fractionner les repas en 2 à 3 fois par jour. L’enzymotherapie substitutive fait appel à de la poudre de pancréas de porc lyophilisé. Seule les préparations contenant une activité catalytique élevée sont utilisables. En pratique deux produits sont facilement accessibles: Tryplase ND, spécialité vétérinaire qui est une poudre vendue en gélule et les formes humaines qui sont présentée sous forme de gélules de granules micronisés gastrorésistants (Eurobiol ND par exemple). Les recommandations de dose d’enzyme ne sont pas établies chez le chat. Il faut donc procéder par essai et rechercher la dose minimale efficace en commençant à des doses élevées pour obtenir une réponse clinique rapide (à titre indicatif et pour chaque repas Lipase: 10 000 U, amylase : 6000 U et protéase : 400 U avec des unités de pharmacopée européenne sous forme de granules gastrorésistants peuvent être utilisés). Les gélules doivent être ouvertes et bien mélangées au repas puis administrées immédiatement. Il n’est pas rare qu’avec l’évolution de la maladie les doses d’enzymes doivent être augmentées. Les hypocobalaminémies doivent être traitées par voie parentérale car la complémentation en enzymes pancréatiques ne suffit pas à normaliser l’absorption de la cobalamine (500 µg/ chat SC une fois par semaine pendant 6 semaines puis tous les mois - utiliser les formes ne contenant que de la cobalamine pas de cocktail). La première injection peut être réalisée en attendant les résultats du dosage car ce produit n’est pas toxique. Redoser la cobalaminémie pour s’assurer de l’efficacité Samedi 14 mars 2015 de la complémentation est une bonne option en particulier dans les cas de mauvaise réponse au traitement ou de rechute. Certains cas de déficit en vitamine K sont rapportés chez les chats atteints d’IEP, il faut dans ce cas après exploration de la coagulation pour faire un diagnostic, complémenter en vitamine K par voie parentérale. En cas d’échec, il faut toujours reconsidérer le diagnostic mais dans certains cas un traitement antibiotique pour stabiliser la dysbiose peut aider (métronidazole, amoxicilline-acide clavulanique, tylosine, doxycycline sont des options possibles pendant une durée de 2 à 4 semaines maximum). Certains animaux s’améliorent sous anti-acides (oméprazole 1 mg/kg deux fois par jour PO). L’existence d’un hypofolatémie doit faire suspecter une dysbiose ou une infiltration inflammatoire ou tumorale de l’intestin grèle. La réponse au traitement est le plus souvent bonne et l’amélioration clinique survient en général dans la semaine qui suit l’instauration du traitement mais elle est modulée par l’existence d’affections intercurrentes (diabète sucré, cholangites, inflammation intestinale chronique) qui peuvent compliquer la prise en charge. Malheureusement 10% des cas ne répondent pas au traitement. Lectures conseillées Bazelle J and Watson P. pancreatitis in cats. is it acute is it chronic is it significant? J Feline Med surg, 2014, 16 : 395-406. Davison LJ. Diabetes mellitus and pancreatits in cats. Cause of effect? J Small Anim Pract. 2015, 56 : 50-59. Diaz C and Carreira LM. serum ionized calcium as a prognosis risk factor in the clinical course of pancreatittis in cats. J Feline Med surg, 2014. epub ahead of print Jensen KB and Chan DL. Nutritional management of acute pancreatitis in dogs and cats. J Vet Emerg and Crit Care. 2014, 24 : 240-250. Simpson KW. Pancreatitis and triaditis in cats: diagnosis and treatment. J Small Anim Pract. 2015, 56 : 40-49. Steiner JM. Exocrine pancreatic insufficiency in the cat. Topics in Companion An Med. 2012, 27 : 113-116. Stockhaus C et al; Serial serum feline pancreatic lipase immunoreactivity concentrations and prognostic variables in 33 cats with pancreatitis. J Am Vet Med Assoc. 2013, 243 : 1713-1718. Thompson KA et al. Feline exocrine pancreatitis in cats: 16 cases (1992-2007). J Feline Med surg, 2009, 11 : 935-940. Xenoulis PG et al. Feline exocrine pancreatic insufficiency: 150 cases (abstract). J Vet Int Med. 2012, 26 : 765 Conférences sur la Grande Piste -52- Samedi 14 mars 2015 Particularités du diabète sucré dans l’espèce féline Ghita Benchekroun Dr Vet, Diplomate ECVIM-CA Internal Medicine Université de Paris-Créteil Val de Marne École Vétérinaire de Maisons Alfort. Le diabète sucré est une dysendocrinie fréquente chez le chat. Il correspond à un état d’hyperglycémie persistant provoqué par un déficit absolu ou relatif en insuline. Plusieurs classifications du diabète sucré ont été proposées. En pratique, il est intéressant de distinguer de manière schématique, les diabètes secondaires (à une autre maladie – pancréatite ou tumeurs pancréatiques, acromégalie, hypercorticisme…) ou à l’administration de médicaments hyperglycémiants) et les diabètes primaires (pour lesquels aucune maladie préexistante au développement du diabète n’a été mise en évidence). PHYSIOPATHOLOGIE Lors de diabète primaire, deux mécanismes physiopathologiques entrent en jeu : 1/une diminution de la sensibilité à l’insuline de la part des tissus périphériques et, 2/une diminution de la sécrétion d’insuline : chez le chat, deux phénomènes y participent et contribuent à la perte de fonction des cellules béta : le dépôt d’amyloïde et la glucotoxicité. Ce dernier phénomène mérite d’être particulièrement souligné. La glucotoxicité renvoie à une baisse des capacités de sécrétion (et d’expression) de l’insuline par les cellules beta des îlots de Langerhans, lorsque celles-ci sont soumises à une hyperglycémie chronique. Ces altérations fonctionnelles (puis lésionnelles) des cellules beta sont réversibles dans un premier temps puis irréversibles. Cette notion de glucotoxicité a des grandes conséquences thérapeutiques : la récupération en cours de traitement par l’animal de capacités d’insulinosécretion peut expliquer les fréquents surdosages en insuline exogène observés dans l’espèce féline et certains diabètes transitoires. Cette particularité n’admet pas d’équivalent dans l’espèce canine, ceci explique pourquoi l’équilibrage d’un diabète canin est par bien des aspects plus simple que celui d’un diabète félin. Lors de diabète secondaire, plusieurs affections peuvent être associées au diabète sucré. En particulier, l’association pancréatite – diabète sucré est possible bien que dans ce cas, il est impossible de savoir laquelle des deux pathologies (pancréatite et diabète sucré) est la cause et laquelle est la conséquence. Enfin, les glucocorticoïdes et l’hormone de croissance ont des actions diabétogènes très marqués. 80% des chats présentant un hypercortisolisme et vraisemblablement 100% des chats atteints d’acromégalie sont diabétiques. EXPRESSION CLINIQUE Le diabète sucré peut apparaître à tous les âges, mais environ 95% des chats ont plus de 5 ans. Une forte prédisposition sexuelle est observée en faveur des mâles (70-80% des cas) généralement stérilisés. Le diabète chez le chat se manifeste le plus souvent dans sa forme non compliqué, tandis qu’environ un tiers des chats présentent une forme compliqué (acidocétose et/ou hyperosmolaire). La plupart des chats diabétiques présente une PUPD qui est observée par les propriétaires dans 80% des cas environ. Ceux qui présentent un diabète sucré non compliqué maintiennent un bon appétit et ne présentent pas de vomissements, tandis que les chats atteints d’acido-cétose montrent souvent une dysorexie et des vomissements. Une particularité du chat est toutefois la possibilité d’un appétit diminué lors de forme non compliquée. Il est également important de noter que près de 1 chat sur 2 est obèse au moment du diagnostic. Une particularité du chat est la présence comme complication d’une neuropathie diabétique. Elle se traduit parfois par une planti ou palmigradie mais peut également être subclinique. Le plus souvent et de manière précoce, une difficulté à sauter est rapportée par les propriétaires. Les signes cliniques peuvent s’améliorer avec un contrôle adéquat du diabète. En revanche, à l’instar de l’espèce canine, les cataractes sont très discrètes dans l’espèce féline. DIAGNOSTIC DU DIABÈTE SUCRÉ Chez le chat, après le diagnostic du diabète sucré et de ses complications, il est souvent indiqué de rechercher une cause ou une maladie concomitante. Dans un contexte clinique évocateur, la présence concomitante d’une hyperglycémie à jeun et d’une glycosurie confirment le diagnostic dans un pourcentage élevé des cas. Cependant, le diagnostic peut s’avérer difficile pour 2 raisons. D’une part, lors de présentation clinique fruste et également lors d’hyperglycémie de stress marquée pouvant donc entraîner une glucosurie. Dans ces cas, la réalisation de bandelette urinaire au domicile hors d’un contexte de stress ou une mesure des fructosamines sériques sont indiquées. La persistance d’une glucosurie au domicile ou une valeur de fructosamines sériques élevées sont alors compatibles avec un diagnostic de diabète sucré. Certaines précautions sont toutefois à prendre dans l’interprétation des fructosamines car celles-ci dépendent de la concentration des protéines, du métabolisme des protéines et enfin de la chronicité de l’hyperglycémie. Ainsi, lors d’hypoprotéinémie, d’hyperthyroïdie ou lors d’apparition aiguë d’un diabète sucré, leur valeur peut être usuelle malgré l’existence d’un diabète Conférences sur la Grande Piste -53- Samedi 14 mars 2015 sucré. fréquent tout au long de la vie de l’animal. Parmi les complications du diabète sucré, l’analyse urinaire est incontournable afin d’exclure une cétonurie ainsi qu’une infection urinaire. En fonction des cas, d’autres examens peuvent être nécessaires (gaz du sang, NFS, examen biochimique, fPLI, examens d’imagerie). Pour ces raisons, il est de plus en plus fréquent d’encourager les propriétaires les plus motivés à se procurer un glucomètre (AlphaTrak ND) et de réaliser les courbes de glycémie au domicile. Enfin, dans certains cas exceptionnels, les hypoglycémiants oraux (glipizide de la famille des sulfamides hypoglycémiants) constituent une alternative à l’insulinothérapie. Cette alternative offre des résultats satisfaisants dans 1/3 des cas environ. Ces examens sont particulièrement indiqués lorsqu’une maladie concomitante est suspectée. Cependant, la recherche d’une endocrinopathie doit être raisonnée. D’une part une hyperactivité de l’axe corticotrope est souvent présente lors de diabète sucré et donc l’exploration d’un hypercorticisme n’est à réaliser que lorsque le diabète sucré est équilibré a minima. D’autre part, la recherche d’une acromégalie par dosage d’IGF-1 peut s’avérer faussement négative si le dosage est réalisé trop précocement c’est-à-dire dans les 6 semaines qui suivent la mise en place de l’insulinothérapie. Enfin, l’association d’un diabète sucré et d’une pancréatite semble fréquente. Aussi, lorsque ces 2 pathologies sont associées, il semble que la gestion du diabète sucré soit plus difficile en particulier en raison d’une grande variabilité de doses d’insuline nécessaires et la survenue fréquente d’hypoglycémie malgré l’utilisation de dose faible d’insuline. Il est donc recommandé de rechercher la présence d’une pancréatite lors de diabète sucré par un dosage de lipase spécifique féline (fPLI) et par une échographie abdominale. Cependant, des études supplémentaires sont nécessaires pour évaluer l’utilité du dosage des fPLI dans le diagnostic de pancréatite chez les chats diabétiques. En effet, une publication a montré une augmentation des fPLI chez 83% de chats diabétiques. La signification clinique d’un pourcentage aussi élevée est probablement discutable. TRAITEMENT Le traitement du diabète sucré repose sur la mise en place de mesures diététiques associée à une insulinothérapie. Chez le chat, le traitement doit permettre un contrôle de la glucotoxicité afin de diminuer la destruction des cellules béta pancréatiques et la lutte contre l’insulinorésistance. En effet, l’objectif est d’obtenir un état de rémission pendant lequel les chats se maintiennent en euglycémie sans nécessiter d’insuline. La prise en charge nutritionnelle est fondamentale : prise en charge de l’obésité et mise en place d’une alimentation adaptée (régime enrichi en protéines et bas en hydrates de carbone). Lors de maladie concomitante (maladie rénale chronique, pancréatite…), une ration adaptée devra alors être prescrite idéalement grâce à l’intervention d’un nutritionniste. Aujourd’hui, 2 insulines sont fréquemment utilisées chez le chat pour le traitement du diabète sucré non compliqué avec de très bons résultats (insuline porcine, Caninsulin ND et Glargine, Lantus ND). Quelle que soit l’insuline choisie, il est conseillé d’utiliser une insulinothérapie biquotidienne en première intention. Il est important de préciser au propriétaire que l’objectif thérapeutique et la rémission clinique seront atteints après 1 à 2 mois de traitement avec implication d’un contrôle hebdomadaire comprenant examen clinique et courbe de glycémie. Compte tenu de la possibilité de rémission clinique, le propriétaire doit être averti de la nécessité d’un suivi régulier, de la possibilité d’hypoglycémies et d’un ajustement de doses Pour en savoir plus Appleton DJ, Rand JS, Sunvold GD. Insulin sensitivity decreases with obesity, and lean cats with low insulin sensitivity are at greatest risk of glucose intolerance with weight gain. J Feline Med Surg 2001;3:211-228. Bennett N, Greco DS, Peterson ME, et al. Comparison of a low carbohydrate-low fiber diet and a moderate carbohydrate-high fiber diet in the management of feline diabetes mellitus. J Feline Med Surg 2006;8:73-84. Forman MA, Marks SL, De Cock HE, et al. Evaluation of serum feline pancreatic lipase immunoreactivity and helical computed tomography versus conventional testing for the diagnosis of feline pancreatitis. J Vet Intern Med 2004;18:807-815. Hall TD, Mahony O, Rozanski EA, et al. Effects of diet on glucose control in cats with diabetes mellitus treated with twice daily insulin glargine. J Feline Med Surg 2009;11:125-130. Marshall RD, Rand JS, Morton JM. Treatment of newly diagnosed diabetic cats with glargine insulin improves glycaemic control and results in higher probability of remission than protamine zinc and lente insulins. J Feline Med Surg 2009;11:683691. Nelson RW, Griffey SM, Feldman EC, et al. Transient clinical diabetes mellitus in cats: 10 cases (1989-1991). J Vet Intern Med 1999;13:28-35. Yano BL, Hayden DW, Johnson KH. Feline insular amyloid: association with diabetes mellitus. Vet Pathol 1981;18:621-627. Conférences sur la Grande Piste -54- Samedi 14 mars 2015 Urgences oculaires : ce qu’il faut savoir pour une bonne prise en charge de son patient Hervé Laforge Docteur vétérinaire DESV ophtalmologie Dipl. ECVO En ophtalmologie, toute lésion peut entraîner dans les heures qui suivent son apparition des dommages irréparables comme la perte de la vision, une douleur permanente, un déficit fonctionnel ou une altération esthétique. La prévention de la perte ou de l’altération de la vision est, bien entendu, une priorité compte-tenu de la nature de cet organe noble heureusement pair qu’est l’oeil. Reconnaître un caractère d’urgence à une lésion ne signifie pas nécessairement agir avec précipitation. Il faut, avant de mettre en œuvre le traitement approprié, faire un examen complet du globe et de ses annexes, et, au besoin, un bilan général. BILAN OPHTALMOLOGIQUE ANAMNÈSE Le vétérinaire recueillera les commémoratifs soit par téléphone, permettant ainsi de donner les premiers conseils, soit en examinant l’animal een mettant en relation les symptômes observés avec la race, le mode de vie, les événements survenus. EXAMEN DE L’ŒIL À DISTANCE On apprécie l’aspect du globe, des annexes et de l’ensemble de la tête. On teste les réflexes (sensibilité, photomoteur direct et consensuel, menace, suivi d’une boule de coton). EXAMEN GÉNÉRAL Il a pour but de permettre de savoir si on peut anesthésier sans risque le patient et si les dommages oculaires ne sont pas associés à d’autres lésions . EXAMEN SOUS ANESTHÉSIE On examine successivement : • Les paupières • Le système lacrymal • La conjonctive et la membrane nictitante • La cornée et la sclère • La chambre antérieure et l’iris • Le cristallin • Le segment postérieur • L’orbite URGENCES MEDICALES • • • • • • • • • Conjonctivite aiguë Plaie cornéenne superficielle Ulcère cornéen superficiel Brûlure chimique ou physique Uvéite aiguë Glaucome aigu Hyphéma Contusion Cécité brutale URGENCES CHIRURGICALES • • • • • • • • • • Conjonctivite néonatale Luxation du globe Plaie des paupières Plaie de la cornée Ulcère cornéen profond Corps étranger Luxation du cristallin Glaucome Abcès rétrobulbaire Fracture de l’orbite Les différentes affections relevant de l’urgence se manifestent par de la douleur, une modification de l’aspect de l’œil (rougeur, perte de transparence, modification de position, une perte de la vision. Si les deux premières sont faciles à observer par le propriétaire, il n’en va pas de même pour la perte de la vision, notamment si elle est unilatérale. La prise en charge rapide des urgences ophtalmologiques nécessite à la fois des moyens humains et matériels. Si la majorité des affections peuvent être traitées par la majorité des vétérinaires, un petit nombre nécessitent le recours à une structure de spécialiste. La perte de chance peut être invoquée lorsque tout n’a pas été mis en œuvre d’emblée pour traiter au mieux la maladie oculaire. Conférences sur la Grande Piste -55- Samedi 14 mars 2015 Luxation de la glande nictitante : Traitement chirurgical Laurent Bouhanna Docteur Vétérinaire Titulaire du DESV d’ophtalmologie Lieu d’exercice : Clinique vétérinaire – 17 Bd des Filles du Calvaire – 75003 PARIS www.ophtavet.com MOTIF DE CONSULTATION Le propriétaire présente son animal parce qu’il a constaté une modification brutale de l’aspect de l’œil et a remarqué la présence d’une masse charnue rosée au niveau du canthus interne Il s’agit généralement d’un jeune chiot, âgé de 3 à 12 mois, mais quelques chats peuvent être touchés (les burmeses, par exemple). Initialement l’atteinte est unilatérale mais le risque qu’elle devienne bilatérale existe. Cette masse peut devenir, dans certains cas, très inflammatoire et gonfler légèrement en deux jours. C’est alors que l’écoulement peut devenir mucopurulent suite à une surinfection bactérienne secondaire. DÉMARCHE DIAGNOSTIQUE Comme cette affection est facile à diagnostiquer à l’examen clinique, les examens complémentaires ne sont pas particulièrement nécessaires. Il faut toujours effectuer un test de Schirmer car beaucoup de races prédisposées à la luxation de la glande nictitante souffrent à l’âge adulte également de kératoconjonctivite sèche. Il faut examiner minutieusement l’autre œil et prévenir le propriétaire des risques de luxation de la glande de cet œil afin de voir avec lui s’il envisage une intervention chirurgicale prophylactique sur cet œil lors de la correction du premier. DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL • Luxation de la glande nictitante • Eversion du cartilage de la membrane nictitante • Conjonctivite plasmocytaire (plasmocytome) • Tumeurs (rare) • Kyste de la membrane nictitante (rare) • Procidence de la membrane nictitante (énophtalmie, syndrome de Claude Bernard-Horner, tétanos, douleur oculaire, etc.) SOINS À EFFECTUER Mis à part les soins généraux pré- et postopératoires et l’application du traitement topique prescrit, cette affection demande très peu de soins spécifiques. POINTS À RETENIR LORS DE L’EXAMEN CLINIQUE • Vérifier l’autre œil: cette affection est souvent bilatérale. • Essayer de remettre la glande en place manuellement. Si elle n’est pas trop volumineuse elle peut rester en place un jour ou deux, ainsi elle ne s’hypertrophie pas plus et se trouve protégée des lésions jusqu’au jour prévu de l’intervention (mais de toutes façons, l’intervention est nécessaire). Si la glande est hypertrophiée, elle ne restera pas en place. • Vérifier la glande lors d’éversion du cartilage. L’éversion • • peut précéder une luxation totale de la glande. En fait certaines races peuvent être présentées en consultation en ne présentant qu’une éversion du cartilage et celleci est traitée avec succès. Mais très peu de temps après, l’animal revient avec une luxation de la glande nictitante. Par conséquent, il faut toujours vérifier la glande nictitante des animaux présentés avec ce qui semble n’être qu’un problème de cartilage. Effectuer un test de Schirmer en particulier chez les animaux des races prédisposées ou chez les animaux plus âgés. NE JAMAIS EXCISER LA GLANDE RAPPELS ANATOMIQUES ET PHYSIOLOGIQUES La glande nictitante se trouve enfouie dans la partie ventromédiale de la membrane nictitante. Elle est lâchement fixée sur le tissu périorbitaire et à la base du cartilage de la membrane nictitante. Elle sécrète la portion aqueuse du film lacrymal contribuant à un tiers de celui-ci (le reste provient de la glande lacrymale principale). OPTIONS THÉRAPEUTIQUES MÉDICALES Le traitement médical n’est pas une option à long terme du traitement de la luxation de la glande nictitante. Cependant, si la glande est hypertrophiée et inflammée, l’association par voie topique de corticoïdes et parfois par voie générale d’AINS permet de réduire l’œdème et facilite l’intervention chirurgicale. Si la consultation s’effectue un certain temps après la luxation, on note souvent le développement d’une surinfection bactérienne, il est alors conseillé d’adjoindre une antibiothérapie topique pendant quelques jours avant d’entreprendre le traitement chirurgical. Les cas atypiques survenant chez les vieux chiens peuvent être associés à une kératoconjonctivite sèche. Chez ces patients, si la production lacrymale est restaurée et la glande remise en place manuellement, il n’est parfois pas nécessaire d’entreprendre un traitement chirurgical. Du fait de l’augmentation du frottement provoqué par l’absence de la phase aqueuse des larmes, la membrane nictitante frotte plus lorsqu’elle se déplace ce qui peut entraîner une luxation de la glande (imaginer par analogie des essuie-glaces se déplaçant sur un pare-brise sec ; cela permet de comprendre comment la glande peut être amenée hors de sa position). Par conséquent, la correction de l’anomalie lacrymale et la remise en place manuelle de la glande peut suffire chez ces patients. OPTIONS THÉRAPEUTIQUES CHIRURGICALES Le traitement de choix consiste à repositionner chirurgicalement Conférences sur la Grande Piste -56- la glande nictitante et deux techniques sont principalement entreprises en routine : l’enfouissement de la glande par formation d’une poche à la base de la membrane nictitante ou la fixation de la glande sur le rebord orbitaire. L’exérèse chirurgicale de la glande ne peut être que fortement déconseillée, bien qu’elle soit malheureusement encore effectuée parfois. Comme les races de chiens qui présentent une luxation de la glande ont également tendance plus tard à l’âge adulte à souffrir d’une kératoconjonctivite sèche et qu’il est clairement démontré que l’ablation de cette glande entraîne une diminution de la production lacrymale mise en évidence par le test de Schirmer, l’exérèse de la glande ne peut être recommandée. Beaucoup d’éleveurs sont encore favorables au retrait de la glande, car c’est une technique rapide, relativement bon marché et qui, bien évidemment, permet le traitement immédiat. Cependant la kératoconjonctivite sèche qui peut se développer ultérieurement sera plus sévère si la glande est retirée et, dans ce cas, il sera nécessaire d’entreprendre des traitements médicaux onéreux, bien souvent pendant toute la vie de l’animal. Malheureusement, même si l’on sait qu’il existe un lien entre l’ablation de la glande et la baisse de la production lacrymale, il n’y a aucun moyen de prédire quels sont les chiens qui développeront une kératoconjonctivite sèche et ceux qui y échapperont. Cependant, après avoir expliqué tous les risques de manière à ce que les propriétaires réalisent bien qu’en effectuant l’ablation de la glande suivie d’une suture rapide, ils peuvent à ce stade compromettre la santé de l’œil de leur chien à long terme, il se peut que les propriétaires restent inflexibles et demandent malgré tout absolument l’ablation de la glande. S’ils insistent pour que le praticien opère l’animal en conséquence, celui-ci se trouve obligé d’entreprendre une intervention qu’il considère comme n’étant pas l’idéal pour le patient. Il peut être alors judicieux de faire signer au propriétaire un formulaire de décharge afin qu’il réalise bien que l’ablation chirurgicale n’est pas recommandée par les ophtalmologues et qu’elle peut entraîner des complications à long terme. On peut espérer ainsi que les propriétaires accepteront le repositionnement de la glande. Actuellement la méthode de repositionnement la plus répandue est la technique d’enfouissement (ou méthode de la poche) légèrement modifiée (technique décrite ici). Sous anesthésie générale, la membrane nictitante est éversée à l’aide de points de positionnement ou de pinces de fixation en prenant soin de ne pas les placer sur le bord libre de la membrane nictitante ou sur le cartilage. Cela provoquerait, dans les deux cas des lésions et modifierait l’effet d’essuie-glace du bord libre de la membrane nictitante. Des incisions elliptiques sont effectuées de part et d’autre de la glande luxée suivie d’une dissection mousse en direction centrifuge par rapport à la glande. Les incisions doivent traverser la conjonctive et le tissu sous-jacent, et être suffisamment profondes pour que la suture soit suffisamment résistante (si elles sont trop superficielles, la suture va cisailler la conjonctive très fine). La glande en elle-même ne doit pas être incisée. S’il existe une éversion du cartilage de la troisième paupière, la partie anormale peut être retirée à ce moment. Les incisions sont suturées par un surjet allant de dehors en dehors de chaque incision et passant au-dessus de la glande de Samedi 14 mars 2015 manière à la faire entrer dans une « poche » formée d’un repli de conjonctive. Les extrémités des incisions sont laissées ouvertes pour permettre l’évacuation de la sécrétion lacrymale. Les nœuds peuvent être enfouis dans la face bulbaire de la membrane nictitante (selon la technique originelle. Le fil de suture le plus adapté est le Vicryl 5/0 ou 4/0 si la glande est particulièrement hypertrophiée ou chez les chiens de race de grande taille. Le traitement postopératoire comporte des antibiotiques topiques et des AINS systémiques. Il faut prévenir les propriétaires que la membrane nictitante apparaîtra rouge et gonflée après l’intervention et que cela peut prendre 2 à 4 semaines pour qu’elle récupère son aspect normal. Le risque maximal d’échec s’observe environ 3 à 4 semaines après l’intervention car les fils de suture commencent à se résorber. Il est donc très important de surveiller de près ces patients durant le premier mois qui suit l’intervention. POINTS CLÉS À RETENIR LORS DE CETTE CHIRURGIE • Cette intervention est bien plus facile à effectuer sous grossissement. • Si le cartilage de la membrane nictitante est éversé, il faut retirer la portion éversée via l’incision placée le plus près du bord libre de la membrane nictitante avant de remettre en place la glande. • Il faut placer les nœuds sur la face palpébrale de la membrane nictitante. • Le surjet s’effectue en partant du globe et en se dirigeant vers l’extérieur de la membrane nictitante : de cette façon, la pointe de l’aiguille est toujours dirigée à l’opposée de la cornée, ce qui élimine tout risque d’ulcération par inadvertance. • Éviter les corticoïdes topiques après l’intervention, car cela pourrait affaiblir le fil de suture plus tôt ce qui augmenterait les risques de récidives de la luxation. PRONOSTIC Le taux de réussite à long terme est important, toutefois il existe des risques de récidive de luxation de la glande, en particulier chez certaines races de chiens comme le Mâtin de Naples et les autres mastiffs comme nous l’avons déjà vu, ainsi que chez les bouledogues anglais. Chez ces derniers, le nombre de récidives est peut-être plus lié au plus grand nombre de cas qu’à une véritable prédisposition. Il faut donc prévenir les propriétaires de la nécessité éventuelle d’une seconde intervention chirurgicale. Si c’est le cas, il faudra faire tout son possible pour s’assurer de sa réussite, car il est toujours plus difficile d’intervenir une deuxième fois. Il sera peut-être prudent dans ce cas de référer l’animal. Voici quelques conseils pour améliorer le taux de réussite. L’administration topique de corticoïdes avant l’intervention peut diminuer l’inflammation glandulaire mais il ne faut pas en administrer après l’intervention car ils ralentissent la cicatrisation des plaies et augmentent le risque de rupture des sutures. Le fil de suture choisi peut être de plus fort diamètre, toutefois cela entraîne des réactions tissulaires et un œdème plus importants et augmente le taux d’infection bactérienne. Il faut donc trouver le juste équilibre. Il est également possible de renforcer le surjet utilisé dans la technique d’enfouissement, en rapprochant les fils ou en plaçant un deuxième surjet au dessus du premier de manière à doubler le repli sur la glande. Toutefois, il faut s’attendre Conférences sur la Grande Piste -57- là encore à une réaction tissulaire plus importante. Certains auteurs suggèrent de terminer l’intervention en effectuant un recouvrement de la cornée par la membrane nictitante afin de maintenir à plat cette membrane et faciliter la cicatrisation normale. Cependant, en pratique, cela n’est généralement pas nécessaire. Une fois l’intervention terminée, il se produit un léger prolapsus de la membrane nictitante ainsi qu’un œdème et une hyperhémie plus ou moins marqués de celle-ci pendant les 2 à 4 semaines suivantes. En général, tout rentre dans l’ordre et la production lacrymale reste normale. De ce fait, on peut dire aux propriétaires que le pronostic est généralement bon. Pour en savoir plus La vidéo de l’intervention en live est visible sur : www.youtube.com/watch?v=T1DIwnBbleg Samedi 14 mars 2015 Conférences sur la Grande Piste -58- Samedi 14 mars 2015 Protocoles de prise en charge d’une cataracte, d’une luxation du cristallin et d’un glaucome Dr. Thierry Azoulay Vétérinaire Spécialiste en Ophtalmologie CVH, 28, Fbg de Saverne 67000 Strasbourg PROTOCOLE DE PRISE EN CHARGE D’UNE CATARACTE RECONNAÎTRE L’AFFECTION DÉFINITION La cataracte correspond à une opacification partielle ou totale du cristallin. Elle doit être distinguée de la sclérose du cristallin qui correspond au vieillissement normal du cristallin et se manifeste par une opalescence de celui-ci. ÉTIOLOGIE Les cataractes peuvent être congénitales, héréditaires, métaboliques (diabète, hypocalcémie), iatrogènes, traumatiques, post-inflammatoires ou séniles. LES PRINCIPAUX SIGNES CLINIQUES La cataracte est habituellement évidente lorsqu’elle est présente. Cependant il importe de noter les éléments suivants : 1. Stade de maturité de la cataracte : elle peut être immature, mure ou hypermature. Cet état détermine le degré d’urgence de la prise en charge mais aussi les risques éventuels de complications. Il y a donc un impact direct sur le taux de réussite de l’intervention. 2. La rapidité d’installation de la cataracte : une cataracte diabétique s’installe habituellement très rapidement et l’œdème du cristallin qui l’accompagne constitue un facteur de complication non négligeable qu’il importe de prendre en considération en adaptant le délai de prise en charge et la stratégie chirurgicale. Un traumatisme du cristallin provoque le plus souvent une cataracte d’apparition brutale qui s’accompagne d’une uvéite phaco-clastique violente lors de rupture capsulaire. Une prise en charge rapide est également nécessaire. 3. La présence de signes inflammatoires : des synéchies iridocristalliniennes, une modification de couleur de l’iris, une hypotension oculaire, une rougeur ciliaire, un retard de dilatation sont autant d’éléments en faveur d’une uvéite associée à la cataracte. Son traitement est indispensable avant d’envisager une chirurgie. ÉTABLIR UN BILAN LÉSIONNEL EXAMEN CLINIQUE L’évaluation de la fonction visuelle passe par la mise en œuvre du réflexe de clignement à la menace, du test de la boule de coton, du réflexe d’éblouissement modifiés en cas d’atteinte des voies optiques afférentes. Il est important de noter la présence d’une baisse de l’acuité visuelle préalablement à l’installation de la cataracte car celle-ci pourrait prouver que la baisse de vision provient d’une autre affection oculaire. Ainsi l’atrophie rétinienne progressive peut s’accompagner secondairement d’une cataracte. Dans ce cas, les réflexes photo-moteurs peuvent encore être présents même si la plupart du temps ils sont modifiés. L’examen attentif de toutes les structures oculaires est indispensable afin de rechercher une uvéite, une instabilité du cristallin, une anomalie embryonnaire qui accompagne la cataracte… EXAMENS COMPLÉMENTAIRES Une mesure de la pression intraoculaire (PIO) est indispensable afin de rechercher un risque de glaucome (PIO>20 mm Hg) ou d’uvéite (PIO>10 mm Hg). L’électro-rétinographie permet de valider le bon fonctionnement des photorécepteurs avant d’entreprendre une intervention chirurgicale. L’échographie permet d’identifier des anomalies dans le segment postérieur impossibles à observer du fait de la cataracte telles qu’un décollement de rétine, une hyalite, une persistance de l’artère hyaloïde, une déchirure capsulaire postérieure ou équatoriale… Elle permet en plus de déterminer la taille de l’implant. ADAPTER LA PRISE EN CHARGE Une fois le bilan préopératoire accompli et le patient sélectionné (absence de contre-indications, propriétaire motivé, sujet suffisamment compliant), un entretien avec le propriétaire doit permettre d’obtenir son consentement éclairé (devis, complications éventuelles). Une préparation médicale, variable selon le chirurgien, est prescrite : instillation d’AIS et AINS plusieurs jours avant l’intervention, port d’une collerette et d’un harnais 24h avant le rendez-vous opératoire… La période postopératoire comprend parfois une hospitalisation durant les premières 24-48 heures afin de surveiller le patient et notamment sa PIO (risque d’hypertension intraoculaire notamment dans les 6 heures qui suivent l’intervention. Des contrôles sont ensuite proposés à J1, J7, J14 puis plus espacés. Un traitement médical habituellement anti-inflammatoire est prescrit à la discrétion du chirurgien. PROTOCOLE DE PRISE EN CHARGE D’UNE LUXATION DU CRISTALLIN RECONNAÎTRE L’AFFECTION DÉFINITION Une luxation du cristallin correspond à un déplacement de celui-ci après rupture de la zonule qui constitue son système suspenseur. La luxation peut être antérieure, à cheval sur l’iris ou postérieure. En cas de rupture partielle, on parle de sub-luxation. Conférences sur la Grande Piste -59- ÉTIOLOGIE On distingue les luxations primaires liées à une prédisposition raciale présentant une anomalie zonulaire des luxations secondaires consécutives à d’autres affections telles que glaucome, cataracte, uvéite… LES PRINCIPAUX SIGNES CLINIQUES La luxation antérieure du cristallin est habituellement évidente surtout lorsqu’il existe une cataracte. Lors de luxation postérieure, il est parfois possible d’observer le cristallin déplacé dans la cavité vitréenne. Des signes indirects tels qu’un iridodonesis (tremblement du bord pupillaire de l’iris qui ne repose plus sur le cristallin), une disparition des 2ème et 3ème image de Purkinje Samson sont également des éléments en faveur d’une ectopie cristallinienne. Une sub-luxation du cristallin laisse apparaître un croissant aphaque (sans cristallin) à l’endroit de sa désinsertion zonulaire et peut se manifester par un phaco-donesis c’est-àdire un tremblement du cristallin lié à son défaut de maintien. La présence de vitré dans la chambre antérieure est parfois le premier témoin d’une instabilité cristallinienne. ÉTABLIR UN BILAN LÉSIONNEL EXAMEN CLINIQUE : L’évaluation de la fonction visuelle passe par la mise en œuvre du réflexe de clignement à la menace, du test de la boule de coton, du réflexe d’éblouissement modifiés en cas d’atteinte des voies optiques afférentes. La présence d’un œdème cornéen en regard du point de contact entre l’endothélium et le cristallin luxé indique une irritation chronique. Un œdème cornéen plus diffus est au contraire le témoin d’une hypertension oculaire. La présence de vitré dans la chambre antérieure ou dans l’aire pupillaire constitue également un risque d’obstruction au drainage de l’humeur aqueuse et donc d’hypertension. L’examen du fond d’œil permet de localiser un cristallin luxé postérieurement ou d’identifier un décollement rétinien consécutif au déplacement intra-capsulaire du cristallin. EXAMENS COMPLÉMENTAIRES : Une mesure de la pression intraoculaire (PIO) est indispensable afin de rechercher un risque de glaucome (PIO>20 mm Hg). L’électro-rétinographie est rarement mise en œuvre lors de luxation du cristallin car il s’agit le plus souvent d’un incident soudain sans modification progressive de la rétine. L’échographie permet par contre d’identifier des modifications du vitré (hyalite, hémorragie…), un décollement de rétine ou un cristallin luxé postérieurement. Un test génétique pour rechercher le gène ADAMTS17 permet également d’évaluer le risque de luxation dans certaines races prédisposées. ADAPTER LA PRISE EN CHARGE Un traitement anti-inflammatoire par voie générale est mis en place le plus souvent ainsi qu’un traitement anti-glaucomateux en cas d’hypertension intraoculaire (cf traitement médical du glaucome). PROTOCOLE DE PRISE EN CHARGE D’UN GLAUCOME RECONNAÎTRE L’AFFECTION DÉFINITION (DUBIELZIG 2010) : Le(s) glaucome(s) est (sont) une maladie neuro-dégénérative pour laquelle, dans le cas du chien, l’hypertension intraoculaire constitue le facteur de risque le plus important. Samedi 14 mars 2015 ÉTIOLOGIE Les glaucomes peuvent être primaires et concernent alors essentiellement des races prédisposées. Leur connaissance permet d’apporter un indice supplémentaire lors du diagnostic. Ils peuvent être également secondaires et sont la conséquence dans ce cas d’une affection initiale telle que cataracte, luxation du cristallin, uvéite, tumeur, dépôt de pigments dans l’angle irido-cornéen… LES PRINCIPAUX SIGNES CLINIQUES : Le glaucome se manifeste chez l’homme par l’apparition de signes fonctionnels (baisse de l’acuité visuelle, douleur et céphalée selon l’acuité de la crise) parfois difficiles à observer chez les animaux. L’impact sur la vision sera plus évident au propriétaire en cas de cécité préexistante de l’œil adelphe. La rougeur oculaire objectivée par la dilatation des veines épisclérales, l’œdème cornéen et la mydriase constituent la triade majeure des signes cliniques. MESURE DE LA PRESSION INTRAOCULAIRE : Celle-ci permet de confirmer l’hypertension intraoculaire et tout en confirmant l’atteinte glaucomateuse, d’évaluer l’impact sur la vision en fonction de son importance. Elle est idéalement mesurée en utilisant un tonomètre à aplanissement ou à rebond. ÉTABLIR UN BILAN LÉSIONNEL ÉVALUATION DE LA FONCTION VISUELLE : lors de glaucome, la papille optique et les cellules ganglionnaires sont les premières à souffrir. Ces structures jouent un rôle majeur dans la vision et leur altération a des conséquences directes, le plus souvent irréversibles, qu’il convient d’explorer lors de la prise en charge d’un glaucome. On utilise en premier lieu le réflexe de clignement à la menace, le test de la boule de coton, le réflexe d’éblouissement qui seront modifiés en cas d’atteinte des voies optiques afférentes. Le réflexe photomoteur peut être modifié du fait de la mydriase hypertensive et difficile à interpréter. Cependant la pupillométrie chromatique qui consiste à analyser ce réflexe en utilisant des longueurs d’onde chromatiques données devrait permettre une fois standardisée d’identifier plus précisément l’impact du glaucome sur les cellules ganglionnaires. L’électrorétinographie conventionnelle est moins intéressante en première intention car les modifications de tracés sont tardives lors de la maladie glaucomateuse. ÉVALUATION DES AUTRES STRUCTURES OCULAIRES Un glaucome peut s’accompagner d’un cortège de lésions secondaires qui généralement seront le témoin d’une présentation tardive du patient et donc d’une situation irréversible : hydrophtalmie (ou buphtalmie), luxation du cristallin, hémorragie intraoculaire, décollement de rétine, atrophie rétinienne… ÉVALUATION DE L’ŒIL ADELPHE : En cas de glaucome, l’évaluation concerne aussi l’œil adelphe afin d’identifier ses facteurs de risque car il représente le plus souvent à ce stade l’unique recours visuel. Il convient donc d’identifier une prédisposition au glaucome primaire en réalisant une gonioscopie (examen de l’angle irido-cornéen) ainsi qu’une échographie haute fréquence de la fente ciliaire. Un examen ophtalmologique attentif permettra également d’identifier une éventuelle instabilité du cristallin (phacodonesis, iridodonesis, vitré dans le segment antérieur), la présence d’une tumeur ou de Conférences sur la Grande Piste -60- pigments potentiellement à l’origine d’un glaucome secondaire. ADAPTER LA PRISE EN CHARGE LE TRAITEMENT MÉDICAL 1. Traitement médical d’urgence : • Mannitol à 10 ou 20 % en perfusion intraveineuse, 1 à 2 g/ kg, 1goutte par seconde. Son action permet de déshydrater rapidement les milieux intraoculaires (humeur aqueuse et vitré) et dure 6 à 12h. Attention aux risques d’œdème pulmonaire chez l’insuffisant cardiaque. • Acétazolamide (Diamox ®) en I.V, 5-10 mg/kg (flacons de 500 mg disponibles en pharmacie), agit en 10 minutes avec un effet maximal en 2-3 heures. Cet inhibiteur de l’anhydrase carbonique (IAC) permet de diminuer la sécrétion d’humeur aqueuse ; son action est puissante (jusqu’à 40% de baisse de la PIO). Relai avec la forme orale à 10 mg/kg/j 2 fois par jour (comprimés dosés à 250 mg). Il induit de la polypnée et parfois des troubles digestifs. Les effets secondaires sont plus marqués chez le chat. • Latanaprost (Xalatan® collyre) 2 instillations par jour travoprost (Travatan collyre® ) ou bimatoprost (Lumigan collyre 0,3 mg/ml®) peuvent être également utilisés. Ils sont souvent très efficaces chez le chien (beaucoup plus inconstants chez le chat) mais ont un effet pro-inflammatoire et provoque un myosis. Il n’est pas conseillé de l’utiliser en cas de sécclusion pupillaire et d’iris bombé ou lorsqu’il existe une incarcération de vitré dans l’aire pupillaire. • Paracentèse en cas d’échec • Injection de dexaméthasone (0,1-0,2 mg/kg) afin de diminuer l’éventuelle inflammation concomitante et d’avoir un effet neuroprotecteur. • A chaque fois que cela est possible, un traitement étiologique est initié. 2. Traitement médical chronique • Dorzolamide (Trusopt® collyre) ou brinzolamide (Azopt ® collyre) 2-3 fois par jour. Ces IAC sont préférés à l’acétazolamide car mieux tolérés, notamment lors d’une utilisation à long terme. • Latanoprost (Xalatan®), Travoprost (Travatan®) ou bimatoprost (Lumigan®) • Collyres associant plusieurs principes actifs : bêtabloquant et pilocarpine (Timpilo 2, Timpilo 4, Cartepilo® collyres), dorzolamide et timolol (Cosopt® collyre), latanaprost et timolol (Xalacom® collyre). • Neuroprotecteurs et antioxydants : maléate de timolol (Timoptol® collyre 0,5 %), méthylprednisolone et minocycline. D’autres molécules sont en cours d’évaluation. LE TRAITEMENT CHIRURGICAL Une fois le patient stabilisé, un traitement chirurgical peut être envisagé. On distingue 2 situations : le glaucome visuel et le glaucome avec perte irréversible de la vision. 1. Glaucome visuel : On privilégie dans ce cas un traitement conservateur au cours duquel on réalise un cycloaffaiblissement. La photo-coagulation des corps ciliaires est pour l’instant la solution la plus efficace pour diminuer la PIO: elle peut être réalisée par voie externe (voie sclérale) ou par voie interne (endo-oculaire). Une nouvelle technique prometteuse utilisant des ultra-sons est en cours de validation chez le chien. Il est également possible d’augmenter le drainage de l’humeur aqueuse par des Samedi 14 mars 2015 techniques filtrantes mais les drains utilisés ont tendance à se boucher rapidement. 2. Glaucome avec perte irréversible de la vision : La solution de choix consiste à mettre en place une prothèse d’évisceration ou lorsqu’elle n’est pas possible, à énucléer LES PROTOCOLES 1. Glaucome terminal 2. Glaucome aigu 3. Dépistage anormal Conférences sur la Grande Piste -61- Samedi 14 mars 2015 Comment gérer les chiens agressifs Valérie Dramard Un chien agressif est un chien qui présente des comportements agressifs fréquents ou dans des contextes qui ne devraient pas en déclencher. On considérera alors que le chien souffre d’une affection comportementale dont un des symptômes est l’agressivité. Une agression comme tout comportement est multifactorielle, la prise en charge d’un chien agressif sera donc toujours multimodale (environnementale, relationnel, médicale) . L’entretien avec les maîtres, l’observation directe du comportement du chien et son examen clinique permettent de préciser de quels types d’agression il s’agit et de distinguer deux situations. Soit l’agressivité est considérée comme « normale » dans le contexte ou elle s’est produite (comme par exemple, une agression par irritation d’un chien qu’on punit dans son lieu de couchage), et c’est sur le contexte et les relations que les maîtres entretiennent avec leur chien qu’il faudra agir (thérapie comportementale). Soit l’agressivité est liée à une affection comportementale où dominent par exemple un déficit des auto-contrôles ou de la peur, et c’est un traitement médicamenteux qui devra être envisagé en plus d’une thérapie comportementale adaptée. La dangerosité du chien qui doit être évaluée parallèlement (pronostic) dépend de la taille du chien, du diagnostic établi et des ressources du système familial. Conférences sur la Grande Piste -62- Samedi 14 mars 2015 Pour une utilisation optimale des phéromones chez les carnivores domestiques Muriel Alnot Perronin DMV, Comportementaliste diplômée des ENVF Consultations en référé à Paris Chercheur et enseignant à l’IRSEA. Institut de recherche en Sémiochimie et Ethologie Appliquée. Département d’Ethologie et neurosciences. Tél +336 15 39 43 87 - [email protected] DÉFINITION Le terme « phéromone » vient du grec pherein (transporter) et hormân (exciter). Karlson et Lüsher sont les premiers à utiliser ce mot en 1959 et en donnent la définition suivante : « Une phéromone est une substance (ou un mélange de substances) qui, après avoir été sécrétée à l’extérieur par un individu (émetteur), est perçue par un individu de la même espèce (récepteur) chez lequel elle provoque une réaction comportementale spécifique, voire une modification physiologique. » C’est une substance qui intervient dans la communication intraspécifique, et qui par opposition aux « hormones » n’est pas secrétée dans l’organisme mais à l’extérieur de celui-ci. Aujourd’hui, le terme de « phéromones » ayant donné lieu à différentes polémiques, il a été remplacé par un terme plus adapté à l’ensemble des substances concernées : les sémiochimiques; Les sémiochimiques peuvent être définis comme les différents « jus » ou assemblages de petits composés chimiques volatiles (acides carboxyliques, cétones, alcools, aldéhydes terpènes, alcanes, parfois associées à des amines et putrescines perceptibles et désagréables pour le nez) servant à la communication dans une espèce donnée ou entre espèces différentes. PRINCIPALES CLASSES Les premiers classements tiennent compte du mode d’action connu : Karlson (1960) propose deux catégories de phéromones, selon que leur mode d’action emprunte la voie gustative ou la voie olfactive. Wilson (1962) propose une classification actuellement encore évoquée, d’une part, les phéromones qui déclenchent une réaction immédiate (releasers) et d’autre part les phéromones qui la modifient (primers) sans changement immédiat, provoquant la naissance d’un nouveau comportement dans une situation donnée. Puis en 2010, le terme phéromone étant à la fois restrictif et inadapté à l’ensemble des substances impliquées dans la communication chimique, Patrick Pageat évoque la notion de « Chemonet ©», regroupant ainsi tous les « sémiochimiques », dont les phéromones. Pageat distingue deux catégories de sémiochimiques : • Les « Métabosèmes » (dont les phéromones) qui concernent les messages physiologiques / métaboliques des individus • ou une population d’individus Les « Idiosèmes » qui concernent les informations de l’individu (sorte de carte d’identité) MODE D’ACTION Contrairement aux odeurs, le fonctionnement des sémiochimiques ne nécessite pas d’apprentissage. Leur fonctionnement fait appel à un mécanisme « de type réflexe » directement du bulbe « olfactif accessoire » vers le système limbique et l’hypothalamus sans passage par le cortex. La production des sémiochimiques s’effectue dans différentes glandes sébacées (faciales, anales, podales…mammaires) La détection se fait après un « flehmen » (chez le chat) ou parfois un « tongueing / licking» (chez le chien) au moyen de l’organe voméronasal (OVN) ou organe de Jacobson (1813). Les phéromones actuellement connues ont été répertoriées selon leurs fonctions: sexuelles (Eléphant, Mites…), d’alarme (fourmis, Carnivores…), territoriales (Chat, antilope, rhinocéros…), de familiarisation (Chat, tigre, lion…), attachement /adoption (PC, LP, CV, CN, CT…BV, CP) PHÉROMONES DE SYNTHÈSE DISPONIBLES CHEZ LES CARNIVORES DOMESTIQUES CHAT FELIWAY® Feline facial fraction F3 Indication : la disparition des troubles comportementaux liés à la perturbation de l’environnement FELIWAY MULTICAT® = CAP Cat appeasing pheromon Indication : la disparition des conflits lors de cohabitation dans les groupes de chats FELIFRIEND® Feline facial fraction F4 Indication : la prévention des conflits intra et interspécifques FELISCRATCH® FIS Feline interdigital semiochemichal Indication : l’induction des griffades sur un support choisi CHIEN ADAPTIL® = DAP Dog appeasing pheromon Indication : la disparition du stress du à la séparation lors de l’adoption du chiot ; la diminution/disparition de certains états phobiques ; la facilitation dans la relance des apprentissages… Conférences sur la Grande Piste -63- Samedi 14 mars 2015 Diminuer les signes de stress en organisant mieux l’environnement de vie chez le chat et les NAC « à poils » (lapin, cochon d’inde, hamster...) JF Quinton V. Dramard La symptomatologie des NAC est traditionnellement plus fruste que celle des carnivores, notamment pour les petites espèces de rongeurs. Si le stress ne s’exprime pas toujours aussi clairement chez eux que chez le chien et le chat, il existe néanmoins certains signes de souffrance que l’on peut reconnaître : • • • • • comportements répétitifs anormaux (stéréotypies), boulimie, troubles digestifs, troubles du comportement éliminatoire entraînant des pododermatites chez le lapin, signes dépressifs (mise en retrait, durée de sommeil accrue), gastrite, obésité chez le furet, comportement de crainte et de dépression (station permanente dans un abri sur ses déjections), troubles de la cohabitation avec rasage des poils chez le cobaye mâchonnement de la fourrure chez le chinchilla, stéréotypies chez les petits rongeurs. À la différence des chiens et des chats, chez lesquels logis humain et animal se confondent, les NAC ne partagent pas librement le domicile de leur propriétaire. Le propriétaire maîtrise donc beaucoup plus de paramètres réglant la vie de son animal qu’il n’en a souvent clairement conscience. C’est pourquoi, pour prévenir ou diminuer ces signes, il faut tout d’abord respecter les besoins spécifiques de chaque espèce (espèce solitaire ou non, rythme nycthéméral, alimentation…). Néanmoins, l’enrichissement du milieu de vie (cachettes, litière, possibilité d’activités physiques, d’exploration voire de jeu…) dans un espace plus restreint que le milieu naturel est la clé de la prévention du stress. Concernant, le chat, il se trouve que la même logique d’aménagement de l’environnement et des activités de vie (nourriture, litière, activités de jeu, exploration) peut être utilisée pour augmenter le bien être d’un chat en appartement, diminuer les signes de stress (irritabilité, marquages urinaires, griffades) voire les maladies fonctionnelles (cystite, alopécie extensive, boulimie) qui peuvent être observés. L’intérêt de faire cohabiter un chat qui n’est pas naturellement très social avec d’autres congénères doit être discutée au cas par cas. Conférences au Bar de l’Impératrice -64- Vendredi 13 mars 2015 Conduites à tenir : Pour se sentir (plus) à l’aise lors d’une anesthésie Dr Paul Coppens DMV, Dip.ECVAA, Spécialiste européen en anesthésie vétérinaire En 2013, dans le cadre de Best of Vétérinaire, une nouvelle approche de la sécurité en anesthésie a fait l’objet d’un « masterclass ». Cette approche appelée « culture de la sécurité » (« Safety Culture ») est un système de gestion du risque prenant en compte les facteurs humains. Le texte accompagnant ce masterclass est joint au présent document. La présentation de cette année a pour but de documenter cette approche de l’anesthésie dans le cadre de la « culture de la sécurité » et d’apporter des exemples d’organisation, de stratégie et de logistique qui non seulement peuvent être mises en œuvre pour l’amélioration de la sécurité du patient mais également générer une sérénité accrue lors de la réalisation clinique de l’anesthésie. La mise en œuvre d’un protocole d’anesthésie est tout aussi importante que le protocole lui-même. Il n’existe pas de protocole idéal sans effets secondaires. Tous les protocoles d’anesthésie sont associés à des risques. La gestion de ces risques est fondamentale. Il existe des recommandations concernant les prérequis minimum lors de la réalisation clinique d’anesthésies qui ont été publiés par L’Association des Vétérinaires Anesthésistes (AVA : « Association of Veterinary Anaesthetists ») (Annexe 1). Toutes les anesthésies sont mises en œuvre par des êtres humains. L’erreur est humaine. Ce facteur humain sera pris en compte dans l’organisation afin de gérer le risque. Pour cette raison, les recommandations de l’AVA concernant les prérequis minimum sont assortis d’une liste de questions à répondre par l’affirmative avant de procéder à l’induction de l’anesthésie. POURQUOI ET COMMENT ABORDER L’ANESTHÉSIE DANS UN CADRE DE CULTURE DE LA SÉCURITÉ ? LES POINTS SUIVANTS DEVRONT ÊTRE ENVISAGÉS : Anesthésie, source de stress ? Méconnaissance Gravité de l’acte Technicité s’apprend Risque existe Absence de surveillance est une situation compromettante Objectif de la surveillance Comment surveiller Anesthésie opérée par un être humain Double casquette chirurgien-anesthésiste Déléguer la surveillance Gestion du risque Travail d’équipe Erreur humaine Intégration des facteurs humains dans la gestion du risque Technicité pour l’ASV Technicité pour le vétérinaire Définition des tâches Répartition des tâches Sécurité accrue : fondements : Environnement / plateau technique Compréhension de l’acte / définition des objectifs Adaptation au patient, aux contraintes chirurgicales/ diagnostiques, au niveau d’expérience de l’équipe Surveillance Stratégie incluant les facteurs humains Acquisition de la technicité Compréhension de l’équipement Compréhension des outils pharmacologiques Adéquation état physique du patient / choix des outils / niveaux d’expérience Hiérarchisation de la surveillance Gestion du risque lié aux facteurs humains Outils de gestion du risque (voir ci-dessous : La sécurité en anesthésie vétérinaire : une culture nouvelle.). Modèle de Reason --> plaques de protection : Gestion technicité : Matériel Savoir-faire Conférences au Bar de l’Impératrice -65- ----> niveau minimum : prérequis recommandés AVA Gestion facteurs humains : Procédures Listes de vérification et mémos Communications briefing debriefing Retour d’expérience Exemple de diagramme d’un processus anesthésique dans un concept de culture de la sécurité : Vendredi 13 mars 2015 Conférences au Bar de l’Impératrice -66- Vendredi 13 mars 2015 La sécurité en anesthésie vétérinaire : une culture nouvelle De l’exemple de l’aviation civile à la mise en œuvre - la prise en compte des facteurs humains. Dr Paul Coppens DMV, Dip.ECVAA, Spécialiste européen en anesthésie vétérinaire Commandant Fabrice Levoyer, Pilote de ligne, Commandant de bord Boeing 777 Dr Luca Zilberstein, DMV, PhD, Dip.ECVAA, Spécialiste européen en anesthésie vétérinaire RÉSUMÉ L’approche nouvelle pour l’anesthésie vétérinaire de l’intégration des facteurs humains dans le concept gestion des risques et menaces cher à l’aviation, ouvre d´encourageantes perspectives. Prendre conscience que l’erreur est humaine, que certaines circonstances favorisent son apparition et que des perceptions peuvent être fausses ou biaisées sont autant de facteurs humains qui sont à mettre au centre de nos préoccupations de sécurité. Appréhender l’anesthésie en utilisant des plaques de protection comme les procédures et les listes de vérifications, le briefing et la communication efficace permet d’envisager une sécurité drastiquement accrue pour nos patients à l’instar de celle affichée par l’aviation et l’anesthésie humaine. Le debriefing et l’analyse systématique des problèmes rencontrés s’inscrivent dans une dynamique de mise en place de parades. Une anesthésie plus sûre est la condition sine qua none au développement harmonieux de la chirurgie et des soins prodigués à nos animaux. Une liste de vérifications spécifiques garantissant la mise en place des prérequis recommandés par l’AVA (Association of Veterinary Anaesthetists) avant de procéder à l’induction de l’anesthésie générale a été conçue par le Dr Coppens et le Commandant Levoyer et est présentée dans le cadre de ce «Master Class». MOTS CLEFS : ANESTHÉSIE, AVIATION, GESTION DU RISQUE, PROCÉDURE, LISTE DE VÉRIFICATION, LISTE DE CONTRÔLE, CHECK LIST Un chien sur 2000, un chat sur 1000, un cheval sur 100, bien qu’étant en bonne santé, meurent suite à l’anesthésie. Ces chiffres interpellent lorsque l’on sait que la mortalité liée à l’anesthésie en médecine humaine est aujourd’hui bien inférieure à un pour 100.000 anesthésies, toutes catégories de patients confondues. POURQUOI FAIRE APPEL À UN PILOTE POUR PARLER SÉCURITÉ EN ANESTHÉSIE VÉTÉRINAIRE ? Dans leur domaine professionnel, outre leur apprentissage des savoirs faire indispensables, les pilotes sont formés depuis maintenant une trentaine d’années à la mise en œuvre permanente de démarches créées et orientées dans un seul but : la sécurité. Ces démarches, connues sous le nom de FACTEURS HUMAINS, ont été exportées dans de nombreux domaines à leur demande (médecine humaine, anesthésie humaine, blocs opératoires, dentistes, centrales nucléaires, sous marins ...) où elles ont conduit à des résultats unanimement salués et parfois spectaculaires. C’est le cas de l’anesthésie en médecine humaine où, en France, la mortalité liée à l’anesthésie est passée de 1/13000 à 1/145000 en 20 ans. D’OÙ VIENT LA PRISE EN COMPTE DE CES FACTEURS HUMAINS EN AVIATION ? Dans les années 50, les taux d’incidents / accidents constatés dans le transport aérien étaient de 1/100 environ. Mieux certes qu’à l’époque des pionniers (1/10 !) mais totalement incompatibles avec un développement harmonieux de l’activité. Un gros effort technologique fut entrepris et l’apparition de systèmes plus fiables et sophistiqués permit une amélioration efficace. Mais rapidement, il fallut constater que le gain dû aux technologies venait à plafonner. Ainsi, malgré plus de systèmes toujours plus performants, le bénéfice devenait asymptotique, quasi stable, et beaucoup plus embêtant et l’essor important en volume du transport aérien engendrait un nombre d’événements indésirables rapidement croissant. La perspective d’un accident majeur toutes les semaines dans les années 2000 était tout bonnement de nature à condamner l’activité. Et ce, pour plusieurs raisons : • les pressions médiatique et émotionnelle du grand public seraient intenables. • la pression juridique, malgré des conventions internationales favorables au développement du transport aérien, serait finalement ruineuse. Le risque zéro et l’obligation de résultat avançaient à grands pas dans les esprits et dans les lois. • idem pour la pression assurancielle. • C’est donc sous la menace de voir son activité péricliter ou disparaître que l’aviation a dû trouver une voie permettant d’atteindre un taux d’accident acceptable que les spécialistes, et bientôt les réglementations, devaient fixer à 10-6 ou 10-9 pour les parties critiques (ex: moteurs des avions bimoteurs), soit une progression d’un facteur 10 millions par rapport aux 1/100 initiaux. D’ACCORD, MAIS POURQUOI FAIRE APPEL À UN PILOTE POUR PARLER SÉCURITÉ EN ANESTHÉSIE VÉTÉRINAIRE ? Vous-même ou un de vos collègues vétérinaires êtes peut-être pilote de loisir. S’il existe des vétérinaires pilotes, il n’est pas fréquent de rencontrer des pilotes qui pratiquent en loisir la médecine ou l’anesthésie vétérinaire. Cette idée paraît d´ailleurs assez saugrenue. Pourtant, si on y réfléchit, les deux professions ont bien des choses en commun. Dans les 2 cas existe une pression temporelle, l’impossibilité d’abandonner le travail en cours (en se disant qu’on le reprendra plus tard, quand on sera plus en forme par exemple, ou qu’on aura pu y réfléchir plus amplement), la Conférences au Bar de l’Impératrice -67- nécessité de gérer ses ressources mentales, gérer les priorités, trier le principal et l’accessoire, gérer l’urgence, mobiliser ses connaissances ou faire appel à son expérience et décider en permanence de la conduite à tenir. Remarquons ensemble une «légère» différence: le pilote est embarqué dans l’avion. Mais si l’on remplace accident aérien par accident d’anesthésie, conduite du vol par conduite de l’anesthésie, gestion de la hauteur par rapport aux obstacles par gestion de la profondeur de l’anesthésie et naturellement pilote par anesthésiste, on voit que les enjeux ne sont pas bien éloignés. LA PRISE EN COMPTE DES FACTEURS HUMAINS POUR L’AMÉLIORATION DE LA SÉCURITÉ. Les FACTEURS HUMAINS sont le résultat de l’étude des interactions entre un individu et son milieu de travail, incluant les autres personnes, la technologie, la documentation et l’environnement. (Schéma). CONSCIENCE DE LA SITUATION Lors d’opérations complexes, ce sont surtout les liens entres ces différents domaines qui sont un enjeu majeur, plus que les domaines eux-mêmes. Pour mener à terme sa mission, le pilote va interagir avec différents éléments. Il doit se forger une représentation fiable de l’état et de l’évolution de ces éléments, de ce qu’il peut en attendre et surtout de comment les gérer. Comment va évoluer le milieu extérieur (le temps se dégrade-til ? Des phénomènes dangereux sont-ils à redouter ? Vole-t-on vers des montagnes ? Va-t-il bientôt faire nuit ? Ou tout ceci en même temps ?). De quelles machines est-ce que je dispose pour m’aider ? Sontelles adaptées à mon besoin ? Comment vais-je les mettre en œuvre aujourd’hui ? Que dois-je en attendre ? De quelles ressources humaines est-ce que je dispose aujourd’hui ? La mienne est-elle en forme (Fatigue) ? Quelle tâche confier à chacun ? Vendredi 13 mars 2015 Utiliser ses connaissances n’est possible que si elles sont immédiatement disponibles en mémoire. Or, accéder à sa mémoire peut se révéler long. Le briefing est un bon moyen d’activer la mémoire à court terme pour opposer une procédure efficace à une situation urgente imprévue. L’ERREUR Comme le dit l’adage populaire, l’erreur est humaine. Comment faire pour éviter de commettre des erreurs ? Répondre à cette question est vain : c’est la question elle-même qu’il faut abandonner. Commettre des erreurs est profondément inscrit dans la nature humaine. Si l’ordinateur peut s’enorgueillir de ne pas faire d’erreur pour les tâches qui lui sont confiées, l’humain doit accepter que son esprit imaginatif, inventif, créatif, adaptatif, est aussi éminemment faillible. Le Rapport 2010 de l’observatoire des risques médicaux indique que sur les 4000 accidents ayant donné lieu à une indemnisation de plus de 15000€, 0,7% sont liés à des défaillances technologiques et...65% à des fautes ou erreurs humaines. L’acceptation de cette réalité est parfois difficile dans des domaines médicaux par exemple, où le praticien traite en permanence de la vie et de la mort, enjeu qui ne devrait être confié qu’à des êtres infaillibles. Les pilotes traitent eux aussi de cet enjeu, mais comme on l’a vu, ils ont dû apprendre à gérer leurs erreurs. Une erreur n’est donc pas en elle-même un problème. Des observations ont montré que des équipages pouvaient en commettre entre 2 et 6 par heure en fonction des difficultés rencontrées et de leur comportement. Ce qui est capital est de détecter et d’empêcher la conséquence d’une erreur. Ceci est décrit par le modèle de Reason ou modèle du fromage suisse, où l’on montre comment évolue l’erreur et comment elle aura ou non une conséquence. Les réponses à toutes ces questions permettent de définir le CONTEXTE dans lequel va devoir s’inscrire le PROJET D’ACTION adapté. Avoir CONSCIENCE DE LA SITUATION, c’est être capable d’appréhender de la façon la plus extensive l’intégralité de la réalité qui nous entoure et comment nous allons interagir avec elle. Ceci nous permet d’identifier en permanence les MENACES qui risquent de compromettre le projet d’action. Anticiper ces menaces est la meilleure défense à leur opposer et ceci dans un CONTEXTE DYNAMIQUE, c’est-à-dire évoluant dans le temps. La méthode FORDEC (pour Faits, Options, Risques, Décision, Exécution, Contrôle) a été élaborée pour servir de guide à la survenue d’un incident. Après l’application d’une procédure de sauvegarde, suivre ce guide permet l’adaptation du projet d’action au nouveau contexte. Il doit conduire à prendre la meilleure décision. Il sert de support à la réflexion, dans un moment de stress important qui pourrait justement favoriser une mauvaise décision. Il sert également à envisager les possibilités de se sortir d’une situation délicate, la première solution venant à l’esprit n’étant pas toujours la meilleure alors qu’on aurait bien envie de s’en contenter, ou à élaborer une solution alternative appelée Plan B. En termes de communication, qui parle et à quel moment a par exemple été prédéfini. Figure. Modèle de Reason. Conférences au Bar de l’Impératrice -68- Ainsi, pour conserver des opérations sûres, sera-t-il nécessaire de mettre en œuvre des Plaques de Reason efficaces et de gérer la détection et l’interception des erreurs. Mettre en œuvre certaines plaques telles que les Procédures / Check List a permis des améliorations spectaculaires en anesthésie humaine. Cependant, on estime encore aujourd’hui que 50 % des 10000 événements indésirables graves survenant chaque année à l’hôpital pourraient encore être évités par la mise en œuvre de procédures dont, notamment, l’utilisation de Check List. En 2008, les erreurs médicales ont eu un coût estimé à 17 milliards de Dollars aux États Unis. En 2008 et 2009, l’Organisation Mondiale de la Santé a publié et testé une liste de contrôle pour la sécurité chirurgicale. Celle-ci dépasse largement le cadre de l’anesthésie et implique toutes les parties concernées et leurs interactions dans un bloc opératoire. Son utilisation a permis de réduire d’un tiers les décès. J’AIME LE GEM Le modèle actuellement le plus utilisé dans le transport aérien est appelé GEM pour Gestion des Erreurs et des Menaces. Il consiste à gérer de manière permanente les erreurs par l’utilisation rigoureuse des Plaques de Reason et à opposer des parades aux menaces anticipées lors de l’acquisition de la conscience de la situation. Comme on l’a vu, les erreurs devront être détectées, puis traitées pour annihiler leur pouvoir de nuisance. Conserver une bonne conscience de la situation permet d’éviter de se focaliser sur un objectif en oubliant l’ensemble du contexte. C’est ce phénomène de tunnellisation qui fait qu’aujourd’hui, dans l’aviation légère, une des causes premières d’accident n’est autre que ... la panne d’essence. (Sur le thème de «Ça va passer»). QUELLES APPLICATIONS EN ANESTHÉSIE VÉTÉRINAIRE ? CONTEXTE GÉNÉRAL A l’inverse de l’anesthésie humaine et de l’aviation civile qui font appel à des professionnels spécialisés, l’anesthésie vétérinaire est, dans la grande majorité, pratiquée par des omnipraticiens ou des spécialistes dans d’autres domaines (chirurgien, ophtalmologue, neurologue, spécialiste en imagerie, …). La pratique de l’anesthésie ne constitue donc qu’une partie seulement de leurs tâches. Cette situation explique partiellement pourquoi l’analyse des risques et de l’évolution de la sécurité n’est pas aussi avancée. En effet, la prise en charge des facteurs humains n’est pas ou à peine évoquée. Et pourtant, dans ce contexte particulier, leur rôle est certainement déterminant et leur gestion primordiale. Les facteurs de risques connus sont : un mauvais état de santé, le caractère d’urgence, une intervention majeure, l’âge avancé, l’obésité et la cachexie, l’intubation, l’administration de fluides chez le chat ; un mauvais état de santé, le caractère d’urgence, une intervention majeure, l’âge avancé, un faible poids, le caractère brachycéphale, l’utilisation de la xylazine chez le chien. Chez ce dernier, la prolongation de la durée ainsi que le maintien de l’anesthésie à l’halothane après induction avec un injectable ou le tout par inhalation (comparé au maintien à l’isoflurane après induction avec un injectable) sont associés à un Vendredi 13 mars 2015 risque accru. L’attention devra donc porter sur l’état du patient, son âge et ses capacités réduites de tolérance et d’adaptation, sa petite taille et les difficultés à réaliser des actes peri-opératoires tels l’intubation ou la mise en place de cathéters ainsi que le risque de surdosage des fluides. La complexité importante et la durée prolongée de l’intervention chirurgicale nécessiteront une surveillance plus pointue. La prise du pouls, l’utilisation d’un oxymètre de pouls et la présence d’un technicien diminuent le risque. Chez le cheval, nous retrouvons un mauvais état de santé, un âge inférieur à 6 mois ou supérieur à 14 ans, une intervention majeure mais aussi le type d’intervention, la durée de l’anesthésie, le caractère d’urgence et le moment de l’intervention. En effet, le risque est accru entre minuit et six heures du matin et pendant le weekend. Outre le caractère d’urgence associé aux interventions effectuées à ces heures, la fatigue et la disponibilité réduite de personnel sont évoquées. Bien qu’aucune étude ne porte sur les facteurs humains proprement dits, certains indices, comme ces derniers points rapportés, en laissent percevoir la réalité et il ne s’agit vraisemblablement que de la pointe de l’iceberg. On notera que si la part des complications et accidents liés aux facteurs humains est majoritaire en aviation et en anesthésie humaine (jusqu’à plus de 80%), pourquoi en serait-il autrement en anesthésie vétérinaire ? Nous en ignorons l’incidence en anesthésie vétérinaire mais faut-il attendre de la connaître pour prendre des mesures ? La réponse est non d’autant plus qu’il n’est pas possible de baser une mesure de précaution sur de l’« evidence based medicine ». Outre la nature humaine en elle-même, plusieurs facteurs peuvent favoriser l’apparition de ces erreurs. Ces facteurs sont liés à : • l’organisation : formation inadaptée ou insuffisante suite à l’introduction de nouveaux médicaments, techniques ou matériel, manque de moyens, organisation suboptimale, manque de rigueur, normalisation des déviances ..., • la situation et l’environnement de travail : pression, matériel inadapté et/ou non maîtrisé, mauvaise ergonomie, utilisation de médicaments ou techniques non maîtrisés, absence de routine claire et de recommandations, interruption et/ou changement du personnel ..., • l’équipe : problème de communication, prépondérance de la hiérarchie ... La complexité d’un système favorise bien entendu les erreurs mais, en anesthésie vétérinaire, seuls les spécialistes y sont confrontés. En effet, si la complexité de l’anesthésie vétérinaire s’avère nécessaire pour la réalisation d’actes chirurgicaux ou diagnostiques complexes, elle requerra la présence de spécialistes en la matière qui, néanmoins, ne seront pas à l’abri de faire des erreurs et devront s’en protéger. C’est pourquoi, pour le vétérinaire non spécialiste en anesthésie, l’évolution de l’anesthésie passera par le fait de référer ces cas complexes. Pour autant, n’oublions pas que la grande majorité des anesthésies est et sera réalisée sous la responsabilité de vétérinaires généralistes ou spécialistes dans d’autres branches que l’anesthésie. Le vétérinaire qui pratique une anesthésie portera donc le plus souvent une double casquette, celle du chirurgien, ophtalmologue, imageur ou autre et celle de l’anesthésiste. Son rôle d’anesthésiste est vécu au service de son rôle de chirurgien, ophtalmologue, imageur ou autre. Ceci entraîne Conférences au Bar de l’Impératrice -69- naturellement une hiérarchisation des rôles inappropriée. Car si la routine est omniprésente dans le cadre des anesthésies quotidiennes, l’organisation en est-elle pour autant organisée et surtout contrôlée ? De plus, pendant la phase de maintenance de l’anesthésie, le vétérinaire vaquera à son activité principale reléguant l’anesthésie au second plan. La surveillance de cette dernière incombera : • au personnel technique au mieux, hiérarchiquement inférieur et avec lequel la communication peut donc être biaisée, • à des moyens techniques auxquels peuvent être associés une croyance inconditionnelle, une formation inadaptée et donc une méconnaissance des limites et une interprétation inappropriée, ou une complexité non maîtrisable par un non spécialiste. On notera que, en anesthésie vétérinaire, le moyen le plus fiable d’évaluer la profondeur de l’anesthésie est clinique et non technique ! • ou sera tout simplement absente en s’inscrivant dans la philosophie «ça passe ou ça casse». • Comme nous l’avons vu, cette situation globale peut donc amener dans le chef d’une même personne, le vétérinaire, une hiérarchisation inappropriée des rôles et des tâches, une importance moindre de l’anesthésie, une prise en compte insuffisante de la surveillance et une prise de décision inadaptée. Tous ces comportements suivent une certaine logique et il n’y a pas lieu de les blâmer mais il convient d’être conscient qu’ils peuvent induire un sentiment biaisé concernant la nécessité de mettre en place des systèmes de protection et qu’il existe par conséquent une tendance à brûler certaines étapes en termes de sécurité du patient et in fine à favoriser l’erreur. En prenant conscience de ce contexte, la nécessité de mettre en place des garde-fous devient encore plus flagrante. L’erreur est inhérente à la nature humaine. D’où une perception des choses relative et parfois fausse. Il faut accepter ces éléments tout comme les situations spécifiques qui favorisent ceux-ci. La gestion de ces facteurs humains sera fondamentale si l’on veut diminuer le risque. Le but final de cette démarche est de les intégrer et de mettre en place des plaques de Reason afin d’éviter que des problèmes évitables ne surviennent. Dans l’état actuel des connaissances et de l’environnement anesthésique en pratique vétérinaire courante, nous pouvons proposer une initiation au GEM par la mise en œuvre d’un modèle de Reason simplifié. QUELS SONT LES OUTILS UTILISÉS EN AVIATION POUVANT NOUS AIDER EN ANESTHÉSIE VÉTÉRINAIRE ? - Procédures (Normales/Urgence) => liste reprenant point par point la marche à suivre. - Cross Check et Action Contrôle => permet une vérification mutuelle ; une personne exécute l’action et l’autre vérifie que l’action a été effectuée. - Check List (CL) => qu’est-ce qu’une Check List ? (B17). Ces listes regroupent les items obligatoires à la bonne marche des opérations à venir. Les éléments qu’elles contiennent ont été choisis avec soin pour leur importance, parfois vitale ou leur propension à être facilement oubliés. Les items dont l’oubli ou Vendredi 13 mars 2015 la mauvaise exécution compromettent la sécurité sont appelés killer Items. L’ordre a également son importance. Il correspond généralement à l’ordre dans lequel les actions ont dû être faites. Une Check List doit être simple et rapide à réaliser. Elle n’est pas la liste détaillée de ce qu’il faut faire et comment. Cela relève du savoir faire et de la technicité. Elle termine une phase d’un processus et autorise le début d’un autre. Ex: la preflight CL termine la préparation de l’avion avant le départ et permet de débuter l’embarquement des passagers. Une fois cet embarquement terminé, les pilotes mettent en œuvre les systèmes nécessaires au démarrage des moteurs et effectuent la « Before Start CL». Photos. CL après décollage. (c)Fabrice Levoyer. Les CL permettent de lutter contre une forme de routine. On risque facilement d’oublier un item qui est toujours fait d’habitude. Le mode de fonctionnement qui nécessite le moins de ressources pour l’homme est le mode routinier par opposition aux modes Apprenant (Qualifié mais depuis peu) ou Expertise (Toutes ressources mobilisées pour traiter une anomalie). 80% des actions sont effectuées en mode routine avec les risques associés : Biais d’habitude et de Confirmation. Les CL servent a écarter tout doute sur un oubli et donc apportent une bonne dose de sérénité, même en mode routinier. À quoi sert la bouteille d’oxygène dont on se rend compte qu’elle est vide au moment où débute une détresse respiratoire ? La CL avant une étape clef comme le décollage en aviation ou l’induction en anesthésie reprendra avant tout les killers items, c’est-à-dire les choses qui, si elles ne peuvent pas être faites correctement vont vous tuer (aviation) ou tuer le patient (anesthésie). En anesthésie, une dépression respiratoire est relativement courante et nécessite la mise en œuvre d’une oxygénation et éventuellement d’une ventilation qui, pour être efficace, requiert une intubation. Une dépression cardiovasculaire peut également survenir et nécessiter l’administration de fluides ou médicaments nécessitant la présence d’un cathéter. Lors d’une anesthésie, la survenue d’un arrêt cardiorespiratoire ne peut jamais être éliminée et nécessitera la mise en place d’une réanimation. En anesthésie vétérinaire, un mémo, reprenant les cinq items en caractère gras dans le texte ci-dessus, pourra être avantageusement affiché sur l’appareil d’anesthésie et/ou sur la table de chirurgie par exemple. Ces items sont de fait les Conférences au Bar de l’Impératrice -70- prérequis recommandés par l’AVA (Association of Veterinary Anaesthetists). Photos. Mémo reprenant sous forme de mots clefs les cinq prérequis de l’anesthésie. (c)Paul Coppens. Ce mémo nécessite toutefois une réflexion complémentaire. Par exemple, la ventilation pour être efficace nécessitera l’utilisation d’un ballon de réanimation ou d’un circuit respiratoire exempts de fuite d’une part et une étanchéité du ballonnet de la sonde endotrachéale permettant de prévenir les fuites au niveau de la trachée. Pour parfaire l’efficacité de cette procédure de vérification par mémo, le Dr Paul Coppens et le commandant Fabrice Levoyer ont développé une Check List qui termine le processus de préparation à l’anesthésie et autorise l’induction de l’anesthésie, dans l’esprit et l’efficacité éprouvée de celle de l’aviation. Vendredi 13 mars 2015 - Communication => travail en équipe. L’ASV. Les briefings (avec et sans). Le briefing est un moment de communication entre membres d’une équipe ou même pour un opérateur seul (conducteur de train). Il répond à plusieurs besoins: • Formaliser en les énonçant les particularités du contexte de l’opération à mener. • Énoncer un projet d’action permettant ensuite de détecter tout écart à ce projet (Réglages). • Mettre chaque intervenant au même niveau d’information sur le projet à mener. • Rappeler le rôle de chacun en fonction des particularités du jour. Ex : Annonce des écarts. Un briefing se doit donc d’être court et adapté au contexte pour une bonne conscience de la situation. Il peut être mené à des moments clefs identifiés (avant de lancer une anesthésie) ou dès qu’un besoin se fait sentir. (Absence momentanée, relève, anomalie...). - Matériel => Le matériel se doit d’être adapté et fonctionnel. Le vétérinaire doit en avoir la maîtrise (cf. point suivant). Il sera systématiquement préparé et vérifié (par procédures et/ou Check List). Le matériel permettra d’évoluer avec une sécurité accrue permettant des actes fondamentaux comme l’oxygénation, la ventilation, la protection des voies respiratoires, l’administration de produits IV,… Le matériel de monitorage constituera un soutien utile dans la mesure où il est utilisé à bon escient et de manière maîtrisée. - Savoir Faire => Retour d’expérience. Le vétérinaire, sans devenir un spécialiste, se doit d’avoir certaines compétences et de rester conscient que ces compétences devront être adaptées lors de l’utilisation de nouvelles techniques ou de nouveaux médicaments et lors de l’acquisition de nouveaux équipements par une formation appropriée. En aviation, le pilote doit se qualifier pour être autorisé à piloter un nouveau type avion. Cette qualification fait suite à une formation spécifique. - Ergonomie => L’utilisation de l’ergonomie permet de se mettre dans des conditions optimales par l’adaptation du travail, des outils et de l’environnement pour la réalisation des tâches que nous devons prester. - Être humain => S’il est un facteur de risque parce qu’il fait des erreurs, il est également le garant de la sécurité du patient par son attention, sa rigueur et son intelligence. Figure. CL : avant induction de l’anesthésie générale. (c)Paul Coppens & Fabrice Levoyer. Remarque importante : Si les CL ont de telles vertus qu’elles sont lues inlassablement par tous les pilotes du monde de leur première à leur dernière heure de vol, des plus petits aux plus gros avions, des sous marins aux modules lunaires (Félix), elles ne doivent aucunement être considérées comme une assurance tout risque. D’abord parce qu’on peut oublier de les faire, ensuite parce qu’on ne sait jamais... (Sécurités de train) et qu’il existe toujours des comportements non convaincus (En 1999, 19 pilotes d’avions légers ont décollé sans vérifier le niveau d’essence qui était au plus bas. Ils se sont tous crashés après le décollage !) - Chance => CONCRÈTEMENT Enoncées pour la première fois en 1998 puis en 2005 et repris officiellement en 2008 par l’« Association of Veterinary Anaesthetists » (AVA) (l’Association des Vétérinaires Anesthésistes), cinq compétences sont recommandées à tout vétérinaire pratiquant l’anesthésie générale (cf. annexe 1). L’adoption d’un cadre minimum permettant d’appliquer ces compétences est indispensable. L’AVA recommande la mise en place d’une liste de vérification de ces prérequis avant chaque induction d’anesthésie générale. L’anesthésie est constituée de 4 étapes chronologiques : la prémédication (que nous intègrerons dans la période dite avant Conférences au Bar de l’Impératrice -71- l’anesthésie), l’induction, la maintenance et le réveil. A chaque étape, un certain nombre de plaques de protection peuvent être mises en place sous différentes formes : procédure (PRO), Check List ou liste de vérification (CL), mémo (MEM), briefing/debriefing (BFG), communication (COM), ergonomie (ERG), … • • La séquence globale est en soi une procédure et son respect peut contribuer à améliorer la sécurité. Entre parenthèses et en caractère gras, nous retrouverons les outils qui nous aideront à mettre en place des plaques de protection. La séquence globale est la suivante : AVANT L’ANESTHÉSIE • La consultation et l’examen pré-anesthésique. (PRO) • Un briefing portant sur l’intervention et ses modifications pathophysiologies, sur l’état du patient, sur les problèmes anticipés permettant de définir le plan anesthésique et les points essentiels de surveillance peropératoire et les modalités de l’antibiothérapie prophylactique peropératoire éventuelle. (BFG) • Distribution des tâches et définition des responsabilités. (COM) • Le choix d’un protocole anesthésique incluant un adjuvant analgésique en cas de processus nociceptif ou douloureux. • La préparation et la vérification du matériel nécessaire à l’application des prérequis de l’AVA. (PRO) (CL) • En cas d’anesthésie par inhalation, la préparation et la vérification du matériel spécifique. • (PRO) (CL) • En cas d’utilisation de moyens techniques de surveillance, la préparation et la vérification du matériel spécifique. (PRO) (CL) • En cas d’utilisation d’un respirateur, la préparation et la vérification du matériel spécifique. • (PRO) (CL) AVANT L’INDUCTION DE L’ANESTHÉSIE : (CL) • Vérifier que l’on a à faire au bon patient pour la(les) bonne(s) chirurgie(s). (COM) • La vérification que les prérequis de l’AVA peuvent être mis en œuvre immédiatement. (CL) (MEM) APRÈS L’INDUCTION DE L’ANESTHÉSIE : (PRO) • Procédure de raccordement à l’appareil d’anesthésie. (PRO) • Vérifier la profondeur de l’anesthésie (signes cliniques simples basés sur l’observation de la position de l’œil, du réflexe oculo-palpébral et du tonus de la mâchoire). (MEM) AVANT LE DÉBUT DE LA CHIRURGIE : (CL) (MEM) (COM) • Vérifier que l’on a à faire au bon patient pour la(les) bonne(s) chirurgie(s) et du bon côté. • Confirmer la mise en place de l’adjuvant analgésique. • Vérifier la mise en place de l’antibioprophylaxie éventuelle. • Vérifier la profondeur de l’anesthésie (signes cliniques simples basés sur l’observation de la position de l’œil, du réflexe oculo-palpébral et du tonus de la mâchoire). (MEM) (ERG) PENDANT LA MAINTIEN DE L’ANESTHÉSIE • Surveiller constamment l’adéquation de la profondeur de Vendredi 13 mars 2015 l’anesthésie (signes cliniques simples basés sur l’observation de la position de l’œil, du réflexe oculo-palpébral et du tonus de la mâchoire). (PRO) (ERG) (COM) (MEM) Détecter une défaillance respiratoire entraînant une hypoxie par un monitorage adapté : détecteur d’apnée si administration d’oxygène, oxymètre de pouls en l’absence d’administration d’oxygène. (PRO) (ERG) (COM) (MEM) Détecter une défaillance cardiaque compromettant le débit cardiaque et de ce fait, l’oxygénation des tissus par la prise de pouls régulière au minimum, idéalement par la capnographie. (PRO) (ERG) (COM) (MEM) AVANT LE RÉVEIL : (PRO) (CL) (MEM) (COM) • Décider des points essentiels de surveillance postopératoire, d’un plan analgésique post-opératoire, du plan thérapeutique postopératoire, de la stratégie du sevrage de l’oxygène, de la ventilation ou d’autres thérapeutiques peropératoires éventuelles. AU RÉVEIL : (PRO) • Surveillance de l’efficacité de la respiration. Si administration d’oxygène peropératoire, prolonger de 10 minutes minimum après l’arrêt de l’administration d’anesthésiques. 5 minutes après l’arrêt de l’oxygène, être vigilant à l’apparition de cyanose ou mieux vérifier l’adéquation de la ventilation par l’oxymétrie pulsée. • Surveillance du retour à la conscience. • Surveillance de l’hypothermie. • Surveillance du retour à l’homéostasie. • Surveillance de l’adéquation de l’analgésie. • SURVEILLANCE POURSUIVIE JUSQU’AU RETOUR DE LA CONSCIENCE ET DE L’AUTONOMIE CARDIORESPIRATOIRE, JUSQU’À CE QUE LA TEMPÉRATURE SOIT > 37°C ET QUE L’ANALGÉSIE SOIT SATISFAISANTE. APRÈS L’ANESTHÉSIE : (BFG) (COM) • Un debriefing portant sur le matériel et sur le fonctionnement. • En cas de problème : analyse avec tous les intervenants dans le but d’éviter une répétition, recours à un spécialiste ou expert si nécessaire, mise en place d’un plan préventif intégré. Afin de garantir ce bon déroulement de l’anesthésie, le recours aux procédures et aux Check List est un support fondamental. Le briefing permet de mettre notre cerveau en éveil face à des complications identifiées possibles et donc prévisibles. La clarification de « qui fait quoi » est très importante ; cela favorise en outre la responsabilisation et facilite la communication. Idéalement, les procédures seront mises sur pied avec la contribution de l’ensemble des intervenants. Elles n’ont de sens que si elles sont faisables, appliquées, et ce, par l’ensemble du personnel. Le debriefing permettra un fonctionnement optimal pour les futures interventions et en cas de problème(s), une analyse systématique de ce(s) dernier(s) afin de modifier ou de mettre en place une nouvelle plaque de protection pour éviter l’évitable. Il n’est pas nécessaire d’attendre une série statistiquement significative. Une seule erreur est suffisante pour prendre des mesures adéquates. Dans le même ordre d’idées, mettre en évidence un problème peu fréquent ne pourra se faire qu’en mettant en commun les problèmes rencontrés par un grand nombre de personnes. C’est pourquoi en aviation il existe des systèmes permettant de rapporter anonymement le(s) Conférences au Bar de l’Impératrice -72- problème(s) rencontré(s). Depuis peu, ce type de systèmes de signalement d’incidents/accidents est mis en place également en anesthésie humaine et plus largement, en médecine. CONCLUSION Sensibiliser aux Facteurs Humains et introduire une gestion des erreurs et des menaces dans une discipline relèvent d’un changement de culture dans laquelle l’aspect technique et cognitif reprend la place qui est la sienne, un outil pour produire. La sécurité des opérations est mise au premier plan en privilégiant les techniques qui permettent de parer aux multiples menaces qui se présentent lorsqu’un être humain met en œuvre un projet quel qu’il soit. Les acteurs de ces techniques doivent être encouragés et félicités de leur démarche car une fois l’adhésion obtenue, les résultats sont visibles dans le temps. La démarche proposée n’est ni inquisitrice ni culpabilisante. Elle nécessite un temps d’appréhension et d’adaptation : après plus de trente ans de formation et d’application de ces techniques, les pilotes sont maintenant et depuis très récemment évalués sur leur capacité à mettre en œuvre ces notions de Facteurs Humains. Intégrer le fait que le vétérinaire est à la fois un sauveur fantastique et en même temps le maillon faible d’un processus complexe, c’est faire preuve d’un haut niveau de conscience de la situation. S’il est très gratifiant de réaliser le geste chirurgical parfait, il n’est pas négligeable que le chien s’en réveille ! Vendredi 13 mars 2015 Bibliographie et lectures conseillées http://www.who.int/publications/list/WHO_IER_ PSP_2008.05/fr/ Chassot PG, Clavadetscher F (2012) Sécurité et Anesthésie. Dans Précis d’Anesthésie Cardiaque. www.precisdanesthesiecardiaque. ch version PAC 4.1 Coppens P, Mathieu E (1998) Guide pratique pour anesthésier chiens et chats. Pfizer Santé Animale, Orsay, pp.12-13 Coppens P, Mathieu E (2005) Anesthésie et conditions spécifiques. Guide pratique pour anesthésier chiens et chats. Deuxième partie. Pfizer, Paris, page 2 de couverture Brodbelt D (2008) Perioperative mortality in small animal anaesthesia. The Veterinary Journal 182, 152-161 Johnston GM, Eastment JK, Wood JLN, Taylor PM (2002) The confidential enquiry into perioperative equine fatalities (CEPEF): mortality results of Phases 1 and 2. Vet Anaesth Analg 29, 159-170 Moens Y, Coppens P (2007) Patient Monitoring and Monitoring Equipment. Dans Manual of Canine and Feline Anaesthesia and Analgesia. 2nd Edition, BSAVA, Gloucester, pp.62-79 (https://www.bsava.com/LinkClick. aspx?fileticket=Ai%2fNaHvHLBU%3d&tabid=955&mid=2395) Helmreich RL (2000) On error management: lessons from aviation. BMJ 320, 781-785 Reason J (2000) Human error: models and management. BMJ 320, 768-770 Conférences au Bar de l’Impératrice Annexe 1. http://www.ava.eu.com/index.php?do=/vets-and-nurses http://www.ava.eu.com/recommendations/AVAfrench.pdf -73- Vendredi 13 mars 2015 Conférences au Bar de l’Impératrice -74- Vendredi 13 mars 2015 Conduite à tenir face à une suspicion de dermatite atopique chez le chien Dominique Heripret Dr vét, Dip ECVD, Spécialiste en Dermatologie vétérinaire CHV Frégis, 94110 – ARCUEIL CHV Pommery, 51100 – REIMS L’atopie est définie comme une prédisposition héréditaire à développer une hypersensibilité à des facteurs environnementaux La dermatite atopique est une des manifestations de l’atopie ; il s’agit d’une prédisposition héréditaire à développer une dermatite prurigineuse chronique avec des signes cliniques typiques et une présence d’IgE envers des facteurs environnementaux (poussière, pollens, aliments, …) Chez le chien, l’impact de la dermatite atopique canine (DAC) serait de 10% de la population canine, proportion pouvant augmenter chez certaines races prédisposées (Bouledogue français). Cependant, il ne faut pas classer toute dermatite prurigineuse comme atopique et il est important de suivre une démarche diagnostique raisonnée d’autant qu’il s’agit d’une maladie gérable mais non curable qui nécessite une gestion thérapeutique au long cours, souvent combinée et variant en fonction de l’évolution (poussées, surinfections, ….), de l’individu et du propriétaire. A - PATHOGENIE Plusieurs théories ont été avancées au cours des décennies évoluant du tout allergique (outside-inside), à la théorie hygiéniste, aux troubles de la barrière cutanée (inside-outside). A l’heure actuelle, on propose plutôt un mélange de ces diverses théories, intitulé « outside – inside – outside ».On reconnaît l’importance des troubles de la barrière cutanée génétiquement programmés et aggravés par le stress, mais avec une interrelation avec l’environnement, les modifications du microbiome et du microbiote, les traumatismes, justifiant une philosophie thérapeutique multimodale en fonction du cas individuel. Il découle simplement de la figure 1 que le traitement devra s’attacher à gérer l’ensemble des problèmes : • éliminer les infections cutanées • favoriser la stabilité du microbiome • maintenir la barrière cutanée voire la restaurer • empêcher ou diminuer l’inflammation et le prurit responsables de traumatismes cutanés • limiter la pénétration allergénique • limiter les effets des allergènes GENETIQUE CERAMIDASES STRESS BARRIERE CUTANEE TRAUMATISMES Inflammation Prurit Infection microbienne ALTERATION du MICROBIOME PENETRATION des ALLERGENES Figure - Inter-relation entre les cutanée altérations de la barrière Figure 1–1Inter-relation entre les altérations de la barrière et ses conséquences cutanée et ses conséquences B – Démarche diagnostique des infections ou des causes infectieuses B 1)–Elimination DÉMARCHE DIAGNOSTIQUE Face à un chien atteint de prurit, il faudra éliminer en premier les causes infectieuses de prurit : - puces et DAPP en premier : grande fréquence de la DAPP, souvent récidivante. Ne pas oublier la notion de foyer d’éclosion et la rapidité de piqures par de jeunes puces écloses (quelques minutes) alors que les plus rapides des antiparasitaires agissent en quelques heures.. - parasitoses : gale sarcoptique, cheyletiellose, otodectose et même démodécie - pyodermite de surface : intertrigo, syndrome de surpopulation bactérienne - pyodermite superficielle : folliculite bactérienne - dermatite à Malassezia 1) ELIMINATION DES INFECTIONS OU DES CAUSES INFECTIEUSES Face à un chien atteint de prurit, il faudra éliminer en premier les causes infectieuses de prurit : infections est d’autant plus importante que certaines peuvent mimer la • L’élimination puces des etcesDAPP en premier : grande fréquence de la DAPP, dermatite atopique (gale voire DAPP) et que d’autres compliquent fréquemment la dermatite atopique (pyodermite superficielle, dermatite souvent récidivante. Neà Malassezia). pas oublier la notion de foyer Dans un certain nombre de cas, la bonne gestion de ces infections permettra de ne plus avoir de symptômes même en présence d’une dermatite sous-jacentepar (notions seuil de prurit et d’éclosion et la rapidité atopique de piqures dede jeunes puces de sommation des effets). écloses (quelques minutes) alors que les plus rapides des antiparasitaires agissent en quelques heures.. • parasitoses : gale sarcoptique, cheyletiellose, otodectose et même démodécie • pyodermite de surface : intertrigo, syndrome de surpopulation bactérienne • pyodermite superficielle : folliculite bactérienne • dermatite à Malassezia L’élimination des ces infections est d’autant plus importante que certaines peuvent mimer la dermatite atopique (gale voire DAPP) et que d’autres compliquent fréquemment la dermatite atopique (pyodermite superficielle, dermatite à Malassezia). Dans un certain nombre de cas, la bonne gestion de ces infections permettra de ne plus avoir de symptômes même en présence d’une dermatite atopique sous-jacente (notions de seuil de prurit et de sommation des effets). Conférences au Bar de l’Impératrice -75- Vendredi 13 mars 2015 Lorsque les symptômes persistent ou récidivent malgré un traitement bien conduit, il faudra bien évidemment vérifier l’absence de cause sous jacente récidivante (puces) et on pourra alors commencer à envisager le diagnostic de dermatite atopique si certaines conditions sont réunies. 2) CRITÈRES CLINIQUES DE DIAGNOSTIC Plusieurs séries de critères cliniques ont été proposées depuis une trentaine d’années (Willemse puis Prélaud pour les plus connues) ; ce sont ceux de Favrot qui ont cours à l’heure actuelle : • apparition des symptômes avant 3 ans • chien vivant à l’intérieur • prurit cortico-sensible • prurit non lésionnel initialement • pododermatite antérieure • affection du pavillon auriculaire • pas d’atteinte du bord libre auriculaire • pas d’atteinte dorso-lombaire Ces critères sont uniquement cliniques et anamnestiques. Tout le monde s’accorde pour ne plus considérer les résultats de tests allergologiques, in vivo (intradermoréactions) ou in vitro (dosage IgE) comme un élément diagnostic. Ces tests allergologiques n’interviennent que dans une recherche thérapeutique : identification des allergènes pour une immunothérapie spécifique (désensibilisation). L’histopathologie n’a pratiquement aucun intérêt dans le diagnostic de dermatite atopique puisque l’infiltrat cellulaire en peau lésionnel n’est absolument pas spécifique et peut être rencontré lors de pyodermite ou d’ectoparasitose. Le diagnostic de dermatite atopique et donc uniquement anamnéstique et clinique à l’heure actuelle. 3) RÉGIME D’ÉLIMINATION Une fois parvenu à l’hypothèse de DAC, il faudra éliminer une origine alimentaire (qui ne représente cependant que 10 à 20% des cas de dermatite atopique) en proposant un régime d’élimination soit industriel (un régime hautement hydrolysé comme le Royal Canin Anallergenic) ou un régime ménager à base de protéines naïves (cheval, lapin, gibier), lentilles ou pommes de terre ou polenta, légumes verts, huile végétale (olive par exemple). Ce régime doit être strict et durer 2 mois. En cas d’amélioration à l’issue du régime, il faudra systématiquement proposer une ré-introduction globale pour évaluer la rechute (entre 12 et 72 heures) car une amélioration spontanée est toujours possible (évolution allergique en dents de scie ou par poussées). C – GESTION THÉRAPEUTIQUE La gestion thérapeutique découle de la pathophysiologie (figure 2) et sera donc multimodale. -Shampooing -Acides gras -Emollients Sécheresse cutanée -Topique antiseptique Surinfection -Topique antibiotique -Antibiothérapie Immunothérapie Pénétration des allergènes -Eviction allergénique -Immunothérapie Inflammation Prurit -Glucocorticoïde -Ciclosporine -Oclacitinib Figure 2 - Gestion multimodale en fonction des anomalies Figure 2 – Gestion multimodale en fonction des anomalies liées à la dermatite atopique. Cette liées lareprise dermatite atopique. Cette gestion a étépublié reprise gestionàa été par un groupe d’experts (ICADA) sous forme d’un consensus en 2010 par (http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1365-3164.2010.00889.x/pdf) et disponible en unfrançais groupe d’experts (ICADA) sous situations forme cliniques d’un consensus publié sur internet, qui différencie les différentes (phase aiguë, phase prévention des poussées). enchronique, 2010 (http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.13653164.2010.00889.x/pdf) et disponible en français sur internet, Cette gestion peut inclure, au départ, une évaluation diagnostique (élimination des puces et/ou qui différencie différentes situations régime d’élimination) les et permet d’avoir une idée de la charge cliniques médicamenteuse(phase (ensembleaiguë, du traitement à mettre en place pour que le chien atteint ait une peau quasiment saine et un prurit phase chronique, desdupoussées). acceptable : cela inclut prévention la charge de travail propriétaire, les effets secondaires des médicaments, le coût et la satisfaction ou non du propriétaire). En gros,gestion on peut distinguer étapes : Cette peut3inclure, au départ, une évaluation diagnostique 1) gestion des infections et des modifications cutanées, prévention anti-parasitaire, gestion (élimination des puces et/ou régime d’élimination) et permet de la crise prurigineuse +/- régime d’élimination. 2) reconnaissance de la DAC, évaluation de l’intensité du prurit, notion de charge d’avoir une idée charge médicamenteuse médicamenteuse pour de choisirla AVEC le propriétaire les modalités thérapeutiques(ensemble adaptées 3) prévention, gestion des poussées du traitement à mettre en place pour que le chien atteint ait une peau quasiment saine et un prurit acceptable : cela inclut la charge de travail du propriétaire, les effets secondaires des médicaments, le coût et la satisfaction ou non du propriétaire). EN GROS, ON PEUT DISTINGUER 3 ÉTAPES : 1. gestion des infections et des modifications cutanées, prévention anti-parasitaire, gestion de la crise prurigineuse +/- régime d’élimination. 2. reconnaissance de la DAC, évaluation de l’intensité du prurit, notion de charge médicamenteuse pour choisir AVEC le propriétaire les modalités thérapeutiques adaptées 3. prévention, gestion des poussées ETAPE 1 • antibiothérapie systémique (clindamycine, céfalexine, amoxy-clavulanique) ou topique (acide fusidique) en fonction de l’étendue des lésions de pyodermite • gestion antiseptique des plis, des espaces interdigités, des lèvres • gestion de l’éventuelle otite • shampooings (fonction de l’état cutané) idéalement bihebdomadaires • prévention anti-parasitaire systémique (afoxolaner, fluralaner, spinosad) car shampooings fréquents • corticothérapie brève et intermittente (prednisolone 0,7-1 mg/kg/j sur 2-4 jours à répéter si besoin) • régime d’élimination comme décrit plus haut. ETAPE 2 : ÉVALUATION CUTANÉE ET ÉVALUATION DE LA CHARGE MÉDICAMENTEUSE AVEC LE PROPRIÉTAIRE. 1. si peau améliorée, propriétaire satisfait : on peut continuer ainsi en associant un topique glucocorticoïde (acéponate d’hydrocortisone), en poursuivant les shampooings (plutôt antiseptiques en prévention), l’antisepsie locale, la prévention antiparasitaire, en tentant une épargne Conférences au Bar de l’Impératrice -76- glucocorticoïde (anti-histaminique) et en adaptant l’alimentation avec supplémentation en acides gras 2. si peau améliorée mais charge médicamenteuse lourde : discussion de tests allergologiques en vue d’une immunothérapie spécifique (désensibilisation), adaptation du traitement antiprurigineux systémique (oclacitinib, ciclosporine) et topique (acéponate d’hydrocortisone) ETAPE 3 : PRÉVENTION, GESTION DES POUSSÉES • maintien d’une hygiène cutanée (shampooings, antisepsie), de la prévention parasitaire • thérapeutique pro-active (acéponate d’hydrocortisone systématiquement 2 à 3 jours par semaine sur des sites systématiquement impliqués • immunothérapie spécifique • accompagnement du propriétaire (motivation, observance) • gestion précoce des poussées (oclacitinib, corticothérapie). CONCLUSION La bonne gestion de la DAC ne se limite pas à la prescription d’un médicament ou à la réalisation de tests allergologiques ; cela nécessite une participation du propriétaire et sa bonne compréhension du caractère chronique et récidivant de la maladie. De plus, la charge thérapeutique étant assez lourde, il faudra axer la communication sur la motivation et adapter le traitement au cas individuel en raisonnant sa prescription en fonction des données physiopathologiques actualisées. Vendredi 13 mars 2015 Conférences au Bar de l’Impératrice -77- Vendredi 13 mars 2015 Attitude à avoir devant un épileptique qui ne répond pas correctement à la mise en place d’un traitement Laurent Cauzinille, Diplômé du collège américain de médecine interne (Neurologie) et du collège européen de Neurologie. Spécialiste en Neurologie Centre Hospitalier Vétérinaire Frégis - Arcueil Il arrive qu’un traitement anti-épileptique (AE) ne soit pas suffisant pour contrôler un patient présentant des manifestations épileptiformes. Il est essentiel de se poser quelques questions et d’avoir une approche toujours scientifique et rigoureuse. Le Premier AE est choisi en fonction de la fréquence et de l’intensité des crises (AE à demi vie courte), de ses effets secondaires potentiels, des préférences et de l’habitude du clinicien. On recherche un AE dont les propriétés antiépileptiques et sédatives/hypnotiques sont suffisamment séparées pour avoir un intérêt thérapeutique. Le Phénobarbital (Pb) reste encore l’AE de première intension en médecine vétérinaire canine et féline. Le bromure (Br) est intéressant pour les crises peu nombreuses ou psychomotrices. L’Imépitoïne (Im) est la dernière molécule AE vétérinaire mise sur le marché. Le Lévétiracétam (Lé) est l’une des molécules de médecine humaine la plus prometteuse qui intervient dans la cascade de prescription en 4ème chez le chien, en 2nd chez le chat chez qui le Br crée une bronchite éosinophilique et l’I n’a pas d’AMM. Attention, contrôler un épileptique, ça n’est pas que diminuer le nombre de crises ! Contrôler un épileptique, c’est 1. augmenter l’intervalle de temps de tranquillité entre chaque épisode, 2. diminuer l’intensité des crises, 3. diminuer la durée des crises, 4. diminuer leur nombre à chaque fois qu’une série se déclenche, 5. diminuer le temps de récupération de la phase post ictale. Tous ces critères de réduction ne sont pas systématiquement présents mais il faudra positiver sur les acquis aux yeux du propriétaire pour qu’il le remarque si cela ne lui vient pas de lui même. En l’absence de ces changements positifs, on est alors en droit de se demander si ce mauvais contrôle vient du diagnostic ou du traitement. REMETTRE EN CAUSE LE DIAGNOSTIC ÉTIOLOGIQUE DE L’ÉPILEPSIE …. Avant de mettre en place un traitement AE sur un animal qui a présenté plusieurs manifestations épileptiformes et qualifié d’ « épileptique », il est essentiel de prouver que l’épilepsie est bien primaire, c’est à dire uniquement fonctionnelle. Le fait que l’animal fasse partie des races à risques, qu’il soit normal entre les crises, qu’elles soient plus souvent nocturnes ou en salves, plutôt généralisées, que l’animal ne fasse pas de crises plusieurs jours ou semaines avant qu’elles ne réapparaissent en étant normal durant cet intervalle, … ces critères sont en faveur d’une épilepsie primaire. Par contre, l’irrégularité des crises en nombre/ intensité/fréquence, le fait que l’animal ne soit pas 100% normal entre les crises, que la crise soit cliniquement asymétrique (contracture musculaire d’un coté du corps en début de crise) et ne soit pas d’emblé généralisées, … sont des critères qui doivent faire suspecter une épilepsie réactionnelle à la présence d’une lésion cérébrale ou d’une anomalie métabolique qu’il serait bon d’explorer avant d’augmenter l’AE ou d’en ajouter un autre. Devant un mauvais contrôle des crises et si un traitement AE a été institué à l’aveugle avec une hypothèse d’épilepsie idiopathique, il est essentiel que le propriétaire accepte de faire des examens sanguins afin d’éliminer les principales causes métaboliques (glycémie, calcémie, ionogramme, acides biliaires, hématocrite, T4/TSH …), des examens d’imagerie en coupe (IRM plutôt que Tomodensitométrie) et une ponction rachidienne afin d’éliminer les principales causes d’épilepsie structurale (inflammation, anomalie congénitale décompensé, accident vasculaire traumatique ou spontané, tumeur). LE CHOIX DU DOSAGE ÉTAIT-IL OU NON ADAPTÉ ET L’OBSERVANCE DU PROPRIÉTAIRE EST ELLE BONNE ? Avec tout AE, une posologie de base est préconisée par le laboratoire, mais comme tout patient n’a pas la même capacité -78- Conférences au Bar de l’Impératrice à répondre à une molécule et à l’éliminer, il faut fréquemment réajuster cette dose. Le Pb a par exemple une « fourchette thérapeutique » à respecter pour être efficace ; une dose trop faible ne permet pas au Pb de bien fonctionner et une dose trop forte peut entrainer à long terme une insuffisance hépatique. Il est essentiel d’expliquer cette particularité des AE au propriétaire d’autant que ce dernier est souvent tenté de d’ajuster la dose lui même ce qui expliquerait l’échec thérapeutique. En cas d’inefficacité, on vérifiera avec le propriétaire si la posologie est bien respectée. La demi vie d’un AE varie d’une molécule à l’autre. Sa concentration sanguine est finalement stable après seulement « 5,5 X le temps de demi-vie ». En cas d’inefficacité, on vérifiera avec le propriétaire si le temps nécessaire a été donné à l’AE pour être suffisamment concentré dans l’organisme. La vitesse d’élimination du médicament impose la fréquence d’administration : plus l’AE a une demi vie courte, plus il doit être donné fréquemment. En cas d’inefficacité, on demandera si la régularité des prises est respectée par le propriétaire? Comme les AE vétérinaires entrainent fatigabilité, somnolence, polydipsie et polyphagie, il n’est pas rare que le propriétaire, non informé de ces effets secondaires, modifient de lui même le dosage. En cas d’inefficacité, on demandera au propriétaire s’il n’a-t-il pas changé la dose à cause d’effets secondaires qu’il juge pénibles? Le phénobarbital est un inducteur enzymatique chez le chien; en augmentant l’activité de la cytochrome P450 des hépatocytes, il augmente sont auto-catabolisme. Il n’est pas rare qu’une phénobarbitalémie initialement dans la fourchette thérapeutique ne le soit plus après quelques mois et qu’un animal initialement stable ne le soit plus en corolaire. En cas d’inefficacité on vérifiera si le propriétaire a été mis au courant qu’un ajustement est parfois nécessaire après quelques semaines ou mois de traitement. Si l’animal prends du poids parce qu’en croissance ou par négligence du propriétaire face à une augmentation de la faim, la quantité d’AE par Kg d’animal va décroitre au cours du temps, expliquant une efficacité initiale qui ne l’est plus par la suite. En cas d’inefficacité on vérifiera avec le propriétaire tout changement de poids. L’observance des consignes doit responsabilisation du propriétaire. faire l’objet d’une QUE FAIRE DEVANT UN MAUVAIS CONTRÔLE DES CRISES EN MONOTHÉRAPIE SANS PROBLÈME D’OBSERVANCE ? Devant un mauvais contrôle, un dosage sanguin de l’AE est indiqué s’il est disponible dans le commerce (phénobarbitalémie et bromémie) ; il est réalisé une fois la concentration sérique stable (2 semaine pour le Ph et 2 mois pour le Br). Le but est de vérifier que la dose n’est pas tout simplement trop faible, c’est à dire en deçà de la fourchette thérapeutique (25 mg/L pour le Pb, 800 mg/l pour le Br). Quand le contrôle n’est pas satisfaisant et la dose trop basse, ou sur les AE qui ne se dosent pas, la première recommandation est Vendredi 13 mars 2015 de l’augmenter de 25% pour obtenir une concentration sérique plus haute sans dépasser la valeur supérieure conseillée parce que toxique (45 mg/L pour le Pb, 3000 mg/l pour le Br) ou la posologie maximale recommandée (30 mg/Kg pour l’Im, pas de limite pour le Lé). Si la phénobarbitalémie/bromémie est dans la fourchette thérapeutique, mais inférieure à la dose toxique, le dosage de ces deux AE peut encore être augmenté de 25% pour au maximum avoisiner la fourchette haute ; ça n’est pas la dose administrée (et donc la « quantité de comprimés pris » aux yeux du propriétaire) qui fait que l’animal est à risque, c’est un surdosage sur du long terme. Cet ajustement pourra avoir lieu à chaque fois que le contrôle sera jugé inapproprié. QUE FAIRE EN CAS D’ÉPILEPSIE DITE REBELLE À LA MONOTHÉRAPIE SANS CAUSE APPARENTE … Si le diagnostic d’épilepsie sans cause structurale ou secondaire est certain et qu’une monothérapie est insuffisante pour contrôler les crises, un second AE est ajouté. En épileptologie vétérinaire, il est conseillé d’ajouter un AE plutôt que d’essayer de le substituer à un autre au risque de rendre l’ »pilepsie encore plus instable et de passer en crises subintrantes ou en status epilepticus. Ce second AE doit avoir préférentiellement une demi-vie, un mode d’excrétion et des effets secondaires différents du premier; idéalement il doit être peu coûteux. L’association Pb et Br était la plus fréquemment utilisée jusqu’à maintenant. En bithérapie Pb/Br, les fourchettes thérapeutiques recherchées sont de 15 à 30 mg/dL pour le Pb et 800 à 2500 mg/L pour le Br. Depuis la sortie de l’Im qui a une courte demi vie et donc une activité d’action plus rapide, l’association Pb et Im est envisageable. Comme l’Im n’est pas dosable en routine, la posologie est à adapter en l’augmentant progressivement de 10 à maximum 30 mg/Kg deux fois par jour. Au delà elle n’a pas d’efficacité supérieure. Enfin, le Lé est un nouvel AE très utilisé en médecine humaine. Sa pharmacodynamie a bien été étudiée chez le chien. Il est utilisable à la dose de 5 à 20 mg/Kg 2 à 3 fois par jour, voire plus, et peut être choisi en troisième AE chez le chien ou en second chez le chat. On évitera le Br chez le chat qui occasionne des broncho-pneumopathies éosinophiliques. CONCLUSION Face à un épileptique dont le contrôle sous phénobarbital n’est pas satisfaisant aux yeux du propriétaire ou du clinicien, il faut en tout premier lieu se poser des questions sur le diagnostic d’épilepsie idiopathique et la bonne utilisation du ou des AE utilisé(s) et ne pas hésiter à rester en monothérapie aussi longtemps que possible en épuisant toutes les ressources du premier AE avant d’ajouter d’autres molécules plutôt que de le substituer !!! Conférences au Bar de l’Impératrice -79- Vendredi 13 mars 2015 Conduite à tenir lors d’un larmoiement chez le lapin Dr Christophe Bulliot Exercice exclusif NAC Nandy (77) L’épiphora est un motif fréquent de consultation pour le lapin de compagnie. L’approche clinique est différente dans cette espèce par rapport au chien et au chat en raison des particularités anatomiques et physiologiques de l’œil du lapin et de l’étiologie essentiellement environnementale chez cette pathologie. La cornée est large (30% de la surface du globe oculaire). Le lapin possède un unique point lacrymal. Il est situé entre la paupière inférieure et la nictitante à 2-3 millimètres de l’angle interne. Le conduit lacrymal présente deux courbures et rétrécissements prédisposant à son obstruction. La première se situe au niveau de l’os maxillaire proximal en regard de la première prémolaire et la seconde se situe à la base des racines des incisives. La sécrétion lacrymale et la fréquence des clignements de paupières sont très faibles dans cette espèce ce qui explique sa prédisposition à un assèchement oculaire conduisant à une conjonctivite et une dacryocystite généralement à l’origine de l’épiphora. Le praticien doit donc en premier lieu porter son attention sur l’environnement du lapin et questionner le propriétaire sur les points suivants : type de cage, présence de courants d’air / vapeurs / poussières, type de litière, hygiène de la cage, hygrométrie. Les principales autres causes d’épiphora sont les inflammations et infections bactériennes, les abcès et malocclusion dentaire. L’examen clinique repose sur l’examen dentaire et l’examen ophtalmologique proprement dit. Ce dernier consiste notamment en la réalisation d’un test de Schirmer (norme : 5-12 mm/min) pour évaluer si la quantité de larme est normale ou non et d’un test à la fluorescéine pour objectiver une éventuelle obstruction du conduit lacrymal. Cette dernière est la principale explication d’un épiphora chez le lapin. Un excès de secrétions lacrymales en est que très rarement la cause. L’obstruction du conduit lacrymal est due à un rétrécissement de la lumière du conduit lors d’inflammation de sa paroi, un corps étranger, des secrétions ou peut avoir une cause non ophtalmologique (abcès dentaires, tumeur faciale). Les examens complémentaires requis sont la radiologie, la dacryocystographie, le scanner et l’analyse bactériologique. Le traitement repose sur l’antibiothérapie, l’administration d’antiinflammatoire, la réalisation d’un sondage des conduits lacrymaux voire d’une chirurgie dentaire. Pour la réalisation d’un sondage du conduit lacrymal, le lapin est anesthésié et positionné en décubitus latéral. Une pression douce à travers la paupière supérieure permet une procidence de la nyctitante. La paupière inférieure est abaissée et le conduit repéré. Une sonde lacrymale est introduite délicatement et du sérum physiologique stérile est instillé progressivement. Une évacuation de secrétions purulentes par le méat lacrymal nasal peut être constatée. Un traitement par simple sondage du conduit lacrymal et médication sans correction de paramètres environnementaux erronés et souvent à l’origine de l’épiphora conduit à une guérison momentanée. De la même façon, une approche clinique sans investigation d’une éventuelle pathologie dentaire associée conduit à un diagnostic partiel. Bibliographie Kern T.J., 1997. Rabbit and rodent ophtalmology. Seminars in Avian and Exotic Pet Medecine, vol 6, n°3, p138-145. Kirschner S.E., 1997. Ophtalmologic diseases in small mammals. In : Hillyer E.V. et Quesenberry K.E., Ferrets, rabbits and rodents, clinical medecine and surgery. Ed Saunders, p339-345. Rival F., Atlas d’Ophtalmologie des Nouveaux Animaux de Compagnie, Ed Vetnac, 2008, 239 p Williams D.L., 1999. Laboratory animal ophtalmology, In : Gelatt K.N., Veterinary ophtalmology, 3ème ed. Ed. Lipponcott Williams ands Wilkins, p 1209-1236. Conférences au Bar de l’Impératrice -80- Vendredi 13 mars 2015 Conduite à tenir face à une parésie des postérieurs chez un furet Charly Pignon DMV, Dip ECZM (Small Mammal) Chef du Service NAC d’Alfort Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort [email protected] La parésie souvent aussi appelée faiblesse de postérieurs se définie comme un déficit moteur définie par une perte partielle des capacités motrices d’une partie du corps (limitation de mouvement, diminution de la force musculaire), d’un ou de plusieurs muscles par opposition à la paralysie ou plégie, qui elle est caractérisée par la perte totale de motricité d’une partie du corps. La paraparésie est une parésie touchant les membres postérieurs, et ce symptôme est extrêmement fréquent chez le furet. Les causes de cette paraparésie sont assez nombreuses et peuvent être différentes de celles que l’on va retrouver chez les autres carnivores domestiques. PHYSIOPATHOLOGIE Chez le furet, une paraparésie peut être présente lors d’une atteinte du système nerveux central, mais aussi lors d’une atteinte endocrine, métabolique ou lors d’anémie. On explique mal aujourd’hui pourquoi une maladie systémique peut avoir des répercussions sur la motricité de membres postérieurs du furet. Certain auteurs parlent d’hypotension sur la moitié postérieur du corps de cet animal assez longiligne. HISTORIQUE ET EXAMEN CLINIQUE Normalement, lorsque les furets se déplacent, ils doivent avoir le dos recourbé. Une des signes précoce de paraparésie est la perte de ce recourbement de la colonne vertébrale. Il est important de préciser le caractère aigue ou chronique de l’apparition de ce symptôme. Une apparition aigue est généralement vue lors d’une atteinte du système nerveux centrale, d’un trauma, d’un corps étranger (très fréquents chez les jeunes animaux) alors qu’une apparition chronique fera plutôt penser à une atteinte métabolique. Cette parésie peut aussi s’accompagner d’autres signes tels qu’une léthargie, un ptyalisme lors de pathologie métabolique. Lors d’atteinte neurologiques compressives, les propriétaires peuvent observer une ataxie, puis une parésie qui va évoluer en paralysie. L’examen clinique doit se faire avec la plus grande délicatesse notamment lorsqu’une cause traumatique est suspectée. Cet examen clinique peut se révéler relativement normal notamment lors de troubles métaboliques. La palpation abdominale est une étape très importante de l’examen clinique. Elle peut mettre en évidence une douleur viscérale lors de corps étranger, une splénomégalie ou une adénomégalie mésentérique lors de troubles de l’appareil hématopoïétique. Un globe vésical peut aussi être présent lors d’atteinte neurologique. Il est aussi à noter qu‘une obésité sévère peut entrainer une faiblesse des postérieurs. L’examen neurologique se réalise de la même manière que sur un chien ou un chat. Celui-ci permettra non seulement de confirmer l’origine neurologique, mais aussi de neurolocaliser la lésion. DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL ATTEINTES MÉTABOLIQUES • Hypoglycémie : insulinome, lymphome, corps étranger gastro-intestinal, insuffisance hépatique sévère, sepsis. • Anémie : hyperœstrogénisme, hémorragie, leucémie, insuffisance rénale chronique. • Cardiopathie : cardiomyopathie dilaté, cardiomyopathie hypertrophique, trouble de conduction (bloc atrioventriculaire). • Obésité sévère. ATTEINTES NEUROLOGIQUES • Néoplasie : lymphome, chondrosarcome, myélome multiple, métastase. • Infectieux : maladie de carré, rage, méningite (cryptococus). • Inflammatoire à médiation immune : maladie aléoutienne. • Traumatique : hernie discale, fracture, luxation de vertèbre. EXAMENS COMPLÉMENTAIRES La réalisation d’une glycémie est l’un des premiers examens complémentaires à effectuer. Il est possible d’utiliser un glucomètre tout en prenant en compte le fait que de récentes études ont montré que certains modèles peuvent surestimer la glycémie. La réalisation d’un examen biochimique permettra de vérifier non seulement la glycémie avec plus de précision, mais aussi les paramètres hépatiques, et rénaux. Une numération formule sanguine, ou à défaut un hématocrite et un frotti sanguin permettront de mettre en évidence une anémie et éventuellement des anomalies de formule lors de lymphomes. En fonction des hypothèses diagnostiques retenues, une échocardiographie sera réalisée pour rechercher une cause cardiaque, une échographie abdominale pour rechercher un corps étranger (le plus souvent radio transparents), un nodule pancréatique, une anomalie structurelle hépatique, rénale, ou des nœuds lymphatiques. Lors d’une suspicion d’atteinte neurologique une radiographie vertébrale peut être réalisée afin de rechercher une fracture vertébrale, mais l’examen tomodensitométrique est le moyen d’imagerie qui donnera le plus de détails. Un prélèvement d liquide céphalorachidien peut aussi être réalisé lors de suspicion de méningite. Conférences au Bar de l’Impératrice -81- TRAITEMENT Les traitements sont variés en fonction des cause ayant entrainées la paraparésie. La cause la plus fréquente de parésie des postérieurs est sans doute la présence d’un insulinome. Les traitements sont médicaux (corticoïde et diasoxyde) ou chirurgicaux (lobectomie pancréatique). Il est a noter que les études montrent que le traitement chirurgical donne une meilleur médiane de survie. Si un corps étranger est mis en évidence, le traitement sera alors chirurgical (gastrotomie ou entérotomie) après avoir stabilisé l’animal. Lors d’atteinte neurologique traumatique si un cas d’hémi-laminectomie couronné de succès a été décrit, les chirurgies vertébrales restent difficiles à cause de la petite taille des vertèbres, et la cageothérapie est la solution la plus souvent utilisée. Les atteintes infectieuses et néoplasiques sont quant à elle bien souvent de mauvais pronostiques malgré quelques traitement (nursing, chimiothérapie) qui peuvent permettent de prolonger la vie de l’animal. Vendredi 13 mars 2015 Conférences au Bar de l’Impératrice -82- Vendredi 13 mars 2015 Conduite à tenir en cas de crises convulsives chez un oiseau Florent Modesto Service des Nouveaux Animaux de Compagnie Clinique Vétérinaire Brasseur 6 rue Dechamps 7170 Manage, Belgique [email protected] Les crises convulsives sont des processus pathologiques complexes qui peuvent avoir de nombreuses étiologies. Traiter un oiseau en crise peut s’avérer très stressant pour l’animal lui-même mais également pour les propriétaires et le praticien. Une démarche raisonnée s’avère donc primordiale pour gérer le cas à court, moyen et long terme. I. RECONNAÎTRE LE STADE DE LA CRISE CONVULSIVE Une crise convulsive est une manifestation clinique d’une activité électrique excessive dans le cerveau, à un moment précis. La forme que prend cette crise peut varier selon la région du cerveau qui est touchée. On reconnaît différents stades avant, pendant et après la crise. La phase précédant la crise est le prodrome. Elle est caractérisée par de l’anxiété ou de l’agitation qui peut arriver quelques jours à quelques heures avant le début de la crise. L’activité cérébrale anormale commence avec la phase suivante : l’aura. L’animal, très agité, veut fuir, cherche le propriétaire ou présente une autre anomalie comportementale. Cette phase précède de quelques secondes à minutes la convulsion. L’ictus correspond à la crise convulsive en tant que telle et dure quelques minutes. La phase post-ictale est caractérisée par l’apparition de troubles neurologiques temporaires consécutifs à la crise (désorientation, cécité, ataxie,..). Lors de l’admission du patient en crise, le vétérinaire doit effectuer une anamnèse très brève et dirigée (le reste sera complété par la suite). La courte description de la crise par les propriétaires s’avère primordiale pour déterminer sa fréquence, le stade et les potentielles conséquences cérébrales. L’âge ainsi que l’espèce est également important afin d’avoir une tendance étiologique et pronostic. mais plus courte durée d’action), peut être administré à la place. Une dose de 0.5-3 mg/kg en IM ou de 0.5-2 mg/kg par voie intranasale sera alors utilisée. Si l’oiseau régurgite pendant sa crise, ce dernier est placé tête vers le bas afin d’éviter une aspiration trachéale. Le bec est nettoyé avec un coton-tige. L’animal est ensuite supplémenté en oxygène et une évaluation de la glycémie est rapidement réalisée. En cas d’hypoglycémie, un bolus de dextrose 30% à 1ml/kg IV est administré. Ce bolus peut être rapidement répété ou l’animal peut être mis sous perfusion continue. Il est important de savoir que les corticoïdes sont à éviter. Ils encouragent le développement d’infections secondaires et augmenteraient le taux de mortalité chez les patients avec des dommages cérébraux (études issues de médecine humaine). Dès que les convulsions ont stoppé pour une période de 12 à 24h, la CRI peut être diminuée sur les 12 à 24h suivantes. Si le diazépam ne stoppe pas les convulsions, le phénobarbital doit être mis en place à 2-10 mg/kg/h. Cependant, son efficacité serait très limitée. L’utilisation de produit anesthésique volatile sera faite en dernier recours. La température devra être monitorée suite au status epilepticus. II. GESTION D’URGENCE DU STATUS EPILEPTICUS III. COMPLÉTER L’ANAMNÈSE ET EVALUER L’ANIMAL Le Status epilepticus correspond à une crise convulsive qui dure 5 minutes ou plus, ou à une succession de 2 crises (ou plus), sans reprise de conscience entre les convulsions. Quand un patient aviaire est présenté en crise, le premier objectif thérapeutique est de la stopper. La molécule de choix est le diazépam à 0.5 m/kg IV ou 1mg/kg (per cloacal, IM). Le médicament peut être administré toutes les 2 minutes pour un total de 3 doses ou placé en perfusion continue (CRI) à 1 mg/ kg/h en IV (veine basilaire) ou IO. Le midazolam, qui donne également de très bon résultat (plus puissant que le diazépam Une fois que l’animal est stabilisé, l’anamnèse doit être complétée afin de connaître les paramètres environnementaux et autres facteurs qui pourraient avoir une implication dans l’apparition des crises. Il est important de savoir s’il y a des dénominateurs communs relatifs à l’apparition de la crise ou de convulsions passées. Le vétérinaire doit insister sur les différents médicaments présents dans la maison et auxquels l’animal aurait pu avoir accès. Les agents toxiques auxquels l’animal peut être exposé doivent également être revus. Conférences au Bar de l’Impératrice -83- Un examen complet, incluant une évaluation neurologique, doit être réalisé afin de mettre en évidence un processus pathologique particulier et afin d’évaluer les dommages cérébraux. IV. PROCÉDURES DIAGNOSTIQUES Les examens complémentaires s’avèrent indispensables pour déterminer la cause des crises et ainsi permettre la réussite d’un traitement à long terme. Le choix sera orienté par l’historique complet de l’animal et l’examen physique. Chez les oiseaux, les étiologies décrites sont les suivantes : • Nutritionnelle : hypovitaminose E & sélénium (plus fréquent chez les jeunes oiseaux, perruchon), hypovitaminose B1 (Thiamine) • Métabolique : hypocalcémie (gris du gabon), hypoglycémie (rapaces, sevrage précoce), encéphalose hépatique • Traumatique : choc crânien • Cardiovasculaire : athérosclérose, AVC (Gris du gabon, perruche), syndrome hyperlipidémique (« yolk stroke », femelle en ponte) • Néoplasique : tumeurs extra-crâniennes (adénocarcinome hépatique) ou intracrâniennes (gliome, papillome du plexus choroïde, lymphosarcome, …) • Infectieuse : Chlamydophila psittaci, Proventricular Dilatation Disease (PDD) • Toxique : métaux lourds (Plomb, Zinc), pesticides (organophosphorés, carbamates) • Épilepsie idiopathique : épilepsie essentielle (Amazona amazonica, Inséparables) Un bilan sanguin complet (hématologie et biochimie) s’avère souvent le plus utile dans un premier temps pour orienter le diagnostic. L’imagerie médicale (radiographie, scanner, IRM, myélographie) est également une aide précieuse au diagnostic, surtout si le patient est réfractaire au traitement ou ne montre pas d’anomalie sanguine significative. D’autres tests pourront être envisagés selon les résultats : dosage toxines, ponction LCR... V. GESTION À LONG TERME La réussite du traitement à long terme dépend tout autant de l’établissement de la cause des convulsions que de la thérapie utilisée et de la compliance des propriétaires (suivi efficace du patient). Compte-tenu du peu d’information chez les oiseaux, l’adaptation des thérapies anticonvulsivantes canine est de rigueur. Le levetiracepam, le zonisamide ou la gabapentine sont les molécules les plus utilisées. Vendredi 13 mars 2015 RÉFÉRENCES ANTINOFF N: Stop the shakes! Diagnosing and Treating Neurologic Disorders in Birds. Proceedings of the Annual Conference of the Association of Avian Veterinarians, Providence 2007, RI, pp 201-216 BEAUFRERE H., NEVAREZ J., GASCHEN L., et al : Diagnosis of presumed ischemic stroke and associated seizure management in a Congo African Grey Parrot. J Am Vet Med Assoc 2009, 239: 122128 BENNETT RA: Neurology, in Ritchie BW, Harrison GJ, Harrison LR (eds): Avian Medicine: Principles and Application. Lake Worth, FL, Wingers Publishing, pp 723-747, 1994 BOWLES H, LICHTENBERGER M, LENNOX A: Emergency and critical care of pet birds. Vet Clin North Am Exot Anim Pract 10:345-394, 2007 DELK. K. Clinical Management of seizures in Avian patients. J Exo Pet Med 2012, 21: p132-139 PLATT SR. Evaluating and treating the nervous system, in Harrison GJ, Lightfoot TL (eds): Clinical Avian Medicine, Vol II. 2008, West Palm Beach, FL, Spix Publishing, pp 493-517 SCHNELLBACHER R., BEAUFRERE H. et al : Pharmacokinetics of Levetiracepam in Healthy Hispaniolan Amazon Parrot (Amazona ventralis) after oral administration of a single dose. J Avian Med Surg 2014, 28(3): 193-200 Conférences au Bar de l’Impératrice -84- Vendredi 13 mars 2015 Les anémies hémolytiques à médiation immune idiopathiques chez le chat Ghita Benchekroun et Cathy Trumel Les anémies hémolytiques à médiation immune idiopathiques ou primaire (AHMI primaires) sont moins fréquentes chez le chat que chez le chien. Elles peuvent être dues à la liaison d’anticorps sur la membrane des hématies et sont alors éliminées de la circulation par le système phagocytaire et donc à l’origine d’une AHMI extra-vasculaire ou bien à une attaque directe des progéniteurs médullaires avec pour conséquence une anémie non régénérative. Chez le chat, les AHMI Primaires sont le plus souvent caractérisées cliniquement par un abattement marqué et de la dysorexie survenant sur des chats jeunes adultes. Des vomissements sont rarement observés. A l’examen clinique, les éléments les plus fréquents sont la pâleur des muqueuses, un souffle cardiaque, une splénomégalie et beaucoup plus rarement un ictère ou une polyadénomégalie. Le bilan biologique montre fréquemment une anémie sévère, souvent macrocytaire mais régénérative dans 50 % des cas seulement. Le test d’agglutination sur lame est positif dans la majorité des cas. Une thrombopénie dans le cadre d’un syndrome d’Evans ou d’une CIVD est rarement observée. La leucocytose fréquente chez le chien est rare chez le chat mais une neutropénie et une lymphocytose peuvent être observés dans environ 1/3 des cas. Le bilan biochimique peut révéler une hyperbilirubinémie souvent modérée, une hyperglobulinémie et une augmentation de l’activité ALAT. Le test de Coombs est fréquemment positif. Le myélogramme permet de différencier les AHMI centrales et périphériques lors d’anémie non régénérative et d’apporter des éléments pronostiques. Lors d’atteinte centrale, on parlera d’aplasie érythroïde isolée si les précurseurs érythroïdes représentent moins de 5 % de la population médullaire totale associée à une lymphocytose à lymphocytes matures parfois intense (jusqu’à 55 % de la population médullaire). Le diagnostic d’AHMI primaire est fondé sur la mise en évidence d’une anémie sévère avec agglutination, test de Coombs positif et exclusion d’une cause métabolique et toxique (syndrome urémique, hypophosphatémie, anémie hémolytique par stress oxydatif avec corps de Heinz et/ou eccentrocytes), infectieuse (hémobartonellose, FeLV, FIV, PIF) ou néoplasique (Syndrome myélodysplasique, hémopathie malignes). Le traitement est fondé sur l’utilisation de la corticothérapie a dose immunosuppressive (prednisolone à 2 mg/kg une à deux fois par jour initialement puis passage en dose dégressive dès qu’une rémission hématologique est obtenue). La prednisolone est alors diminuée par palier de 25% de la dose totale toutes les 2 à 4 semaines de manière à ce que le traitement dure plusieurs mois. En cas de réponse insuffisante, l’utilisation d’autres immunosuppresseurs (cyclosporine à 5 mg/kg/jour ou chlorambucil 2mg / chat un jour sur 2 ou 0.1-0.2 mg/kg/j) est préconisée. Une transfusion peut être réalisée en fonction de l’état du patient et lorsque l’hématocrite est inférieur à 10 %). Enfin, l’administration d’anti-acide (Anti-histaminiques H2) est conseillée au vu de l’utilisation de doses élevées de glucocorticoïdes dans un contexte de défaut de perfusion intestinale. Le pronostic est globalement plus favorable que chez le chien avec un taux de mortalité d’environ 24 %. Pour en savoir plus Kohn B., Weingart C., Eckmann V. Ottenjann M., Leibold W.: Primary Immune-Mediated Hemolytic Anemia in 19 Cats: Diagnosis, Therapy, and Outcome (1998-2004). J Vet Intern Med 2006;20: 159-166. Husbands B.D., Smith S.A., Weiss D.J.: Idiopathic immune mediated hemolytic anemia (IMHA) in 25 cats. ACVIM 2002. Stokol T.: immune-mediated anemias in the Cat IN Schalm’s Veterinary hematology 6th edition 2010 Blackwell Publishing Ltd pp226-232. Conférences au Bar de l’Impératrice -85- Samedi 14 mars 2015 Boiteries orthopédiques et neurologiques Pr. Pierre Moissonnier DMV, MS, PH.D, Diplom ECVS Service de chirurgie, Centre Hospitalier Vétérinaire d’Alfort, École Nationale Vétérinaire d’Alfort, 7 avenue du général de Gaulle, 94700 Maisons Alfort DÉFINITION Une boiterie (ou claudication – terme employé pour l’homme, sachant que certains considèrent ces termes comme étant différents) est une démarche avec inclinaison asymétrique du corps. Cette asymétrie peut ainsi porter sur un membre, ou plusieurs, peut être intermittente ou permanente. Autres définitions : Irrégularité dans la démarche. Suivant cette définition, il est évident que des causes aussi bien mécaniques ou provenant d’une douleur peuvent engendre cette démarche irrégulière. Si l’orthopédie est le plus souvent incriminée, les boiteries d’origine nerveuse sont également à considérer. Certaines sont aisées à distinguer des boiteries orthopédiques, d’autres les miment à un point tel que bien souvent les animaux qui en sont atteints sont traités pour une cause erronée. Un examen neurologique exhaustif est indispensable pour envisager la présence d’une boiterie d’origine nerveuse. Les principaux troubles permettent de conclure en la présence d’un trouble neurologique : • convulsions • altération de la conscience • parésie ou paralysie avec déficit proprioceptif • ataxie cérébelleuse (augmentation du polygone de sustentation, ataxie, roulé) • hyperesthésie ou anesthésie • cessité • incontinence • vomissements ou régurgitation Malheureusement, dans de nombreux cas (en particulier pour certaines atteints du monotneurone périphérique), l’examen orthopédique et neurologique interfèrent. Ainsi une suppression d’appui liée à une douleur orthopédique peut mimer un déficit proprioceptif et conduire à la réalisation d’examen complémentaires inappropriés . La réponse est parfois simple. Par exemple par quel examen commencer ? Celui qui fait le moins mal (normalement l’examen neurologique), et qui ne modifiera pas les réponses obtenues par le second. Cette présentation est un travail dirigé autour de ce diagnostic différentiel. En charge des consultations générales de chirurgie mais aussi spécialisées en neurochirurgie, P. Moissonnier vous propose d’explorer tour à tour les causes simples facilement différenciables puis certains pièges diagnostiques qu’il faut connaître afin de les éviter. Conférences au Bar de l’Impératrice -86- Samedi 14 mars 2015 La thérapeutique des plaies par l’utilisation de pansements modernes Dr Claude Carozzo Maître de Conférences, PhD, Dipl. ECVS Service de chirurgie, VetAgro sup La cicatrisation des plaies regroupe un ensemble de phénomènes physiologiques complexes cataboliques et anaboliques. Le déroulement naturel de la cicatrisation se décompose classiquement en cinq étapes : phase inflammatoire, phases de détersion, de granulation, d’épidermisation et de maturation. Le traitement des plaies s’inspire du déroulement naturel de la cicatrisation pour en favoriser l’évolution et, dans la mesure du possible, en raccourcir la durée. Le traitement ne doit pas entraver le processus de cicatrisation par des interventions intempestives. • Les modalités de traitement des plaies sont multiples : chirurgicales lors de parage, de suture ou de fermeture de plaies par des techniques de lambeaux ou de greffes, ou conservatrices lors de traitement sous pansement de plaies qui ne peuvent être suturées immédiatement. Les avancées réalisées dans la compréhension des phénomènes de cicatrisation et dans leur prise en charge, tant dans le milieu médical chez l’homme que dans le milieu vétérinaire, ont conduit au développement de nouveaux pansements techniques dit «spéciaux». Ces produits techniques reposent sur un ensemble de principes communs notamment le principe de cicatrisation en phase humide ; en raison de leur caractéristiques propres, ils reconnaissent un champ et des conditions d’utilisation spécifiques. DIFFÉRENTS TYPES DE PANSEMENTS Les pansements techniques actuels en émergence sur le marché vétérinaire peuvent être classés en fonction de nombreux critères dont leur imperméabilité (à l’air et/ou aux liquides), la nature de leur constituants principaux (hydrocolloïdes, alginates, hydrocellulaires, hydrogels, pansements gras, au charbon, les films, etc...) ou leurs caractéristiques fonctionnelles principales. C’est cette dernière caractéristique que nous utiliserons pour classer les pansements. Peuvent être distingués : • les pansements à haut pouvoir d’absorption ; • les pansements préservant l’humidité ; • les pansements non adhérents semi-occlusifs. La présentation ci-après n’est pas exhausitve. PRINCIPE DE LA CICATRISATION EN MILIEU HUMIDE Le principe de cicatrisation en phase humide repose lui sur le fait que la cicatrisation naturelle se déroule dans un milieu humide ; les éléments cellulaires et moléculaires peuvent migrer et se développer dans ces conditions de façon optimale. Une étude déjà ancienne de Winter en 1962, a montré une accélération de la cicatrisation sous pansement synthétique semi-occlusif par rapport à une plaie laissée à l’air libre chez l’homme. Cette cicatrisation est d’environ 30 % plus rapide que dans un environnement sec. Les intérêts de l’environnement humide sont : • le maintien au niveau de la plaie de conditions de température et d’humidité qui optimisent les capacités naturelles de cicatrisation et préviennent la dessiccation ; • la présence de protéases, facteurs de croissance dans l’exsudat ; • la présence des globules blancs (qui favorisent donc la détersion autolytique ) ; • la détersion plus ciblée des tissus morts (pas d’induction de lésion concomitantes des tissus sains péri lésionnels) ; le risque moins important d’infections (l’exsudat constitue une barrière mécanique, présence et maintient de macrophages et de PNN) • le retrait du pansement moins douloureux. Toutefois, un excès d’humidité et un exsudat trop important peuvent contribuer à la macération excessive de la plaie, délétère à la cicatrisation, et qui favorise l’extension de la nécrose et augmente le risque infectieux. Il est donc important d’adjoindre à la première couche du pansement un dispositif d’absorption de cet excès d’humidité ou de changer régulièrement le pansement. I – LES PANSEMENTS A HAUT POUVOIR D’ABSORPTION Ils sont indiqués d’une manière générale sur les plaies fortement exsudatives. A – LES PANSEMENTS HYPERTONIQUES SALES COMPOSITION Compresses imbibées d’une solution de NaCl 20 %. PROPRIÉTÉS Action physique : présentés en compresses à large maille, ils favorisent le drainage vertical. Un effet détersif mécanique des tissus nécrotiques et des débris ayant adhéré au pansement peut être également observé lors du retrait. Action osmotique : la nature hypertonique de la solution induit un afflux des liquides depuis la plaie vers le pansement. Conséquence sur la cicatrisation : Les réactions inflammatoires Conférences au Bar de l’Impératrice -87- Samedi 14 mars 2015 sont stimulées par l’augmentation de la micro-vascularisation locale. Ces éléments favorisent la détersion et la granulation. Ce type de pansement entraîne par ailleurs une dessiccation des tissus préjudiciable aux bactéries, ce qui lui confère une propriété bactériostatique. Les avantages de la cicatrisation en milieu humide sont retrouvés. Le pansement constitue une barrière imperméable et permet le maintien de l’humidité et de la température, favorisant ainsi la détersion, l’angiogenèse et, dans une moindre mesure, l’épithélialisation. INDICATIONS Plaies avec un exsudat abondant, infectées ou nécessitant une détersion agressive et rapide. INDICATIONS Les indications sont donc larges, de la phase de détersion à la phase d’épidermisation sur les plaies modérément exsudatives : plaies aiguës (brûlures, dermabrasions, sites donneurs de greffes), lésions chroniques (escarres). Plaies atones (localisation difficile, cicatrisation sur os ou tendons sous jacent). B – LES PANSEMENTS A BASE D’ALGINATE COMPOSITION Les fibres d’alginates de calcium sont extraites d’algues brunes marines et sont présentées sous forme de compresses non tissées ou de mèches. CARACTÉRISTIQUES Le pouvoir d’absorption de ce type de pansement est très important (10 à 15 fois son poids en eau) et supérieur à celui des hydrocolloïdes ou hydrocellulaires. Fonctionnant sur le principe d’un drainage vertical, ces pansements diminuent les macérations sur les tissus sains périphériques tout en maintenant une humidité suffisante grâce à la formation d’un gel d’interface. En outre, ils ont des propriétés hémostatiques. PROPRIÉTÉS Ces pansements favorisent la détersion et la granulation. La création d’un gel d’interface permet un contrôle de la contamination microbienne (bactéries capturées dans le gel : diminution du risque d’infection) et le retrait non douloureux du pansement. INDICATIONS Leur utilisation est à privilégier pour les plaies modérément à fortement exsudatives, plaies hémorragiques et plaies infectées. Les plaies aiguës suintantes telles les brûlures, les déhiscences de plaies postopératoires, les sites donneurs de greffes, les abrasions, les fistules les abcès opérés sont de bons exemples de plaies justifiant l’emploi d’alginates. Les plaies chroniques, telles que les escarres de décubitus sont également de bonnes indications. II – LES PANSEMENTS PRESERVANT L’HUMIDITE (OCCLUSIFS ET SEMI-OCCLUSIFS) A – LES HYDROCOLLOIDES COMPOSITION Deux formulations sont disponibles. Sous forme de plaque : deux couches sont présentes, une couche interne absorbante de carboxyméthylcellulose (CMC) associée à de l’élastomère, de la pectine, de la gélatine, etc. et une couche externe imperméable en polyuréthane (film, mousse) ou polyester/polyamide. Sous forme de pommades, poudres : il n’y a alors que de la CMC. CARACTÉRISTIQUES/PROPRIÉTÉS La CMC forme un gel d’interface au contact de l’exsudat qu’il permet de contrôler par drainage et absorption (néanmoins plus limitée que pour les alginates). Ce type de pansement n’est en revanche pas indiqué sur les plaies fortement exsudatives. B – LES HYDROCELLULAIRES COMPOSITION Pansements totalement synthétiques constitués essentiellement de polyuréthane, sous différentes formes galéniques (matière adhésive, billes, fibres, films), parfois enduits de silicone. CARACTÉRISTIQUES Les hydrocellulaires se comportent comme de petites éponges et présentent un haut pouvoir absorbant (10 fois leur poids). Le film polyuréthane externe souvent associé le rend imperméable aux liquides et aux bactéries, tout en restant perméable aux échanges gazeux. PROPRIÉTÉS Ce type de pansement permet le maintien de l’humidité, tout en limitant la macération (perméable aux gaz et haut pouvoir absorbant). Comme pour toute cicatrisation en phase humide, ils favorisent la détersion (mais effet moindre que les alginates et les hydrocolloïdes), la granulation et dans une certaine mesure, l’épidermisation (non adhérence à la plaie). INDICATIONS Les indications de ce type de pansement sont larges : toutes les phases de cicatrisation mais plus particulièrement la phase de granulation, en tant que première couche ou en tant que seconde couche absorbante d’un autre type de pansement. C – LES HYDROGELS COMPOSITION Les hydrogels sont des gels amorphes contenant une forte concentration en eau purifiée (> 70 %). Selon les produits, ils sont associés soit à de la carboxyméthylcellulose de sodium, soit à de l’alginate Ca2+ / Na+, soit à de la pectine, soit au propylène glycol. CARACTÉRISTIQUES Contenant une forte teneur en eau, ces produits sont utilisés pour hydrater les plaies sèches et nécrotiques. Le gel permet de maintenir le milieu humide, sans pour autant adhérer à la plaie. La détersion est favorisée. INDICATIONS Leur utilisation est à privilégier d’une manière générale pour les plaies non exsudatives voire sèches, en phase de détersion, pour humidifier des plaies, (escarres, plaies atones, plaies d’irradiation, etc.) et pour le ramollissement des plaques de nécrose. Conférences au Bar de l’Impératrice -88- D – LES FILMS DERMIQUES COMPOSITION Films de polyuréthane . CARACTÉRISTIQUES / PROPRIÉTÉS Les films utilisés en pratique sont semi-perméables : perméables à l’air mais imperméables aux liquides. et aux bactéries. Ils maintiennent l’humidité (cicatrisation en milieu humide) et favorisent donc la détersion. Transparents, ils permettent la surveillance du pansement placé dessous. INDICATIONS En tant que pansement primaire, ils sont donc particulièrement indiqués pour les plaies d’abrasion superficielle, les sites donneurs de greffe, les brûlures superficielles ou la protection temporaire de tous types de plaies pour la balnéothérapie. En tant que pansement secondaire (sur hydrogel, sur alginate), pour assurer la protection du pansement primaire vis-à-vis des contaminations extérieures et favoriser le maintien de l’humidité. III – LES PANSEMENTS NON ADHERENTS LES PANSEMENTS GRAS ET INTERFACES COMPOSITION Présentés sous forme de tulle ou d’interfaces, ils sont constitués d’une maille plus ou moins fine (très serrée pour les interfaces) enduite de substance grasse telle que la vaseline / parafine ou du silicone. Un principe actif peut également être incorporé : antiseptique (Polyvidone iodée), antibiotique, corticoïde. CARACTÉRISTIQUES/PROPRIÉTÉS Ils maintiennent un milieu humide, mais poreux et sans capacité d’absorption. Ils laissent passer l’exsudat vers la 2ème couche du pansement. Etant non (ou peu) adhérents, leur retrait se fait sans douleur et en théorie, sans lésion de la plaie sous-jacente. Toutefois, lors de l’emploi d’un tulle (maille large) il est impératif de le retirer avant qu’il ne sèche sinon il risque d’adhérer et de léser le tissu de granulation lors du retrait. Ce type de complication n’est pas rencontré avec les interfaces (compresse simple enduite) qui n’adhèrent pas à la plaie et permettent de respecter le tissu nouvellement formé). INDICATIONS Les indications sont plus limitées : plaies superficielles en phase de bourgeonnement, des brûlures, des dermabrasions , et pour la fixation de greffes (pastilles, filets, etc.) Samedi 14 mars 2015 Conférences au Bar de l’Impératrice -89- Samedi 14 mars 2015 Détresse respiratoire chez les oiseaux Minh Huynh DVM, MRCVS Diplomate of European College of Zoological Medicine (Avian) INTRODUCTION La détresse respiratoire chez l’oiseau est un motif de consultation fréquent qui nécessite une prise en charge urgente et agressive. La gestion de ces cas doit prendre en compte plusieurs facteurs dont le stress du patient et la maladie sous jacente. La différence notable des oiseaux par rapport aux petits mammifères réside en leur capacité à cacher leur signe clinique jusqu’à la décompensation brutale. Lorsque la détresse respiratoire devient apparente, l’animal entre alors en état de stress potentiellement fatal. Toute manipulation à est alors extrêmement risquée. Il est déconseillé de mener des procédures invasives à ce stade comme notamment de faire un examen clinique complet. I. STABILISATION. Mettre l’animal en couveuse sous oxygène. Une administration d’analgésique (Butorphanol) à ce stade est bénéfique si elle ne nécessite pas de manipulation excessive. II. OBSERVATION À DISTANCE. OBSERVER LE TYPE DE DYSPNÉE (INSPIRATOIRE OU EXPIRATOIRE). Notamment en cas de dyspnées inspiratoires, il faut se préparer à l’éventualité d’une obstruction trachéale, et son traitement par une cannulation des sacs aériens. D’autres signes cliniques à distance peuvent être utiles : l’observation des fientes notamment peut révéler une polyuropolydipsie ou une hépatopathie. L’observation à distance associée à un recueil exhaustif des commémoratifs permet au clinicien de préparer son plan thérapeutique III. RADIOGRAPHIE « EN BOITE » Si la réalisation d’une radiographie vigile est à déconseiller fortement, il est néanmoins possible de réaliser un cliché dorso-ventral de l’oiseau dans une boite à oxygène. Cette vue grossière permet de distinguer les sacs aériens et de déterminer la présence d’un épanchement coelomique, d’une aérosacculite majeure ou de fracture. IV. PRÉPARATION DE L’ANESTHÉSIE. La manipulation des oiseaux en détresse respiratoire leur est souvent fatale. Celle-ci sera toujours dans la mesure du possible réalisée sous anesthésie. Tous les éléments nécessaires à la réalisation de l’anesthésie, aux examens complémentaires et aux chirurgies éventuelles doivent être préparés à l’avance et dans un ordre précis. Le temps anesthésique doit être limité à son strict minimum. V. GESTES TECHNIQUES. L’oiseau est alors saisi rapidement et induit au masque par des gaz inhalants. Une démarche diagnostique logique et méthodique permettra de déterminer les gestes urgents à réaliser pour optimiser les chances de survie de l’animal. A. EN CAS DE DÉTRESSE RESPIRATOIRE BASSE : INTUBATION La plupart des gestes techniques doivent être réalisés sous anesthésie pour pallier au stress de la manipulation. L’intubation est une étape clé de l’anesthésie puisqu’elle permet une délivrance efficace des gaz inhalants, une ventilation assistée, et une surveillance anesthésique à l’aide de la capnographie. L’intubation doit tenir compte de plusieurs particularités de la trachée des oiseaux : • L’absence d’épiglotte rend l’intubation aisée. • A taille égale, la trachée des oiseaux est de plus gros diamètre que celle des mammifères • La trachée possède des anneaux trachéaux complet ce qui la rend moins extensible. De ce fait on préfèrera utiliser des sondes sans ballonnets. B. EN CAS D’OBSTRUCTION HAUTE : CANNULATION DU SAC AÉRIEN En présence d’une obstruction trachéale, l’oiseau rentre en dyspnée inspiratoire sévère. Les causes sont multiples (granulome aspergillaire, corps étrangers, parasites). Du fait de l’anatomie particulière des oiseaux, il est possible de court-circuiter le passage de l’air dans la trachée en réalisant une cannulation du sac aérien thoracique latéral droit. L’abord du site se fait par une voie latérale droite après préparation aseptique. Une incision est pratiquée entre la 7eme et la 8eme côte. Le sac aérien est visualisé et percé. Une cannule est introduite dans le sac aérien et suturée de part et d’autre autours des côtes adjacentes. La délivrance de l’anesthésie est reprise par cette cannule puis arrêtée à la fin des procédures. C. VOIE VEINEUSE OU OSSEUSE La base de la fluidothérapie de choc s’effectue par voie intraveineuse ou intra-osseuse stricte. Après l’intubation, la mise en place d’un cathéter veineux est indispensable pour la gestion en urgence des détresses respiratoires. Il permet la délivrance de cristalloides, de colloides, et de glucose. Celui-ci peut être implanté dans la veine ulnaire / la veine metatarsienne médiale ou la veine jugulaire. Les cathéters intraosseux peuvent être implantés dans le tibia ou dans l’ulna. Conférences au Bar de l’Impératrice -90- D. RADIOGRAPHIE E. COELIOCENTHÈSE Les oiseaux ne possèdent pas de diaphragme. La présence de tout épanchement coelomique comprime les sacs aériens et constitue une contrainte importante pour la respiration. Il est indispensable d’effectuer une coeliocenthèse rapidement pour permettre une expansion normale des sacs aériens. La cavité coelomique est entourée de sacs aériens chez l’oiseau ce qui complique la réalisation de la coeliocenthèse. La ponction du liquide d’épanchement au travers d’un sac aérien aurait pour conséquence un afflux délétère de fluide dans le sac aérien. Le site unique de ponction se situe au niveau de la ligne blanche, à 1cm en dessous du bord caudal du bréchet. Le maximum de fluide est retiré afin de privilégier au mieux la respiration. Les pertes protéiques occasionnées sont compensées par voie intraveineuse par l’administration de colloides. Certains gestes en urgences peuvent s’avérer salvateur mais cela ne dispense pas d’une approche raisonnée et méthodique. La stabilisation initiale est au moins aussi importante que ces actes techniques, complétée par les examens complémentaires appropriés. Samedi 14 mars 2015 Conférences au Bar de l’Impératrice -91- Samedi 14 mars 2015 Conduite a tenir face à une dyspnée chez un reptile Lionel Schilliger Dip. ECZM (Herpetology) Dip. ABVP (Reptile and Amphibian Practice) Les affections de l’appareil respiratoire profond sont particulièrement fréquentes chez les reptiles en captivité et sont souvent de pronostic sombre. Bien qu’elles connaissent une étiologie variée (environnementale, infectieuse, fongique, parasitaire, néoplasique ou mécanique), leur expression clinique est généralement assez univoque et spécifique. La compréhension des pneumopathies des reptiles exige, au préalable, une bonne connaissance des particularités anatomo-physiologiques du tractus respiratoire de ces animaux. RAPPELS ANATOMO-PHYSIOLOGIQUES SPÉCIFICITÉS ANATOMIQUES TRACTUS RESPIRATOIRE SUPÉRIEUR Chez tous les reptiles, des narines sont situées par paire sur la partie la plus rostrale de la tête. Chez certains lézards, tels que l’iguane vert (Iguana iguana), elles recèlent des «glandes à sel» qui sécrètent un jetage hyperosomotique de chlorure de sodium et de chlorure de potassium en cas d’augmentation de l’osmolarité du plasma. Celles de crocodiliens sont proéminentes, équipées de petites valves étanches, et permettent ainsi à ces animaux de chasser à l’affût sous l’eau tout en respirant. Les narines se poursuivent par les cavités nasales, symétriques et séparées l’une de l’autre par une cloison nasale médiane ostéocartilagineuse. Ces cavités nasales s’abouchent dans la cavité buccale au niveau des choanes. L’organe voméro-nasal (appelé «organe de Jacobson»), appareil chimiorécepteur par lequel chemine l’essentiel de l’information olfactive chez les squamates (les lézards et les serpents), est très réduit, voire absent, chez les tortues et les crocodiliens. Chez les chéloniens et les sauriens, l’orifice glottique s’ouvre en arrière et à la base de la langue. Des cordes vocales sont parfois présentes, en particulier chez les geckos qui peuvent émettre des vocalises qui varient d’un petit cri aigu, chez certaines espèces de petite taille, à un aboiement strident (ex : Gecko gecko). Chez les ophidiens, il est très facile à repérer car il est situé sur le plancher de la cavité buccale, juste en arrière de la gaine de la langue bifide. Il se prolonge immédiatement par les premiers anneaux trachéaux. Pendant la déglutition d’une proie, la glotte des serpents est projetée en avant de la langue par les muscles géniotrachealis droit et gauche pour permettre à l’animal de respirer. Chez les crocodiliens, il existe une «trivalve» étanche au fond de la gueule qui permet au pharynx d’être isolé de la cavité buccale pendant une immersion. La trachée des ophidiens est un véritable tuyau, très rigide, située sur le plan médian chez les boïdés et formée d’anneaux trachéaux incomplets (la face ventrale de la trachée est cartilagineuse, sa face dorsale est uniquement membraneuse). Chez les serpents dotés de deux poumons fonctionnels, elle se divise en deux bronches, juste en arrière du cœur comme chez les sauriens. La trachée des chéloniens est très courte, constituée d’anneaux complets, et se divise, chez les tortues de l’Ordre des Cryptodira, immédiatement en arrière de la tête en deux bronches principales qui longent le cou, ce qui leur permet de respirer quand leur tête est rentrée dans la carapace. Ces deux bronches principales, gauche et droite se jètent directement et dorsalement dans chaque poumon, et se ramifient en deux bronches plus petites, perforées sur toute leur longueur (l’une antérieure, l’autre postérieure). TRACTUS RESPIRATOIRE PROFOND Les poumons des reptiles sont assez primitifs : ce sont, pour la plupart des espèces, de simples «sacs» tapissés d’alvéoles pulmonaires. Le volume des poumons des reptiles est supérieur à celui des mammifères, mais ils possèdent une moindre surface d’échanges gazeux (même si, chez ces animaux, cette interface n’implique pas seulement l’épithélium alvéolaire, mais aussi les muqueuses pharyngées et cloacales, et parfois le tégument). Le diaphragme est absent chez tous les reptiles à l’exception des crocodiliens : on ne parle donc pas de cavité pleurale ou péritonéale, mais de cavité thoraco-abdominale ou coelomique. Les poumons des serpents (Fig.1) se situent contre le foie dans la première moitié du second tiers de la distance « nez-cloaque ». Chez presque toutes les espèces d’ophidiens, le poumon gauche est absent ou atrophié. Seuls les boïdés sont dotés de deux poumons bien développés, mais de tailles souvent différentes (le droit est le plus long et le plus volumineux, il s’étend du cœur jusqu’au pôle crânial du rein droit). Lorsque le poumon gauche est absent, il existe souvent un « poumon trachéal » associé au poumon droit (Fig.2). Ce « poumon trachéal » est une extension sacculaire de la muqueuse trachéale qui parcourt longitudinalement et dorsalement la trachée et l’œsophage. Ce poumon trachéal est très vascularisé et participe à la respiration lorsque le poumon droit est collabé par l’ingestion d’une proie volumineuse. La portion la plus postérieure du poumon n’est qu’un simple sac aérien, destiné à rendre le corps plus volumineux pour intimider un prédateur, pour mieux flotter dans l’eau ou pour absorber d’avantage d’énergie calorifique. En effet, lorsqu’il est gonflé et exposé aux rayons du soleil, ce sac aérien pourrait aussi jouer le rôle d’une « chambre à air » chauffante destinée à accélérer le réchauffement du corps. Les poumons des lézards Conférences au Bar de l’Impératrice -92- sont ceux qui ressemblent le plus à ceux des mammifères. Chez certains sauriens évolués, ils ont même un aspect spongieux, constitués de multiples petits cloisonnements alvéolisés. Chez beaucoup d’espèces, la portion caudale des poumons est constituée, comme chez les ophidiens, d’un sac aérien dénué de fonction respiratoire. La morphologie des poumons des sauriens est assez variable selon les groupes d’espèces concernés (Fig.3). Ils peuvent être classés en trois types distincts : • le modèle à « chambre unique », caractérisé par une simple cavité, dépourvue de scissures internes, mais pouvant être creusée de petites anfractuosités appelées « niches », • le modèle « transitionnel », caractérisé par une cavité centrale divisée par de larges scissures, • le modèle à « chambres multiples », divisé en différents compartiments qui confluent tous vers une voie d’air située à l’intérieur même du poumon. LES POUMONS DES IGUANIDÉS Les poumons des iguanidés appartiennent à la fois au modèle à « chambre unique » et au modèle « transitionnel » car ils possèdent une petite bronche située entre la jonction trachéo-pulmonaire et la première scissure. Ils se divisent ainsi en une petite chambre, sur le devant, et en une grande chambre, en arrière. Chez l’iguane vert, par exemple, cette chambre postérieure est elle-même partiellement cloisonnée en trois lobes par de grandes et larges scissures. LES POUMONS DES AGAMIDÉS Les poumons des agamidés se différencient de ceux des iguanidés par le fait qu’ils ne possèdent pas, eux, de bronche intra-pulmonaire. Ils appartiennent au modèle « transitionnel ». Leur chambre pulmonaire postérieure n’est pas toujours divisée en lobes (comme c’est le cas, par exemple chez Physignathus cocincinus qui en possède trois), et elle est parfois seulement creusée de quelques niches situées dorsalement. Calotes sp. présente la particularité de ne pas contenir de chambre pulmonaire antérieure LES POUMONS DES CHAMAELONIDÉS Les poumons des caméléons présentent deux particularités étonnantes : ils sont aplatis dans un plan vertical (en rapport avec la conformation générale de leur corps), et dotés, caudalement, de diverticules en forme de tentacules, assez semblables aux sacs aériens que l’on observe chez les oiseaux. Par ailleurs, on peut considérer qu’ils sont conçus sur le type « agamidés », c’est-à-dire « transitionnel ». Ils possèdent deux scissures, situées dans le poumon principal, qui le divisent en trois lobes distincts qui se dirigent vers l’orifice trachéal. La chambre postérieure du poumon est séparée de la chambre antérieure (la plus petite) par un petit anneau que certains auteurs dénomment « diaphragme ». Tous les caméléons possèdent, au niveau du cou, une extension sacculaire de tissu pulmonaire, attenante à la trachée. Ce petit « sac pulmonaire » se gonfle lorsque l’animal respire avec difficulté ou lorsqu’il souffre d’hyperthermie (on parle alors d’œdème gulaire). LES POUMONS DES GECKONIDÉS Les poumons des geckos appartiennent au modèle « chambre unique » : ils ne sont pas lobés car ils sont généralement dépourvus de scissures internes (sauf chez Rhacodactylus ou Cyrtodactylus, par exemple), mais ils possèdent une rangée Samedi 14 mars 2015 de petites niches situées dosrsalement (dont le diamètre est inférieur à 0,5 mm, par exemple chez les Eublépharinés). A noter : les poumons d’Uroplatus fimbriatus présentent, comme les caméléons, des diverticules en forme de doigts. LES POUMONS DES TÉIDÉS Les poumons des lacertidés sont très proches de ceux des geckonidés, mais ils sont dotés de petites bronches. Ceux des Téidés diffèrent de ceux des geckonidés par le fait qu’ils ne possèdent pas de niches dorso-médiales. Le poumon gauche et le poumon droit sont de tailles équivalenttes chez les Téidés quadrupèdes puissants (ex : Tupinambis), mais le poumon droit est réduit chez les espèces dotées de tout petits appendices locomoteurs (ex : Bachia sp.). LES POUMONS DES SCINCIDÉS Les poumons des scincidés sont similaires à ceux des Téidés, sauf que certains (ex : Cordylidés, Gerrhosauridés) possèdent parfois, comme chez les geckonidés, des niches creusées sur la face dorso-médiale de leur poumon. LES POUMONS DES ANGUIIDÉS Chez les anguiidés longilignes dépourvus de membres (ex : Anguis, Ophisaurus…), les poumons sont, comme chez les ophidiens, en forme de « saucisse ». Le poumon droit, qui s’étend sur pratiquement sur deux tiers de la longueur du corps, est deux fois plus développé que le gauche chez Anguis fragilis. Chez les anguiidés quadrupèdes (ex : Celestus occiduus), les poumons sont de type « chambre unique », dénués de niches, symétriques et de petite taille. LES POUMONS DES VARANIDÉS Les varanidés sont, comme les hélodermatidés, les seuls lézards à être dotés de poumons à « chambres multiples ». Les poumons des varanidés sont volumineux, répartis de manière hétérogène dans la cavité coelomique, et pourvus d’une longue bronche principale, intra-pulmonaire, et de bronches secondaires cartilagineuses. Le poumon gauche est toujours plus fin et plus long que le droit, mais leurs volumes sont identiques. Ils sont compartimentés en de nombreuses cavités, elles mêmes cloisonnées par de fines scissures. Les poumons des tortues s’insèrent sur quasiment toute la face interne de la dossière et sont divisés en plusieurs chambres par de fines cloisons verticales, ce qui leur confère un aspect spongieux (photo 1). Une seule portion des poumons n’est pas fixée sur des structures rigides de la cavité coelomique : c’est une membrane abusivement appelée « membrane diaphragmatique », adhérente ventralement à certains viscères adjacents. Au repos, le volume occupé par les poumons correspond à la moitié du volume total de l’intérieur de la carapace. Mais ce volume pulmonaire devient considérablement réduit (divisé par cinq !) lorsque les quatre membres sont repliés dans la carapace car les extrémités antérieures et postérieures des poumons sont rattachées à la musculature des quatre membres. Ce sont les mouvements des quatre membres qui font varier le volume pulmonaire chez les tortues. Ils exercent ainsi alternativement une traction puis une pression sur les poumons, entraînant avec eux les sacs pulmonaires qui se gonflent et se dégonflent. Les battements rythmés de la peau reliant les deux mandibules, sous le «menton», ne participent en rien à la fonction respiratoire mais uniquement à l’olfaction. Conférences au Bar de l’Impératrice -93- Photo 1 : Coupe longitudinale et parasagittale de la cavité cœlomique d’une tortue terrestre : localisation des poumons (sous la face interne de la dossière) (d’après Schilliger dans « Les tortues de jardin : guide des soins et des maladies », 2007, éd. Animalia). Samedi 14 mars 2015 Fig. 2 : Représentation simplifiée de l’anatomie du tractus pulmonaire de 3 ophidiens typiques (d’après Kardong et Van Wallach In GANS C, GAUNT AS : Biology of the Reptilia, vol. 19, Morphology G. Visceral Organs. Society for the Study of Amphibians and Reptiles, Ithaca, New York, USA : 93-295). LA : Lobe Antérieur PSS : Poumon Semi-Sacculaire à paroi fine PV : Poumon Vascularisé à paroi épaisse SA : Sac Aérien T : Trachée Fig 1 : Coupe ventrale du poumon droit (d’après Miller in Van Wallach in GANS C, GAUNT AS : Biology of the Reptilia, vol. 19, Morphology G. Visceral Organs. Society for the Study of Amphibians and Reptiles, Ithaca, New York, USA : 93-295. Fig.3 : Coupes sagittales du poumon gauche de quelques groupes de reptiles (d’après Perry, in GANS C, GAUNT AS : Biology of the Reptilia, vol. 19, Morphology G. Visceral Organs. Society for the Study of Amphibians and Reptiles, Ithaca, New York, USA : 93-295). Conférences au Bar de l’Impératrice -94- LE SAVIEZ-VOUS ? Le Sphénodon de Nouvelle-Zélande (Sphenodon punctatus), qui n’est pas un saurien mais un rhynchocéphale, possède des poumons très proches de ceux des amphibiens : en effet, même si contrairement aux anoures (ex : Rana sp., Xenopus sp.) il possède une trachée, ses poumons eux-mêmes sont totalement dénués de bronches, de l’extension sacculaire normalement située chez les reptiles en avant de la jonction trachéo-pulmonaire et ils sont constitués d’une chambre unique ainsi que d’un tissu pulmonaire homogène sur toute sa surface interne. SPÉCIFICITÉS PHYSIOLOGIQUES L’absence de diaphragme chez les reptiles implique une participation obligatoire de certains muscles striés squelettiques au cours de la respiration pour faire varier le volume des poumons : les muscles striés squelettiques intercostaux et intrapulmonaires chez les serpents, les lézards et les crocodiles, les muscles des membres et des ceintures pectorales et pelviennes chez les tortues, et le muscle dilatateur de l’orifice glottique chez toutes les espèces. Alors que chez les mammifères, l’inspiration est active et l’expiration est passive, chez les reptiles, à la fois l’inspiration et l’expiration sont des phénomènes actifs nécessitant des contractions musculaires. Le fonctionnement de ces muscles étant affecté par l’administration des substances anesthésiques, une assistance respiratoire doit toujours être assurée chez un reptile tout au long d’une anesthésie et au cours de sa phase de réveil (à raison de 2 à 4 cycles respiratoires par minute). Cette ventilation assistée est d’autant plus importante que le reptile, positionné en décubitus dorsal pour une chirurgie viscérale, voit son volume pulmonaire comprimé par les autres viscères de la cavité coelomique. Sur le plan respiratoire, il existe un point commun à tous les reptiles : ces animaux résistent tous, de manière plus ou moins spectaculaire selon les espèces, à l’anaérobiose. Cette capacité est particulièrement utile et développée chez les espèces dulçaquicoles ou marines au cours de leurs plongées subaquatiques, mais aussi chez les espèces terrestres après une activité physique intense ou pendant l’hibernation. La respiration en anaérobiose est favorisée par plusieurs spécificités anatomo-physiologiques : • la lenteur du niveau de métabolisme basal des reptiles en général leur permet de respirer moins fréquemment que les mammifères. Notons que de manière générale, les espèces terrestres ont une fréquence respiratoire plus élevée que les espèces aquatiques chez qui les périodes d’apnée peuvent être particulièrement longues. • la capacité d’extraction de l’oxygène à partir de l’air inhalé est très développée chez tous les reptiles, mais surtout chez les tortues aquatiques (35–52% de l’oxygène présent dans l’air inspiré sont assimilés, contre 14-30% chez les espèces terrestres). • certaines tortues sont dotées de surfaces d’échanges gazeux extra-pulmonaires, comme par exemple la peau lorsqu’elle celle-ci est suffisamment perméable, la muqueuse pharyngée et la muqueuse cloacale. Par exemple, les tortues de la famille des Trionychidae sont capables d’absorber par la peau, dans l’eau, 70% de l’oxygène total assimilé. Cette absorption percutanée est essentiellement conditionnée par la pression partielle en oxygène du sang. • en cas d’hypoxie (apnée ou insuffisance respiratoire), • Samedi 14 mars 2015 on observe une augmentation de la pression artérielle pulmonaire, liée à une vasoconstriction de l’artère pulmonaire, et une diminution de la pression sanguine sur le trajet veineux pulmonaire de retour. Une moindre quantité de sang oxygéné est alors acheminée vers le cœur puis vers les deux arcs aortiques, mais le sang veineux systémique issu de l’oreillette droite est, du fait de l’augmentation de pression dans la petite circulation, orienté préférentiellement vers les deux arcs aortiques au lieu de s’engouffrer dans le tronc artériel pulmonaire : on appelle cette inversion du sens de la circulation sanguine «shunt intra-cardiaque droite-gauche». Ce court-circuit de la circulation pulmonaire permet alors, en cas d’apnée, d’assurer une certaine perfusion sanguine des organes vitaux. les reptiles sont capables de supporter de fortes concentrations sanguines d’acide lactique. En effet, l’anaérobiose s’accompagne toujours d’une augmentation progressive de la teneur d’acide lactique dans le sang (chez les Terrapene par exemple, il a été montré que cette teneur passe de 1 à 62 mmol/kg pendant l’hibernation). Cet acide lactique est alors stocké dans les muscles, puis redistribué dans le sang en quelques heures à partir du moment où la respiration s’effectue à nouveau normalement. L’acide lactique est ensuite retransformé en glucose dans le foie, puis en glycogène dans les muscles. Le déclenchement des mouvements respiratoires semble conditionné par plusieurs facteurs : l’hypercapnie (l’augmentation de la concentration sanguine en gaz carbonique), l’hypoxie (la diminution de la concentration sanguine en oxygène), la température corporelle (plus la température augmente, plus les besoins de l’animal en oxygène augmentent), le pH sanguin (inversement proportionnel à la température corporelle), la pression partielle sanguine en oxygène (ppO2). Il a été démontré qu’il existerait, chez Trachemys scripta elegans, des récepteurs sensibles à l’étirement du tissu pulmonaire, qui participeraient au déclenchement des phases inspiratoires et expiratoires. SÉMIOLOGIE Les rhinites des reptiles se traduisent cliniquement, comme chez les mammifères, par du jetage ou par une obstruction des narines. Les rhinorrhées, généralement bénignes chez beaucoup d’espèces animales, revêtent chez les reptiles, et chez les chéloniens en particulier, un caractère particulièrement préoccupant. En effet, la rhinite contagieuse des chéloniens, le « Runny Nose Syndrom » ou « Upper Respiratory Tract Disease (U.R.T.D) » compte parmi les maladies les plus fréquemment observées et dont la mortalité est la plus élevée en France chez les tortues terrestres méditerranéennes (en particulier chez les tortues du groupe Testudo graeca). Cette rhinite des tortues affecte également diverses autres espèces, hors de nos frontières telles que Gopherus agassizii, Gopherus polyphemus, Geochelone pardalis, Astrochelys radiata, Geochelone chilensis et Geochelone elegans. • dans la rhinite à herpesvirus, on constate habituellement, outre l’écoulement nasal, un épiphora, de l’anorexie, un amaigrissement rapide, une prostration très intense, une stomato-glossite rapidement nécrotique et une infiltration glycogéno-lipidique du foie. • dans la rhinite à mycoplasmes, on observe exclusivement un écoulement plus ou moins épais au niveau des narines avec parfois une dépigmentation des écailles du rostre ainsi que Conférences au Bar de l’Impératrice -95- des ulcérations du pourtour des narines. La maladie peut évoluer vers la chronicité, par «poussées» successives, ou se compliquer assez rapidement de pneumopathie. Les affections des voies respiratoires profondes se manifestent, quant à elles par : • une ouverture quasi permanente de la cavité buccale (Photo 2), souvent associée, chez les ophidiens à un gonflement intermandibulaire, • une respiration sifflante audible à distance de l’animal, • une apathie liée à l’hypoxie ou au contraire une hyperexcitation liée à la «soif d’air», • une hypersalivation, • une béance de l’orifice glottique visible à l’examen de la gueule et rejetant des mucosités purulentes. Samedi 14 mars 2015 Tableau 1 : Principaux signes cliniques permettant de différencier une respiration anormale d’une respiration physiologique chez une tortue (*T.M.P = Température Moyenne Préférentielle). RESPIRATION EUPNÉIQUE • • • • • • légers mouvements des membres pendant la respiration. environ 4 à 8 cycles respiratoires par minute au repos, et à la TMP*. narines bien dégagées. gueule fermée. absence d’hypersalivation. à l’ouverture de la cavité buccale, orifice glottique dépourvu de toute sécrétion. DYSPNÉE • • • • • • • Photo 2 : attitude dyspnéique d’un python royal (Python regius) : soif d’air, hypersalivation, bénace de l’orifice glottique. Attention ! Une ouverture permanente de la cavité buccale d’un reptile n’est pas toujours synonyme de pneumopathie : elle peut être liée à un excès de chaleur, à une obstruction des voies respiratoires supérieures (ex : sténose des narines, rhinite, abrasion rostrale…) ou à une compression extra-pulmonaire (ex : ascite, ovogénèse, obésité, hépatomégalie, masse intracoelomique…). Chez les serpents et les lézards, on observe parfois des efforts d’expectoration, inexistants chez les tortues dont les poumons sont emprisonnés dans la carapace et dont les deux bronches principales sont dorsales. Chez les tortues, on constate plutôt des mouvements de latéropulsion des membres antérieurs (la tortue «rame» pour respirer) – Tableau 1. léthargie, anorexie et faiblesse généralisée. augmentation de la fréquence respiratoire (> 4-8 / minute). exagération des mouvements des membres antérieurs lors de l’inspiration et de l’expiration (la tortue «rame»). respiration bruyante, gueule ouverte, cou tendu («soif d’air»). écoulements liquidiens au niveau des narines et de la gueule. pâleur ou aspect bleuté des muqueuses buccales. obstruction de l’orifice glottique par du mucus. ÉTIOLOGIE Dans une immense majorité des cas, les pneumopathies des reptiles sont favorisées par un refroidissement brutal (panne de courant, système de chauffage défectueux, thermostat mal réglé, transport dans une boîte non chauffée, manipulations intempestives dans une pièce froide, hibernation mal préparée…). Les poumons ainsi congestionnés se laissent alors coloniser par diverses bactéries opportunistes ou par des champignons saprophytes des voies aériennes. BACTÉRIENNE Les pneumopathies d’origine bactérienne peuvent être primitives ou secondaires à un processus infectieux affectant un autre organe (ex : stomatite). Elles sont généralement provoquées par des bactéries Gram négatives de la famille des Enterobacteriaceae (Pseudomonas, Aeromonas, Klebsiella, Proteus, Salmonella, Pasteurella…). Elles peuvent également être engendrées par des bactéries anaérobies (Bacteroïdes, Peptostreptococcus, Fusobacterium, Clostridium), par des mycobactéries (Mycobacterium sp.) ou encore par des bactéries atypiques telles que des Chlamydia et des mycoplasmes (ces mycoplasmes étant plus souvent responsables du syndrome «rhinite contagieuse» des tortues terrestres -voir Rhinite). Ces pneumopathies bactériennes surviennent généralement sur un animal fragilisé par des conditions de détention inadaptées (température trop basse ou trop élevée, hygrométrie trop forte ou trop faible selon les espèces, alimentation déséquilibrée, hypovitaminose A ou C, eau de boisson souillée par des bactéries fécales…). Conférences au Bar de l’Impératrice -96- VIRALE Chez les ophidiens, quelques virus sont, à l’heure actuelle, reconnus potentiellement responsables d’atteinte pulmonaire : Paramyxovirus (Ferlavirus et Sunshine Virus), Reovirus et Arénavirus (virus de l’IBD). Si la paramyxovirose des serpents s’exprime essentiellement par des symptômes typiques de pneumopathie, la maladie des corps d’inclusions se manifeste, quant à elle, plus souvent par des signes neurologiques centraux associés. Des pneumonies épizootiques à Herpes Virus ont été rapportées chez diverses espèces de chéloniens. Elles s’accompagnent généralement de stomato-glossite nécrotique et d’hépatite. Des cas de pneumonie à iridovirus (dont Ranavirus) ont été décrits chez diverses espèces de tortues (et dans une publication chez des Morelia viridis en Australie). PARASITAIRE Une pneumonie peut aussi être la conséquence d’une infestation parasitaire : • par Rhabdias fuscovenosa, un nématode fréquent des voies respiratoires des ophidiens, • par des pentastomides (ex : Porocephalus, Armillifer, Kiricephalus), • par des trématodes (ex : Dasymetra chez les ophidiens ou Spirorchis sp., un trématode digène des tortues aquatiques, habituellement présent au stade d’adulte dans les gros vaisseaux sanguins de la base du cœur, dont les œufs ont été reconnus responsables de lésions pulmonaires granulomateuses très sévères), • par diverses formes larvaires de nématodes qui traversent le tissu pulmonaire au cours de leurs migrations (ex : Kalicephalus sp.). MYCOSIQUE Les pneumonies d’origine fongique sont probablement sousdiagnostiquées chez les reptiles. Elles constituent souvent des découvertes d’autopsie. Elles surviennent en général chez des animaux immunodéprimés ou ayant reçu de multiples traitements bactéricides et sont provoquées par le développement d’hyphes ou de spores de diverses variétés de champignons (Aspergillus, Candida, Mucor, Rhizopus, Geotrichum, Penicillium, Cladosporium, Beauveria). Dans les années 60, une étude portant sur plus de 200 autopsies de tortues a établi que 3% des décès étaient directement liés à une maladie fungique pulmonaire (avec une atteinte plus fréquente des tortues terrestres par rapport aux tortues aquatiques). MÉCANIQUE Les pneumopathies peuvent aussi être d’origine mécanique et se compliquer ensuite de surinfections bactériennes : c’est le cas, par exemple, des pneumonies par corps étranger provoquées par l’action irritative d’éléments microscopiques du substrat en suspension dans l’air (ex : sciure, copeaux de bois, litière végétale…) ou par la pénétration de liquide dans les voies respiratoires à la suite d’un gavage à la sonde mal effectué. Des émanations toxiques de certaines substances chimiques de l’environnement (produits de nettoyage, accumulation de déjections) peuvent aussi constituer un facteur irritatif pour le tissu pulmonaire. Chez les tortues, des traumatismes de la carapace engendrent généralement de sévères lésions pulmonaires. Ainsi, les fractures Samedi 14 mars 2015 de la dossière par morsures de chien, par écrasement ou par scalp de tondeuse à gazon constituent les causes les plus fréquentes de lésions pulmonaires d’origine traumatique. NÉOPLASIQUE Les tumeurs pulmonaires sont rares chez les reptiles. Seuls deux cas d’adénocarcinomes ont été décrits chez les ophidiens (chez un Naja nivea et un Lampropeltis getulus californiae) et seuls deux types histologiques de tumeurs ont été rapportés à ce jour dans la littérature chez les chéloniens : un fibroadénome chez une cistude (Emys orbicularis) et chez une tortue des steppes (Testudo horsfieldi) et des tumeurs de nature fibropapillomateuse chez la tortue verte (Chelonia mydas). DIAGNOSTIC CLINIQUE Le diagnostic d’une affection respiratoire se fonde sur la reconnaissance clinique de symptômes évocateurs (voir Sémiologie). La présence d’un hypopion chez une tortue ou un lézard ou d’un abcès précornéen chez un serpent peut constituer un signe d’appel en faveur d’une infection pulmonaire. Quelle que soit l’espèce concernée, le diagnostic clinique de rhinite s’impose à l’examen rapproché de la tête et des narines. Chez les serpents, la mise en évidence du jetage peut être favorisée par une délicate palpation-pression exercée d’arrière en avant sur les cavités nasales. Chez les tortues, on peut facilement déclencher la rhinorrhée en refoulant la tête de l’animal à l’intérieur de la carapace (cette manœuvre crée une augmentation de pression à l’intérieur des fosses nasales). RADIOGRAPHIQUE Un examen radiographique peut permettre de confirmer la suspicion clinique de pneumopathie. MICROBIOLOGIQUE, HISTOPATHOLOGIQUE ET PAR PCR. La réalisation d’un lavage trachéo-pulmonaire reste la technique de choix pour la mise en évidence au laboratoire de l’agent étiologique de la pneumopathie (bactéries, champignons, parasites, corps étrangers…). Outre son intérêt diagnostique, ce procédé est un acte thérapeutique qui permet aussi, chez les ophidiens, de liquéfier les glaires présents dans les voies respiratoires, de désencombrer les poumons et de faciliter ainsi la respiration. Cet acte est simple à réaliser, même chez un patient n’ayant pas reçu de sédatif. La gueule du reptile étant maintenue ouverte, l’orifice glottique doit être repéré, puis une sonde stérile de longueur adaptée (de type sonde naso-oesophagienne pour carnivores) est introduite depuis la glotte jusque dans l’un des deux poumons, via la trachée. Du sérum physiologique stérile est instillé lentement dans le poumon à raison de 5-10 ml /kg de poids vif, puis le liquide est aspiré immédiatement à la seringue, en plaçant la tête de l’animal vers le bas. Il est classique et normal que le volume aspiré soit nettement inférieur au volume instillé. La sonde est ensuite délicatement retirée de la trachée. Conférences au Bar de l’Impératrice -97- Photo 3 : Introduction de la sonde stérile dans l’orifice glottique et cathétérisme de la trachée jusqu’au poumon chez un Python molure (Python regius). La mise en évidence de corps d’inclusions intra-nucléaires à l’examen histologique de revêtement muqueux de la cavité buccale, des fosses nasales et des bronches ou de particules virales au microscope électronique est fortement évocatrice d’herpesvirose chez une tortue suspecte sur le plan clinique. Le diagnostic d’herpesvirose est également réalisable par méthode PCR. DIFFÉRENTIEL Attention à ne pas confondre une rhinite avec l’évacuation logique de salive par les narines, via les choanes, lors de ptyalisme ou lorsque l’on tient longtemps un reptile fermement en arrière de la tête. Pendant les quelques jours qui précèdent la mue, les grands boïdés (boas, pythons) peuvent présenter des symptômes faussement évocateurs d’une pneumopathie : ils sont anorexiques, leur respiration devient plus bruyante, la présence de petits fragments de mue sèche autour des narines peut engendrer des sifflements expiratoires et une hypersalivation peut même être observée du fait d’une légère traction exercée par la peau sur les lèvres. THÉRAPEUTIQUE Une antibiothérapie énergique est indispensable pour traiter une pneumopathie infectieuse. L’enrofloxacine (BAYTRIL N.D) à 5-10 mg/kg selon les espèces ou la marbofloxacine (MARBOCYL F.D N.D) à 2-5 mg/kg, associées au métronidazole (FLAGYL N.D) à la posologie de 25 mg/kg/24 h permettent une action combinée contre les bactéries aérobies et anaérobies. L’aérosolthérapie associée à ce traitement donne de très bons résultats : elle consiste à faire respirer au reptile pendant plusieurs séances de 30-45 minutes un nébulisat de particules micronisées de substances mucolytiques (MUCOMYST N.D), d’antibiotiques (GENTALLINE N.D) et d’essences végétales bronchodilatatrices (ex : GOMÉNOL N.D, PULLPHYTON N.D). Samedi 14 mars 2015 Photo 4 : séance d’aérosolothérapie. Comme dans tout traitement antibiotique chez un reptile, la température du terrarium doit être augmentée de 2-3°C par rapport à la T.M.P pour optimiser l’action de la substance bactéricide ainsi que les défenses immunitaires de l’animal. Une technique intéressante de thérapeutique intrapulmonaire a été décrite chez les chéloniens. Cette technique est particulièrement indiquée en cas de pneumonie non généralisée, localisée par examen radiographique. Elle consiste à forer, sous anesthésie générale, un petit trou dans la dossière de la carapace, à l’aide d’une mêche de chirurgie orthopédique de 4 mm de diamètre, en regard du foyer lésionnel. Un cathéter de taille adaptée est alors introduit par ce trou et fixé à la carapace. Des injections d’enrofloxacine peuvent ainsi être effectuées in situ jusqu’à résorption du foyer de pneumonie. Les pneumopathies vermineuses se traitent à l’ivermectine (IVOMEC N.D), sauf chez les tortues, à la posologie de 0,2 mg/kg en une administration, ou à l’aide de diverses autres substances anthelminthiques. Le traitement des pentastomidoses fait appel à l’extraction des parasites par endoscopie. Les pneumopathies mycosiques peuvent être traitées au kétoconazole à la posologie de 30 mg/kg/j ou à l’itraconazole à la posologie de 15 mg/kg/j par voie orale. PROPHYLAXIE La prévention des pneumopathies des reptiles passe essentiellement par une hygiène irréprochable du terrarium et le respect des besoins vitaux propres à chaque espèce (en température et en hygrométrie notamment). La mise en quarantaine, pendant plusieurs mois, des tortues nouvellement acquises constitue la meilleure prévention de la rhinite à mycoplasmes et des viroses. Conférences au Bar de l’Impératrice -98- Tableau 2 : Posologies des principaux antibiotiques utilisables chez les reptiles en cas de pneumopathie. ANTIBIOTIQUES VOIES D’ADMINISTRATION DOSES INTERVALLES D’ADMINISTRATION Amikacine* IM 5mg/kg dose d’attaque 2,5mg/kg ensuite 72 h Carbénicilline* IM 400 mg/kg 24h Ceftazidime IM-IV 20 mg/kg 72h Chloramphénicol* IM 50 mg/kg 72h Ciprofloxacine PO 2,5-11 mg/kg 48-72h IM,P.O 5 à 10 mg/kg (selon les espèces et selon la sévérité de l’infection ex : 6,6mg/kg chez le python réticulé). De 24 h à 5 jours selon les espèces (ex : tous les 4-5 jours chez les tortues boîtes et tous les 5 jours chez le varan des savanes) Gentamicine IM 2,5 mg/kg en dose d’attaque puis 1 mg/kg ensuite (attention, ne pas dépasser !) 72h Métronidazole PO 25 mg/kg 24h Pipéracilline IM 100 mg/kg 24h Enrofloxacine Triméthoprime/ • • • • Sulfaméthoxazole IM 30 mg/kg 24h entre les deux premières doses puis 48h entre les doses suivantes Tylosine IM 5 mg/kg 24h Non disponible en France. IM : intramusculaire IV : intraveineux PO : per os (voie buccale) Références bibliographiques Disponibles auprès de l’auteur sur demande. Samedi 14 mars 2015 Conférences au Bar de l’Impératrice -99- Samedi 14 mars 2015 Conduite à tenir face à une anorexie chez un reptile Norin Chai DVM, MSc, PhD Ménagerie du Jardin des Plantes, Muséum national d’Histoire naturelle L’objet de cette présentation est de fournir aux praticiens des éléments pratiques qui leur permettront de gérer le syndrome « anorexie » avec plus de sérénité. L’anorexie est un des principaux motifs de consultation chez les Reptiles. Mais on ne pourra la traiter qu’en identifiant et traitant ses origines. L’alimentation entérale assistée n’est qu’un support pour aider à restaurer l’état général de l’animal et favoriser la reprise d’un comportement alimentaire normal. LES PRINCIPES DE LA PRISE EN CHARGE DE L’ANOREXIE 1 - EXAMEN CLINIQUE ET ÉTUDE DES COMMÉMORATIFS Voir si cette anorexie ne serait pas tout simplement physiologique : pré-hibernation, mue, folliculogénèse avancée, gestation (dernière moitié chez les boïdés), ovulation, mise bas/ponte imminente, estivation de certaines espèces lors de beaux temps (Testudo horsfieldi notamment), mâles voulant s’accoupler… 2 - VÉRIFIER LES PARAMÈTRES ENVIRONNEMENTAUX Baisse de température (baisse d’activité), mauvaises conditions de captivité, alimentation inadaptée à l’espèce, stress de captivité et d’origine intra ou inter spécifique, pathologies infectieuses et non infectieuses (nutritionnelles, néoplasiques). Dans tous les cas, les paramètres seront optimisés. Cela permet de supprimer la plupart des facteurs prédisposant à l’anorexie. 3 – RÉHYDRATATION Bains réguliers d’eau tiède, fluide (NaCl 0,9% + glucose 5% 50/50) en ICoelomique, SC ou IO. 4 – TRAITEMENTS EMPIRIQUES EN PREMIÈRE INTENTION Analgésie, métronidazole PO 25 mg/kg/j pendant 5 jours ou 125 mg/kg 2 fois à 15 jours d’intervalle, vitaminothérapie (vitamine B 12 à 0,05 mg/kg IM tous les 2 jours, 6 IM en tout et vitamine C à 20 mg/kg IM 2 fois à 8 jours d’intervalle). 5 - Le gavage avec une procédure chirurgicale ou non. 6 – Entamer un processus diagnostique rigoureux et identifier et traiter la cause primaire. Remarque : le traitement empirique n’est évidemment pas systématique. Dans de très nombreux cas, une anamnèse exhaustive et une démarche diagnostique posée permettent d’élaborer un traitement plus spécifique. ETIOLOGIE DE L’ANOREXIE L’anorexie est un syndrome qui peut être associée à presque n’importe quelle maladie aiguë ou chronique. On peut notamment citer : • • • • • • • • • • • • • • Problèmes environnementaux (trop froid, trop chaud, trop hulide ou sec..), agressions intraspécifiques Stress de transport, maladaptation (changement brusque d’environnement, mise en captivité d’animaux sauvages) Douleur Pathologies gastro-instestinales (corps étrangers, impaction, parasitism) Pathologie respiratoire Maladies nutritionnelles ou simplement un régime inadéquat (de la salade pour des omnivores, de la viande pour les herbivores…) Déshydratation Acidocétose, azotémie, hypocalcémie, hyperkaliémie, hypokaliémie, autres désordres hydroélectriques Insuffisance rénale Stase folliculaire Rétention d’œufs Pathologie hépatique (lipidose, hépatite) Problèmes de vue (dommage dû au froid, pathologie intraoculaire) Pathologie du système nerveux central L’anorexie post-hibernale représente un syndrome à elle seule et peut être reliée à : • Un défaut d’observation considérant un animal confiné « réveillé », toujours en hibernation • Un défaut d’alimentation et d’hydratation adéquats avant et après l’hibernation • Un apport inadéquat de chaleur et de lumière avant et après l’hibernation • Une période excessive d’hibernation • Une pathologie ou un trauma survenu pendant l’hibernation • L’apparition clinique d’une pathologie sous-jacente non diagnostiquée avant hibernation. Conférences au Bar de l’Impératrice -100- L’anurie, avec l’hyperuricémie et hyperkaliémie représente une cause majeure de l’anorexie post hibernale. Les bains, l’administration de fluide (NaCl 0,9%) par voie orale, clocale, cœlomique sont indiqués. On peut aussi proposer une cathétérisation de la vessie. 1 – 2 % du poids vif de fluide administré quotidiennement devrait induire une diurèse normale. L’administration par voie orale de fluide hypotonique (eau) réduit l’osmolarité plasmatique à un niveau où la filtration glomérulaire peut accroitre. Ceci permet d’aider à restaurer la fonction rénale, décroitre l’uricémie, et l’acide urique dans le sang. Samedi 14 mars 2015 Conférences au Bar de l’Impératrice -101- Samedi 14 mars 2015 La persistance du canal artériel : synthèse et actualités Professeur Valérie Chetboul DVM, PhD, Dipl. ECVIM-CA (Cardiology) Chef de l’Unité de Cardiologie d’Alfort (UCA), CHUVA UMR INSERM-ENVA U955 (Cardiologie), Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort, 7 avenue du Général de Gaulle 94704 Maisons-Alfort cedex Le canal artériel est une connexion vasculaire reliant, chez le fœtus, l’aorte au tronc pulmonaire. De façon plus précise, il s’étend de la bifurcation du tronc pulmonaire jusqu’à la paroi aortique ventro-latérale. Ce canal se ferme de façon fonctionnelle (vasoconstriction) dans les premières heures de la vie et «anatomiquement» en 7 à 10 jours environ. L’absence de fermeture du canal artériel est désignée sous le terme de «persistance du canal artériel» (PCA). La PCA constitue une des cardiopathies congénitales canines les plus fréquentes (jusqu’à 25 à 30 % des cas dans les grandes séries). Elle est plus rare dans l’espèce féline. L’essentiel de cet exposé sera ainsi consacré à la PCA chez le chien, en détaillant les grandes caractéristiques de cette cardiopathie congénitale, tout en insistant sur les données plus récentes concernant plus particulièrement : • la survie, • les complications, • la classification morphologique du canal et son intérêt dans le choix de la technique de fermeture du shunt, • les indications et avantages de la fermeture par voie endovasculaire. 1. EPIDEMIOLOGIE – ETIOLOGIE La PCA est plus fréquemment rencontrée chez les femelles. Une prédisposition est également décrite dans certaines races : Caniche toy et nain, Colley, Yorkshire, Shetland, Springer spaniel, Setter irlandais, Spitz-loup, Cocker et, en France, entre autres, Berger des Pyrénées, Berger Allemand et, plus récemment, Chihuahua. La PCA a été démontrée comme étant une cardiopathie héréditaire chez le Caniche nain, transmise selon un mode autosomique polygénique. 2. CONSEQUENCES PHYSIOPATHOLOGIQUES Le canal artériel persistant est à l’origine d’un shunt gauche-droite entre l’aorte descendante et le tronc pulmonaire. L’importance de ce shunt (et, par là même, de ses conséquences) est déterminée par le calibre du canal ainsi que le rapport des résistances vasculaires pulmonaires et systémiques. Un canal artériel de gros débit peut ainsi être à l’origine d’une augmentation significative du débit pulmonaire, suivie d’une surcharge volumique gauche (dilatation atriale gauche, puis dilatation ventriculaire gauche) compliquée, dans les formes les plus graves, d’un œdème pulmonaire par insuffisance cardiaque congestive gauche, l’insuffisance congestive globale représentant le stade ultime de la cardiopathie. Des complications rythmiques (tachycardie sinusale, fibrillation atriale, extrasystoles supraentriculaires ou ventriculaires) et une insuffisance mitrale fonctionnelle (par dilatation de l’anneau valvulaire) peuvent également être observées. L’apparition de lésions irréversibles des artérioles pulmonaires peut aboutir à la constitution d’une hypertension artérielle pulmonaire. Si la pression dans l’arbre pulmonaire dépasse la pression artérielle systémique, le shunt s’inverse (il est alors droite-gauche) et l’anomalie devient ainsi cyanosante. Il s’agit du syndrome d’Eisenmenger qui constitue une contre-indication chirurgicale. Les autres complications possibles, plus récemment décrites, sont la dissection voire la rupture artérielle (notamment du tronc pulmonaire) et l’endocardite aortique. 3. DIAGNOSTIC 3.1. DIAGNOSTIC CLINIQUE • La PCA se caractérise dans un premier temps par des symptômes uniquement physiques, incluant l’auscultation d’un souffle continu systolo-diastolique basal gauche, isolé ou associé à un souffle systolique apexien gauche (lors d’insuffisance mitrale fonctionnelle ou lors de dysplasie mitrale associée). S’y ajoute parfois la présence d’un pouls bondissant lors de PCA de gros débit. Lors de l’évolution de la cardiopathie, apparaissent des symptômes fonctionnels comme la dyspnée, la toux, ou l’intolérance à l’effort témoignant d’une insuffisance cardiaque gauche. • Des arythmies (cf. supra) sont souvent observées lors d’insuffisance cardiaque. • Les signes cliniques accompagnant l’inversion de shunt sont la cyanose des muqueuses génitales (les muqueuses buccales restant normales ou subnormales), le dédoublement du deuxième bruit cardiaque, et enfin la disparition de la composante diastolique du souffle voire la disparition complète de ce dernier. 3.2. DIAGNOSTIC PAR IMAGERIE 3.2.1. RADIOGRAPHIE La radiographie thoracique reste indispensable pour confirmer ou infirmer la présence d’un œdème pulmonaire. Les autres signes radiographiques de PCA, isolés ou associés à des degrés divers, incluent la dilatation de l’aorte, celle du tronc pulmonaire et de l’atrium gauche, l’augmentation de taille du ventricule gauche et l’hypervascularisation pulmonaire. 3.2.2. EXAMEN ÉCHO-DOPPLER • L’examen échographique bidimensionnel (2D) permet de Conférences au Bar de l’Impératrice • • • -102- visualiser - partiellement ou totalement - le canal artériel sur les coupes « petit axe » transaortiques obtenues par voie parasternale droite ou gauche. Le mode 2D, couplé au mode Doppler couleur, permet l’étude précise de la morphologie du canal et la détermination de ses dimensions (longueur, diamètre maximal, diamètre de l’ostium pulmonaire et de l’ostium aortique). Ces données qualitatives et quantitatives sur le canal sont indispensables pour déterminer le choix optimal de la technique d’occlusion du canal (cf. infra). Ainsi un canal artériel de type morphologique II (selon la classification de Miller et al, 2006) peut faire l’objet d’une fermeture endovasculaire (notamment par Amplatz Canine Duct Occluder, ACDO, cf. infra). L’examen échographique 2D et temps-mouvement permet de confirmer ou infirmer les conséquences cavitaires de la cardiopathie et de classer ainsi la PCA en 5 stades de gravité croissante (classification établie à l’Unité de Cardiologie d’Alfort) : absence de conséquence cavitaire (stade 1), dilatation atriale gauche (stade 2), dilatation ventriculaire gauche en diastole puis systole (stades 3 et 4), puis dilatation cavitaire globale (avec généralement hypertension pulmonaire associée : stade 5). Enfin, l’examen écho-Doppler permet de confirmer ou infirmer la présence de complications potentielles : dissection artérielle, endocardite, ou encore hypertension artérielle pulmonaire. Des exemples concrets seront donnés au cours de l’exposé. 4. PRONOSTIC Le pronostic de la PCA a récemment été analysé à partir de données issues de 520 chiens atteints de cette malformation. Elles seront présentées au cours de l’exposé. En résumé, les facteurs influençant la survie incluent la présence de cardiopathies congénitales associées, d’une régurgitation mitrale importante, et de signes cliniques au moment au diagnostic. 5. TRAITEMENT Le traitement de la PCA est chirurgical. Il a pour but la fermeture du canal et permet la disparition de la dilatation atriale gauche en 24-48 heures dans la majorité des cas. La dilatation ventriculaire est plus lente à disparaître, et la fonction inotrope peut même ne jamais se normaliser si elle était initialement fortement altérée avant intervention. Cependant cette altération systolique est généralement relativement bien tolérée cliniquement. L’œdème pulmonaire doit être systématiquement traité avant l’intervention. Il existe différentes techniques chirurgicales de fermeture du canal dont les avantages et inconvénients seront discutés au cours de l’exposé : 1) par thoracotomie avec suture du canal ou fermeture par clips, 2) par thoracoscopie, et 3) par voie endovasculaire avec un dispositif d’occlusion spécifiquement conçu pour le chien (ACDO) si la taille et la morphologie du canal le permet. Cette dernière méthode, de loin celle actuellement préférée des cardiologues pour ces différents avantages, reste néanmoins réservée aux centres spécialisés en raison de la nécessité de disposer au moins d’une échographie transœsophagienne, et idéalement à la fois d’une fluoroscopie et d’une échographie transœsophagienne. Samedi 14 mars 2015 Bibliographie : choix de références Birchard SJ, Bonagura JD, Fingland RB. Results of ligation of patent ductus arteriosus in dogs: 201 cases (1969-1988). J Am Vet Med Assoc 1990;196:2011-3. Bomassi E, Libermann S, Bille C, Rattez E. Patent ductus arteriosus in a family of Chihuahuas. J Small Anim Pract 2011;52:213-9. Borenstein N, Behr L, Chetboul V, Tessier D, Nicole A, Jacquet J, Carlos C, Retortillo J, Fayolle P, Pouchelon JL, Daniel P, Laborde F. Minimally invasive patent ductus arteriosus occlusion in 5 dogs. Vet Surg 2004;33:309-13. Bureau S, Monnet E, Orton EC. Evaluation of survival rate and prognostic indicators for surgical treatment of left-to-right patent ductus arteriosus in dogs: 52 cases (1995-2003). J Am Vet Med Assoc 2005;227:1794-9. Campbell FE, Thomas WP, Miller SJ, Berger D, Kittleson MD. Immediate and late outcomes of transarterial coil occlusion of patent ductus arteriosus in dogs. J Vet Intern Med 2006;20:83-96. Corti LB, Merkley D, Nelson OL, Ware WA. Retrospective evaluation of occlusion of patent ductus arteriosus with hemoclips in 20 dogs. J Am Anim Hosp Assoc 2000;36:548-55. Côté E, Ettinger SJ. Long-term clinical management of rightto-left («reversed») patent ductus arteriosus in 3 dogs. J Vet Intern Med 2001;15:39-42. Goodrich KR, Kyles AE, Kass PH, Campbell F. Retrospective comparison of surgical ligation and transarterial catheter occlusion for treatment of patent ductus arteriosus in two hundred and four dogs (1993-2003). Vet Surg 2007;36:43-9. Gordon SG, Saunders AB, Achen SE, Roland RM, Drourr LT, Hariu C, Miller MW. Transarterial ductal occlusion using the Amplatz Canine Duct Occluder in 40 dogs. J Vet Cardiol 2010;12:85-92. Hamabe L, Kim S, Yoshiyuki R, Fukayama T, Nakata TM, Fukushima R, Tanaka R. Echocardiographic evaluation of myocardial changes observed after closure of patent ductus arteriosus in dogs. J Vet Intern Med 2015;29:126-31. Hogan DF, Green HW 3rd, Gordon S, Miller MW. Transarterial coil embolization of patent ductus arteriosus in small dogs with 0.025-inch vascular occlusion coils: 10 cases. J Vet Intern Med 2004;18:325-9. Hunt GB, Simpson DJ, Beck JA, Goldsmid SE, Lawrence D, Pearson MR, Bellenger CR. Intraoperative hemorrhage during patent ductus arteriosus ligation in dogs. Vet Surg 2001;30:58-63. Miller MW, Gordon SG, Saunders AB, Arsenault WG, Meurs KM, Lehmkuhl LB, Bonagura JD, Fox PR. Angiographic classification of patent ductus arteriosus morphology in the dog. J Vet Cardiol 2006;8:109-14. Nguyenba TP, Tobias AH. The Amplatz canine duct occluder: a Conférences au Bar de l’Impératrice -103- novel device for patent ductus arteriosus occlusion. J Vet Cardiol 2007;9:109-17. Porciello F, Caivano D, Giorgi ME, Knafelz P, Rishniw M, Moise NS, Bufalari A, Fruganti A, Birettoni F. Transesophageal echocardiography as the sole guidance for occlusion of patent ductus arteriosus using a canine ductal occluder in dogs. J Vet Intern Med 2014;28:1504-12. Pouchelon JL, Chetboul V, Garnier E, Brochier L, Gallix P. Proposition d’une classification échocardiographique du canal artériel à partir de 24 cas. Rec Med Vet 1997;172 :623-42. Saunders AB, Achen SE, Gordon SG, Miller MW. Utility of transesophageal echocardiography for transcatheter occlusion of patent ductus arteriosus in dogs: influence on the decisionmaking process. J Vet Intern Med 2010;24:1407-13. Saunders AB, Gordon SG, Boggess MM, Miller MW. Long-term outcome in dogs with patent ductus arteriosus: 520 cases (19942009). J Vet Intern Med 2014;28:401-10. Scansen BA, Simpson EM, López-Alvarez J, Thomas WP, Bright JM, Eason BD, Rush JE, Dukes-McEwan J, Green HW 3rd, Cunningham SM, Visser LC, Kent AM, Schober KE. Pulmonary artery dissection in eight dogs with patent ductus arteriosus. J Vet Cardiol, sous presse. Singh MK, Kittleson MD, Kass PH, Griffiths LG. Occlusion devices and approaches in canine patent ductus arteriosus: comparison of outcomes. J Vet Intern Med 2012;26:85-92. Stauthammer CD, Tobias AH, Leeder DB, Krüger MU. Structural and functional cardiovascular changes and their consequences following interventional patent ductus arteriosus occlusion in dogs: 24 cases (2000-2006). J Am Vet Med Assoc 2013;242:1722-6. Van Israel N, French AT, Dukes-McEwan J, Corcoran BM. Review of left-to-right shunting patent ductus arteriosus and short term outcome in 98 dogs. J Small Anim Pract 2002;43:395-400. Van Israël N, Dukes-McEwan J, French AT. Long-term followup of dogs with patent ductus arteriosus. J Small Anim Pract 2003;44:480-90. Van Israël N, French AT, Dukes-McEwan J, Welsh EM. Patent Ductus Arteriosus in the older Dog. J Vet Cardiol 2003;5:13-21. Samedi 14 mars 2015 Conférences au Bar de l’Impératrice -104- Samedi 14 mars 2015 Approche des médecines alternatives au travers de conduites à tenir et de cas cliniques Dr Michel Bolzinger Dr Philippe Zeppa Les médecines alternatives, ou non conventionnelles s’appuient sur une approche globale du patient. Si la phytothérapie, l ‘ostéopathie, l’acupuncture rencontrent un vrai engouement des patients, elles sont aussi des thérapies qui ont un réel intérêt et une efficacité redoutable, mais aussi, bien sûr, leurs limites. Avec le temps, elles ont trouvé leur place aux côtés de techniques modernes, et loin de s’opposer elles s’enrichissent mutuellement en aiguisant le sens clinique du praticien. Ce sont des médecines d’avenir. Nous allons vous montrer au travers de l’expérience de deux praticiens en Médecine Traditionnelle Chinoise, comment ils ont développé une consultation de médecine non conventionnelle au sein de leurs structures, parfois en associant thérapie conventionnelles et non conventionnelles. LA MÉDECINE TRADITIONNELLE CHINOISE DANS LA PRATIQUE QUOTIDIENNE D’UNE CLINIQUE VÉTÉRINAIRE. • • • • • Peut-on soigner les animaux grâce à la MTC ? Les approches diagnostics sont-elles les mêmes ? Quelles pathologies chez les animaux traités avec la MTC ? Les trajets des méridiens et les localisations des points, comment faire ? Peut-on poser des aiguilles et utiliser les moxas chez les animaux ? en augmentant l’élimination digestive de l’azote encore une fois, permettent de soulager le travail du Rein ,dans son rôle d’élimination de l’urée. Dans ces deux exemples, les connaissances modernes de la physiologie et de la pathologie et des traitements de l’insuffisance rénale rejoignent les connaissances millénaires de la MTC, en mobilisant finalement l’énergie du Gros Intestin, pour aider le Rein. Chez les hommes et chez les animaux, l’organisme comporte huit grands groupes principaux de glandes endocrines, comme les huit Merveilleux Vaisseaux, avec lesquels on retrouve une analogie. Les chiens peuvent souffrir, par exemple, comme les hommes , d’un syndrome de Cushing, et le vétérinaire va différencier le Cushing surrénalien ( analogue du Vaisseau de la motilité du Yin, Yin Tsiao Mai) , très Yin, très proche des Reins ,avec des modifications des glandes surrénales visibles par échographie, et les Cushing hypophysaires ( analogue du Vaisseau de la motilité du Yang, Yang Qiao Mai) , très Yang, situé dans le crâne (Yang) , l’hypophyse libère vers les surrénales une hormones en trop grande quantité. Ces exemples montrent bien, comment les connaissances allopathiques et MTC s’enrichissent mutuellement. Voilà quelques questions auxquelles un vétérinaire praticien, titulaire du DATC, va tenter de répondre. Les connaissances de la physiologie et de la pathologie enseignées à l’école vétérinaire et celles apprises dans le cadre de la formation en MTC ( diplôme DATC, ) , loin de s’opposer, se nourrissent l’une de l’autre. Les laboratoires nous proposent des chélateurs du phosphore intestinal pour aider les insuffisants rénaux, ces médicaments en permettant l’élimination du phosphore par la voie digestive aide le Rein déficient de l’animal qui souffre d’insuffisance rénale. Des aliments pour les chiens, permettent le développement d’une flore , dans le gros intestin, flore avide d’azote , qui Méthode de calculs des distances (cun) Conférences au Bar de l’Impératrice -105- Samedi 14 mars 2015 Les différences anatomiques entre les animaux et l’homme, en particuliers le nombre de doigts, un seul doigt chez le cheval, et le nombre de vertèbres, 18 thoraciques chez le cheval, 13 thoraciques chez le chien,… ces différences interdisent une juxtaposition des localisations des points de l’homme sur l’animal. Les vétérinaires ont ainsi créé, si on peut utiliser ce terme, non pas des points supplémentaires mais des points primes, correspondant aux vertèbres supplémentaires, par rapport à l’homme. Trajet du Vaisseau Gouverneur chez le chien – Localisation de Bai Hui On retiendra aussi qu’on trouve le point Bai Hui situé à la jonction lombo-sacré, dans l’espace, assez facile à localiser entre les apophyses épineuses de la dernière lombaire et de la première vertèbre sacrée. L’approche MTC du patient finalement très moderne, s’inscrit dans une médecine d’avenir qui peut s’intégrer dans une équipe pluridisciplinaire de vétérinaires regroupant différentes spécialités, chirurgie, dermatologie, médecine interne, gynécologie, ophtalmologie… La MTC place le vétérinaire au cœur de son métier comme diagnosticien et comme thérapeute. Les analyses de laboratoires, les examens d’imagerie servent à confirmer le diagnostic clinique, et ne sont pas les fondements du diagnostic. Les traitements demandent sa compétence, sa capacité d’écoute et de ressenti, son expérience de toucher des pouls, associés à ses connaissances de vétérinaire allopathe, des pathologies des animaux de rentes de loisir ou de compagnie. Les deux approches, allopathique et MTC se nourrissent l’une de l’autre, plutôt que s’opposer l’une à l’autre, comme nous l’avons déjà écrit. Les pathologies de races, par exemple, en particulier entraînant des désordres de la peau ou des poumons, oriente le praticien vers un examen de l’énergie du Rein. Lésions de dermatite chez un West Highland Terrier Il faut bien dans ce cas faire un examen clinique, un raclage de la peau, voir une biopsie, effectuer un cliché radiologique des poumons pour poser le diagnostic. Les maladies auto-immunes de plus en plus souvent diagnostiquées sont abordées autrement grâce à la MTC, en évitant le recourt à la corticothérapie et à tous ses effets secondaires néfastes. Conférences au Bar de l’Impératrice -106- Samedi 14 mars 2015 LE DIAGNOSTIC Poser le diagnostic passe par les différentes étapes très classique d’un examen clinique. Le patient animal ne pourra pas bien entendu, nous fournir autant d’information qu’une personne, … par exemple, simplement l’endroit exact de la douleur, L’anamnèse, les éventuels examens complémentaires qui sont disponibles, analyses de sang, radios, scanner, examen de l’animal en station, et au pas, voir au trot. Puis le praticien passe à un examen de la peau, qui permet d’observer des rougeurs, verrues, dépilations, zone de grattage… Lésions de dermatose auto-immune autour des narines (sur le trajet du méridien du Gros Intestin) diagnostiquée chez un berger australien L’arsenal thérapeutique vétérinaire, qui est de plus en plus vaste, et de plus en plus efficace, trouve pourtant ses limites et les approches diagnostiques et thérapeutiques MTC peuvent permettre d’aller plus loin dans les traitements. Lésion visible sur le trajet du méridien Triple Réchauffeur- Patte antérieure d’un beauceron IL pourra déjà observer si les lésions de la peau correspondent aux trajets de tel ou tel méridien. Puis on examinera les pouls, on pratiquera une palpation des vertèbres, des organes, viscères… et aussi des points bien entendu. Technique de prise de pouls chez le chien La palpation des vertèbres, des organes, viscères, des méridiens, des points, …sont à la base du diagnostic, même si les informations données par la palpation ne sont qu’un élément supplémentaire pour préciser un diagnostic et ne constitue pas seule un signe formel de l’atteinte. Les douleurs des genoux ou des coudes nous invitent à palper les différents points He, et les douleurs jarrets ou carpes, nous orienterons plutôt sur l’examen des points Yuan. Conférences au Bar de l’Impératrice -107- Samedi 14 mars 2015 Lorsque le praticien aura su trouver une cohérence entre les différents symptômes, il pourra en conclure un diagnostic. Un autre élément à prendre en compte et le diagnostic thérapeutique. En fait si le patient va mieux, si les dysfonctions détectées à la palpation ont disparues, si les pouls sont dans la normalité, c’est que le diagnostic, et le traitement associé étaient justes. Le cout d’un traitement, qui reste à la charge du propriétaire de l’animal, même si les assurances médicales pour les animaux se développent, impose au praticien des résultats rapides et visibles, en quelques semaines. LES PATHOLOGIES EN MTC Pour le grand public, en tout cas, pour les propriétaires d’animaux, la MTC reste à ce jour, et à tord une médecine de deuxième intention. C’est à dire que les animaux nous sont présentés lorsque les autres traitements n’ont pas donné satisfaction. Il s’agit donc en général de cas lourds et chroniques. Parfois il est possible de superposer le point en dysfonction et la lésion visible à la radio. Cette tendance, de cas lourds et chroniques, semble diminuer avec le temps, et nous recevons en consultation de plus en plus de cas, plus bénins, dès l’apparition de premiers symptômes. D’ailleurs nous proposons à nos patients des traitements MTC, lorsqu’ils nous présentent leurs animaux, même s’ils ne sont pas venus dans ce but. Dans notre clinique vétérinaire, nous recevons statistiquement, surtout des animaux souffrants de problèmes locomoteurs, présentant des boiteries ou de l’arthrose liée à l’âge. Les analyses statistiques des pathologies font ressortir des tendances par espèces. Par exemple chez les chats, nous trouvons beaucoup de pathologies de l’élément métal, de l’asthme, des infections des griffes, de la constipation, de la dermatite milliaire, des gingivites très graves, sans traitement efficace, avec des chutes des dents, une mauvaise odeur de la bouche, comme si la bouche pourrissait, même chez des animaux jeunes,… Becs de perroquet très étendus chez un Boxer de 2,5 ans présentant une boiterie postérieur avec défaut d’appuis Nous recevons également beaucoup de pathologies neurologiques, comme des animaux souffrant d’hernies discales et présentant de la paralysie, ou des animaux souffrant d’ataxie, ou de crise épileptiforme… Nous voyons aussi des cas de dermatologie, et l’approche terrain , Conférences au Bar de l’Impératrice -108- Médecine Chinoise , l’approche globale , montre souvent une efficacité bien meilleure que les traitements médicamenteux , … qui débouchent sur une antibiothérapie et une corticothérapie longue, couteuse et avec des effets délétères pour les patients. En pédiatrie les animaux sont présentés pour des problèmes de croissance, en particulier les très grandes races, pour des déviations des aplombs des problèmes d’allures, ou de testicules ectopiques par exemple… Les propriétaires nous présentent souvent des dossiers médicaux volumineux, avec des résultats d’analyses de sang, des clichés radiologiques, ou échographiques des images de scanner… La MTC, une médecine d’avenir, proche du patient, nous a apporté beaucoup dans notre pratique quotidienne, un véritable souffle nouveau. La MTC nous a révélé des gisements de richesses thérapeutiques, scientifiques, culturelles, économiques,… à notre portée, pour le bien être de nos patients et de leur propriétaire. Bibliographie Cours de médecine traditionnelle chinoise IMAOV Guide Pratique D’acupuncture Du Chien Et Du Chat Philippe Zeppa - Editions Med’com Les principes fondamentaux de la médecine chinoise – Giovanni Maciocia – Editions Satas Précis d’acupuncture chinoise - Editions Dangles Traité d’acupuncture vétérinaire - Frédéric Molinier – Editions Phu Xuan XIE’S VETERINARY ACUPUNCTURE EDITED BY Huisheng Xie Vanessa Preast ILLUSTRATED BY Zhen Zhao Samedi 14 mars 2015