ALLEMAGNE-FRANCE : DEUX PROFILS DÉMOGRAPHIQUES DISSEMBLABLES Gérard-François Dumont To cite this version: Gérard-François Dumont. ALLEMAGNE-FRANCE : DEUX PROFILS DÉMOGRAPHIQUES DISSEMBLABLES. Panoramiques, 2001, pp.102-107. <halshs-01145712> HAL Id: halshs-01145712 https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01145712 Submitted on 25 Apr 2015 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of scientific research documents, whether they are published or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Rythmes et Çomportements diffèrent fro.* \ A(&r\df ^s-: dén c eux profils ffaphiques em b l a b l es par Gérard-FrançoisDumont Deux profils démographiquesdissemblable s L' antérioritéfranç5 aise de Ia dénatatité 36,3 millions en 1850, soit une haussede combiné de la guerre de 1870 et des comportementsmalthusiens. _ Après les années1870,la populationde la France tend vers la stagnati-on;le taux net de reproduction devient même inférieur à l'unité dans les années 1890, la fécondité n'étant plus suffisantepour permettrele simple remplacementdes généràtions.La population continuenéanmoinsà augmentergrâce à I'immigration et à une baisseiie la mortalité aussi rapide, et parfo_isplus, que chez nos voisins européens. L'exceptiôn française d'une baisse précoce de là fécondité est encoreplu_snette à la fin du xrx. siècle,parce que la diminution de la fécondité s'y I poursuit. Du quences.Suivent des périodesde croissance, avec les années1816-1825,coffespondantà la Restaurationet 184l-1845, lôrs de la Monarchie de Juillet. Pour I'ensemblede la période 1815-1845,la France connaît une croissance faible par rapport aux autres populationseqropéehnes; mais elle est régulière, à un rytlrme qui, s'il s'était poursui-vi, aurait entraîné une France de 50 -à 55 millions d'habitantsvers l9l0-1915. Dans le même temps, de 1800 à 1850, la popjlation de I'Allémagne augmente de 53 7o, passantde 22 à 3IJ millions d'habitants, et approche celle de la France. Cette différence de rythme provienr de la stabilité de la féconditéallemande,tandis que la mortalité baisse. L'Allem&gne dépassela France Congrès de Vienne à 1870, la tants. Les mêmes évolutions se prolongeant jusqu'à la fin du xIX" siècle,les écartsseéreusent : 56 millions d'habitants en Allemagne en 1900, 40,5 millions en France. 103 France-Allemagne : un tandem en panne ? seulement.Ces évolutions dissemblablesont des conséquenceséconomiquesimportantes, I' attitude malthusiennefrançaise s'opposant au progrès technique. Les deux guerres mondiales Au tournantdu xx'siècle, la féconditéallemande commence à fléchir et le maintien du dynamisme éconbmique nécessite I'immigration ta4dis que l'émigration décline. La première moitié du xx" sièble accentue en 1900. Pourtant, les facteurs qui auraient pu permettre, pendant ce demi-siècle, une haussefrançaiseplus nette sont nombreux : abaissementdu taux de mortalité infantile ; augmentationde I'espérancede vie ; fécondité rehausséepour la période 1946-1950,à des niveaux jamais enregistrés depuis le début du siècle, avec près de 3 enfants par femme. Mais la premièremoitié du xx. siècleeffegistre égalementI'effet des guerres.Pour la France, la première guerre mondiale représente 1 345 000 morts et cinq années (1915-1919)de classescreuses.En outre, . comme celles-ci ont des comportementsde faible fécondité,les décèsI'emportent sur les naissancesde 1935 à 1939; ce déficit s'accentueavec la guerre en 1940 et 1941, même s'il se réduit dès 1942 et plus encore en 1943 grâce à la remontéede la fécondité. A cela s'ajoutent les morts de la seconde guerre mondiale. En définitive, la stagnationde la population de la France de 1900 à 1950 airaït été totale sansI'excédentnatureldes annéespostérieures à la secondeguerre mondiale,-soit environ 300 000 par an. Le solde migratoire positif et les progrèsde la lutte contrela mortalité ont été gomméspar les chocsdémographiquesdesdeux gueneset par une fécondité faible. T.'Allemagne enregistre également les effets démographiques négatifs des deux guerres mondiales. Mais elle profite des effets de vitesse acquise si importants en 104 démographieet d'une évolution plus favorable qui expliquent une progressionde 2l Vo en cinquante ans. Sa population atteint 68 millions en 1950,soit 26 millions de plus que la France. Des soldes naturels de sens inverse Pendant la seconde moitié du xx" siècle, l'écart Allemagne-France se réduit et les deux pays connaissentà nouveau des évolutions différentes. La France enregistre un meilleur mouvement naturel puisque son taux d'accroissementest devenu constamment positif, même s'il s'abaissede 6,5 pour mille dans les années1950 à 3,7 pour mille dans les années1990. Elle connaît en outre d'importants apportsmigratoires.C' est pourquoi, la sesondemoitié du xx. siècle se présente en rupture complète avec la stagnation des quarante-cinqpremièresannéesdu siècle et la population de la France (métropole) passede 47,8 millions d'habitantsen 1950 à 58,4 millions au recensement de 1999 (+ 40 7o). L'évolution allemande est nettementplus heurtée. Les effets du renouveau démographique de I'après-guerre,auxquels s'pjoute un solde migratoire positif (notamment avec l'immigration turque), permettentune croissance de la population, à un rythme qui se ralentit progressivementde 1950 à 1974. dité qui entraînefun solde naturel négatif désormaispermaneirrdepuis 1972.La bàisse de la population de I'Allemagne des années 1975-1978 est suivie d'une légère reprise jusqu'en 1981 sousI'effet de la remontéede la fécondité dans la partie Est. Puis la population diminue à nouveaujusqu'en 1985 où elle tombe à moins de78 millions. Une nette reprise démographique est alors provoquée par I'implosion soviétique qui voit I'arrivée desAassiedler,ressortissantsde soucheallemande, considérés comme citoyens allemands aux termes de la loi fondamentale de 1949: ils viennent de Pologne, de Tchécoslovaquie, de Hongrie, de Yougoslavie, ou Deux profils démographiques dissemblable s L'évolution des populations de I'Allemagne et de la France depuis 1800 (territoire actuel) 82500 80000 nffi 25000 72ffi æ 000 67ffi 650m 62500 60000 s7500 55000 52500 50000 47W0 45000 42 500 40000 37ffi 35000 32500 30000 27sffi 25000 22500 20000 17500 15000 12500 10000 7 500 5 000 25m 0 a28æ- de -population I'Allernagne (milliers d'habitants) de la --,FPoPulation France (milliers d'habitants) Ë E EE E EE E E EF La Francerestepluspeupléejusqu'aumilieudesannées1860, puisI'Allemagnedevientplusimportante. Chiftes Hubert, puis Euroct* 105 France-Allemagne : Janine SOULLIE Chroniques économiques, n'4. 15 avril 1995. d'URSS. Pour les seules années 1989 et 1990, on en compte 737 000. A ce mouvement migratoire exceptionnel s'ajoutent les exodes yougoslaves.Au tournant du millénaire, I'Allemagne compte 82 millions d'habitants. Le bilan de la secondemoitié du xx" siècle est donc plus favorable à la France, même si les deux grands pays d'Europe occidèntale connaissentune accentuationdu vieillissement qui sera,très certainement,l'évolution majeure du xxr siècle. Les rythmes démographiquesde la France et de I'Allemagne ont donc continuéde diverger depuisles années1960.La Francea enregistré des évolutions naturelle et migratoire. relativementrégulièressi I'on exceptele pic desrapatriésd'Algérie en 1962.En revanche, l'évolution migratoire allemande s'est trouvée considérablementheurtéeen raison des événementset plus particulièrementde l'évolution de I'Europe médianeet orientale. I*s dffirences de peuplement D'autres grandes différences proviennent du peuplement,des différencesde densitéset de I'armature urbBine.Cette dernière s'explique par desdivergencespolitiquesanciennes. La France centraliséea longtemps donné une 106 prime à sa capitalepolitique dont I'agglomération domine les hiérarchies urbaines.Elle pèse 9,6 millions d'individus tandis que les ileuxième, troisième et quatrième agglomérations françaises(Lyon, Marseille et Lille) se situent entre I et 1,3 million : la capitale démographique de la France est -en même temps capitale politique et écongmique. En revanche,I'Allemagne dispose d'une hiérarchie urbaine différente. La principale quatrième agglomératipns allemandes sont RtrinlRutr-D'ii-sseldorf,'., ave€ 2,5 millions d'habitants, et Rhin/Ruhr-Cologne, ayec 2,2 millions. Viennent ensuite la ville-Etat (Stadtstaat) de Hambourg (2,1 millions d'habitants) et la Bavière, Mtinich (1,6 million). Stagnation et décroissance Certainesdivergencesd'évolution entre la Franceet I'Allemagne sont donc directement dépendantesdes contextespolitique et géopolitiqu-e.D'autres demandentde prendreen Deux profils démographiquesdissemblables mariageen France,pourcentagele plus élevé d'Europe occidentale,contre-18E; à I'Allemagne.En matière de divorce, selon I'indice synthétique,,la France(39 divorcespour cent mariages)devanceI'Allem4gne (32). l'Europe. Au regardde leurs populations,les divergencesen matièrede comportementsde fécondité ou de nuptialité doivènt être soulignées.Ainsi leur soldesnaturelssont de sens inverse et les rythmes de vieillissement des populationssont différents. L'histoire ne donnepasd'exemplede pays en perte.de vitalité démographique cap-able d'avancéessignificatives.ûnè eîtemagïe et une France s-'appauvrissant démographiquement sont-elles vraiment capablesd impulser, pour le xxr siècle, une évolution plggressistede I'Europe et de la place de l'Europe dans le monde ? Gérard-François DUMONT l. Pour la période 1850-1930,l'émigration allemande est estimée à 9,8 millions de personnes. d'inertie et d'une féconditémoinsbasse,pourrait compter 59,9 millions d'habitant-s en 2050,un chiffre équivalenrà celui de 2000. La démographieconduit à s'interroger sur -la complérnentarité et sur I'efficacité du couple franco-allemand pour I'avenir de Le Monde, 1" février 20S1 r07