Effets des expositions simultanées aux métaux et aux polluants organiques
Radhouane CHAKROUN et Faycal FAIDI
pourrait conduire à des concentrations de ce composé dans
l’organisme plus importantes et ainsi partiellement contribuer
à l’amplification des effets observés dans le protocole de
co-exposition.
Le cadmium est essentiellement néphrotoxique et peut être à
l’origine d’une ostéoporose (4), mais il peut également entrainer
des modifications hépatiques à plus fortes doses (5). La toxicité
des PCB concerne les effets neurologiques, hépatiques en plus des
effets reprotoxiques et autres probables effets cancérogènes (6).
Il serait de ce fait intéressant d’étudier d’autres effets combinés
de ces produits ubiquitaires dans notre environnement.
Effet de l’exposition simultanée à l’arsenic
et au dichlorvos sur le métabolisme
du glutathion, sur les paramètres neurologiques
et hépatiques, et l’histopathologie tissulaire
chez le rat
Flora SJS, Dwivedi N, Deb U, Kushwaha P, Lomash V. Effects of
co-exposure to arsenic and dichlorvos on glutathione metabolism,
neurological, hepatic variables and tissue histopathology in rats.
Toxicol Res 2013; DOI: 10.1039/C3TX50038A.
Résumé
Cette recherche étudie les effets liés à l’exposition simultanée
à l’arsenic et à un pesticide organo-phosphoré : le dichlorvos.
L’étude a été réalisée sur des rats exposés par la voie orale à une
dose d’arsenic de 1 mg/kg/j et/ou a une dose de dichlorvos de
4 mg/kg/j par injection sous-cutanée pendant 16 semaines. Les
effets de stress oxydatif ont été étudiés par le dosage dans les
tissus du cerveau et du foie des dérivés réactifs de l’oxygène
(ROS7), des substances réactives à l’acide thiobarbiturique
(TBARS8), des taux de glutathion oxydé (GSSG9) et réduit (GSH10),
ainsi que des activités enzymatiques de la glutathion peroxydase
(GPx11) et de la glutathion S-transférase (GST12) impliquées dans
les mécanismes de détoxification. Les résultats confirment les
effets de stress oxydatif liés à l’exposition à l’arsenic seul ou en
présence de dichlorvos et exprimés par une augmentation des
concentrations des ROS. Les auteurs rapportent également une
augmentation plus prononcée de l’activité de la GPx dans les
tissus cérébraux du groupe de rats co-exposés aux deux produits.
Les effets de mort cellulaire et les effets histopathologiques au
niveau du foie étaient également accentués par la co-exposition
à l’arsenic et au dichlorvos avec des modifications dégénératives
plus sévères du parenchyme hépatique. Cette co-exposition a
également engendré une légère baisse de la concentration de
l’arsenic au niveau du cerveau et une faible augmentation de
cette concentration au niveau du foie. Ces variations seraient
dues à la formation de complexes arsenic-dichlorovos entrainant
une accumulation du métal au niveau du foie.
L’étude de la concentration de neurotransmetteurs a montré une
diminution des taux de noradrénaline et de dopamine suite à
l’exposition à l’un ou l’autre des deux polluants. Cette diminution
était moins importante dans le cas de co-exposition aux deux
produits.
Commentaire
Cette étude a mis en évidence des effets toxiques synergiques13
de l’arsenic et du dichlorvos se traduisant par un effet de stress
oxydant plus important et des altérations histopathologiques
plus prononcées au niveau du foie des rats co-exposés.
Elle a également mis en exergue des effets antagonistes14
liés à cette co-exposition par rapport à la concentration de
neurotransmetteurs. Elle présente l’avantage d’avoir étudié un
grand nombre de paramètres biochimiques du stress oxydant
et des mécanismes de détoxification en relation, ainsi que les
paramètres neurobiologiques et les examens histopathologiques.
Cependant, une dose unique de chacun des composés a été
utilisée ce qui limite l’interprétation des résultats. Cette limite est
confirmée par les faibles variations des concentrations d’arsenic
trouvées au niveau du cerveau des rats exposés simultanément
aux deux composés et qui étaient significatifs dans une
précédente étude utilisant des doses différentes (7). Egalement,
l’administration de l’arsenic a été faite par la voie orale alors que
le dichlorvos a été administré par injection sous-cutanée. Les
auteurs justifient ce choix par le fait qu’ils voulaient éviter les
interactions des composés au niveau du tractus gastro-intestinal
et par le fait que l’absorption des pesticides se fait le plus souvent
par la voie cutanée et l’arsenic par la voie orale. Or, en dehors
des secteurs professionnels concernés, l’exposition humaine
aux deux toxiques se fait généralement via l’alimentation et par
conséquent par la voie orale.
Conclusion générale
Ces publications contribuent à la connaissance des
effets liés à l’exposition simultanée aux métaux lourds
et aux produits organochlorés et organophosphorés,
contaminants toxiques ubiquitaires dans notre
environnement� Elles mettent en évidence des
interactions qui peuvent se traduire aussi bien par des
effets de synergie que par des actions antagonistes� Ces
effets dépendent évidemment de la nature des produits
en mélange, mais également des doses administrées et
de la durée d’exposition et par conséquent du niveau
d’exposition� Les propriétés toxicologiques individuelles
de ces composés sont généralement bien documentées�
Ces deux études montrent l’intérêt qui doit être accordé
aux études des effets combinés et l’impact qu’elles
peuvent avoir sur l’évaluation des risques�
27
Anses • Bulletin de veille scientifique n° 22 • Santé / Environnement / Travail • Décembre 2013
Agents chimiques