UE3 – Guérin-Dubourg Suivi thérapeutique pharmacologique (STP) La pharmacocinétique sert surtout au moment du développement d'un médicament pour savoir quel va être son parcours chez un individu donné. Mais elle a aussi des applications cliniques, des applications quotidiennes dans vos pratiques de médecin et de sage-femme. Il y a des médicaments pour lesquelles on est contraint de faire un dosage plasmatique pour avoir une idée de son efficacité ou une idée de l'observance. Un cas très classique, va être chez les patients séropositifs qui sont sous tri/quadri thérapie. Aujourd’hui, on veut savoir si le médicament a un effet. Des fois, la première chose qu'on veut savoir c'est si le patient prend ces médicaments. Pour savoir ça, on fait un dosage. Si la valeur est zéro, il ne le prend pas et si la valeur est normale, il prend son médicament. Ça c’est l'indication de base du suivi thérapeutique pharmacologique et de temps en temps ça arrive qu'on demande de faire un dosage pour s'assurer que le patient prenne bien son traitement. Souvent on va un peu plus loin que ça. Il y a des relations dose-effet ou des relations posologie-effet donc on va essayer de moduler l'effet d'un médicament en fonction de la concentration plasmatique. On va faire des adaptations posologiques, en fonctions d'un suivi thérapeutique pharmacologique (STP). STP = suivi thérapeutique pharmacologique = TDM (Therapeutic drug monitoring) Comme pratique clinique, en ville, on va plutôt faire du suivi à travers de test de biologie courante qui vont permettre d'évaluer l'effet d'un médicament parce qu'il y a un retentissement sur un dosage qu'on fait couramment au laboratoire pour une prise de sang. Exemple : les anti-vitaminiques K (médicaments anticoagulants). Il y a des tests fonctionnels qui sont faciles à mettre en œuvre dans un laboratoire en ville qui permette de savoir qu'elle est votre capacité à coaguler. On mesure ça, qu'on appelle l'INR qui vous permet d'évaluer l'effet du médicament. Donc là ce n’est pas un dosage du médicament mais on en mesure l'effet. C'est des médicaments qui ont un polymorphisme d'effet tellement important et des variabilités d'effet tellement importantes d'un individu à l'autre, d'ordre pharmacocinétique voire même d'ordre pharmacodynamique, qu'à posologie égale chez 2 individus côte à côte vous aurez jamais les mêmes effets. C’est est très dangereux car, vu qu'ils ont des marges thérapeutiques très étroites, vous basculez très vite de la zone d'effet thérapeutique à la zone d'effet secondaire grave. Il y a un suivi normalement très rigoureux de ces patients. Aujourd'hui il y a près de 30% des gens de plus de 50/55 ans (à titre indicatif seulement) qui sont sous AVK à qui on fait des dosages d'INR en laboratoire régulier parce qu'il y a un risque très important. Le STP (ou TDM) consiste en la mesure de la concentration plasmatique d’un médicament pour adapter individuellement la posologie pour un patient donné. À !1 partir d'un dosage plasmatique, on peut souvent évaluer la concentration des médicaments à son site d'action. De plus, avec des données sur le polymorphisme génétique du patient, on peut choisir les médicaments à donner et la posologie adaptée. On veut : - Etablir la posologie optimale, s’assurer qu’on est dans la bonne zone de concentration (zone d’efficacité thérapeutique) - Etre efficace et non toxique I. Buts du Suivi Thérapeutique Pharmacologique Les 2 buts principaux sont : 1. Diminuer le taux d’échecs thérapeutiques (s’assurer que notre patient soit dans la bonne zone thérapeutique surtout si effets secondaires importants) - liés à une mauvaise observance (attention ne pas toujours faire confiance aux patients quand on leur demande s’ils prennent leurs traitements). ou à une dose insuffisante 2. Réduire la fréquence des effets indésirables et/ou toxiques des médicaments liées à une dose excessive ou à une posologie, qui, d’entrée n’est pas la bonne (médicaments à marge thérapeutique étroite ou difficile d’utilisation). Courbe dose-effet (rappel) !2 ! Plus le médicament a une dose importante plus il va avoir un effet important. Par rapport à la notion d'affinité d'un médicament à sa cible, un médicament n'est jamais spécifique. Si vous augmentez la concentration plasmatique d’un médicament, il va se lier d'une manière ou d'un autre à d'autres cibles et il va produire d'autres effets que l’on maitrise moins, effets secondaires ou parfois effets iatrogènes dangereux. Diminuer le taux d'échec c'est limiter les inobservances, limiter les zones d'inefficacité ou on ne donne pas suffisamment de médicament et réduire la fréquence des effets indésirables en limitant les surdosages qui vont amener souvent à des effets indésirables non maitrisés. II. Justifications du STP et pré-requis Le STP d’un medicament est justifié si : • • • Relation concentration – effet est meilleure que la relation dose/effet (exemple : médicament avec une forte variabilité inter individuelle d’ordre pharmacocinétique et pharmacodynamique). Souvent il y a de la pharmacogénétique sous-jacente notamment un polymorphisme d’expression des cytochromes d’ordre pharmacocinétique. Relation dose/concentration présente une grande variabilité interindividuelle (d’ordre pharmacocinétique). Zone thérapeutique étroite Exemple : la digoxine (médicament anti arythmique). La zone thérapeutique c'est 10-20ng/ml. À 25ng/ml vous avez une défaillance cardio vasculaire possible avec risque de coma et à 30ng/ml vous êtes mort. Là, il y a intérêt à faire du dosage. Donc la marge thérapeutique est très étroite et la zone d'efficacité est très fine. !3 • • Réponse pharmacologique difficilement accessible par une mesure de l’effet (pour les traitements prophylactiques tels que les immunosuppresseurs utilisés suite à une greffe, médicaments) ou dans le cas où on ne peut pas voir ou quantifier l’effet du médicament car il n’y a rien de palpable au niveau clinique et il n’existe pas de tests biologiques qui le permettrait). Interactions médicamenteuses avec médicament susceptibles de modifier la PK (les antirétroviraux avec effet inducteur et inhibitteur enzymatique fort). Quand vous avez la combinaison de ces justifications, vous êtes sûr et certain que ce sont des médicaments pour lesquels il faudra faire du suivi thérapeutique pharmacologique. On fait des dosages et du suivi thérapeutique pharmacologique pour des molécules pour lesquelles on n’a pas le choix. Ce sont les AVK (anti vitamine K), certains anticancéreux, des immunosuppresseurs, des médicaments antirétroviraux et des antituberculeux dont on n’a pas vraiment d’alternative thérapeutique. Souvent quand on fait du dosage de médicament, c’est parce que c’est écrit dans le Vidal, c’est-à-dire qu’il faut le faire si vous donnez le médicament. Notion de Zone Thérapeutique Zone thérapeutique : c’est la zone de linéarité dose effet où il y a l'effet thérapeutique souhaité. C’est la zone où on maîtrise l’effet d’un médicament. Plus la pente est douce, plus on maîtrise l’effet du médicament. Notion de Marge Thérapeutique Marge thérapeutique : c’est la différence de concentration qui va exister entre une zone d'effet thérapeutique et une zone d'effet secondaire. !4 Il n’est pas possible de la représenter sur une courbe dose effet car sur une courbe dose effet, on ne voit qu'un effet. Pour une même molécule, vous allez avoir des concentrations plasmatiques où vous allez avoir un effet 1, on va dire que dans cette zone-là vous avez seulement un effet et puis vous allez avoir des concentrations plasmatiques bien plus élevées où vous allez avoir un effet 2 qui apparaît. La marge thérapeutique, c’est la différence de concentration entre les deux. Très souvent entre la concentration où il y a les effets thérapeutiques et la concentration des effets toxiques, la marge thérapeutique est énorme. Question élève 2015 : La marge thérapeutique ce n’est pas la différence entre la DL50 et le DE50 ? Réponse : Oui, on peut s'en rapprocher. Sauf que la DL c'est létale mais on a la DT50 (la dose toxique 50). Donc c’est à partir de là, souvent, qu’on définit, expérimentalement, la marge thérapeutique. !5 En fonction de la modification d'une posologie, vous allez modifier l'effet sur les patients. Si par exemple vous avez un antihypertenseur qui se prescrit à 50mg/jour et vous savez que si ça ne marche pas, le patient va revenir et vous allez lui donner 75mg, vous serez encore dans la zone efficacité thérapeutique. Vous savez que vous allez augmenter l'effet en augmentant la concentration sans forcément amener à des effets toxiques. Des fois, la zone thérapeutique et la marge thérapeutique se chevauchent c’est-à-dire que la zone d'efficacité, où vous avez les concentrations efficaces du médicament avec l'effet premier recherché, et la zone où les premiers effets indésirables apparaissent, est quasiment la même. Dès que vous êtes sur la zone d'effet max, vous avez déjà des effets indésirables qui apparaissent. C’est l’exemple de la digoxine (zone thérapeutique et marge thérapeutiques très étroites) ou des dopaminergiques (céphalées ou tremblements chez les patients). 1. Relation concentration-effet ! Description du schéma : Entre la dose et la concentration plasmatique, il y a un gros volet pharmacocinétique et entre la concentration plasmatique et l’effet, il y a un gros volet pharmacodynamique. Il existe des variabilités inter et intra individuelles très fortes en terme de pharmacocinétique et de pharmacodynamique. Donc : • Une même dose ne produit pas les mêmes effets d’un individu à l’autre. • La variabilite de réponse aux médicaments est la conséquence de 2 variabilités associées ou non : Pharmacocinétique (PK) et Pharmacodynamique (PD) !6 ! ! Le tabagisme va amener à une induction ou une inhibition enzymatique comme l'alcoolisme. Dès que vous avez des facteurs environnementaux qui peuvent entrent en jeu pour des médicaments qui sont très fortement métabolisés, ça peut vraiment faire évoluer le traitement. Exemple d’un patient qui prend des AVK (anti vitamine K ; médicament anticoagulant), qui sont fortement métabolisés par le cytochrome 2C9 qui est très sensible à l’alimentation. Il prend la même posologie depuis des années, il fait un dosage INR tous les 3 mois qui est à peu près stable. Ce patient, après un voyage, !7 (changement de ses habitudes) aura son INR qui est parti dans tous les sens à cause de l’alcool ou du tabac… ! A titre d’exemple ; Aucun qcm sur des exemples Exemple : Le GLIVEC (Imatinib), traitement utilisé dans les leucémies myéloïde chroniques (anti BCR abl), est un inhibiteur de récepteur Tyrosine kinase. Avec l'Imatinib, on est arrivé à un taux de rémission de 80-90 % comparé aux protocoles chiomiothérapeutiques très lourds utilisés auparavant. On se rend compte pour le GLIVEC que certains patients sont éepondeurs et d’autres non à même posologie. On en a conclu qu’il y a un seuil (concentration plasmatique efficace) à partir duquel les patients étaient répondeurs ou non (1000ng/ml). Donc pour le GLIVEC il n’y a pas de zone thérapeutique mais un seuil (au dessous pas d’effet et au dessus effet). Courbes ROC : permet de trouver le seuil à partir duquel le traitement devient efficace. Ordonnée : 1-la sensibilité et Abscisse : 1-la spécificité et à chaque point on a une zone de concentration différente. De cela, on va en retirer une VPP et une VPN c'est-à-dire des patients qui vont prendre le traitement et pour lesquels on va observer un effet et des patients qui ne vont pas prendre de traitement et pour lesquels on ne va pas observer d’effet et on en déduit la sensibilité et la spécificité du test. Nous allons donc avoir d’après la courbe un point avec une sensibilité et une spécificité maximum (ici ce point est 1000ng/mL) où on avait la meilleure réponse au niveau globale. Quand on augmentait les concentrations, certes on répondait bien !8 mais il y avait trop d'effets secondaires et quand on baissait la concentration, globalement on répondait moins bien. Donc pour le GLIVEC, au dessus de ce point (1000ng/mL) on sera efficace et en dessous on n’est pas efficace mais le seul problème, c’est qu’il y a des variabilités inter individuelles à posologie égale donc d’origine pharmacocinétique et on fera un dosage plasmatique. 2. Relation dose-concentration ! En fonction de la concentration plasmatique, il y a une réponse différente au traitement et il fallait nécessairement s’assurer qu’on était au delà de 1000ng de concentration plasmatique pour avoir un effet. Quand on regarde toutes les populations en fonction des posologies, il y a des chevauchements plus ou moins importants. On remarque qu’il y a une importante variabilité pharmacocinétique inter individuelle pour le GLIVEC, et qu’avec des posologies complètements différentes on retrouve une même concentration plasmatique. Ce phénomène est en partie expliqué par métabolisme via CYP P450 3A4 (interactions, induction, inhibition, polymorphisme) Il va falloir adapter la posologie en fonction des patients surtout pour ceux qui sont à 1600ng/ml avec le risque d’apparition des effets secondaires. Question élève 2015 : Pour le test du ROC, il est faussé parce qu'admettons dans l'étude qu'on a fait, on a trouvé 1000ng/ml mais eux ils auront 900ng/ml de concentration. On pourra dire que c'est plus 900ng/ml qui correspond que 1000ng/ml? Réponse : Non, on va construire une courbe ROC en fonction de la concentration plasmatique et non pas de la posologie. Le principe quand on construit une courbe ROC, pour un scientifique ou un clinicien qui va mener la recherche clinique, c’est de savoir qu'elle est la dose efficace. On va constituer pleins de sous-groupes de patients LMC et en fonction des sous-groupes, on va leur donner du médicament et on va faire un dosage plasmatique du médicament sur un taux résiduel (un taux donné) qu'on va !9 procéder chez tout le monde de la même façon. En fonction des patients, on va voir s'ils répondent ou non et on fait le dosage. C’est ça la donnée d'entrée. 3. Effet difficile à apprécier cliniquement Exemples : - Immunosuppreseurs - Anti-épileptiques STP non justifié : – Bétabloquants (médicament antihypertenseur) : mesure de la TA – AVK : mesure d’un paramètre biologique simple INR (International Normalized Ratio) = mesure de capacité de coagulation du plasma du patient. Question élève 2015 : C’est quoi la différence entre l'INR et STP? Réponse : Ce sont deux choses différentes. L’INR (international normalized ratio) est un test uniquement lié à la mesure d'efficacité des AVK alors qu’un STP (suivi thérapeutique pharmacologique) est un suivi thérapeutique large pour toutes les molécules telles qu'elles soient. L'INR n’est pas un STP. L'INR permet d'évaluer l'effet alors que le STP permet de mesurer la concentration d'un médicament au niveau plasmatique ou au niveau d'une cible par un dosage. Quand on fait un INR, on fait un test phénotypique ; on évalue une capacité biologique et non pas la concentration d'un médicament. Donc pour les AVK, on ne fait pas de STP. 4. Interactions médicamenteuses Toutes les molécules sujettes à de grosses variabilités dans leur concentration plasmatique (à cause d’intéractions médicamenteuses) sont soumises à des suivis pour faire des adaptations posologiques (exemple : les innibiteurs de protéases qui sont des médicaments anti-rétroviraux et aussi certains immunosuppresseurs) /!\ Connaître les inducteurs et les inhibiteurs enzymatiques car les molécules pour lesquelles on fait des suivis thérapeutiques pharmacologiques peuvent avoir des modifications d’effets très importantes (interaction médicamenteuse) en présence d’un inducteur ou d’un inhibiteur enzymatique. III.Les indications du suivi thérapeutique pharmacologique !10 Souvent c’est un outil pour : - Certains traitements prophylactiques pour lesquels on peut difficilement juger de leur efficacité thérapeutique.(dans le cas des immunosuppresseurs et des rejet de greffe) - Evaluer certains traitements, c’est-à-dire est-ce que l’objectif thérapeutique est atteint quand on a du mal à l’évaluer cliniquement leur efficacité ? (médicaments avec mauvaise relation dose - concentration et bonne relation concentration-effet , exemple : le glivec) - Pour certaines modifications de traitement, dose, association,voie d’administration, comme les médicaments à zone thérapeutique étroite. Dès qu’on va modifier leur posologie, un STP nous permettra de voir si il y a un retentissement au niveau de la concentration plasmatique. - En cas d’échec thérapeutique, un dosage nous permettra de savoir l’origine : problème d’observance, traitement inefficace, sous-dosage ou parfois même pharmacogénétique (Exemple : patient hypermétaboliseur, anti rétroviraux ou dans le cas où les patients consultent pleins de praticiens différents donnant lieu à des interactions médicamenteuses qui ne sont pas forcément maîtrisées…) - Les suspicions de toxicité qui rejoignent un peu les problèmes de pharmacogénétique et surdosage de certains patients. Ça survient chez des patients qui ne métabolisent pas bien ou qui métabolisent trop bien, dépendant des cas de figure. - Observance : c’est l’indication la plus basique qui soit.. Il est difficile de faire respecter l’observance à un traitement surtout chez ceux qui prennent des médicaments qui ont des effets secondaires lourdes et même psychologiques tels que les anticancéreux, des antirétroviraux. La non-observance de ces médicaments conduit à des graves conséquences car le patient se sentira malade quand il commencera à avoir des effets cliniques qui se présenteront bien trop tard. Exemple : un patient qui est HIV+, s'il ne prend pas son traitement, il va se mettre en immunodépression grave et va mourir du premier streptocoque qui passe. 1. Cas clinique Patient traité par Imatinib (glivec) (médicament anti-cancéreux) sans réponse thérapeutique. On veut savoir la cause de l’échec thérapeutique. Seuil efficace : C = 1000ng/ml !11 ! On essaye de savoir quelle est la concentration plasmatique du patient pour savoir s’il appartient à la famille répondeuse ou non répondeuse et adapter la posologie en conséquence. Donc on vérifie la concentration résiduelle. - Si C < 100ng/ml ! mauvaise observance, on sait que le patient ne prend pas son médicament. (Là encore raison de plus pour se méfier des réponses des patients, notamment quand le traitement est prophylactique et donc que pour le moment le patient n’a aucun symptôme) - Si C = 800ng/ml ! le patient prend son traitement mais il métabolise trop. Il faut augmenter la posologie. - Si C = 2000ng/ml ! on est dans la zone thérapeutique, et si le patient est quand même dans en échec, il faut se poser d’autres questions. Est ce qu’il y a une résistance qui s’est développée au traitement. Les LMC qui deviennent résistante s: les cellules tumorales ont tendance à évoluer, elles vont surexprimer par exemple des PGP (P-glycoprotéine) et il faut du coup proposer d'autres alternatives. Au-delà du dosage du médicament, on fait aussi un suivi biologique de l'effet des molécules, où on va regarder s’il y a encore des cellules malignes qui circulent dans le sang, qui présentent une mutation de la cellule qui s'appelle Bcr2. Question élève 2015 : Dans le cas de la tolérance, est-ce que les concentrations plasmatiques sont élevées? Réponse : Ces médicaments, pour lesquels il y a une tolérance ou une forme de pharmacodépendance, ne sont pas concernés par le suivi thérapeutique. Ce sont souvent des médicaments qui agissent sur le système nerveux central, la plupart du temps, les benzodiazépines, certains antalgiques ou les antiasthmatiques où on a le phénomène de tolérance parce qu'on a besoin d'augmenter les doses pour avoir les mêmes effets. Ce sont souvent des médicaments pour lesquels vous avez une relation dose effet qui est assez nette. Le cas de figure où on fait un suivi thérapeutique pharmacologique, c’est-à-dire, le dosage, le suivi, l'interprétation des résultats et la discussion avec le labo, relève en général, du domaine du spécialiste. Par exemple : le néphrologue qui suit un patient greffé rénal. Il faut savoir que ça existe aussi avec les généralistes dans le cas où les patients vont voir un médecin généraliste. 2. Quels médicaments pour STP ? - Antirétroviraux (notamment inhibiteurs de protéases en traitement de HIV) - Antibiotiques (aminosides qui sont toxiques pour l’oreille et glycopeptides) pour savoir si on est en zone efficace ou toxique. - Antiépileptiques (carbamazepine, clonazepam…) !12 - Antiarythmiques (lidocaine, quinidine) - Cardiotoniques (digitoxine, digoxine avec zones thérapeutiques très étroites d’ordre du nm/ml et avec une marge thérapeutique encore plus étroite et si on passe de 10ng à 15ng, on a des effets secondaires terribles) - Immunosuppresseurs (ciclosporine, tacrolimus…), dosages fréquents (exemple : patients greffés) - Anticancéreux et anticoagulant - Antituberculeux - Anticonvulsivant - Antipsychotiques (exemple : la clozapine pour le traitement de la schizophrénie. Pour le cas de la clozapine, au lieu de faire un dosage de la molécule pour vérifier la toxicité, on fait un suivi de la numération formule sanguine qui donne le taux de neutrophiles car sa toxicité est une baisse des polynucléaires neutrophiles. La clozapine peut amener à une agranulocytose, c’est-à-dire qu'il n’y a plus de polynucléaires neutrophiles donc il n'y a quasiment plus de défense immunitaire primitive (innée)) Question élève 2015 : C’est quoi la différence entre antiarythmiques et cardiotoniques ? Réponse : Les cardiotoniques sont aussi des antiarythmiques. La différence c'est que les cardiotoniques sont indiqués dans l'insuffisance cardiaque où le cœur étant souvent gros, il aura du mal à pomper et tournera au ralenti. On aura besoin d'augmenter le rythme et on va dans ce cas la donner des cardiotoniques qui ont la capacité d'avoir un effet inotrope, bathmotrope positif. Le cœur va battre plus fort et va pomper plus fort (inotrope positif) avec une fréquence plus importante (bathmotrope positif). Les antiarythmiques sont indiqués pour des patients souffrant de troubles du rythme avec des risques de fibrillation auriculaire et ventriculaire important. Le rythme cardiaque est lié à un potentiel d'action. Il y a le nœud sinusal qui va amener à déclencher la contraction cardiaque. Les antiarythmiques vont permettre de maîtriser les défaillances du potentiel d'action et d'avoir un rythme régulier. 3. Quels patients ? - Patients dont les paramétres pharmacocinétiques sont particuliers ou non prévisibles. Exemple : IR, IH, patient sous dyalise, en plurithérapies avec de très fortes interactions médicamenteuses.… - Indication spécifique dans laquelle le médicament peut présenter une zone thérapeutique étroite : – MTX faible dose/PAR : pas de STP – MTX forte dose/chimiothérapie : STP !13 - Association de médicaments à risque – Interactions PK (inducteur, inhibiteurs enzymatiques…) Le suivi thérapeutique pharmacologique n’est pas forcément lié au type de patient mais plutôt à la molécule. Il y a des médicaments pour lesquels vous devez le faire. Ça fait partie des recommandations. !14 IV.Modalités pratiques Informations nécessaires : posologie, contexte clinique, rythme d'administration, l’heure de prélèvement, l’heure de la dernière prise, et indication du dosage (recherche d'efficacité ou de toxicité) etc… Rendu de données chiffrées qui n'ont pas de sens pour le médecin s'il n'y a pas les informations nécessaires. Au minimum : la posologie. ➢ Quand prélever ? ➢ Comment ? ➢ Informations nécessaires devant accompagner le prélèvement ? ! Quand on prend un médicament plusieurs fois à rythme périodique, il y a un moment où on atteint une zone plateau ou d’équilibre entre l’absorption, métabolisation, élimination, pour atteindre cet équilibre, il faut au moins attendre 5 demi-vies. C’est à ce moment là qu’on commence le STP, le premier dosage en fonction des indications (recherche d'efficacité, recherche de toxicité). Donc si un médicament a un t1/2 de 5 jours, il faudra attendre 5t1/2 (soit 25 jours) pour faire le STP PIC : (= Cmax) dosage au moment où on est sensé avoir la concentration la plus forte. Zone de toxicité Vallée (= taux résiduel/Cmin) : dosage au moment où on est censé avoir la concentration la plus faible. Zone d’efficacité thérapeutique On cherche à trouver la zone thérapeutique : - La zone résiduelle c’est la zone où on a toujours le minimum. C’est la prise de sang avant la prise du matin c’est-à-dire qu’il s’est passé 8 à 10h après la dernière prise. On fait un dosage en taux résiduel, cela permet d’apprécier le !15 niveau basal de médicament. Ce qui est important est de savoir si avec ce niveau basal on est dans la zone thérapeutique ou si on est trop bas (il faudrait dans ce cas augmenter la dose). - La zone au pic, la zone où la concentration est à son maximum. Elle va nous permettre de savoir si oui ou non à un moment donné de la journée on est dans une zone toxique ou pas. Donc pour un dosage en vallée qui sert à traduire une zone d’efficacité, il faut faire la prise de sang 5 minutes avant la prise de médicament. Le tempo (à quel moment faire la prise de sang) est fondamental alors que le dosage en pic qui sert à chercher une efficacité et la zone toxique, la prise de sang doit être fait souvent une demi-heure, une heure ou deux après la prise, selon la molécule. (Le temps au pic est donné par les industries pharmaceutiques). Un pic pas forcément nécessaire pour les médicaments avec une marge thérapeutique très large. L'heure de la prise du médicament et l'heure du prélèvement doivent être extrêmement bien renseignées pour permettre une bonne interprétation. Attention : Il ne faut pas doser trop tôt car sinon les résultats ne sont pas interprétables parce qu’on n’atteint pas l’état d’équilibre (exemple du médicament avec un t1/2 de 4 jours. Danger lorsque le patient n'est pas à l'état d'équilibre car risque de surdosage. Par exemple : le retentissement d'une modification de posologie des AVK sur un INR peut prendre 3-4 jours. Si un INR est fait dans les 12h, on n’aura pas de modification et augmenter d'avantage la posologie, se traduira par un patient en surdosage avec des conséquences graves comme des hémorragies massives. Autres chose qu’on peut faire : (en one shot) • • • • Aire sous la courbe ou AUC qui caractérise toute la biodisponibilité du médicament. Pour la réaliser on va faire de la pharmacocinétique, des explorations fonctionnelles. On va faire des fois des dosages en 5, 6, 7, 8 voire 12 points, cela arrive dans certaines hospitalisations de jour, on est obligé de le faire pour certains médicaments (notamment pour immunosuppresseurs où les modèles mathématiques nous permettent de le faire qu’avec 3 points par exemple). Ici, l'efficacité est principalement liée à la biodisponibilité. Cmin (évalue l’efficacité) Cmax (évalue la toxicité) AUC estimée !16 On a maintenant des modèles où on ne fait plus que 3 points (mais le patient doit être vu et prélevé à 20 min, 60min 180 min (il faut être très rigoureux sur les temps de prises pour avoir des résultats avec le moins de variables possibles) après la prise du traitement comme ça on peut établir une vrai aire sous la courbe (AUC). Il y a des médicaments pour lesquels l'efficacité est liée à la concentration maximale ou la concentration résiduelle et il y a des médicaments où l'efficacité est principalement liée à la biodisponibilité. Exemple : 2 médicaments différents qui ont au même temps, exactement la même Cmax. Vous avez deux biodisponibilités totalement différentes donc des efficacités différentes. Une aire sous la courbe, une biodisponibilité complète, est un renseignement qui est encore plus intéressant que Cmin et Cmax. On est vraiment dans une zone de biodisponibilité totale de la molécule. C’est une information qui est très pertinente. Les AUC sont vraiment recommandées pour le lipophénolate qui est un immunosuppresseur. (C’est surtout pour les immunosuppresseurs qu’on fait des aires sous la courbe.) Le cas général pour résumer : ➢ A l’équilibre, Selon index d’exposition du médicament Selon l’indication, l’information recherchée : • Efficacité – Med relation effet - Cmin démontrée – Vérification objectif atteint – Recherche cause d’un échec de traitement – Med asso : interaction… C min = vallée (= résiduelle) • Observance • Toxicité – Med relation effet - Cmax démontrée 15% des médicaments C max = pic !17 – Ex. Aminosides • Pb absorption : – Med avec mauvaise biodisponibilité – Exemple : itraconazole C min et C max Quand on cherche à évaluer une efficacité ou une observance on va doser le taux résiduel, parce que le taux résiduel en général est la zone d’équilibre, au-delà de laquelle on est efficace et en dessous de laquelle on est inefficace. Donc la vallée est souvent là pour caractériser l’efficacité. Il est logique que la Cmax va nous permettre plutôt de caractériser la toxicité du médicament parce que si on a un PIC trop fort, c’est à dire qu’on est au-delà de la zone thérapeutique. Il sert aussi à évaluer l’efficacité parce qu’on veut s’assurer qu’on est bien en dessous de Cmax. Quelques fois on est obligé de faire les deux (Cmin et Cmax) pour des problèmes d'absorption, variabilité importante ou d'interactions médicamenteuses, par exemple pour les glycopeptides. !18