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Contribution FNAME dans le cadre de la mission
"Grande pauvreté et réussite scolaire"
Mars 2015
La FNAME se place résolument dans le cadre d'une école pour “la réussite de tous”. La
charte du maître E est introduite par ce constat que "Tous les élèves ne disposent pas des
mêmes chances de réussite scolaire. Pour un nombre non négligeable d'entre eux, il est
difficile de comprendre l'école et d'apprendre". Parmi ces élèves, de nombreuses études
concordent pour dire combien la proportion d'élèves issus de milieux très défavorisés est
importante.
La FNAME s'engage avec détermination dans l'idée d'une école inclusive chacun doit
trouver sa place et parvenir à atteindre le maximum de ses capacités quels que soient ses
atouts ou ses déficits. Elle participe, avec les RASED, à l'idée d'une école pour tous en
termes d'accessibilité cognitive, l’on crée pour chacun les conditions de la réussite, en
prenant les dispositions nécessaires pour, sinon faire disparaître, au moins réduire, les
désavantages des enfants rencontrant des difficultés. Pour cela, les personnels de RASED
et parmi eux, les maîtres E, travaillent en partenariat avec les enseignants, les familles et
au sein même du réseau pour agir sur deux axes : la prévention et la re-médiation.
Nous donnerons ci-dessous un aperçu des missions du maître E mises en lien avec les
difficultés particulières rencontrées par les élèves issus de familles en situation de grande
pauvreté. Les exemples sont donnés à titre d'illustration et non de modélisation.
Pistes de travail pour un maître E pour participer à la réussite des enfants de famille en
grande pauvreté :
1. Renforcer la relation entre les familles en situation de pauvreté et l’école.
Le maître E joue un rôle de médiateur entre les familles et l’école. Lors de ses rencontres
avec celles-ci, ses entretiens (préparés et formalisés) permettent d'expliquer les enjeux de
l’école, d’aider les parents à décoder certains fonctionnements institutionnels, mais aussi
de leur redonner toute leur place de parents, aussi démunis soient-ils, dans la scolarité de
l’enfant.
Dans certaines maternelles, les maîtres E participent à l'accueil des parents, avec
l'ensemble des membres du RASED quand cela s’avère possible, dès le premier jour de la
rentrée scolaire. Cet accueil en direction des parents ainsi que la mise en place de “temps”
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de discussion entre eux, en présence de l'enseignant spécialisé favorise l’émergence des
inquiétudes éventuelles, des attentes, des malentendus éventuels et facilite un premier
accrochage des parents à l'école, terreau d'une confiance à construire. Dans ce cadre, le
maître E se place dans une posture d’écoute bienveillante, non surplombante et non
formalisée, de façon à favoriser les échanges des parents entre eux et prend part aux
conversations de façon informelle ou répond aux demandes des uns et des autres.
L'expérience de ce type d'initiatives témoigne d’un transfert important de la confiance vers
l'école.
D'autres expériences de présence régulière de l'enseignant spécialisé dans le quotidien de
l'école, en appui de l'équipe et se familiarisant avec les enfants et leurs parents, montrent
que des temps très informels d'échange permettent de nouer des liens de partenariat
bénéfique pour l'ensemble de l'équipe. Un travail de partenariat autant avec les
enseignants que les parents est ainsi facilité.
“D'une manière générale, le maître E prend le temps d'expliquer les enjeux de l'école et du
projet mis en place pour l'enfant apprenant.” *
2. Améliorer la relation enseignant / famille
Le maître E joue un rôle de médiateur entre les familles et les enseignants. Sa position un
peu décentrée par rapport à l’école, mais dans l’école, en lien avec les différents
professionnels autour de l’enfant et interlocuteur privilégié des parents, ses connaissances
pluridisciplinaires et sa posture empathique lui permettent de rapprocher les différents
acteurs.
Il peut apporter un autre regard sur l'enfant, éviter le fatalisme et redonner à chacun sa
dignité et sa place dans la co-éducation de l'enfant. Il lutte contre les représentations
mutuelles qui tendent à générer des incompréhensions, souvent néfastes à la
communication.
Le maître E, dans ce cadre, propose des rendez-vous communs avec les enseignants des
classes pour impulser un autre type de relation permettant de trouver un langage commun
avec pour centre l'enfant/élève. Ces actions aident les enseignants qui risquent une attitude
trop incisive avec le danger d’un écho chez des parents se jugeant déjà̀ disqualifiés. Elles
aident également les enseignants fatalistes ou désemparés par la souffrance qu'ils
perçoivent chez certains élèves (et ses répercussions sur leurs apprentissages), comme
ceux qui craignent leur stigmatisation.
3. Développer le partenariat avec les familles autour de l'élève des apprentissages
Les représentations de l'école et de la réussite peuvent parfois être très différentes dans
les familles en situation de grande pauvreté. Pour ne pas se sentir disqualifiés par l'école,
par fatalisme et aussi sur les capacités qu'elle aura de faire réussir leurs enfants, certains
parents minimisent par protection l'intérêt de la scolarité. Il est alors difficile pour l’élève de
“s’engager” pleinement dans l’apprentissage proposé par l’école, et par conséquence,
d’avoir une chance de réussir. Le décalage socio-culturel entre l’école et certaines familles
les incite à disqualifier l'école puisqu'ils se sentent disqualifiés par elle.
En associant les parents au projet d'aide de leur enfant, le maître E explicite la
problématique de l'élève et les démarches mises en place pour l'aider. "Il permet des
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échanges sur des registres plus larges que le scolaire (...) et permet de recréer des
possibles".*
Certaines initiatives de maîtres E s'appuient sur le travail du GFEN, "Tous capables d'aider
son enfant". En faisant venir les parents dans l'école sous le prétexte d'aider les parents à
mieux soutenir leur enfant dans son travail scolaire, le maître E (bénéficiant de nouveau de
sa position décentrée) suscite des échanges qui vont permettre aux parents de voir à la fois
combien ils savent aider leurs enfants et tout ce qu'ils leur ont appris depuis leur naissance.
Après analyse des leviers qui ont permis ces apprentissages et les obstacles qui ont pu les
freiner, les parents apprennent à transférer leurs compétences sur le travail scolaire, à
reprendre confiance dans leurs qualités d'éducateurs. L'expérience sur le terrain témoigne
là encore d’un changement de regard des parents sur l'école et les apprentissages.
4. Le maître E médiateur pour les apprentissages.
Cette mission du maître E se définit sur plusieurs niveaux d'accompagnement. Pour l’élève
issu d’une famille très défavorisée, le livre n’est que peu ou pas présent, le besoin
vital et quotidien n’est pas d’apprendre, parfois la langue orale est très peu élaborée,
très éloignée en tout cas de cette langue de l’école qui est celle de l’écrit, les processus à
mettre en œuvre ou nécessaires à l’entrée dans la culture écrite (celle de l’école) ne se
situent pas au même niveau d’intériorité que pour les élèves ayant bénéficié de tout un
travail d’acculturation durant des heures, avant l’école et hors l’école (ce qui permet à ceux
d’accéder plus facilement à la compréhension de la langue de l’apprentissage et de la
culture écrite).
Favoriser la réussite scolaire des enfants issus de familles subissant une situation de
pauvreté suppose un accompagnement spécifique, une écoute spécifique, une empathie,
pour partir d’où est l’enfant (son langage, ses besoins, ses envies) et l’accompagner vers
les apprentissages proposés par l’école. Les maîtres E et les personnels des RASED ont
un rôle déterminant à jouer ici, à condition toutefois d’être en nombre suffisant pour pouvoir
vraiment être à l’écoute et au plus près des besoins de chacun des élèves ayant besoin
d’un accompagnement spécifique, de leurs familles et de leurs enseignants.
- Faire apprendre autrement :
Le maître E aide l'enseignant de la classe à porter un autre regard sur l'enfant, la co-
réflexion sur l'élève et l'analyse de ses besoins engendrent une complémentarité des
actions autant qu'une réflexion de l'enseignant sur les apprentissages de la classe. Le
maître E intervient également comme personne ressource en centrant ses actions sur les
élèves rencontrant des difficultés persistantes d’apprentissage. A partir de son expertise
d'aides spécialisées à dominante pédagogique, il apporte un appui aux enseignants pour
prévenir et analyser les difficultés d’apprentissage que peuvent manifester leurs élèves
issus de familles en situation de grande pauvreté, et accompagne l'enseignant dans
l’élaboration de réponses adaptées aux besoins des élèves. Il sensibilise les maîtres aux
aspects pédagogiques qui fragilisent ces élèves plus que d’autres et les mettent en
difficulté dans leurs apprentissages.
En maternelle, il sensibilisera les enseignants aux risques d’une évaluation des élèves qui
mesure davantage les habitudes de l'enfant que ses compétences.
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- Travail sur le langage
Les recherches sociologiques (Bernard Lahire entre autres) montrent un rapport différent
au langage dans les familles en situation de grande pauvreté avec une prédominance du
langage fonctionnel. Le langage est comme « pris dans les situations ». Le maître E aide
les élèves à développer expression et compréhension du langage à travers des situations
de communication. Il ne cherche pas à faire des exercices structuraux de grammaire
(possibles en APC ou en soutien) mais à faire entrer l'élève dans l'activité narrative la plus
naturelle possible. C'est elle qui le conduira progressivement à en faire un objet d'étude
(phonologique, puis plus tard vocabulaire, grammaire, compréhension de textes,
rédaction). De la même manière, la phonologie ne sera pas travaillée, exploitée, à
travers un entraînement, mais autour d'un travail sur la prise de conscience des attitudes
d’élève propres à développer la conscience phonologique, écoute, attention, observation,
analogie, prise d’indices dans l’oral
Le langage oral sera associé à un accompagnement dans la culture du livre, souvent
absent de la maison, afin de développer les compétences et les pratiques culturelles du
livre et de l'écrit.
Cette activité particulière des maîtres E dans la prévention du langage en maternelle aide à
la représentation de la tâche scolaire, à la compréhension de consigne.
Pour certains élèves en grande précarité (logement exigu, vétusté, déménagements
successifs...), un travail sur l'organisation spatio-temporelle sera indispensable pour la
compréhension du fonctionnement du nombre mais aussi de l’écrit (organisation temporelle
de l’oral, organisation spatiale de l’écrit).
Le langage oral peut continuer à être travaillé sur projet d'aide pour des élèves si un projet
individuel d’aide spécialisée s’avère indispensable.
- Re-médiations
Afin d'assurer la réussite de tous les élèves, l'axe de re-médiation "s’organise suite à
l'analyse des besoins particuliers d'un élève pour aider à la mise en place des
compétences instrumentales comme la construction du nombre, la compréhension du
fonctionnement de l'écrit, la construction du projet de lecteur, parallèlement à des
compétences cognitives comme la symbolisation, la perception du but, l'utilisation d'images
mentales, de procédures expertes..."*
Le maître E développe des pratiques d'aides spécialisées au plus près des besoins de
l'élève et de ses difficultés, et construit un projet d'aide pour lequel les parents seront
associés. Il est essentiel de ne pas laisser la difficulté s'installer pour garder mobilisés
parents et enfant-apprenant.
Ces re-médiations peuvent se faire sous deux formes déterminées au plus près des
besoins de l’élève : soit dans un travail en petits groupes hors de la classe, soit sous forme
de co-intervention dans la classe. Précisons que la co-intervention des enseignants
spécialisés la différence des actions des enseignants surnuméraires pdmqc) n’a pas
pour vocation principale de renforcer le pôle didactique (pour des élèves dont les besoins
du moment ne se situent pas dans le soutien/renforcement) mais il s’agit de venir dans
l’environnement de l’élève penser la complexité de l’apprentissage, à partir des grilles de
lecture expertes sur la difficulté scolaire dans toutes ses dimensions.
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Le travail “externalisé” est indispensable lorsqu’il faut revenir aux fondamentaux non
compris qui font obstacle aux apprentissages en cours. Il est nécessaire également pour
des élèves perturbés par des troubles de l’attention qui doivent apprendre à réguler les
informations. A ceux-ci s’ajoutent ceux qui ont besoin d’un “save space” pour reconstruire
leur estime de soi et leur confiance dans leur capacité d’apprendre et de réussir. Un
transfert vers la classe interviendra alors dans un second temps.
- Assurer les transitions - éviter les ruptures
Nous savons que certains passages doivent être accompagnés, c'est le cas du passage de
la grande section maternelle à la classe de CP en élémentaire. Dès la GS, un travail de
prévention peut se mettre en place, sur les représentations de l’apprentissage. Comme
interlocuteur déjà connu des enfants, le maître E apporte une “sécurisation”, en particulier
au cours des premiers jours suivant la rentrée. Certains maîtres E envisagent dès les
premières semaines de classe des co-interventions dans la classe autour d'un projet de
partenariat. Des élèves repérés plus fragiles en GS peuvent également être accompagnés
dans leurs premiers pas d'apprentis lecteurs (tuilage de l’aide possible entre la GS et le
CP).
De nombreux élèves aux familles en situation de grande pauvreté vivent des
déménagements successifs suite aux expulsions par exemple, le RASED, avec ses
différents réseaux, peut accompagner ces transitions d'une antenne à l'autre, d'une
circonscription à une autre.
5. Organiser le partenariat avec d’autres professionnels :
- dans le cadre du lien entre les différents professionnels qui agissent autour de
l’enfant
“Sa connaissance des différents champ d’aide (paramédical, psychologique) fait du
maître E, comme des autres membres du RASED, un interlocuteur privilégié lorsque des
aides extérieures se mettent en place pour l’enfant.” Parmi ces partenaires extérieurs se
retrouvent régulièrement les Centres médico-sociaux quand les familles bénéficient d’un
suivi.
Ces partenariats peuvent également s’élargir à une logique d’accompagnement hors école,
toujours dans l’objectif de tisser des liens, afin que les actions proposées soient les plus
pertinentes possibles.
Certains partenariats existent dans le cadre de projets avec ATD Quart Monde.
La FNAME est, par ailleurs, un partenaire actif au côté de l’AFEV, en particulier au sein du
comité de pilotage des journées de refus de l’échec scolaire.
- Dans le cadre du Pôle ressource de circonscription
Le RASED est l’une des composantes du Pôle ressource dans le cadre des nouvelles
missions définies par la circulaire du 18/08/2014 : “Le pôle ressource de la circonscription
regroupe tous les personnels que l'inspecteur de l'éducation nationale (IEN) peut solliciter
et fédérer pour répondre aux demandes émanant d'un enseignant ou d'une école
(conseillers pédagogiques, maîtres-formateurs, animateurs Tice, enseignants référents
pour la scolarisation des élèves handicapés, psychologues scolaires, enseignants
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