Le gisement rupestre de Siega Verde, Salamanque Une vision de

Article original
Le gisement rupestre de Siega Verde, Salamanque
Une vision de synthe
`se
Paleolithic art in open air at Siega Verde, Salamanca
A synthetical view
Jose
´Javier Alcolea Gonza
´lez *, Rodrigo de Balbı
´n Behrmann
Departamento de Historia I y Filosofı
´a, Universidad de Alcala
´de Henares,
A
´rea de Prehistoria, C. Colegios N828.801 Alcala
´de Henares, Espagne
Disponible sur Internet le 25 septembre 2007
Re
´sume
´
Le gisement rupestre pale
´olithique de plein air de Siega Verde, Salamanque, est l’ensemble unitaire le
mieux dote
´en manifestations rupestres pale
´olithiques a
`l’air libre de toute la pe
´ninsule ibe
´rique. Son e
´tude,
fruit de plus de dix ans de travaux sur le terrain, a culmine
´avec la re
´cente publication d’une monographie
comple
`te. Dans les lignes qui suivent, nous essayons de synthe
´tiser le contenu de celle-ci, en faisant une
emphase plus particulie
`re sur l’analyse interne des repre
´sentations et sur leur relation avec leur environne-
ment culturel imme
´diat, le Pale
´olithique Supe
´rieur de la Meseta castillane. Les re
´sultats d’un aussi long
processus de recherche supposent une nouvelle interpre
´tation, non seulement du gisement lui-me
ˆme, mais
aussi de tout le phe
´nome
`ne rupestre pale
´olithique a
`l’inte
´rieur de la pe
´ninsule, et dans un cadre plus ge
´ne
´ral,
du discours graphique du Pale
´olithique Supe
´rieur europe
´en.
#2007 Publie
´par Elsevier Masson SAS.
Abstract
The Paleolithic shelter Art in the open air of Siega Verde, Salamanca, is the unitary group better endowed
with paleolithic shelter manifestations in the bleakness of the whole Iberian Peninsula. Its study,
consequence of more than 10 years of works on the land, has culminated with the recent publication of
a complete monograph. In the following lines, we intend to synthesize the content of that, with special
emphasis in the internal analysis of the representations and in their relationship with its cultural immediate
environment, the Upper Paleolithic of the Castilian Plateau. The results of so long investigation process
http://france.elsevier.com/direct/ANTHRO/
L’anthropologie 111 (2007) 501–548
* Auteur correspondant.
Adresse e-mail: [email protected] (J.J.A. Gonza
´lez).
0003-5521/$ – see front matter #2007 Publie
´par Elsevier Masson SAS.
doi:10.1016/j.anthro.2007.07.005
suppose a new interpretation way, not only of the own site, but also of the whole Paleolithic shelter
phenomenon inside the Peninsula, and in a more general environment, of the graphic system of the European
Upper Paleolithic.
#2007 Publie
´par Elsevier Masson SAS.
Mots cle
´s: Pale
´olithique Supe
´rieur a
`l’inte
´rieur de la pe
´ninsule ; Art Pale
´olithique en plein air ; Art en plein air et en
caverne ; Tableau chronologique de l’art Pale
´olithique de la Meseta
Keywords: Upper Paleolithic in the interior of the iberian peninsula; Paleolithic Art open air; Open air and cave Art;
Chronological table of the Paleolithic art in the Meseta
1. Introduction
Le gisement rupestre pale
´olithique de Siega Verde a e
´te
´de
´couvert en 1989 durant les
prospections destine
´es a
`comple
´ter l’inventaire arche
´ologique de la province de Salamanque
dirige
´es par le muse
´e de Salamanque et de
`s cette me
ˆme anne
´e, l’e
´quipe de l’universite
´d’Alcala
´de
Henares dirige
´e par les signataires de ce travail et la Dr Primitiva Bueno Ramirez s’y est incorpore
´e.
La prospection a couvert une zone tre
`s vaste qui comprenait les rives de l’Agueda a
`son
passage par les villages de Villar de Argan
˜an, Villar de la Yegua, Castillejo de Martin Viejo,
Saelices el Chico, San Felices de los Gallegos, Puerto Seguro et d’autres zones semblables et
donc susceptibles de posse
´der un type d’art rupestre, comme le seraient l’aire de confluence entre
le Turones et l’Agueda, a
`la Bouza, certaines zones du Huebra a
`Cerralbo et en aval de l’Agueda
avant de confluer avec le Douro, dans la municipalite
´de la Fregeneda, toutes celles-ci dans la
province de Salamanque. Une fois la prospection intensive termine
´e, le gisement fut de
´limite
´
dans une zone d’environ un kilome
`tre de longitude, la partie centrale se trouvant sur le pont de la
route qui joint Castillejo de Martin Viejo a
`Villar del Ciervo ou
`a
`l’origine, on a localise
´17 zones
avec des gravures rupestres, toutes situe
´es sur la rive gauche de l’Agueda. Le reste de la zone
prospecte
´e n’a pas fourni les me
ˆmes re
´sultats et n’a pu qu’indiquer la pre
´sence de quelques
gravures sche
´matiques sur un affleurement rocheux situe
´en amont du pont de Puerto Segura.
Les travaux poste
´rieurs ont e
´te
´consacre
´sa
`l’e
´tude inte
´grale de la station rupestre, sous la
direction de la chaire de pre
´histoire de l’universite
´d’Alcala
´de Henares, au cours des anne
´es
1991–1994, 1996 et 2005, et ont donne
´naissance a
`plusieurs articles pre
´liminaires (Alcolea et
Balbı
´n, 2003b; Balbı
´n et Alcolea, 1992, 1994, 2001, 2002, 2006; Balbı
´n et al., 1991, 1994, 1995,
1996; Balbı
´n et Santonja, 1992) puis a
`une monographie de
´finitive de re
´cente apparition (Alcolea
et Balbı
´n, 2006). Dans ce travail, nous nous proposons de nous pencher sur une vision
synthe
´tique de ce que signifie la station rupestre de Salamanque, son analyse minutieuse ayant
de
´ja
`e
´te
´de
´veloppe
´e dans la publication pre
´ce
´demment cite
´e.
La vision que nous avons actuellement du gisement rupestre de Siega Verde est bien diffe
´rente
de celle pressentie quand ont e
´te
´entreprises les premie
`res prospections sur le terrain. De la
modeste station rupestre connue en 1991, nous sommes passe
´sa
`un important centre artistique
dont l’inventaire renferme 91 superficies de
´core
´es, regroupe
´es en 29 ensembles, avec 443
te
´moignages artistiques de l’e
´poque pale
´olithique.
2. Contexte mate
´riel et graphique. La Meseta durant la dernie
`re glaciation
Siega Verde ne constitue pas un e
´le
´ment isole
´dans le panorama du Pale
´olithique Supe
´rieur de
la Meseta castillane. Les progre
`s de la recherche, effectue
´s durant les deux dernie
`res de
´cennies,
J.J.A. Gonza
´lez, R.B. Behrmann / L’anthropologie 111 (2007) 501–548502
nous rapprochent d’une re
´alite
´de peuplement et de de
´veloppement graphique du Pale
´olithique
Supe
´rieur beaucoup plus complexe de ce qui est traditionnellement admis. Nous pouvons
aujourd’hui affirmer que les terres de la Meseta castillane ont e
´te
´peuple
´es en permanence durant
la deuxie
`me partie de la dernie
`re glaciation, et que ce peuplement e
´tait original et ne de
´pendait
pas d’autres zones pe
´ninsulaires mieux connues, comme la Corniche cantabrique ou le Levant
me
´diterrane
´en.
Fruit de celui-ci, le riche patrimoine que posse
`de cette zone et ses environs ou
`nous
connaissons 22 ensembles artistiques pale
´olithiques qui se regroupent en quatre grands centres
(Fig. 1) : le nord, dans la zone de contact entre la Meseta et la valle
´e de l’Ebre avec trois
emplacements, Ojo Guaren
˜a, Penches et Atapuerca (Balbı
´n et Alcolea, 1992, 1994) ; le centre qui
borde le pied des montagnes du Syste
`me central et ibe
´rique, avec les grottes de Los Casares, La
Hoz, El Turismo, El Reno, El Cojo, Las Ovejas (Balbı
´n, 2002) et La Griega (Corcho
´n, 1997);le
centre occidental dans le bassin moyen du Douro et du Tage caracte
´rise
´par sa situation
exte
´rieure, avec Siega Verde (Alcolea et Balbı
´n, 2006; Balbı
´n et Alcolea, 2001, 2002; Balbı
´n
et al., 1994, 1995, 1996), Domingo Garcia (Ripoll et Municio, 1999), Mazouco (Balbı
´net
Alcolea, 1992, 1994), les ensembles du Co
ˆa(Baptista, 1999, 2001) avec 24 groupes de
repre
´sentations connues, et ceux de Alto Sabor, Ribeira de Sardinha, Ze
´zere et Ocreza (Baptista,
J.J.A. Gonza
´lez, R.B. Behrmann / L’anthropologie 111 (2007) 501–548 503
Fig. 1. Dispersion de l’art Rupestre a
`l’inte
´rieur pe
´ninsulaire.
Fig. 1. Dispersion of Paleolithic Rock Shelter Art in the peninsular interior.
2001, 2002, 2004; Zilhao, 2003) ; et le sud, beaucoup plus disperse
´et dans des zones de transition
entre la Meseta et la fac¸ade atlantique ou l’Andalousie, avec les grottes de El Nin
˜o(Balbı
´net
Alcolea, 1992, 1994), Maltravieso (Ripoll et al., 1999), la Mina de Ibor (Ripoll et Collado, 1997)
et les gravures en plein air de Cheles (Badajoz) (Collado et al., 2001)a
`co
ˆte
´du Guadiana.
Dans l’e
´tat actuel de nos connaissances, l’art Rupestre Pale
´olithique de plein air se circoncit
presque exclusivement a
`la pe
´ninsule ibe
´rique, me
ˆme si nous connaissons des exemples isole
´s
ailleurs, entre autres celui de Fornols-Haut, de
´couvert dans les Pyre
´ne
´es franc¸aises en 1983 et
date
´par ses spe
´cialistes a
`un moment du Magdale
´nien (Abe
´lanet, 1985; Sacchi, 1987; Sacchi
et al., 1987, 1988a, 1988b).
L’historiographie actuelle sur l’art Pale
´olithique en plein air est lie
´e, cependant, a
`la
de
´couverte du grand centre de la valle
´e du Douro auquel nous pouvons ajouter le cas isole
´des
roches grave
´es de Piedras Blancas, gisement de
´couvert en 1986 a
`Escullar (Almeria) (Martı
´nez,
1986–1987, 1992) et d’autres encore, apparus habituellement en zone frontie
`re hispanoportu-
gaise, comme Sabor, Ribeira da Sardinha, Ocreza, Ze
´zere et Cheles (Baptista, 2001, 2002, 2004;
Zilhao, 2003; Collado et al., 2001).
La de
´couverte du premier document date de 1981, lorsque l’on a trouve
´la roche grave
´ede
Mazouco, situe
´e sur la rive portugaise du Douro pre
`s de Freixo da-Espada-a
`-Cinta, a
`une altitude
de 220 m au-dessus du niveau de la mer, ce qui suppose une altitude limite
´e, par rapport a
`ce qui
est connu sur la Meseta. Ce gisement, touche
´par le barrage d’Aldeada
´vila, a e
´te
´l’objet de
plusieurs travaux depuis sa de
´couverte. On doit fondamentalement les premiers a
`un groupe de
Vitor et Susana Oliveira Jorge (Jorge et al., 1981, 1982). Nous-me
ˆmes avons e
´galement traite
´
l’ensemble dans deux articles ge
´ne
´raux sur l’art Pale
´olithique de la Meseta (Balbı
´n et Alcolea,
1992, 1994).
Apre
`slade
´couverte de Mazouco, les localisations d’art Pale
´olithique de plein air se sont
multiplie
´es dans les environs de la Valle
´e du Douro. Le grand gisement suivant qui a e
´te
´localise
´
est celui de Domingo Garcia, situe
´a
`peu pre
`sa
`1 km du village du me
ˆme nom dans la province de
Se
´govie, sur un ensemble d’affleurements de schiste situe
´sa
`960 m d’altitude au-dessus du
niveau de la mer. Les manifestations artistiques de Domino Garcia sont connues depuis 1970
(Gonzalo, 1970 : pp. 5–9). Mais nous devons attendre 1981 pour trouver des re
´fe
´rences
spe
´cifiques a
`l’art Pale
´olithique de la station, dans ce cas redevables a
`Martı
´net Moure (1981) et
cette dernie
`re, en solitaire (Martı
´n, 1981). Poste
´rieurement, une e
´tude pre
´liminaire d’ensemble a
e
´te
´re
´alise
´e ; aussi bien des manifestations pale
´olithiques que des postpale
´olithiques, redevables a
`
Balbı
´n et Moure (1988) et plusieurs re
´interpre
´tations de la figure grave
´e de style Pale
´olithique ont
e
´te
´effectue
´es (Balbı
´n et Alcolea, 1992). Puis dans les anne
´es 1990, une nouvelle e
´tude du
gisement, dirige
´e par Ripoll et Municio (1992, 1999),Ripoll et al. (1994),ae
´te
´effectue
´e, ce qui a
donne
´lieu a
`une augmentation spectaculaire de l’inventaire pale
´olithique du gisement,
documentant principalement des figures re
´alise
´es au moyen d’incision, ce qui, joint a
`certains
e
´le
´ments de Siega Verde, signifiait une certaine nouveaute
´dans le cadre de l’art Rupestre
Pale
´olithique de plein air.
Le gisement de Siega Verde, situe
´sur le cours de l’Agueda et objet de ces lignes, est la grande
de
´couverte d’art Rupestre Pale
´olithique de plein air qui a suivi. Sa de
´couverte, compte tenu des
conditions de conservation et les grandes dimensions du gisement, a suppose
´la confirmation
de
´finitive de l’importance du phe
´nome
`ne rupestre pale
´olithique de plein air, a
`l’inte
´rieur de la
pe
´ninsule ibe
´rique.
Cette confirmation a rec¸u le coup de pouce de
´finitif avec les de
´couvertes spectaculaires du
Co
ˆa. Entoure
´s d’une pole
´mique a
`importante re
´sonance sociopolitique depuis le de
´part, les
gisements rupestres pale
´olithiques de la rivie
`re portugaise sont connus au moins depuis 1991,
J.J.A. Gonza
´lez, R.B. Behrmann / L’anthropologie 111 (2007) 501–548504
bien que leur existence ait e
´te
´cache
´ea
`la communaute
´scientifique internationale jusqu’en mars
1994 (Bahn, 1995 : 235). Actuellement, nous connaissons 24 ensembles d’art Rupestre
Pale
´olithique qui s’e
´tendent sur 17 km le long de la rive du Co
ˆa(Baptista, 2001 :Fig. 1).
L’environnement ge
´ographique des gisements est relativement similaire a
`celui de Siega Verde,
des effleurements de schiste situe
´s sur le bord d’une rivie
`re; dans ce cas, le premier grand affluent
du Douro portugais et a
`proximite
´de la confluence avec celui-ci. Son altitude moyenne, comme
dans le cas de Mazouco, est cependant moindre, aux alentours de 250 m au-dessus du niveau de la
mer. Tout comme dans ce gisement-la
`, la brusque de
´nivellation topographique, diminue la
hauteur des affleurements et des manifestations artistiques qui y sont associe
´s.
Les e
´tudes que nous connaissons sur ces sites sont assez ge
´ne
´rales, mais nous posse
´dons
quelques informations spe
´cifiques, centre
´es sur les ensembles de Canada do Inferno (Baptista et
Gomes, 1995) et ceux de Vale de Figueira, Ribeira de Piscos, Penascosa, Quinta da Barca, Faia,
Vale de Cabroes o Vermelhosa (Zilhao, 1995-1996; Carvalho et al., 1996; Baptista, 1999, 2001;
Baptista et Garcı
´a, 2002), en sus d’une abondante litte
´rature sur la proble
´matique du gisement,
compile
´e en un volume spe
´cifique par V. Oliveira Jorge (1995).
Le bref parcours dans le centre rupestre de plein air de la valle
´e du Douro nous situe au contact
d’une riche re
´alite
´: l’existence de trois grands ensembles artistiques concentre
´s dans ce bassin
fluvial, Siega Verde, Foz Co
ˆa et Domingo Garcia, auxquels il faut ajouter Mazouco, Alto Sabor et
Ribeira da Sardinha (Zilhao, 2003 :Fig. 2). Cette singulie
`re concentration de documents
artistiques de plein air dans la re
´gion en finit avec les apriorismes existants dans la recherche au
cours du sie
`cle dernier, de
´montre que la re
´alite
´artistique pale
´olithique est plus riche que ce que
l’on pensait et ouvre tout une gamme de nouvelles possibilite
´s d’interpre
´tation qui jusqu’a
`
J.J.A. Gonza
´lez, R.B. Behrmann / L’anthropologie 111 (2007) 501–548 505
Fig. 2. Gisements avec vestiges mate
´riels du Pale
´olithique Supe
´rieur a
`l’inte
´rieur de la pe
´ninsule.
Fig. 2. Locations with Upper Paleolithic material remains in the Peninsular interior.
1 / 48 100%

Le gisement rupestre de Siega Verde, Salamanque Une vision de

La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !