HISTOIRE DES ANCIENS PAYS-BAS

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HISTOIREDESANCIENSPAYS-BAS
MICHÈLEGALANDHIST-B-205
01JANVIER2016
JulietteRenardBa1Histoire
Introduction
1. LesPays-BassousCharlesQuin
C'estl’expansionmaximaledesPays-Bas.Maiscesterritoiresn'ont
jamais porté ce nom (à l’époque) étant donné le fait qu'aucune
province n'aurait accepté d'être considérée sous une même
appellationquelesautres1.
LesPays-Basontsubiuneévolutiongéographiqueimportanteet
certains territoires intérieurs n'en faisaient en fait pas partie
commePrincipautédeLiègeindépendante.
Le territoire des Pays-Bas de l'époque ne correspond pas aux
Pays-BasautelsniauBenelux.Certainsnomsquidésignentdes
provinces actuelles ne désignent pas exactement ce qu'ils
recouvrentàl’époque:
-ComtédeFlandre2oulesFlandres:±FlandresOrientaleetOccidentaleactuelles
-DuchédeBrabantbienplusgrandqueleBrabantactuel
-ComtédeLuxembourg:≠Grand-DuchéduLuxembourgactuel
LesPays-Bassontpluriels3,ilssontl’héritaged'unesériedepaysmédiévauxquiontétérassembléssousla
tutelled'unmêmeprince,élémentfédérateurettitulairedenombreuxtitrescorrespondantauxprovinces
(comte de Flandre, duc de Brabant...). Ces princes sont donc souverains de chacune des parties qui
composentlesPays-BasetnonleRoidesPays-Bas.
1
Onlesappelait«les17provinces»;«lesprovincesBelgique»...
e
2
ÀlaformationdesP-B(15 s.)laFlandreesttrèsprospèreettrèsurbanisée(commel’ItalieduNord,cesdeuxrégionssont
atypiquespourl’époque).OnparleparfoisdesFlandrespourdésignerlesPays-Bas,Marie-Thérèseparledes“flamands“pour
désignerleshabitantsdesPays-Bas.
3
Aucunsouverainn’ajamaisréussisàlesunifier
2
2. LesProvincesUniesetlesPays-Basespagnols
Les guerres de religion : le conflit religieux en Europe c’est
transforméenconflitpolitique.LesouverainàlatêtedesPays-Bas
étaitcatholiquemaissesrégionssontgagnéesparlecalvinisme.La
RéformeestempêchéeparCharlesQuinetPhilippeIIquiprennent
des mesures répressives très fortes. Ces mesures seront
considéréescommeunattaqueetlecalvinismeprenddeplusen
plusd’ampleurcequimèneàunerévolution(guerrede80ansoù
lepeuplen’accepteplusl’autoritédusouverain).En1648,untraité
consacrelareconnaissanceparl’Espagnedel’indépendancedela
République des Provinces-Unies au nord, le sud continue à
s'appelerPays-Bas(espagnols).
Le nord va connaître une vie autonome brillante au 17e siècle, s'érigeant comme l'une des principales
puissancesmondiales.LarichessedesProvinces-Uniesestlamer(thalassocratie4)etcelaleurpermetde
selancerdanslecommercecolonial.
Leshollandaisaurontd’aborddescomptoirsenAfrique,puisreprendrontdescomptoirsportugais(Indes)
puis arriveront au Japon où ils auront le monopole du commerce avec les japonais. Ils iront également
s’installerenAmériqueduSudetduNord(ex.NewYork).
Le roi espagnol ne dirige plus que le sud des Pays-Bas. La Principauté de Liège ne fait toujours partie
d'aucuneentité,pasplusquelaPrincipautédeStavelotouleDuchédeBouillon.
L'histoire des Pays-Bas est étroitement liée à l'histoire de l'Europe étant donné que les souverains
exercentleurautoritésurdesterritoiresgéographiquementtrèséloignés(Mexique,Espagne,Pays-Bas...)
depuisleurcapitale.Lemoyendecommunicationleplusrapideestlecheval,cequiallongelesdélaisde
communicationetrendbienplusdifficilequ'aujourd'huilagestiondepossessionssiéloignées.
4
Étatdontlapuissancerésidedanslasuprématiequ’ilasurlamer
3
3. LesPays-Basautrichiens
Ladeuxièmemoitiédu17eesttrèsdifficile
pour ces territoires. On parle de siècle de
malheurcarbeaucoupdesconflitsopposant
la France et l’Espagne ont lieu sur les
territoires des Pays-Bas (conséquences
ravages de guerres et réduction de
territoire).Àlamêmepériode,lesProvincesUnies sont à leur âge d’or (période
d'expansion).
LesPays-Basdeviennentautrichienssuiteàlaguerredesuccessiond’Espagne(18es.).Ilsprennentlenom
dePays-Basautrichiens,maissontaussiappelésPays-BasouProvincesBelgique.LetermeBelgique(utilisé
depuisJulesCésar)revientdeplusenplussouvent.LorsdelaRévolutionbrabançonnede1789,avecle
duchédeBrabantàsatête,lepeuplechoisitlenomd’ÉtatBelgiqueunis.
4. AnnexionàlaFrance,RoyaumedesPays-Bas,indépendancedelaBelgique
En1794,lesanciensterritoiresautrichienssontenvahisparlesfrançaispourconstituerdesdépartements
delanouvelleRépubliquefrançaise.Ilsprirentlenomdedépartementsfrançaisetneportaientpluslenom
deprovinces(Brabant,etc.).LesfrançaisprennentégalementlaPrincipautédeLiège,etessayentdefaire
table rase du passé, ce qui est difficile à cause des populations locales. Les territoires restent français
jusqu’àlachutedeNapoléonen1815.
4
OncréealorsleRoyaumedesPays-Bas(±Beneluxactuel)
et on reprend les noms des anciennes provinces et
principautés.LeterritoirecorrespondauBenelux.
LaBelgiquevasedétacherdeceroyaumeen1830etc'est
lapartienordquiprendraalorslenomdePays-Bas.
OnremarqueégalementquelesPays-Bassontplusurbanisésetpluspeuplésquelerestedel’Europe.Ily
auncommerceetuneproductionartisanaledansetentrelesvilles.
5
Une«nationbelge»?
JeanStengers(1922-2002):
«Lanation,jusqu’àlafinduXVIIIesiècle,estnéedel’État.Leprocessus,fondamentalement,esttoujoursle
même : la vie au sein d’un même cadre politique, la solidarité dans les jours heureux et dans les jours
difficiles,créentchezlespopulationsgroupéesdansunmêmeÉtatlesentimentd’unedestinéecommune.À
forcedevivreencommun,onfinitparseconsidérer,parsesentirlesmembresd’unemêmefamillehumaine.
Lesvieillesnationseuropéennesn’ontpasd’autreorigine.»
àIlexpliquelemoteurdelaformationd’unétat:àforcedevivreencommun,onfinitparsesentirune
origine,unefamille.Cesontlescontoursdel’état,leurconfigurationetleurapparitionauprèsdupeuple,
quifontlesentimentdenationdanslapopulation
àL’Étatfluctue,etlesentimentnationalaussi.
Notiondecitoyen?
Le statut de citoyen n’était pas présent à l’époque, car l’exercice du pouvoir n’était pas partagé,
contrairementàaujourd’hui,dansladémocratie.
Lalangueestunvecteurd’unitédesterritoiresmaisàl’époque,cen’étaitpasunvecteurd’unificationsous
unétat.Parcontre,lesrèglesenétaientun,etlareligionautoriséeégalement5.
Formationdel’Étatmoderne
L’Étatmoderneestunestructurepluslégèrequ'aujourd'huietlesfacteursd'unitéensont
-
leprince,auquelaudoitfidélité,
-
lesorganesreprésentatifs,
-
l'impôt
-
laguerre
JeanStengers:
« Dire que jusqu’à la fin de l’Ancien Régime, les nations sont nées des États, a pour corollaire que les
modificationsdelacartepolitiqueeuropéennepouvaientprovoquer,auboutd’uncertaintempsplusou
moins long, un regroupement correspondant à des communautés nationales. Passer d’un État à l’autre,
d’unesolidaritépolitiqueàuneautre,delafidélitéàunprinceàl’obéissanceàunautreprince,entraîne
aussisouventlepassaged’unenationàuneautre.»
Cen’estdoncpasparhasardquelesconflitstournaientautourdelareligion.
5
6
«L’onamisunestandartoubannièrebiengrande,toutausommetdelaTourredeSaint-Étienne,avecla
CroixdeBourgogneaumilieu,pourfairesavoirauxennemisquenousavonsencoredescœursEspagnolsou
BourguignonsetnonpasFrançais.»
àLesentimentnationaldel'époqueconstitueunvéritablemystèreaujourd'hui:certainsbasculentd'une
nationàuneautreenpassantd'unsouverainàunautre.
Lilleparexemple,s'affirmaitespagnoleoubourguignonnelorsquelestroupesdeLouisXIVl'assiégeaienten
1667.20ansaprès,leshabitantsontacceptéleurnouvelleidentitéetsedirontfrançais.Ilyauneadaptation
àl’autorité
a
SébastienDubois:
«Peut-onparlerdeBelgiqueavant1830,sousl’AncienRégime?Seshabitantsont-ilsconscienced’habiter
unpaysainsinommé?Etsic’estlecas,quellereprésentations’enfont-ils?Existe-t-ilauXVIIIesiècleun
sentimentnationalpopulaire,unsentimentd’appartenanceàceterritoire?[...]sinousconsidéronslanation
comme un peuple éprouvant le sentiment d’une identité commune, ayant une conscience nationale, je
m’empresseraisd’ajouteraussitôtquecettequestionestàvraidiremalposée:celarevienteneffetàvouloir
jugerlepasséenfonctiondecatégoriesd’unautreâge.»
Ilposelaquestiondel'existencedelaBelgiqueavant1830:seshabitantsont-ilsconscienced'habiterun
paysainsinommé?Cettequestionn'apasvraimentdesensetelleestunanachronismesionlatraiteavec
ladéfinitionactuelledelanation,onposenoscritèresactuelsaupassé.
Pourcomprendrelasituationdel’époqueilfautretournerauxtextesdel’époque.
EncyclopédiedeDiderotetd'Alembert
L’Encyclopédiedéfinitlanationcommelapopulationd’unÉtatensachantqu'onestsouslatutelled'un
Prince:«unequantitéconsidérabledepeuple,quihabiteunecertaineétenduedepays,renferméedans
certaineslimites,etquiobéitaumêmegouvernement»
Lesmarquesdelasouveraineté:
-
ledroitdelaguerre:ilaledroitdefairelaguerrecarlasouverainetéluiestreconnue;ildoitprotéger
lanation
-
lesimpôts:donnentlesentimentdefairepartiedelamêmepopulationsoumiseauxmêmeslois
-
lerespectetlapublicationdeslois:ilyavaitbeaucoupd'analphabètes,lasouverainetédesloisse
montraitparl’oralité(luesàtous)
-
lajustice:c'estégalementlesignedumaintiendel'ordredévoluausouverain.
-
lesondescloches:dansunesociétéoùlemoyendelocomotionleplusrapideestlechevaletoùilfaut
plusieursjourspourtransporterunmessage,onutiliselesclochespourtransmettrelesbons(victoire
7
militaire) ou les mauvais (catastrophes) moments. Sous l'Ancien Régime, religion et État sont
étroitementliés.
-
les Te Deum et prières pour le Prince : lorsqu'il est malade ou pour ses funérailles. Ces nouvelles
traversent le pays très vite (une semaine à l’époque, quand le message arrivait à Bruxelles toute la
population était prévenue rapidement par l’utilisation de messagers). On organisait des prières
publiques dans l'ensemble des territoires qu'il administrait. C'est un autre moyen de toucher les
populations.
Lesouverainesttrèséloignéetlamajoritédelapopulationneleverraenfaitjamaismaiselleestconsciente
desonautoritécarelleesttouchéeparcelle-ciauquotidien.
→Parlerdepatriotismeetdenationalismeàl’époquemoderneconstitueraitdoncunnon-sens.Maison
peuttenterd’étudierdansquellescirconstanceshistoriques(politiquesmaisaussisocio-culturelles)ces
conceptssontapparus
→Celasupposeaussides’interrogersurlesniveauxdeculture,jusqu’oùcesconceptsont-ilspénétréla
population?Quelledifférenceentreculturepopulaireetculturedesélite
Lanationbelge,discoursprononcéparHenriPirenne6le1eroctobre1899
«LacréationdesPays-Basbourguignonsaétéfavorisée,disons-letoutdesuite,parlesconditionsgénérales
delapolitiqueeuropéenneàlafinduMoyenÂge.Sansl’affaiblissementdelaFranceparlaguerredeCent
Ans,sansl’impuissancedel’AllemagnesouslesceptredelamaisondeLuxembourg,l’œuvreaccompliepar
PhilippeleBoneutsansdouteétéimpossible.Etpourtant,iln’enrestepasmoinsvraique,depuisdessiècles,
lesdifférentesprovincesféodalesdelarivedroiteetdelarivegauchedel’Escauttendaientinconsciemment
àl’unité.LamaisondeBourgognen’afaitquerecueillirlesrésultatsd’untravailcommencébienavantelle.
Cequ’elleaaccomplin’estpasl’œuvreduhasard.»
«SiellearéuninosdiversterritoiresenunÉtatcommun,c’estparcequeceux-cipossédaientdelonguedate
unecivilisationcommune.Ilsformaient,endépitdubilinguismeetdumorcellementpolitique,uneseule
régiondecultureintellectuelle,commedesolidaritééconomique(...).Parexceptionàlarèglegénérale,notre
civilisation,aulieudes’élaborerdansuncadrepolitiquepréexistant,s’estdégagéetoutd’abord,avantde
recevoirensuitelaconsécrationpolitique.Ailleurs,l’Étataétésouventlacaused’unevienationalepropre;
cheznous,ilsembleenavoirétélerésultat.»
àIlditqu’avantlacréationdesPays-Basbourguignons,unetendance,unevolontédesejoindreexistait
déjà.Pournosrégions,c’estlacivilisationcommunequipréexisteàl’étatetc’estuneexception.
6
Henri Pirenne (1862-1935) est un historien belge qui se démarque de l’histoire factuelle et se rapproche de l’histoire
économique et sociale. Il essaie d’expliquer les faits. Dans sa thèse, fait un discours sur la nation belge dans le cadre sur
l’historiographieetlapolitiquebelge.
8
JeanStengersremetencausecetteidée
L’analysedeJeanStengers:Civilisationnationale?
«Lacivilisationdespuissantescitésmédiévalesdenosrégions–desgrandesvillesflamandes,maisaussi,en
Brabant,deLouvainetdeBruxelles,enyajoutantTournaietValenciennes–aconstituédetouteévidence
unecivilisationoriginale,oùlavoixdesmonuments–desbeffrois,deshalles,deshôtelsdeville–est,àelle
seuleparlante.SouslaplumedePirenne,lestraitsdecettecivilisationurbaineressortentmagnifiquement–
maisilssontbienloindecaractériser,celaestclair,lesPays-Basdansleurensemble.»«Dansl’éparpillement
territorialdelafinduMoyenÂge,danslechaosdesalliances,desguerres,destrêves,desantagonismeset
desrapprochementsentreprincipautés,aucunelignedirectricenesedessinequiannonceleregroupement
territorialdel’Étatbourguignon.Lesvirtualitésderegroupementsterritoriaux,àvraidire,étaientmultiples,
etaucunenes’imposaitplusquelesautres.Loinquel’œuvredesducsdeBourgogneaitétéunaboutissement,
commelevoulaitPirenne,elleaétéunpointdedépart.»
Selonlui,larégionestspécifiquecarelleestforteurbaniséemaislesPays-Bassontplusquecela,parler
seulementdel’urbanisationc’estréducteur,PirenneseconcentreseulementsurlaFlandrevuqu’ilétudiait
laviedesvilles.Pourlui,ilyauraitpuavoird’autresmodèlesquel’urbanisme.
àLeshistoriensn’ontpaslavéritéabsoluecarilsposenttoujourscertainesquestionsàleurssources.Ilya
desthèses,desprisesdeposition,desdébats.
9
L’Étatbourguignon
A. PhilippeleHardi,ducdeBourgogne(1363-1404)
LeduchédeBourgogneétaitadministréparlescapétiensdepuisle11esiècle,jusqu'en1361.Lafamille
l'avait organisé en une très puissante principauté, dans laquelle le pouvoir du duc était incontesté : il
contrôlaitsesvassauxetdisposaitdedomainesétendusauxrevenusélevés(vignes,forêts,viviers).Ellea
réussiàs'imposerdemanièrefortedansleduchéentantquevassauxduroideFrancemaistouts'écroule
lorsqueleducdeBourgogne,PhilippedeRouvre,meurtdelapesteen1361carlorsqu'unedynasties'éteint
sanshéritier,iln'yaplusd’État:leduchérevientàlacouronnequiyétablitungouverneur.
En1363,leroideFranceJeanleBoncèdelaBourgogne,quiasubilapesteetsescatastrophes,àsonplus
jeunefilsPhilippepourlagarderdansl'orbitedelaFrancemaisqu'ellesoitnéanmoinspriseenmain.L’État
développéparlesducsdeBourgognedu14eàlafindu15esièclen'étaitpasunÉtatroyalmaisbienunÉtat
princier,dirigéparPhilippeleHardi.
Ilsecaractérisaitpar:
-
l'existenced'unpouvoirpolitiqueincarnédansunedynastieprincière
-
lacréationd'institutionsadministrativesjudiciaires,financièrespropres
-
l'affirmationd'unediplomatieautonome:c'estunÉtat«indépendant»
10
L'originedelapuissancebourguignonnesetrouvedansuneprincipauté:leduchédeBourgogne.En1363,
Jean le Bon institue donc Philippe le Hardi, son fils cadet, comme duc de Bourgogne, par le biais d'un
apanage7:uneconcessiondebiensimportantsaucadetenéchanged'unerenonciationàlasuccession,pour
privilégierl'aînétoutenfaisantensortequelesautresfilsytrouventleurcompte.Enprincipe,l'apanageest
cédéàtitrehéréditairetantqu'ilyaundescendantmâle.Danslecascontraire,ilretourneàlacouronnede
France.
C’estledéveloppementd’un“nouvel“étatfoncier,onessaiedereconstituerunpouvoirpolitiquestable.Il
est nécessaire d’instaurer une dynastie pour éviter la crise de succession (liée à la population et aux
militaires). Le Prince doit se présenter et faire un contrat de confiance avec la population (vœux
d’obéissance et de protection). Les institutions administratives, financières, militaires et judiciaires
permettentl’autonomiepolitiqueetdynastiqueduprince,mêmes’ilestprocheduroideFrance.
Lesressourcesd’unprinceterritorialàlafinduMoyen-Âge
PhilippeleHardiépouseen1369MargueritedeMale,héritièredescomtésdeFlandreetd'Artoisqu'elle
obtienten1384.Grâceàcemariage,PhilippeleHardiseretrouvealorsàlatêted'unétatplusgrandsous
latutelled’unmêmeprincemêmesilesterritoiressontéloignés.Lagestiondecesterritoiresestcependant
trèscompliquéevulestatutdesprincesitinérantssanscapitalequivoyagentpourasseoirleurautoritésur
cesterritoires.Leprincemédiévalexerceuneautoritédenaturecomplexe:
-
ilestpropriétairefoncier:l'unedespartsdesarichesseestsonpatrimoineimportant;
7
Apanage:Désignelesbiensconcédésauxcadetsdelafamilleroyaleenéchangedeleurrenonciationformelleàlasuccession
paternelledanslesrégionsoùledroitd’aînesselesexcluaientdel’héritage.
11
-
ilestsuzerain:ilestàlatêtedel'édificesocialconstruitdanslecadredelaféodalitéets'appuiesurses
vassaux(avecquiiladeslienspersonnelsdeloyauté-autorité)pourexercersonautorité
ilexercedesdroitsrégaliens:frapperlamonnaie,droitdejustice...Lesprincessecomportentunpeu
commedessouverainsautonomes
ilestleprotecteurdesessujets:ilestàlatêtedel'appareiljudiciaireetassurelapaixenlevantdes
armées,développantdespouvoirsdepoliceetexerçantlepouvoirlégislatif
Puisqu'ilexerceuneautoritédenaturesdiverses,ildisposeégalementderessourcesdenaturesdiverses,
revenusordinairesetextraordinaires.
Sesrevenusordinairespeuventêtrepériodiquesréguliers(ex.boisdeforêt)oupériodiquescasuels(ex.
amende):
-
le domaine : revenus en nature provenant de l'exploitation directe ou indirecte du patrimoine
princier,quiluireviennentparcequ'ilestpropriétaire
lesrevenusd'origineféodaleperçusparleprinceàtitredesuzerain,quiluireviennentdel'autorité
sursesvassaux
lesrevenusprovenantdel'exercicedesdroitsrégaliens:battrelamonnaie,leverdesdroitsde
douanedanslecadredesaprincipautéterritoriale(tonlieu)
les revenus d'origine seigneuriale : revenus en nature ou en espèces provenant des droits de
banalitéetdel'exercicedelajusticeentantqueseigneurparrapportàsessujets.
Guenéeparledelaformationdel’étatau14-15esiècle
«Uneexigencefondamentaledel’opinionpubliqueauxXIVeetXVesièclesestquetoutprincedoitvivre«
dusien»,desondomaine,c’est-à-direderessourcessianciennesettraditionnellesquepersonnenesonge
àluiencontesterlajouissance.Cesressourcestraditionnellessontl’héritagedevicissitudesséculaireset
formentunpêle-mêlededroitsdetoutesnaturesqueleprincesecontentedepercevoirsanssesoucierde
leur origine.» « L’historien moderne peut bien tenter de distinguer droits fonciers, droits seigneuriaux,
droitsféodaux,droitsrégaliens.Leprincemédiévalsecontentaitd’additionnerdansledésordrecequ’il
tiraitdesesterres,desesmoulins,desesforêts,desesétangs,delataillequeluipayaientsespaysans,des
reliefsoudesaidesqueluiversaientsesvassaux,desdroitsdepéagequitouchaientlesbiensencirculation,
destaxesdetonlieuquifrappaientlesmarchandises,surtoutlesgrainsetlesvins,venduesenboutiqueou
aumarché,desamendesinfligéesparsestribunaux,desmonnaiesfabriquéesparsesateliers,etdesmines
exploitéessursonterritoire.»
àToutprincemédiévaldoitvivredu“sien“,desonpatrimoine,êtreautosuffisantgrâceàdesressources
traditionnellesperçues(sansréellementconnaîtreleurorigine)quisontincontestables.
Les princes ne peuvent pas toujours “vivre du sien”8, il faut donc créer de nouvelles ressources9 : les
revenusextraordinaires.
8
Lesbesoinsd’argentssontsurtoutpendantlesconflitsmilitaires(quisontdesmomentsd’affaiblissementpourleprince.Les
empruntssontunesortedepartagedupouvoiraveclespluspuissants,carlescréanciersengagentleurfortuneetondoncun
rôlededécision.
e
9
Celavasemettreenplaceprogressivement,carà partir du 14 les dépenses des princes dépassent les revenus ordinaires
(dépensesmilitaires,administratives,d’apparat,somptuaire…)
12
-
-
-
les aides : subsides d'origine féodale levés par le prince avec le consentement de ses sujetset
réclamés initialement dans des cas bien précis (mariage de la fille aînée, réception du fils aîné
commechevalier,croisadeourançonduseigneur).Cesaidesautrefoisponctuellesdeviennentplus
fréquentesaufilduMoyenÂge;
l'engagère : cession à un créancier en échange d'une somme reçue en prêt, de la jouissance
effectived'unbienoud'unrevenu.L'engagèrediffèredel'hypothèque,carlenu-propriétaireperd
l'usufruitdubiendonnéengage10
les droits de douane, taxe sur les marchandises entrantes et sortantes, ce qui suppose une
administrationsetuncontrôledesfluxdemarchandises,difficileàmettreenplace.
Ilestimportant,sil'onveutêtrepuissant,d'êtrericheetdedisposerderessourcespropres.PhilippeleHardi
sera,malgrétoutessespossessions,incapablede“vivredusien“.Sesrevenusdomaniauxtrèsélevéssont
insuffisantspourassurersontraindevie:dépensesdeprestige,vêtements,festins,voyages,châteauxetc.
(nécessairespourmontrersarichesse).Ilfallaitseprocurer,enplusdesrevenusordinaires,desrevenus
extraordinaires.IlfallaitdoncdévelopperunefiscalitépropredanscenouvelÉtatetrecouriràl’impôt.
Onpasseduprinceterritorialricheàlamisesurpiedd’unétatreposantsurlesressourcesprélevéessurla
population. C’est donc un moyen de cohésion de la population supplémentaire.
10
=sorted’emprunt/prêtd’unbienetdesonusufruitletempsdel’emprunt(ex.GodefroiddeBouillonn’ajamaisreprissonduché)
13
EnreconstituantlescomptesdePhilippeleHardiavantetaprèssonmariage,onconstatel'importancedu
mariageetdel'acquisitiondescomtésdeFlandreetd'Artois.CetÉtatn'estdéjàplusceluid'unprincequi
vitdusien.
B. Leregroupementbourguignon
ToutcommenceaveclacessiondelaBourgogneàPhilippeleHardipuisaveclemariagedecedernieràla
comtessedeFlandreetd'Artois.L'unionpermetdeconstituerdesétatsquinaissentaugrédecechoix.Ils
eurent10enfantsdont7atteignirentl'âgeadulte,cequiestexceptionneltantparlefaitquelamèrea
survécu à 10 accouchements mais aussi car 7 d'entre eux vécurent jusqu'à l'âge adulte, même s'ils
appartenaientàunefamillenoble(quelesmaladiesn’épargnentpas).
Cesenfantsdoiventtousêtredotés,etpourcefaire,leursparentsessaierontdeleurnégocierdebons
mariages.➝Jean(°1371)-Marguerite(°1374)-Catherine(°1378)-Bonne(°1379)-Antoine(°1384)-
Marie(°1386)-Philippe(°1389)
Unepolitiquematrimonialeetderapprochementspolitiquesontpermisdenouerdesalliancesprofitables.
EncequiconcernelesPays-Bas,onconstateunrapprochementavecleHainautetlaHollande-Zélandepar
undoublemariageentreJean(sanspeur),comtedeNeversetMargueritedeBavière(princessehainuyère)
ainsiqueceluideMargueritedeBourgogneavecGuillaumedeBavière.Ils'agitévidemmentd'unetentative
decréerdeslienspolitiquesaveclafamilledeBavière.
UnrapprochementavecleBrabantetleLimbourgaégalementlieu.JeanneduchessedeBrabant,sans
enfant,estveuvedeWenceslasdeLuxembourgdepuis1382.ElleestlatantedeMargueritedeMale,etva
céderleduchédeLimbourgauducdeBourgogneen1396pouréviterunecrisedesuccession,cequivaut
mieuxpourleshabitantsplutôtqued'êtresoumisauxconvoitisesdesprétendantsàlamortdecelle-ci.Elle
reconnaîtMargueritedeMalecommel'héritièreduduchédeBrabanten1401maiscelle-cineprendpas
directementpossessionduBrabant-Limbourgpouréviterqueseshabitantsnesententavalésparlecomté
deFlandre:PhilippeleHarditientcomptedesparticularismesetn'agitpasdansl'optiquedeconstruireun
14
grandétatmaisplutôtdanscellededoterlesenfants.LescomtésrestentdoncautonomesetAntoinede
Bourgogneestdésignécommel'héritieretdeviendraducdeBrabantetduLimbourg.LeBrabantetle
Limbourgnesetouchentpasmaissontdésormaissousl’autoritédumêmeprince.
Grâce à ces mariages, Philippe le Hardi et Marguerite de Male sont parvenus à obtenir des territoires
prochesd'euxsanspourautantlesavaler.Ilsdoiventcependantcontinueràdoterlesenfantsàtraversun
projet de partage entre Jean de Bourgogne, Antoine de Bourgogne et Philippe de Bourgogne. La
fragmentationunenouvellepreuvedelanon-volontéd'extension.
15
1401:
Projet de partage entre
Jean de Bourgogne
!
duché Bourgogne
comté de Bourgogne
comté de Flandre
comté d’Artois
Antoine de Bourgogne
!
duché de Brabant
duché de Limbourg
Philippe de Bourgogne
!
comté de Nevers
comté de Rethel
PhilippeleHardidécèdeen1404etsesterresreviennentàJeansansPeurdurantlaGuerrede100ans.
Pendantcetteguerre,lesducsdeBourgognesonttrèsprochesdelaFrancemaisvontnouerdesalliances
aveclesAnglais,cequiprovoqueraunefractureentreleRoyaumedeFranceetlaBourgogne.Jeansans
Peurn'estpasdansunepolitiqued'extensionmaisestplutôtimpliquédanslapolitiqueàlacourdeFrance.
JeanIVdeBrabant,PhilippedeSaint-Pol,enfantsd'Antoine,etJacquelinedeBavière,filledeMarguerite
deBourgogne,n'eurentaucunedescendance.PhilippeleBon,héritierdeJeansansPeur,auradoncun
regardobliqueversleleLimbourg,laHollandeetleHainautàlamortdesescousinsetseral'initiateurde
l'unionentrecesterritoires.
Il est devenu duc de Bourgogne en 1419 suite au décès brutal de son père assassiné (probablement
commanditéparleroideFrance).LaBourgognedevientpetitàpetithostileàlaFrance,alorsqu'elleavait
étéautrefoisconstituéeparelle.PhilippeleBonchercheréellementàconstituerunÉtatbourguignon.
16
FormationdesPays-BasbourguignonssousPhilippeleBon
PhilippeleBonachètelecomté
de Namur à un comte sans
enfant en 1429, puis prend
possession de l'héritage du
Brabant et du Limbourg en
1430aumomentoùiln'yaplus
dedescendantspourlesdiriger.
L'autorité du Prince doit être
acceptée par la population à
traversuncontratquiconstitue
unpremierlienentreluietses
citoyens. Celui-ci est négocié
dans
une
assemblée
rassemblantlesgroupeslesplus
influents(clergé,noblesse)pour
discuter de l'impôt etc. (même
sil'onestpasdutoutdansune
démocratie). Les habitants
acceptentcettesuccessionmaisveulentgarderleurautonomie.
Par commodité on parle
désormais des Pays-Bas
bourguignons,
car
dépendentdelamaisonde
Bourgogne
d’autres
duchés/comtés.LeDucde
Bourgogne ne considère
pluslaFrancecommeson
alliénaturel,c’estledébut
del’indépendance.
17
L'étape suivante, bien plus
difficile,estdes'emparerdu
Hainaut, de la Hollande et
de la Zélande. La princesse
Jacqueline de Bavière,
emprisonnée par Philippe le
Bon, va être forcée en 1433
de donner ces territoires à
son cousin pour s'être mise
enguerrecontrelui.
Il fait ensuite l'acquisition de la
Picardieparladiplomatie:ilprend
possessiondeterritoirescédéspar
le roi de France lors du Traité
d'Arras (1435), qui réconcilie la
famille de Bourgogne avec la
couronne française. Le roi de
France,CharlesVII,tendàstabiliser
sasituationetreprendrel'offensive
contre les Anglais et cherche à
obtenirlafaveurd'unalliépotentiel
aux frontières du conflit. Au lieu
d'unpaiementfiduciaire,ilcèdeun
territoire pour monter l'alliance
avecPhilippeleBon.
18
LePrinceparvientàobteniren1443le
duché de Luxembourg, que la
PrincessedeGörlitz,veuved'Antoine
de Bourgogne, possède sans avoir
d'enfant.PhilippeleBonfaitpression
surelleavecpourargumentsesliens
desangavecsonancienépoux.Ilest
préférablepourleLuxembourgdese
retrouver dans l'orbite de l’État
Bourguignon mais les assemblées du
Luxembourg refusent que Philippe le
Bon soit nommé gouverneur avant
d'être hériter. Il amène alors ses
troupes pour faire céder ceux-ci,
preuve qu'il a non seulement les
moyens financiers mais également
militairespours'imposer.
Les ducs de Bourgogne tenteront à
plusieurs reprises de mettre la main
sur la principauté (épiscopale) de
Liègesansyparvenirmaisyexercent
uneinfluenceimportante.LesÉvêchés
de Cambrais et le Tournais ne sont
quant à eux pas annexés mais leurs
titulaires sont très proches de la
familledeBourgogne.
Avec ces acquisitions, on peut
observer un basculement du centre
politique.LeDucdeBourgognevitde
plus en plus souvent au Nord à
Bruxelles (Château de Coudenberg)
qui est pratiquement au centre de
l’ensemble. Ce n’est toutefois pas la
capitale (les princes sont toujours
itinérants) mais elle accorde une
certaineimportanceàlaprésencedu
roiensesterritoires.
19
Lehasard(dynastique)n'adoncpasseulprésidéàlaformationdel’Étatbourguignon.L'élargissementd'un
centre vers la périphérie à partir d'un territoire riche, fortement urbanisé, vers des territoires moins
densémentpeuplésyestégalementpourbeaucoup;c'estunmodèledeformationd'étatsouventretrouvé
dansd'autrespays.
Juridiquement,lestextesdel'époquenestipulentpasquePhilippeleBonestàlatêtedesPays-Bas;ils
énumèrentsesdifférentstitresd'autoritésursesterritoires.OnparledePays-Basbourguignons11maisles
territoiresneportaientpasdenompropresinonqu'ilsétaientnomméspaysdepardeçàetpayspardelà,
dénominationquichangeaitenfonctiondel'endroitoùl'onsetrouvait.
11
OnparleégalementdesFlandres,carlaFlandreestlabasedel’agrandissement,etquelaFlandreestunepartietrèsprospère
àl’époque.
20
Cesterritoiressonttrèsurbanisés:onenestimelapopulationà2700000habitants,alorsqu'ilyenavait
4millionsenAngleterre.Ilyaénormémentd'échangesentrecesrégionsmaisaussideparticularismes:on
estfierd'êtreflamandoubrabançon,jusqu'àl'échelonlepluslocal,caractéristiqueimportanteàl'époque
quisubsisteencoreaujourd'hui.
Le prince de la fin du Moyen Âge ne peut plus vivre du sien et doit se tourner vers les habitants pour
négocierl'impôt.Lamoyennedesaidesfinancièresattribuéesauprinceestde25%enFlandre,23%en
Brabant,22%enHollandeet10%enZélande.Ces4«provinces»contribuentpourprèsde80%desimpôts
;cesontdesterritoiresessentielspourasseoirlapuissanceduducdeBourgogne.Par-delà,ungouverneur
estenvoyépourexercerlepouvoirduducenBourgogne.Leseullienjuridiquequilesunitestqu'ilssont
21
sous l'autorité d'un même Prince : ce sont des princes français venus avec leur culture et leur langue
françaisesavecdesconseillersetdesinstitutionsfrançaises.
L’évolutionterritorialesousCharlesleTéméraire
CharlesleTéméraire,ouCharlesleHardi,filsdePhilippeleBon,hériteradel'ensembleàunmomenttrès
important,en1467.Ilvatenterderelierlesdeuxpartiesdel’Étatbourguignon:ilestl'ennemidelaFrance
etsonobjectifestdecréerunensembleterritorialpuissantàlafrontièredecelle-ci.
LaBasseetlaHauteAlsacesontcédées
enengagèreen1469parlesHabsbourg
(qui avaient besoin d’argent), par
lesquelsleducdeBourgogneobtientun
appui entre les deux parties de ses
possessions.
Il a presque la main mise sur la
Principauté de Liège, sous tutelle
bourguignonne, et profite d'une
querelledynastiquepours'emparer
duduchédeGueldreen1473.
22
Il ne lui reste alors plus qu'à
prendrepossessiondelaLorraine
par la guerre en 1475, pour
assurer le lien entre les deux
parties.
Cependant,ausiègedeNancyen
1477,leducdeBourgognetrouve
lamort.
Il n'y avait plus aucun hasard
dynastique et la volonté
d'extensionesttrèsclaire.
Achaquecampagne,ilfallutrecruterens'appuyantsurlesvassauxquilèventdesarméesmaissurtouten
payantdessoldatssupplémentaires;cettepolitiquecoûteuseforceraCharlesleTéméraireàsetourner
vers ses sujets pour l'aider financièrement. A la fin de son principat, il avait dû fortement accroître la
pression fiscale, causant le mécontentement de ses sujets surtout lors de ses premières défaites. Il a
cependantréussi(pendanttrèspeudetemps)àréunirlesdeuxpartiesdel’Étatbourguignon.Alorsqu'un
siècleauparavant,unterritoireétaitcédéparleroideFrancepourdotersoncadet,lesducsdeBourgogne
sontparvenusàpartirdecelui-ciàformerunensembletrèsimportant.
La formation des Pays-Bas (1):
1384 
Flandre
Philippe le Hardi
Artois
1429
Namur
1430
Brabant
Philippe le Bon
Limbourg
1433 
Hainaut
Hollande
Zélande
1435
Picardie (traité d’Arras)
1453 
Luxembourg
1469 
Liège sous tutelle
1473
Gueldre
Charles le Téméraire
23
C. Lecadreinstitutionnel
Lefaitdevivresousunemêmetutelleestégalementunélémentinfluentdanslesentimentd'appartenance
àunmêmeensembleentrelesdifférentesprovinces.CommentlesPrincesont-ilsgéreruntelÉtat?
a. LaCourdesducsdeBourgogne
LaCourestl'élémentleplusbrillantetleplusvisibledel'histoiredesducsdeBourgogne.C’estlàqu’ils
manifestent toute l'apparence de leur pouvoir. Elle est un groupe de personnes qui gravitent
continuellement,périodiquementouoccasionnellementautourduPrince,unnoyaumouvantquin’estpas
toujours le même. Le fait de pouvoir manger et d'être invité aux repas, d'accueillir (montre qu’on a le
pouvoiretlarichessed’entretenirungroupe)etd'êtreaccueilliestunélémenttrèsimportant.
OutrelenoyaudeceuxquisonttrèsprochesduPrinceetdémontrentlelienpersonnelquileslie,lacour
compteégalementlafouledesserviteursetdescourtisansquiespèrentrecevoirunepartdelagénérosité
duPrinceenétantprochedelui.Lespersonnesextérieures(ambassadeurs,envoyés,messagers,etc.)sont
fréquentesetprésentespourunemissionconfiée.
«L'affluenceestlesigned'unecourflorissante»:onétalesarichesse,c’estpourcelaqu’ilsviventaudessusdeleursmoyens(mécénat,bijoux,bibliothèque,vêtements,banquets,…)
LePrincetrouvecinqfonctionsprincipalesàlacour:
1. Organiserlaviequotidienne:«Boireetmanger,dormir,soignerlasanté,prieretlouerdieu,sedivertir,
letoutpendantledéplacementpresquecontinuelquicaractérisetoujourslavieprincièreduMoyenAge
finissant.»DesservicessontmisenplacepourassurerlebondéroulementdelavieduPrince:
médecins,jeux,repas,rangementetc.Coffresettapisseriesvoyagentaveclesprincesitinérants,dansun
systèmeplanifiéetorganisé.
2. Garantirlasécuritéduprinceetcontrôlersonaccès:«Parlaprésencedeserviteurs,danslachambre,
mêmependantlanuit,parlaprésenced’unegardedevantlaporte,pendantlesdéplacements.»Le
Princen'apasd'intimitépourdesraisonsdesécurité;ilestaccessiblecarildoittoujourssemontrer.
3. Impressionnerlesconcurrents:«parlaconsommationvoyante,leluxe,labibliothèque,lesvêtements,
legaspillage,parlegrandnombreetlesuperflu.»Ildoitimpressionnersesconcurrentsquesontles
autresrois,etexposersesrichessespardesdépensesextraordinaires,cequiesttrèscoûteuxmalgréson
patrimoineimportant.Lapolitiquedemécénatyjoueunrôleprimordial,ainsiqueleveloursdestissus,
lesfourrures,lesbijoux.Lacourestlemiroirdelaculturebrillantedusouverain.
4. Intégrerlescouchesdirigeantes:«ceuxdudedans,maisceuxdudehors,sipossible.Alacourdevaient
setrouverlesmembresdelafamilleprincière,lahautenoblesse,derangégaloupresque,lesévêqueset
prélats,noblesounon,lanoblessemoyenneoupetite,desspécialistesdudroit,desfinances,de
théologie,demédecine,formésounonparlesétudesetparlapratique.»LePrince,entraind'agrandir
sesétats,sesertdelacourpourattirerlescouchesdirigeantesdeseséventuellesannexions;la
fonctionpolitiquepermetdecomprendreleprocessusd'intégrationdesnouveauxétats.
Ilsedoitd'inclurelesordresprincipauxdelasociété:lesecclésiastiquesd'abord,quiprientpourlesâmes
detous.Lesmilitairesensuite,noblesdenaissance.Cesdernierssonthiérarchisés(baron,comte,duc,…)
etseullePrinceinfluenceleurprogressionsociale(onpeutacquérirdesnouveauxtitresoulestatutde
nobleauprèsdelui);c'estunoutilpolitiquepourattirerlesgensdontilabesoin.Lanoblessen'estdonc
pasétanche,netravaillepasetdoitsedistinguerdutroisièmeordre(travailleurs,paysans,commerçants
24
etartisans)quiestnégligé.Elleestpendantlongtempshandicapéeetinterditedecommercejusqu'àce
qu'ilsoitofficiellementacceptéparlahautesociété.Lesseulsnon-noblesquelePrinceattireprèsdelui
sont les gens spécialisés : des juristes formés à l'université12 pour assurer la politique, des financiers
praticiens(trésoriers)pourgérersonargentetmettreenplaceunestructurefinancièresansréellenotion
debudget.IlsserontanoblisparlePrincepourleurdonnerduprestige,maisilsneserontvucommedes
égauxparlahautenoblessequebienplustard.(noblessederobe><noblessed’épée)
5. Gouverneretadministrer:«assurerlapaixparledroitetlesarmes,organiserlarentréedesrevenus
domaniaux,etdesimpôts,etenfairelaredistribution,défendresonbien,l’accroîtrepeut-être.»Les
juristesélaborentunelégislationpourmaintenirlapaixintérieureetunearméeestétabliepourattaquer
ousedéfendre.Lesrevenusdomaniauxproviennentdespossessionspersonnellesduroietdesdroits
perçus en tant que souverain, auxquels s'ajoutent les impôts perçus auprès des sujets. Ces recettes
doiventàl'avenirserviraudéveloppementdel’État.
b. InstitutionsliéesàlapersonneduPrince
1. L’Hôtel rassemble tous les services domestiques (gardiens, valets, cuisiniers etc.) assurés par des
personnesoriginairesdesdifférentesprincipautés.Pardéfinition,sesmembressontliésàlapersonne
duPrincepuisqu'ilsassurentsaviequotidienne.Ilcontribueégalementàl'intégrationdepersonnesdes
étatsentrants.
2. Leconseil(ambulatoire)reprendlespersonnesamenéesàconseillerlePrinceetchargéesdelagrande
politique.LePrinceestlechefdel’Étatetincarnel'autorité,maisilnedirigepasseulets'aidedeces«
ministres ». En tout dernier ressort, ce conseil peut aussi être saisi de compétences financières et
judiciaires.Ilestditambulatoirepuisqu'ilsuitlePrinceitinérantaugrédesesdéplacements.Leconseil
étaitconstituédepersonnesvivantdansl’entourageduPrinceetoriginairesdesdifférentesprincipautés,
choisisparluienfonctiondeleurcompétenceetleurconnaissanceduterrain.
SousPhilippeleBon,leconseilambulatoirechangeàcausedeladiversitédesdossiersàtraiteretévolue.
Cesmodificationstraduisentlacomplexificationetlaspécialisationdel’État.
-
en1434:sectionpolitiquepermanenteindépendant
en1447:sectionfinancièrepermanent
àpartirdecemoment-làleGrandConseilquitraitaitdéjàdematièresjudiciairestendàévoluer
pourdevenirunconseildejustice
Onutiliseleterme“conseil“pourtout(politique,finance,justice),etcesconseilsprennentpetitàpetit
leurindépendance,leprinceneprésidesouventplusqueleconseilpolitique(mêmesilesautresrestent
dansl’orbiteduprince,lesuiventdanssesdéplacements,etc.)
3. La chancellerie rassemble les services accompagnant le fonctionnement du conseil. Elle compte un
chancelier,unaudiencieretdessecrétaires.
Lechancelier,unhommedeconfiancedelahautenoblessechoisiparleprinceetprochedecelui-ci,a
demultiplesfonctions:
-
Gardedusceauducal,insignedel'autoritéquipermetd’authentifierlesdocuments
-
Adjointdirectduduc,pourtouteslesaffairespolitiques,administratives,monétairesetjudiciaires
(=“premierministre“)
12
L’UniversitédeLouvainaétécrééeparPhilippeleBonpourremédieraumanquedejuristes
25
-
Président du Conseil ducal en l’absence du duc, soit une forme d'autorité importante sur les
conseillers
-
Correspondantavectouslesfonctionnaires13
-
Intermédiaireentrelessujetsetleduc.SilePrinceestaccessible,ilyanéanmoinsunfiltrepourles
affaires,quiconcernentplutôtlechancelier.Ilestl'incarnationdupouvoir,signifielesordresetsubit
lacolèredupeuplecontrelePrince
-
Porte-paroleduduc,cequifaitdeluiunpersonnaged'uneimportanceprimordiale
L’audiencierestprésentlorsdesaudiencespubliquesduducetestchargédelirelesrequêtesquilui
sontadressées;lesécritssontlusàhautevoixpourenprendreconnaissance.Ilestlesecrétaireàqui
leDucconfiaitlachargedelarecettedel‘émolumentdugrandsceau(lesceauofficielestpayant).
Lessecrétaires,sontdesofficiers«misdanslesecret»(ettenuausecretprofessionnel)quirédigent
lesdocuments.Petitàpetitsecréentdesdessecrétariats,pourorganiserleurtâche.
4. LesRecettesgénérales:lereceveurgénéralestletrésorierdetouteslesfinancesduprince.Ilyenaura
deux:undanslesprovincesduNord,ensuiteunsecondapparaîtraenBourgogne.
Cetargentestleproduitdudomaineoudesimpôts,perçusen«liquide»(envraimétal)danstoutesles
provinces.Danschacuned’elle,desreceveurssontchargésdelerécolter.Letransportdel'argentest
trèsdangereux,onl’évitedoncaumaximum.L’argentestrépartidansdemultiplescaissesetunegrande
partie va être utilisé sur place. Le receveur domanial reçoit alors des ordres de dépenses selon des
documentsécritsetdevientreceveuretdépensier.Lereceveurgénéraln'obtientdoncqu'unepartiede
l’argentrécoltépourledépenseràlacour.
c. Institutionssédentaires
Outrelesinstitutionscentralesd’unétatenformation,onvoitl’apparitiond’institutionssédentairesquise
détachentdelapersonneduprinceàpartirdumomentoùellesn’ontpasbesoindelaprésenceduprince
etutilisentl’écrit.Lesinstitutionssédentairessedéveloppentaudébutdu15esiècle,d'abordàtraversles
conseilsdejusticeetleschambresdescomptes.
Lesconseilsdejustice(unenFlandre,unenBourgogne)sontcréésselonl'idéequelajusticepuisseêtre
menéesansl’interventiondusouverain.Unechambredescomptes(àLilles)estmiseenplaceenFlandre.
Ellessontplusspécialiséesetdéliéesdel'itinéranceduPrince.Lesconseilsdejusticepréfigurentlescours
dejusticeactuellestandisqueleschambresdecomptenousontdonnélaCourdesComptes.
LemêmeprocessusauralieuenBrabantsousleDucAntoinedeBourgogne.DevenuducdeBrabant,ilmettra
en place un conseil de justice et une chambre des comptes à Bruxelles, avant même le regroupement
bourguignon.L'idéeestquel'exercicedelajusticeetdesfinancespuisseêtremenésanslaprésencedu
souverain.
SousPhilippeleBon,lorsduregroupementdesdifférentesprincipautés,ontlieutroisévolutionsmajeures
Tousceuxquisontauservicedel’état
13
26
-
Lacréationdesconseilsdejusticesédentairesdanslesdifférentesprincipautés.
-
L'extensionduressortterritorialdesChambresdesComptes14:LilleestaffectéeàlaFlandre-ArtoisMalinesetauHainaut-NamurtandisqueBruxellesconcerneleBrabant-LimbourgetleLuxembourg.
-
Malgré l'extension, une troisième chambre des comptes est créée à La Haye (1447-1463) et
rassemblelaHollande,laZélandeetlaFrise.ElleseraensuiteréincorporéedanslaChambredes
comptesdeBrabant.Elleestnécessairecar,dansleurrôledevérificationdescomptes,ceschambres
doiventêtrecapablesdeserendresurplace.
Leschambresdecomptesontpourrôlelecontrôledesfinancesducales,soitlavérification,lacorrection
etlaclôturedescomptesdetouslesofficierscomptablesdutrésorducal,desreceveursdomaniauxet
des officiers de justice. Les officiers comptables doivent, chaque année, rendre leurs comptes avec le
résumédeleursrecettesetdeleursdépensesjustifiéesparécrit,quelesresponsablesdelachambre
analysentetcorrigentenleurabsenceavantdelesauditionnerpourjustifier15leséventuelleserreursou
incohérencesqu'ilsontdécelé.Unefoisquelesdeuxpartiessesontmisd'accord,lecompteestclos,le
total des recettes et des dépenses étant fait, et le solde positif ou négatif est archivé jusqu'à l'année
suivanteetlanouvellevérification.Cesarchivesnécessitentlasédentarisation.
Lesofficiersdeschambresdescomptesconnaissenttrèsbienl'étatdesfinancesdudomaineduPrince,ils
ensontdoncégalementlesconseillerspourlagestiondesespropriétés.Ilsjouentlerôledeconseildes
receveurs,arrangentlesaccordspourl’aliénationdudomaineetentretiennentlesbiensimmobiliers16.Ils
gèrent également la conservation de tous les titres (chartes et autres documents) pouvant servir à
maintenirouàrecouvrerlesrevenusdudomaine.Leschambresdescomptessontdoncenquelquesorte
lespremiersdépôtsd'archives.
d. LerégimereprésentatifdanslesPays-Basbourguignons
Lerégimereprésentatifestune«formedegouvernementdanslaquelleleshommes,ouunepartieplusou
moins importante de ceux-ci, participent à l'exercice de l'autorité publique par l'intermédiaire de
représentants.»
Il y avait, déjà à cette époque-là, une partie des hommes qui participaient au pouvoir en envoyant des
représentants dans des assemblées généralement composées de gens importants qui pouvaient se
prévaloir d'une activité avec le prince : le clergé, à la tête de possessions importantes ; la noblesse,
propriétaireetchargéedeprotégerlescitoyens;letiers-étatoùl'onretrouvelesvilles.Onpeutdoncparler
d'unrégimereprésentatifmaiscertainementpasdémocratique.Ilyadoncdesassembléesd’Étatsdans
lesdifférentesprincipautésdepuislafinduMoyenÂge
Lalevéed'impôts,provoquéeparlemanquedemoyensduPrince,doitpasserparlanégociationavecles
assemblées représentatives (le prince n’est pas un despote). La Joyeuse Entrée de Brabant est un acte
constitutionnelparlequellesducsdeBrabant,àl'occasiondeleuravènement,octroyaientàleurssujets
diversprivilègesetfranchises.LepremiertextefutaccordéparJeanneetWenceslasen1356.Parlasuite,
14
=courdescomptesactuelle,comptabilitédel’État,ilfautquelesgensquimanientdel’argentjustifientleurscomptesense
rendantauxchambresdecomtes
15
C’estpourçaqu’onparled’auditeurdelachambre,lesofficierscomptablessejustifientdevantlesauditeurs
16
Cesystèmeestparadoxalétantdonnéquelereceveurpeutdifficilementêtreungestionnaireefficaceenmêmetemps.Ilssont
chargésdecontrôlerlescomptesdesautresmaisdoiventaussigérerledomaine,ilfaudraitplutôtavoirdespersonnesquiont
unevued’ensemblepuisquelàilsdépassentlerôledecontrôleurendevenantaussigestionnaire
27
uneJoyeuseEntréefutexigéeduducAntoinedeBrabant,puisdetoussessuccesseursjusqu'àlafinde
l'AncienRégime.Ellestipule:
-
l'indivisibilitéduduchésansl'accordpréalabledessujets;
-
le maintien des libertés et coutumes, soit les privilèges que certaines catégories de la population
peuventfairevaloiretauxquellesellessonttrèsattachées,dansunesociétéinégalitaire.
-
lanécessitéduconsentementdesÉtatspourlaguerre,laconclusiond'alliancesoulesmodifications
desfrontièresduduché;
-
l'exclusiondes«étrangers»desfonctionspubliques(quelqu'unquin'estpasnéenBrabant)
-
ledroitderésistancesileducnerespectepascesclauses.
Cet accord se maintiendra au fil des siècles, et aucun Prince ne parviendra à faire de tous les duchés
bourguignonsunseuletmêmeÉtatavecdesloisuniques.Lesimpôtsétantindispensablesetnégociésavec
cesÉtats,lesouverainnepouvaitpass'enpasserpourcréerunroyaumeuni.
IlsconstituaienteneffetuncimententrelePrinceetsessujets.CedernierdevaitconvoquerlesÉtatsdans
uneassembléepourréclamerdel'argentafindedonnerlieuàunenégociationdébouchantsurunaccord
quidoitplaireauxdeuxparties.C'estunelutteconstanteentrelePrincetentéparlepouvoirautoritaireet
ses sujets. Aucun souverain, aussi puissant fusse-t-il, n'est jamais parvenu dans les Pays-Bas à lever les
impôtslui-même,alorsqueleroideFrancel'aréussi.Jusqu'àlafindel'AncienRégime,leducdeBourgogne
etsessuccesseursdevrontdoncchaqueannéenégocierlesimpôtsavecleurssujets,entraveévidenteà
l'établissement d'une monarchie absolue dans nos régions étant donné que l'administration était
insuffisantepoursepermettrelalevéed'impôts.
La répartition de l'assiette des impôts était terriblement inégalitaire puisque que seuls les plus riches
prenaientplacedansleursnégociations:ilsferontpeserlepoidsdeladettesurlespaysansquin'avaient
aucunementleurmotàdire.LePrincenégociedonclasommemaisn'apasdepouvoirsurl'applicationet
lamiseenplacedelarécoltedecelle-ci.
LeBrabantétantl’Étatleplusimportantdetous,lanégociationcommenced'abordparcelui-ciétantdonné
quel'arrivéed'unpremieraccordbrabançonfacilitelesdiscussionsaveclesautresprincipautés,mêmesi
laFlandredonnaparfoisdufilàretordreauxautorités.
SousPhilippeleBon,unautreétatdefonctionnementsemetenplace.Aulieudenégocieraucasparcas,
ilva,pourcertainsdossierstrèsimportants(quiconcernentl’ensembledesterritoires),convoquerlesÉtats
Généraux (1464-1465), soit demander aux États d'envoyer des délégués pour avoir une assemblée
commune.
Malheureusementpourlui,cesdéléguésnereçoiventqu'unmandatlimitédelapartdesassembléesdes
principautés:unmandatimpératif,ilssontdonctenusdeseconformerauprogrammequiestdéfinipar
sesmandants,sanspouvoirseprononcersurautrechose(lesassembléesdechaqueÉtatveulentgarder
leurautonomie).
LesÉtatsGénérauxserontdoncrégulièrementconvoqués,pendant150ans,pourlalevéedesimpôtset
d'autres problèmes importants. Complexe mais bien canalisé, le système structure les relations du
souverainavecsesprincipautés.MaiscelaneveutpasdirequelesAssembléesd’Étatsn’existentplus.
28
e. ÉvolutiondesinstitutionscentralessousCharlesleTéméraire( 1467-1477)
EntréenguerreaveclaFrance,CharlesleTéméraireabesoindebeaucoupd'argentpourgérersapolitique
etsonensemble,aveccommeprojetlacréationd'unroyaumeafindescellerl'uniondesesprincipautés.Il
mettraenplaceuncertainnombrederéformesinstitutionnellespoureffectivementgérersesÉtatscomme
unensembleetnonpasindividuellement.
LesattributionsjudiciairesduGrandConseilsontreprisesparleParlementdeMalines(1473),mêmes'ily
aencoredescoursdejusticedanslesprincipautés.Charlesdémontrequ'ilestàlatêtedel'ensembleaux
yeuxdetousencréantunecourdejusticesupérieurefaisantautoritépourtouslesPays-BasàMalines,
petite principauté enclavée dans le Brabant où les sujets ne protesteront pas contre une institution
centralisante.Lavillead'ailleurspuapparaîtrependantuncertaintempscommelecentredesPays-Bas
mêmesilePrincen'yestpasencoreinstallé.Troischambresspécialiséesysontaumêmemomentétablies:
-
-
-
Chambredescomptes:unechambreuniquepourcontrôlerlesfinancesordinairesetlescomptesdu
domaine.ChaqueofficieraffectéàuneprincipautédoitdoncsedéplaceràMalinespourfairerapport
desescomptes.
ChambreduTrésor:déjàau15esiècle,oncomprendqu'onnepeutêtregestionnaireetcontrôleur,
commecelaétaitlecasauparavant,carceladonnelieuàunconflitd'intérêt.Ilyamaintenantune
chambrepourlecontrôledelacomptabilitéetl'autrepourlagestiondudomaine(=chambredutrésor)
Chambres des généraux : cette chambre est chargée de gérer les finances extraordinaires, soit les
impôtsnégociésauprèsdesÉtatsGénéraux.
Janvier1477marqueleSiègedeNancyparleducdeBourgognepourrécupérerlaLorraine.Sestroupes
sontdéciméesetleduclui-mêmemeurtsurlechampdebataille.L'effortdecentralisationquiavaitsuscité
ungrandmécontentementchezlesofficierscomptablesnotamment(craintequecettecentralisationfasse
échapper une part de l’autorité des différentes principautés) ainsi que la pression fiscale entraînée par
l'effortmilitaireimportantdesdernièresannéesfontgronderlesÉtatsetprovoquentl'effondrement.
L’ÉtatétantintimementliéàsonPrince,unproblèmedesuccessionsepose.Alorsqu'avaitlieuau15esiècle
uneévolutionduconseilaulique(delacour)desducsdeBourgogneversunespécialisation,lePrincea
autourdeluidesconseillersdesquels,sousPhilippeleBon,sedétachentdessectionspolitique(nobleset
juristes),financière(experts)etjudiciaire(juristesduGrandConseilauParlementàMalines1473).
Touts'effondrecependanten1477lesdiversesinstitutionsmisesenplaceparCharlessontdétruiteset
redeviennentunGrandConseilambulatoireauseinduquelsubsistentcependantdessectionsspécialisées
quis'endégagentassezvite(Bureaudefinances:1487).Lacomplexitédesaffairesferaquel'onverraen
faitsere-détacherdel'ensembledessectionsspécialisées.Silastructureinstitutionnelleestfrappéede
pleindefouetsuiteàlamortduPrince,latendancelourdeverslaspécialisationestinéluctable.
29
30
LesPays-BasauXVI e siècle
A. LedéveloppementdesPays-BassousCharlesQuint
a. LeslendemainsdudésastredeNancyetlepassagesouslasouverainetédesH absbourg
AlamortduducdeBourgogne,leroideFranceconquiertlaPicardie,l'Artois,leDuchédeBourgogneetla
Franche-Comté tandis que Liège et la Gueldre, ayant récemment rejoint l'ensemble, reprennent leur
autonomie.Laquestiondelasuccessionseposerapidement,étantdonnéqueCharlesleTémérairen'a
qu'unehéritièreféminine.Selonlaloi,l'apanagenepeutêtretransmisqu'àunhéritiermasculin,cesur
quoiLouisXIs'appuierapourobtenirleduchédeBourgogne(maiss’imposesurtoutparlesarmes).
Les lendemains du désastre de Nancy (1477)
Les possessions
bourguignonnes en 1477
Les lendemains du désastre de Nancy (1477)
Les pertes territoriales
après la bataille de
Nancy
1477
31
MariedeBourgognereçoitlesterritoiresencorebourguignonsets'appuiesursesÉtatsGénérauxpourfaire
front.Lorsdecetterencontre,elleestreconnuecommeprincessenaturelledecesterritoiresenfaisant
beaucoupdeconcessionsenfaveurdesescollaborateurs(leGrandConseilestremplacéparunconseil
itinérant, lutte contre l’autorité du souverain sur la centralisation). C'est la première fois que ces états
doiventfairefaceensemble,ets'affirmentdansleurunité.
Trèsvite,unmariageestorganiséentreMariedeBourgogneetMaximiliend'Autriche,quiferanaîtrele
lienentrelesHabsbourgetnosterritoires.Maximiliend'AutricheseretrouveseulàlatêtedesPays-Bas,
suiteàlamortaccidentelledesafemmeen1482.Elledécèdelaissantdeuxenfantsenbasâges:Philippe
le Beau et Margueritte d’Autriche. Elle laisse des difficultés extérieures mais également intérieures : le
chancelieraétéexécutécarilsymbolisaitl’autoritédeCharlesleTéméraire.
Maximilien d’Autriche est régent des Pays-Bas jusque 1494, durant la minorité de Philippe le Beau et
parvientàreconquérirl'Artois,laFranche-ComtéetleCharolaisen1493aucoursduTraitédeSenlis.La
puissancedesHabsbourgluiapermisdenégocieravecleroideFrance(intérêtpourlaFrancequelaguerre
s’arrête car le roi a d’autres ambitions en Italie) et les Pays-Bas sont à nouveau un ensemble d'états
géographiquementéloignés,cequineposepasdeproblèmeàl'époque.
Le passage sous la souveraineté des Habsbourg
1493: Traité de Senlis
Dès sa majorité, Philippe le Beau devient “souverain“ des Pays-Bas (1594-1506). Les alliances
matrimonialesaurontuneimportanceprimordialedansl'histoiredesPays-Bas.PhilippeleBeauépouse
uneprincesseespagnole:JeanneditelaFolle,fillecadetted'IsabelledeCastilleetdeFerdinandd'Aragon.
Suiteàunesériededécès,JeannelaFolledevientl’héritièredutrôned’Espagne.PhilippeleBeauprendle
pouvoir,aunomdesonépousequidevientreine,deCastilleen1504suiteaudécèsd'IsabelledeCastille17
etdécèdelui-mêmeen1506.Unenouvellecrisehéritièrevoitlejourcarsonfils,lefuturCharlesQuint,n'a
que6ans.MaximiliendeHabsbourgestànouveaunommérégentdesPays-Basmais,occupépard'autres
affaires(sesintérêtssontauSERG),ilaffecteMarguerited'Autriche,tantedeCharles,àsesfonctions.
Reine qui a mis fin à la Reconquista et qui a soutenu les expéditions de Christophe Colomb. Elle se marrie avec Ferdinand
d’AragoncequifaitlelienentrelaCastilleetl’Aragon➝lesEspagnes
17
32
Le passage sous la souveraineté des Habsbourg
La succession de
Charles le
Téméraire
b. CharlesQuint,souveraindesPays-Basetconquêtesterritoriales
CharlesQuintatteintlamajoritéethériteen1515:ilestofficiellementdésigné“souverain“desPays-Bas
etdelaFrance-Comté,souslenomdeCharlesdeHabsbourg.Leschosesseprécipitentaudécèsdeses
ancêtres:àlamortdeFerdinandd'Aragon,régentdeCastille(suiteàl’incapacitéderégnerdeJeannela
Folle),en1516,ilhéritedelaCastilleetdel'Aragon,soitdesEspagnes.IlrègnedoncsurlesEspagnesmais
égalementsurlespossessionsenAmériquesetenItalie.Ils'appellealorsCharlesIer,roidesEspagnes.Il
hériteensuitedespossessionsdesHabsbourgen1519àlamortdeMaximiliend'Autriche.
Il se présente ensuite en tant qu'Habsbourg à l'élection impériale de 1519 à laquelle il a de sérieux
concurrents.S'appuyantsursesterritoires,ilparvientàapparaîtrecommeceluiquipourraitêtrelegarant
delapuissancedel'EmpireetprendlenomdeCharlesVàsanominationentantqu'empereur.Ilestàla
tête d'un territoire immense et prend la décision dès 1522 de céder les possessions héréditaires des
Habsbourg(soitlesterritoiresautrichiens)àsonpetitfrèreFerdinandvuladifficultéqu'ilpourraitavoirà
exercersonautoritésurcesterritoires.CegestemarquelaséparationentrelesHabsbourgd'Espagne,rois
d'Espagne,etlesHabsbourgd'Autriche,empereurs.18
LesPays-BasperdentenimportanceetnesontplusréellementlecentredespossessionsdeCharlesQuint
etdesessuccesseursquis'installerontenEspagne.Cesétatsdeviennentdoncsatellitesalorsqu'ilsétaient
le centre de l'ensemble sous les ducs bourguignons. Philippe II, successeur de Charles Quin, s'établira
définitivement non loin de Madrid et deviendra le premier souverain sédentaire, s'entourant de son
administration,totalementàl'opposédesonpère.OnparledoncdePays-Basespagnolspourle16esiècle,
18
Iln’yaqueCharlesQuinquiaitétéàlatêtedetouscesterritoiresenmêmetempsqu’empereur.Letitred’Empereurvaensuite
auxHasbourgsd’Autriche.IlvaêtreconfrontéàdesdivisionsdansleSERGavecl’avènementduprotestantismecequiamèneà
undébutdeprotestationdelatutelledel’empereur.Sessuccesseursimpériauxserontàlatêted’unSERGdiviséterritorialement
etreligieusement.
33
ce qui est historiquement incorrect étant donné que le souverain est autant prince des Pays-Bas que
d'Espagne.
Trèsrapidement,CharlesQuints'empare(soitparconquêtesoitpartraté)denombreusesprovincespour
reconstituerunensemblepluscohérentaudétrimentdevoisinsplusfaibles.
1521Tournai(confirméparletraitédeMadriden1526)
1523Frise
1529Utrecht+Overijssel
1536Drenthe+Groningue
1543Gueldre+Zutphen
1543Cambrai
NB.PasLiège
-
En1543,onparlaitdéjàdesXVIIprovincessousCharlesQuint,cequisoulignequel'onaconscienced'un«
tout ». C'est à l'occasion de leur scission lors de la deuxième partie du 16e siècle que l'on évoque ces
provincescommeunensemble,leLeoBelgicus,figurésousl'emblèmedulion.
Le28juin1548alieulaTransactiond'Augsbourg.C'estunacteparlequelCharlesQuintrégladevantla
Diète19impérialeréunieàAugsbourg,lesortdel'héritagebourguignon:lesPays-BasetleFranche-Comté
formaientdésormaisleCercledeBourgogne,largementaffranchidelajuridictionimpériale.Celamontre
lavolontédedémontrerquecesterritoiressontunispardesliens.
LorsdelaPragmatiquesanctiondu4novembre1549,ildécrèteques'appliquerontdésormaislesmêmes
règlesdesuccessiondanslesPays-BasetdanslaFranche-Comté.Cettemesureapourbutdemaintenir
l'unitédel'héritagebourguignon.
Les conquêtes territoriales sous le règne de Charles Quint
Les conquêtes territoriales sous le règne de Charles Quint
Les XVII Provinces
sous Charles Quint
Assembléedesreprésentantsdel’empire
19
34
Charles Quint, souverain des Pays-Bas
Pays-Bas
Saint Empire
Autriche
France
Espagne
Naples
Sardaigne
Sicile
L’empire de Charles Quint
L’Empire de Charles Quint
B. Ungouvernementpardélégation
a. LegouverneurgénéraldesPays-Bas
Parlefaitmêmedelamonarchiecomposite20,CharlesQuintestobligéd'organiserdesgouvernementspar
délégation21dèsledébutdu16esiècleàcausedestempsdevoyageentresesdifférentespossessions.La
fonctiondegouverneurgénéraldesPays-BasestmisesurpiedetBruxellesdevientvilledecour,centre
desPays-Bas.Marguerited'Autricheestnomméeàceposteaprèsavoirassurélarégenceentre1506et
1515.Asondécès,CharlesQuintdésignesasœur(àlui)MariedeHongriequis'installeraàBruxellesalors
quesaprédécesseurétaitbaséeàMalines,cequiamorceralanaissancedelavilleentantquecapitale.Ces
gouvernantess'entourentd'unecourentantquesouverainsparprocuration,appuyéesparCharlesQuint.
SiAnversestlepôleéconomique,BruxellesdevientlepôlepolitiquedesPays-Bas.
Legouverneurestdoncreprésentantdusouverainetchefdesarmées(saufs'ilestunefemme,ilyaalors
uncommandantgénéraldesarmées)souventtrèsprochedecedernier.Ilreçoitunelettrepatentede
nominationquidélèguelespouvoirstotauxnéanmoinslimitéspardesaccordssecrets(“lettressecrètes“)
pouréviterdesdébordements.IldoitdeplussuivrelesConseilscollatérauxàBruxellesetcorrespondre
régulièrement avec le souverain, où qu'il soit. La nécessité de transférer ces messages rapidement a
20
Quiestforméd'élémentsdiversetpeuhomogènes
21
LesPays-Bassontunélémentfondamental,idempourl’Amériquemaisunsystèmededélégationestobligatoirevulesmoyens
decommunicationdel’époque
35
d'ailleurs encouragé le perfectionnement des moyens de communication. Le souverain se réservait la
décisionsurlesaffaireslesplusimportantes,soitl'appareilgouvernemental,tellesque:
-
laconvocationdesÉtatsGénéraux
-
l'octroideprivilègesperpétuels(quivalentau-delàdumandat)
-
lagrâcepourlescrimesdelèse-majesté(pouratteintes au souverain, au pouvoir du souverain)
-
l'aliénationdesbiensdelaCouronne(vendredesbiensrelevantdupatrimoine)
-
lesanoblissements
-
la désignation des évêques et des principaux abbés, des présidents des Conseils de justice, des
présidents des Chambres des Comptes, du personnel supérieur des Conseils collatéraux, des
gouverneursprovinciaux,desgouverneursdesvillesprincipales,desofficierssupérieursdel'armée
Legouverneurexercedoncsesfonctionsdanslesaffairescourantes,danslesnominationssubalterneset
faitlespropositionsausouverain.
b. Bruxelles,villedeCour
L’enceintedeBruxelles,muréederemparts(double-enceinte)quiprotégeaientdessiègesetdesinvasions.
Toutcequiestendehorsdesenceintesestlacampagne.Enfévrier1731,unincendieaprislePalaisde
Coudenberg(palaisdelacourdepuis1531)etnerestaientquedesruinesaulendemain.Lacoursereloge
dansunchâteautoutproche,lePalaisdeNassau.Au18e,lePalaisdeNassauestréaménagéluidonnantun
nouvelaspectetdevientlePalaisdeCharlesdeLorraine.LesruinesduPalaisdeCoudenbergsontlaissées
enétatpendantquaranteans.Legouverneurétantinstalléenseslieux,ilestdécidéqu'aucunpalaisnesera
construitmaisqu'uneplace,lafuturePlaceRoyale,seraaménagéedansunstylenéo-classiqueenl’honneur
dugouverneurgénéral.LachapelledeCharlesQuint,quisubsistaitdanslesruinesenbonétat,aétéabattue
entouteconnaissancedecausecarelleétaitdanslechemin.Quelquesannéesaprès,onprendraladécision
deconstruireunpalaispourlesgouvernementsgénérauxàLaeken.
Au18e siècle,Bruxellesseralavillela
plus importante au niveau démographique, la population étant attirée par le fait que ce soit le siège de
pouvoiretpartouslesavantagesquecelasuppose.
C. L'organisationdesConseilscollatéraux
a. Lerésultatd'unelongueévolution
LesConseilscollatérauxsontdesconseilsplacésauxcôtésduprinceoudugouverneurgénéral;ilssontles
piliersdesgouvernementsdespays.En1531alieul'établissementdestroisconseilsd’État,privéetdes
financesparCharlesQuint,nomméscollatéraux,parcequ’ilssontadlatusprincipis22,faisantpartiedela
couretdelamaisondusouverain.Charlesjugeinsuffisantl’uniqueconseilpourl’examen,ladiscussionet
ladécisiondetouteslesaffairesduressortdugouvernementsupérieuretdécidedoncd’instituertrois
conseils.Ils’estenréalitéfondésurl’apportd’unelonguehistoirepourformalisercesinstitutions.
22
auprèsduprince
36
b. OriginedesConseilscollatérauxétablisparCharlesQuint
LesConseilscollatérauxtrouventleuroriginedansl'évolutionduconseilaulique(lacourautourduprince)
desducsdeBourgogneversunespécialisation:leconseilautourduPrinces'étaitdiviséentroissections
spécialiséesavecleursexpertsrespectifs,
- Sectionpolitique
- Sectionfinancière
- Section judiciaire se détachant de la conduite des affaires politiques puis se cristallisant lors de la
créationduParlementdeMalinesen1473
Le pouvoir central est néanmoins ébranlé par les évènements de 1477 et toutes les institutions se
resserrentversMariedeBourgogne;unnouveauGrandConseilambulatoireestcréé,duquelsedégagera
cependanttrèsviteunBureaudesfinancesen1487.Latendanceàlaspécialisationamorcéeaudébutdu
15esièclesepoursuitdoncdanslesdécenniessuivantescarelles’avèrenécessaire.
Audébutdu16esiècle,lascissionentrelesaffairesjudiciairesetpolitiquessedessineànouveau.UnGrand
ConseilarrestéestétabliàMalines.
37
UnautreGrandConseillezleprince(àcôtéduPrince)ambulatoiredonnenaissanceàdeuxgroupes:un
Conseilprivé(restreintcomposédenoblesetjuristes)pourlesaffairespolitiquesetunBureaudesfinances
(composédenoblesetd’experts).En1531,cedernierdevientConseildesfinancesetleConseilprivése
diviseenunConseild’ÉtatetunConseilprivé,lepremieravecdesnoblesetlesecondsans.
Cesmembresdelahautenoblesseviventàlacouretsontleshéritiersdesgrandsvassauxmédiévaux;leur
importanceestprimordialecarilslèventlesarméesetsontdespropriétairesterriensreprésentésdansles
assemblées d’État. Ils sont très encombrants pour le pouvoir et on voit à un tournant majeur dans la
conception de celui-ci : à l'aube des temps modernes, les souverains ont tendance à vouloir fonder le
pouvoirsurunedélégationabsolue;lathéoriedelamonarchieabsoluesemetdoucementenplace.Les
membresdelanoblesse,quantàeux,estimentquelepouvoirsepartageentrelesouveraineteux-mêmes.
A mesure que les souverains tendent à l'absolutisme, ils se heurtent de plus en plus durement à leurs
conseillersnobles.Ainsi,lePrincecréeleConseild’Étatauquelilaffectelesnobles,dissociéduConseilprivé
réservéauxjuristes.ConcernantleConseildesfinances,certainsnoblesyjouentencoreunrôleentantque
grands propriétaires domaniaux. La tension grandit au fil du temps au sein du Conseil d’État et, pour
maintenirl'ordreetdonnerducréditàsesspécialistes,lesouveraindécidedelesanoblir;onparleraalors
denoblessederobeetdenoblessed'épée,distinctionbeaucoupévoquéedanslesécrits.
c. LeConseild’État(//politique)➝nobles
LeConseild’Étatsecomposede12conseillers,soit2ecclésiastiqueset10nobles,auxquelss'ajoutentle
personnelrestreint:2secrétaires,2huissiers,1aumônieretquelquesemployésauprèsdessecrétaires.
Progressivement, des juristes furent nommés au Conseil d’État. Ses compétences sont précisées par
l'Ordonnancedu1eroctobre1531:
-
la politique étrangère : relations diplomatiques avec les puissances voisines et défense du pays :
conférencesdepaix,applicationdestraitésinternationauxetcontestationsterritoriales
-
la politique intérieure : il est responsable de la coordination des rouages du gouvernement :
organisation de la cour du gouverneur général, propositions des nominations dans les institutions
centrales/dans la magistrature, conflits de compétence entre les hauts fonctionnaires, contrôle des
administrations provinciales, relations entre l’Église et l’État (propositions pour la collation des
bénéficesetdignitésecclésiastiques)
Lesconseilscollatérauxneprennentpasofficiellementdedécisionsmaisilsjouentunrôlefondamental
danslaconduitedugouvernementpuisquelegouverneurgénéralsuitleurspropositionslaplupartdu
temps.Lepouvoirdelanoblessen'estpasquesymbolique;leursdécisionspèsentdanslabalance.
d. LeConseilprivé(//politique+justice)➝juristes
OnretrouvedansleConseilprivé5conseillersdelonguerobe(desjuristes)présidésparunchef-président
(égalementprésidentduConseild’État,iln'yadoncpasdecloisonnementétancheentrelesConseils).
Certainsautresconseillerspouvaientêtreappelésauxdélibérationsenfonctiondesmatièrestraitées.Les
compétencesadministrativesetjudiciairesduConseilprivésontégalementpréciséesparl'Ordonnance
du 1er octobre 1531 : « les affaires de nostre supreme hauteur et souveraineté, autorité es choses
procedantdegrâce,tantaucivilquecriminel,etquisontpardessuslestermes,trainetcoursordinaires
dejustice»(laséparationdespouvoirsn'estpaseffective,c'estunancêtreduministèredelajustice):
38
-
maintiendesprérogativesdupouvoirsouverain:législation(préparation,publicationetinterprétation
deslois);censure,contrôledel'instructionpublique,descorporations,delabienfaisance,desfestivités,
despostesetvoiesdecommunication;maintiendel'autoritésouverainevialesautoritésprovinciales
etlocales(officiersdejusticeprovinciauxetlocaux,relaispourveilleràl'observationdeslois)
-
justice:rendaitparfoislajusticecommetribunald'exceptionouparl'exercicedudroitd'évocation(le
droitdes'emparerd'unprocèsencoursetletraiterenhautlieu);préparationdesdossiersrelatifsau
droitdegrâce.
Ilexistaitbeaucoupdecourdejustice:danschaquevilleetprovinceainsiqu’àMaline.Onvoitunefoisde
plus qu'il n'y a pas de séparation des pouvoirs avec le droit d'évocation. Le conseil privé deviendra
néanmoinsprogressivementdemoinsenmoinsunconseildesjusticepourdevenirunconseilpurement
politique.
e. LeConseildesfinances
LeConseildesfinancesestlefruitd'unelongueévolutiondepuisPhilippeleBon.Ilsecomposede6agents
de rang supérieur : 3 chefs des finances (membres de la haute noblesse23), 1 trésorier général et 2
conseillersoucommis.
Sescompétencessontfinancièresetéconomiquesetconcernentladirectiongénéraledesfinancesde
l’État:
gestiondesrevenusdudomaineetdessubsides24(procéduredepétitiondesaidesetsubsides)
auxquelss'ajoutentlesdouanesàpartirdu16esiècle
– gestion des dépenses publiques : paiement des salaires, frais de fonctionnement de l'appareil
gouvernemental et des hautes juridictions, paiement de la solde des militaires, ravitaillement,
logementdessoldats;
– supervisiondesfonctionnaireschargésdesrecettesoudépenses;
– conseil pour toutes les questions ayant un impact financier (travaux publics, entretien des
bâtiments,fortifications).
–
23
Lahautenoblessen’estpasspécialiste,maisonlesassocieauconseildesfinancespourqu’ilssoientcontentsd’avoiruntitre.
e
e
e
Ilssontencadréspasdesspécialistes.Latendanceobservéedansla2 ½du16 etau17 estqu’onnenommeplusdesuccesseur
➝onfiniparneplusavoirdemembresdelanoblessedansceconseil
24
La perception des impôts prend de plus en plus d’importance et nécessite une négociation avec les États provinciaux et
généraux.
Procédure de la perception de l'impôt : le souverain ou le gouverneur général ne peut pas envoyer des fonctionnaires pour
percevoirl'impôt.Ilfautsystématiquementpasserparunenégociationauprèsdesétatsprovinciaux(quiprélèveeux-mêmes
l’impôt).Unepétitiondemanded’accorderunecertainesomme,etlesouverainprécisequesilademandeestsystématique,
c’estpourassurerlaprotectiondupays(arméepermanente).LesÉtatsseréunissent,discutentdelasommepuisaccordentla
promessed’unesomme.Cettepétitiondesimpôtsestunfreinaupouvoirabsolu.Lessouverains,àcertainsmoments,ontessayé
d’imposer eux-mêmes leurs sommes, mais de manière générale, pendant toute la période moderne, le souverain ou le
gouverneurgénéraln’ontjamaispusepasserdelanégociationaveclesÉtatsprovinciaux.Plusdelamoitiédesressourcesde
l’Étatreposentsurcesimpôts.
39
LesPays-Basespagnols
Cenomestconsacrépourdésignerlapériodedeladeuxièmemoitiédu16esiècleetdu17esièclelorsque
lesouverain,PhilippeIIpuissessuccesseurs,estinstalléenEspagne.LesPays-Basnesontpasunecolonie
mais bien une partie des territoires soumis au souverain (qui possède toujours les différents titres par
provincesdesPays-Bas).Ildélèguesonpouvoirauxgouverneursgénéraux.
A. LascissiondesPays-BassousPhilippeII
a. Lecontextepolitiqueetsocio-économique
A la suite de Charles Quint, les Habsbourg d'Autriche siégeront sur le trône impérial tandis que les
Habsbourg d'Espagne régneront en Espagne, aux Pays-Bas, en Franche-Comté, en Amérique, ….
L'abdication de Charles Quint avait eu lieu en 1555 dans le Palais de Coudenberg devant les conseils,
gouverneurs,…cérémonieaucoursdelaquellelesouveraintransmetsespouvoirsàsonfilsPhilippeII.
Philippe II est à la tête d’une monarchie catholique, tous ses territoires ont cette religion en commun.
PhilippeIIauracommebutdemaintenirl’unité:ilévangélisedemanièreforceoupersécuteetexpulsedes
territoiresjuifs,musulmansetprotestants.
LenouveausouveraindesPays-BasvitàMadrid;unesériedegouverneurssesuccèdentdoncàlatêtedes
Pays-Bas.MargueritedeParme,sasœur,enseralagouvernantegénéraleentre1559et1567:c'estàpartir
decemoment-làquedestroublesnaissentdanslesPays-Bas.Lascissionquienrésulteran'estenrien
prévisiblelorsdel'accessionaupouvoirdeMargueritedeParme,elleestdueàuneséried'élémentsdont
la question religieuse du choc entre protestants et catholiques, au centre des débats mais pas seule
responsable.
Lapremièreraisonestprobablementl'absolutismedePhilippeIIquichercheàsecomportercommeun
roiadhérantàl'idéedemonarchieabsoluefondéesurl'unitéreligieusecatholique,dansladroitelignede
son père. Il n'a néanmoins pas la souplesse ni le charisme de ce dernier ; il a une vision autoritaire du
pouvoir. Il veut mener une politique centralisée et doit s'appuyer sur une gouvernante qui relaie sa
politiquemettantenpérillesparticularismesetleshabitudes(privilèges)danslesPays-Bas.Lapression
fiscales'accentueetlanoblesseperdduterraindanslepartagedupouvoir.
LesPays-Bassontplustouchésparlecalvinismequeparleluthéranisme:faceauxabusdesprivilègesde
l’Église, ils sont partisans de la propriété privée dans un mouvement très organisé de pasteurs et de
communautésbienconstituées.PhilippeIIestimequ'ilfautmieuxgérerleschrétiensets'appuiesurles
structures de l’Église dans les Pays-Bas pour établir de nouveaux évêchés (de six à quatorze), soit des
circonscriptionspluspetitespourencadrerleschrétiens.Ilaladécisionquantauchoixdesévêquesetdes
abbésetnenomineplusdesgrandesfamillesnoblesmaisplutôtdesgensenquiilpeutavoirconfianceet
quiluisontfidèles;iltouchelesprivilégiésdanslesPays-Basetsuscitelemécontentementduclergéetde
lanoblesse.
40
Ladeuxièmemoitiédu16esiècleestégalementmarquéeparuneterribleinflationentraînéeparl'arrivée
demétauxprécieuxaméricains:lahaussedesprixestconsidérableendécalagetotalavecl'adaptationdes
salaires.
C'estsurceterreaud'instabilitésocialeetfinancièrequesedéveloppelaréformeprotestanteàvenir.Sile
malaisereligieuxajouéungrandrôledanslestroublesaveclespersécutionsdesprotestants,iln'estpasle
seul:lafiscalitégrandissante,lapolitiquedecentralisation,lapersonnalitédusouverainetsatendance
versl’absolutismeouencorelacensurelesontfortementinfluencés.
LeConseild’Étatexistetoujoursmaisestdemoinsenmoinssouventréuniafindemettrelanoblessesurlecôté.Lesvilleset
leursprivilégiésquiconstituentleTiers-Étatdansl’assembléedesÉtatsserontégalementtouchéesparlesmesuresdusouverain
etl’oppositionsecristallisedanscesréunions:lePrincedécidedenommerlesdoyensdesmétiersetvérifiequifaitpartiedes
magistratscommunaux.Desmesuressontprisesfaceàl'augmentationdelapauvreté,duvagabondageetdelamendicitépour
réprimerledésordre.
b. ChronologiedelarévoltedanslesPays-Bas
➢ LeCompromisdesnobles
Enavril1566,lesnoblesdécidentdeserendreaupalaisdeBruxelles,réclamantuneaudiencepourfaire
comprendreàMargueritequ’ilssontsensiblesauxdifficultésdesprivilégiésetdespauvres(=leCompromis
desNobles).Ilsviennentluidemanderlasuppressiondesplacardscontreleshérétiques,faceàquoielleest
sensiblemaisimpuissante.Ilsontpeurquecettepolitiquerigoureuseamèneàunerévolteetessaientde
négocierunepolitiqueplussouple.DesconfédérésvontmêmeêtreenvoyéschezPhilippeIImaisilsontreçu
avecbeaucoupdedédain.
➢ Lafurieiconoclaste
Ledangeresttrèsperceptiblecarlafurieiconoclastecalvinistesévitenaoût-septembre1566.Lesrécoltes
ontététrèsmauvaisesetontdonnélieuàunefamine.Dessymboles(images,statues)catholiquessont
détruitslorsdecettecrisedu16esièclebaséesurunerévoltesocialemaisquiprenduneformereligieuse.
Margueriteestprêteàfairedescompromis,suiteàquoilesouverainenvoieleducd’Albe(pasunmembre
delafamille,chefmilitaire)pourl’assister.Ellen’acceptepascettearméevenued’Espagneàsescôtéset
sedémetdesachargeetcedernierdevientgouverneurgénéral:unvéritablerégimedeterreursemeten
placepourréprimerlestroubles.Ilrecrutedesmercenairespourfairelaguerreauxcoupablesd'exactions
danssesterritoires.
➢ LeConseildesTroubles
LeConseildesTroublesestcrééen1567afindepunirlesrebelleseticonoclastescoupablesdes«troubles
»de1566afindesupprimerleprotestantismeetlestroublesdanslesPays-Basespagnols.Onl’appellerale
«TribunalduSang»enraisondelasévéritédesessanctions.Ledoubleobjectifdecentralisationpolitique
(enévitantlesÉtatsGénéraux)etderedressementdel’Églisecatholiquenefutpasatteint.
Aucontraire,larépressionbrutale,lessentencesexcessivesetl’ampleurdesconfiscationscontribuèrentà
alimenterlarésistanceàl’autorité.Lemécontentementmonteraencored’uncranlorsdeladécapitation
descomtesd’EgmontetdeHormessurlaGrandPlacedeBruxelles,le5juin1568.Cetactesonnacomme
unedémonstrationdel’autoritédusouverainsurlesrésistants,cesdeuxderniersétantconsidéréscomme
41
lesmeneursalorsqu'ilsétaientcatholiquesetenfaveurdelapolitiquedeCharlesQuint(maisprévenaient
dudanger).
Larésistances'organisesousladirectiond'unnoble,leprinced’Orange,quiseconvertitaucalvinismeet
monteunearméepourrésistercontrelesouverain.
➢ PrisedelaBrielleparles«Gueuxdelamer»
e des Pays-Bas
LarévolteprendraducorpsaveclaprisedelaBriellele1eravril
1572parles«Gueuxdelamer»,desgensdelamerayantété
chercher de l’appui en Angleterre pour armer la résistance. Leur
insigneest:«Plutôtturcquepapiste»,cequidémontreleurrejet
dupapeetducatholicisme.Ilsmettentenplaceuneimportante
propaganded'oppositionauroietlemouvementsegénéraliseen
HollandeetenZélandeoùl’arméedusouverainnepourrapasles
empêcherdes’installeretdeprogresser.
C’est un échec pour Duc d’Albe qui est rappelé en Espagne, de
nouveaux gouverneurs (toujours militaires) sont envoyés. Ils
remporteront certaines victoires, mais en 1576, c’est la furie
espagnole. Les armées espagnoles, composées de mercenaires,
n’ont pas été payées à temps (le souverain s’est endetté en les
payant)etlessoldatssaccagenttout.
er:
»
➢ LaPacificationdeGand
Le 8 novembre 1576, les Pays-Bas tentent de créer une nouvelle unité à travers un compromis, la
PacificationdeGand.Ils'agitd'unactedefédérationdesdix-septProvincesafindemaintenirlapaixentre
ellesetassurerleurmutuelleassistance.Ilsyproclamentleurvolontédevoirpartirlestroupesespagnoles
desPays-Basetexigentlasuspensiondesplacardsdécrétésparleducd’Albecontreleshérétiques.La
réunion des États Généraux permettra de rétablir l’ordre dans le pays. La liberté de conscience est
proclamée, sauf en Hollande et en Zélande où le calvinisme s’impose tandis que le catholicisme reste
prééminentailleurs.Cetaccordrésulted’unevolontédecompromissurlaquestionreligieuse,maisn’aura
qu’uneportéeéphémère.
Maislenouveaugouverneurgénéralnerespecterapastoutcela.Ilsonttoutessayé,laseulesolutionestla
répressionmilitaire.
➢ L’Uniond’Arras
AlexandreFarnèse,gouverneurdesPays-Basde1578à1592,estconsidérécommeceluiquiapufédérer
lescatholiquesautourdelareconquêtedelapartiesuddesPays-Basjusqu’àAnversens’appuyantsur
ceuxquiveulent,modérément,maintenirlecatholicisme.LesÉtatsduSud(FlandreGallicante)sontdes
territoires assez ruraux (peu peuplés, avec beaucoup d’abbaye et de propriétés nobles) où le
protestantismen’apaspris.Ilspensentqu’ilfaudraitseréconcilieravecPhilippeII.
Le6janvier1579,lesprovincesduSudcatholiquessignentl’Uniond’Arras:unecoalitiondesÉtatsd’Artois,
deHainautetdeLille-Douai-Orchiesenréactionfaceàl’influencecroissantedescalvinistesradicauxdans
42
lesvillesdeFlandreetduBrabantainsiqu’auseindesÉtatsGénéraux.CetteunionscelléeparleTraité
d’Arrasdu17mai.Lesprotestantsfuientverslenordetleterritoiredeviendraenmajoritécatholique.
➢ L’Uniond’Utrecht
L’Uniond’Utrecht,réunissantlesÉtatsdunordcalvinistes,yrépondimmédiatementenjanvier1579,dans
lebutdepoursuivrelarésistancearméecontrelapolitiquedePhilippeII.
La chronologie de la Révolte des Pays-Bas
Union d’Utrecht
Union d’Arras
➢ LaRépubliquedesProvincesUnies
Le26juillet1581,lesÉtatsGénérauxrejettentsolennellementl’autoritédePhilippeII:ilssenomment
RépubliquedesProvincesUnies.Farnèseprendleportd'Anversle17août1585,signaldelafermeturede
l’embouchuredel’EscautauxProvincesUnies,soitladéclinaisonduportd’Anversetledéveloppementdu
port d’Amsterdam (qui devient la capitale). Personne n’acceptera cette autonomie avant 1648, mais
personnen’arriveraàreprendrecesterritoires.
LaRépubliquedesProvincesUniesdoitvivredemanièreautonome:ellen'apasdesouverainàsatêteet
aucune richesse naturelle lui permettant de vivre. Elle dispose cependant d'une expertise avérée en
navigationetencréationdesbateaux:toutesarichessereposerasurlathalassocratie,unprincipedes
comptoirscommerciauxetdedominationdesmers.LaRépubliques’imposecommelaplusgrandeforce
commercialedumondeets’installedanslesAntillesetenAmériquedunord;lesProvincesUniesveulent
devenirlesconcurrentsdirectsduroid’EspagnequiestaussileroiduPortugal.L’Espagneestappauvrie
carelleadépensébeaucoupd’argentquepourempêcherl’émergenced’unegrandepuissance.
➢ TrêvededouzeanspuisPaixdeMünster
En1598,PhilippeIIcèdelesPays-BasàsafilleIsabelleetàsonfuturgendre,l’archiducAlbert.LaTrêvede
douzeansalieuentre1609et1621,avantquenesoitproclaméelaPaixdeMünsteren1648,oùladivision
duNordetSudestofficiellementreconnue.OnparleradésormaisdesPays-BasméridionauxpourlesPaysBasduSud.
43
B. LerègnedesArchiducs
a. LesArchiducs,souverainsdesP ays-Bas
S'ilssontsouverainsdesPays-Bas,lesarchiducsdoiventcependantrendredescomptesàl’Espagne.De
plus,ilestdécidéquelesPays-Basreviendrontdanssonorbites’iln’yaplusd’héritier.Lesarchiducsont
pourrôlederestaurerl’autoritédanslesPays-Basméridionaux.IlsfontleurJoyeuseEntréeauxPays-Bas
pours’yintroniseretparticiperontàtouteslesmanifestationspubliques.
Ilsmarquentleurprésencedansl’espacepublicetlarendentpermanenteparl’intermédiaired'artistes
pour l'ancrer dans l'histoire à travers des peintures. Les souverains assistent aux processions qui se
multiplient:ellessontunmoyend'associertoutelapopulationàunmouvementreligieux.L'archiduchesse
accompagnerégulièrementcespèlerinages.
b. Unprogrammepolitiqueetreligieux
Les archiducs demandent à l’architecte de la cour, Wenceslas Cobergher, de construire un sanctuaire
baroque,marquantainsilacontre-réforme:lesanctuaireNotre-DamedeMontaigu(construitentre1609
et1624),maisaussil'égliseNotre-DamedeBonSecoursàBruxellesetd'autres.
Des couvents et des écoles (Collège des Jésuites et Couvent des Augustins à Bruxelles), activement
soutenusparlesarchiducs,sontinstallésdanslesvilles.L’empreintedecescouventsdanslavilleesttrès
présentesurtoutàBruxelles.
La pauvreté à la suite des troubles religieux n’a pourtant pas disparu : le pays est absolument ruiné à
l'arrivéedesnouveauxsouverains.DesMonts-de-piétésontcréésplutôtquedefaireappelauxusuriers,
assezmalvusàl'époque.Lespluspauvrespeuventallerymettreengageleursobjetsetlesrécupérer
quandilspeuventrembourser.Danslecascontraire,leursbienssontmisenventepourqueleMont-depiétépuissecontinueràfonctionner.
Lesprincess'accordentleserviced’artistes(ex.Rubens)enlesfinançant.
Unautreaspectdeleurancrageestlamiseparécritdescoutumesetdesloisparl’Éditperpétueldu12
juillet1611.Dansunpaysoùlamajoriténesaitpaslire,lanouvelleloiestplacardéedanslesendroits
publicsetproclaméeoralement.C’estunemanièrerenforcerlepouvoirdusouverainetlasécuritédes
justiciables. On recourt massivement à l’écrit dans les procédures de justice, le notariat se développe
égalementàcetteépoque(testaments,lettrespatentes,témoignages,codifications).
C. Lesconvoitisesfrançaisesau17esiècle
Le17esiècleasouventétéqualifiédesiècled'orpourlesProvincesUniesetdesiècledemalheurpourles
Pays-Bas ; les deux expressions sont assez réductrices. A partir de 1621, les Pays- Bas retournent sous
l'autorité des Habsbourg d'Espagne faute d'héritier pour lesouverain. On voit le retour du système de
gouvernementpardélégation.
44
a. LeretourdesPays-BassouslasouverainetédesHabsbourgd 'Espagne
PhilippeIV,roid'Espagne(1621-1665)désigneunegouvernante(Isabelle)pourcontrôlerlesPays-Bas.Mais
au moment où ceux-ci incarnent le théâtre principal de la guerre franco-espagnole (1635-1659), les
gouverneurssesuccèdent(doncl’archiducLéopold-GuillaumedelafamilledesHabsbourgde1647à1656).
L'économie et la population de ces derniers (souffrent de la traversée des armées, des combats mais
égalementdelaréquisitiondelapopulationenvivreetargent)sontforttouchésparlesconflitmaisle
gouverneurvitfastueusementdansunecoursomptueuse.
DeplusenplusdegouverneursgénérauxmilitairessontenvoyéssouslerègnedeCharlesII(1665-1700),
au fur et à mesure du développement des différents conflits, et ceux-ci seront souvent désavoués. Le
souverainétaitquelqu'undetrèsfaible(“débile“)fitmentirlespronosticsquimisaientsursamortrapide,
maisàpartirde1680ildevientincapablederégner.
b. Lesrivalitésfranco-espagnoles
Larivalitéfranco-espagnolereposesurlavolontéd'expansionduterritoirefrançaissouslerègnedeLouis
XIV (1643-1715). Les conflits qui opposeront les deux pays sont très durs ; tant les Pays-Bas que la
Principauté de Liège sont touchés. La France en sortira finalement victorieuse, comme en témoigne le
grignotagedesPays-Bas.
c. Guerrefranco-espagnole(1635-1659)
CetteguerreentrelaFranceetl'EspagneaboutitsurleTraitédesPyrénéesdu7novembre1659.LaFrance
yobtientl'Artois(saufAireetSaint-Omer)ainsiqu'unesériedeplacesfortesenFlandre,enHainautetau
LuxembourgcommeGravelines,Mariembourg,Philippeville,ThionvilleouMontmédy.
d. GuerredeDévolution(1667-1668)
LouisXIVestmariéàlasœurduroid’EspagneetestimequevuqueCharlesIIestnéd’unsecondmariage,
ilestl’héritierlégitimedesPays-Bas.
LaGuerredeDévolutionvoits'affronterlaFrancecontrel'Espagne,l'Angleterre,laSuèdeetlesProvinces
Unies.Le2mai1668,leTraitéd'Aix-la-Chapelleestsigné,parlequellaFranceobtient:
-
UnepartiedelaFlandre,lelongdelacôtedeNieuport
-
LaFlandregallicante(Lille)
-
Plusieurs forteresses dominant les cours d'eau : Courtrai, Audenaerde, Tournai, Ath, Binche et
Charleroi.
Cesacquisitionsaboutissentsurunefrontièreendentsdescie,difficileàprotéger.L'idéeduPréCarréest
soutenue à partir de 1672 par Vauban qui prévoit d'établir une ligne de forteresses tout autour du
territoirefrançais.
45
e. GuerredeHollande(1672-1678)
La Guerre de Hollande oppose la France et ses alliés à l'Espagne, les Provinces Unies, l'Autriche et la
Lorraine.ParleTraitédeNimèguedu17septembre1678,laFrancerendlesplacesconcédéesen1668par
l'Espagne,maisobtient:
-
LaFranche-Comté
-
LamoitiéduHainaut(Condé,Valencienne,Baval,Maubeuge,Cambrai)
-
UnepartiedelaFlandre(Ypres,Cassel,Poperinge,Warneton,Wercicq)
-
AireetSaint-Omer,soitlerestedel'Artois
En1678,lesPays-BasetlaFranche-Comtéontétélargemententamésparlesconflitsfrançais.Unepolitique
desRéunions,d'annexions,estdécrétéeparLouisXIVaulendemainduTraitédeNimèguepourrenforcer
lafrontièreNord-EstdelaFrance.
f. Guerrehispano-française(1683-1684)
LeTrêvedeRatisbonnedu15août1685permetàlaFrancederécupérertroisplacesfortes:Chimay,
LuxembourgetBeaumont.
g. Guerredelaligued'Augsbourg(1688-1697)
LorsdelaGuerredelaLigued'Augsbourg,laFranceaffrontel'Espagne,lesProvincesUnies,l’Autriche,la
Suède,l'Angleterreetd'autresÉtatsdel'Empire.ElleaboutitsurleTraitédeRuswijk,le20septembre
1697.LaFranceyrestituelesplacesenlevéesen1684:Chimay,LuxembourgetBeaumont.
Aucoursdecetteguerre,en1695,Bruxellesestbombardée.Lavilleestassiégée;leconflitesttelqueles
payssontprêtsàdétruiredescitéspourmontrerleurpuissance:untiersdelavilleestravagé.
Des Habsbourg d’Espagne aux Habsbourg d’Autriche
46
h. Unereconstructionrapide
Bruxellesseranéanmoinsreconstruiteen
troisansdèsquelesPays-Basretournent
à la paix sous le gouverneur général
Maximilien-Emmanuel de Bavière, de
1682 à 1704. La Grand Place et ses
alentours sont détruits mais l'hôtel de
villeestpeutouché:saflècheservaitde
cible aux bombardements. Dans la
reconstruction, une volonté naît de
montrer et de restituer l'identité du
travailetdescorporationsduMoyen-Âge.
D. L'évolutiondesinstitutionsgouvernementalesetlesconseilscollatéraux
AffaiblissementduConseild’État:
LesystèmetraditionnelestsupplantéparlesJointesespagnolesquisechargentdel'intendanceetdes
opérationsmilitaires;ellesseréunissentenmargedesconseilscollatéraux.Deplusenplusdespécialistes
deguerreespagnolessontenvoyerauxPays-Baspourstatueretdeviennentlespremiersconsultés,avant
leConseild’État.Cedernierestdoncaffaibli;lanoblessequienfaisaitpartiesesentdépossédéedupouvoir
quin'estpluspartageravecceuxquifonttournerl'économie.LescompétencesduConseildesFinances
sontétenduesauxdouanesetauxaffaireséconomiques
Deplus,lavénalitédesofficessedéveloppeau17esiècle;c'estunprocessusquiconsisteàvendredes
chargesauxparticuliers.L’étatabesoind’argentetilestdésormaispossibled'accéderauxinstitutionsen
achetantsacharge,chacunentreenfonctiondesesmoyensetnonplusdesescompétences.L’Étatytrouve
d'importantesrentréesd'argentmaismaislesacheteurssesententdésormaispropriétairesdeleurcharge
etespèrentlalégueràleurhéritier,puisqu'elleasouventétéachetéepourlebesoindereconnaissance
plusquepourremplirlachargeelle-même.Ilamorceainsisapropredestructioninternecarlesystèmeest
difficileàenrayerunefoislancé.
E. Laguerredesuccessiond'Espagne(1691-1714)
a. DesHabsbourgd'EspagneauxHabsbourgd'Autriche
Des Habsbourg d’Espagne aux Habsbourg d’Autriche
Philippe III
Louis XIII x Anne d Autriche
(1610-1643)
Philippe IV
(1621-1665)
Marie-Anne x Ferdinand III
(1637-1657)
Louis XIV x Marie-Thérèse
(1643-1715)
Charles II
(1665-1700)
Marguerite-Thérèse x Léopold Ier
(1658-1705)
x Eléonore de
Neubourg
Louis Dauphin de France Marie-Antoinette
(1661-1711)
x Maximilien-Emmanuel
de Bavière
Louis
duc de Bourgogne
(1682-1712)
Joseph Ier
(1705-1711)
Charles VI
(1711-1740)
Philippe duc d Anjou
Philippe V
(1700-1746)
Philippe V: roi d’Espagne
Louis XV
(1715-1774)
Joseph Ier: empereur
Louis XIV: roi de France
La succession d’Espagne
47
LaGuerredeSuccessiond'EspagneopposelaFranceàunelargecoalitioncomposéedel'Angleterre,les
ProvincesUnies,l'empereurHabsbourgd'Autriche,laplupartdesprincesallemands,leDanemarkpuisplus
tardlePortugaletlaSavoie.Leconflitsedéclenchesuiteaudécèssanshéritierdudernierreprésentant
desHabsbourgd'Espagne,CharlesII.
LouisXIVtentederevendiquerl'héritageespagnolparsonmariageàlasœurdeCharlesII,maissaitque
lesautrespuissancesrefuseront;illerevendiquedoncpoursonsecondpetit-fils,Philipped'Anjou(17001746).
Faceàlui,unecoalitionseformederrièreLéopoldIer,descendantlégitimedesHabsbourg,maiscedernier
meurten1705.SonfilsJosephIerprendsasuccessionentantqu'empereur,etlefrèredecelui-ci,Charles
VI,seprésenteentantquecandidatautrôneespagnol.Cependant,JosephIermeurten1711pourlaisser
letrôneimpérialàCharlesVI;pluspersonnenesoutientlacandidatureespagnoledecedernier,depeur
qu'ilreconstruiseunénormeempire.
Ilestfinalementdécidéquel'héritageespagnolseradivisé:lesPays-Bas25etlesterritoiresitalienssont
remis aux Habsbourg d'Autriche tandis que l’Espagne et les Indes revient à la France (Philippe d’Anjou
devientPhilippeV,roid’EspagneetdesIndes).
La guerre aboutit sur la signature des Traitésd'Utrecht (11avril 1713) et de Rastadt (6 mars 1714). Le
premier,entrelaFranceetl'Espagned'unepart,l'Angleterre,lesProvincesUnies,lePortugal,laSavoieet
laPrussed'autrepart,metfinàlaGuerredeSuccessiond'EspagneettransmetlesPays-Basespagnolsaux
ProvincesUnies,maisenfaveurdesHabsbourgd'Autriche(tutelle)26.Parailleurs,laFrancerestitueTournais
etleTournaisisainsiqu'unepartiedelaFlandreoccidentale(Furne,Dixmude,Menin,Ypres),ditelaFlandre
rétrocédée.Acetteoccasion,lesfrontièresméridionalesdelaBelgiqueactuellesontquasimentfixées.
LesecondtraitéestsignéentreLouisXIVetl'empereurCharlesVI,etconfirmequelesPays-Basseraient
transmisàl'Autrichedèsl'installationdesgarnisonshollandaisesdanslesplacesdelaBarrière.
LesTraitésdelaBarrière,conclusen1709etmodifiésen1713,sontunpacteentrelespuissancesmaritimes
(Angleterre,ProvincesUnies)pourgarantirauxHollandaisledroitdemaintenirunegarnisondansunesérie
deforteressesdesPays-BasméridionauxafindeseprémunircontreuneéventuelleoffensivedelaFrance.
25
Conscience de l’ensemble que forment les provinces. Même si elles continuent à vouloir garder leurs autonomie et
particularisme,ellesviventensemblessouslamêmetutelle,avecdesinstitutionscommunes.
26
L'AngleterreetlesProvincesUnies,grandespuissancesmaritimesfatiguéesdesmenacesd'expansiondelaFrance,décident
deconstruireunebarrièreauxPays-BaspourlesprotégeretéviterquelaFrancenes'étendeaunord.LesP-Bsontplacéssous
tutelleautrichiennemaismaisavecdestroupeshollandaises,caronnefaitpastotalementconfiance.
48
Ils stipulent également la modification des limites de frontières entre les Pays-Bas autrichiens et les
ProvincesUnies,etletroisièmetraitéde1715prévoitl'installationauxfraisdesPays-Basautrichiensde
garnisonshollandaisesdanslesplacesdeNamur,Tournai,Menin,Furnes,Warneton,Ypresetaufortde
Knokke,tandisqu'unegarnisonmixteseraitcantonnéeàTermonde.Lafermeturedel'Escautfutégalement
confirméeàcetteoccasion.
Des Habsbourg d’Espagne aux Habsbourg d’Autriche
Ce traité est plus au
service
de
la
Hollande:ilsexigent
le payement d’un
subsidequelesPaysBas
autrichiens
doivent payer aux
troupes
hollandaises. C’est
unnouvelimpôt,qui
devra être négocié
chaqueannée.
Le prince souverain
des
Pays-Bas
séjourne désormais
encore plus loin,
puisque Charles VI
estinstalléàVienne.
Des Habsbourg d’Espagne aux Habsbourg d’Autriche
49
LesPays-Basautrichiensetlafindel'AncienRégime
Lesterritoiresautrichienss'agrandissentconsidérablementàl'occasionduconflitdesuccessionespagnol.
Ilsoccupentl'EuropecentraleenAutricheetenHongrie,maisaussileSuddel'ItalieetlesPays-Bas,isolés
maisliésàlamer.La gestion des territoires va devoir changer: les nouvelles mettent une semaine au
minimumpourarriver.
A. Souverainsetgouverneursgénéraux
a. Ladélégationdespouvoirs:unetraditionrenouvelée
CharlesVIestl'EmpereurdesPays-Basde1711à1740etdélèguesespouvoirsàEugènedeSavoie27entre
1716 et 1724. Cependant, il ne se déplace jamais sur les territoires des Pays-Bas. Un ministre
plénipotentiaire(quialespleinspouvoirs)estenvoyéàsaplace:leMarquisdePrié(italien).Ilvadevoir
s’arrangeravecleséliteslocalesalorsqu’ilneconnaîtpasleterritoire.Maislesmembresdel’aristocratie
ontprisleursaisesetsessontaffranchies.L’envoidequelqu’unpensantpouvoirsecomporterdemanière
autoritairenesepassepasbienetlespremièresannéessontchaotiques.
27
Nobleauxexploitsmilitairesimportants:ilanotammentarrêtélesTurcsauxportesdeVienne.
50
Marie-Elisabeth,sœurdeCharlesVI,estfinalementchoisiecommegouvernante(àlaplaced’Eugène)de
1725à1741pourstabiliserlasituationetrestaurerlaviedecouràBruxelles.Ladélégationdespouvoirs
s'exercesurlebrillantmodèleespagnoldeCharlesQuintquiavaitégalementfaitappelàsasœur.
SuiteaudécèsdeCharlesVI,c'estMarie-Thérèse,safilleaînée,ditel'«Impératrice»(mêmesiellenel'a
jamaisréellementété)quiluisuccèdeentantquesouverained'Autrichede1740à1780.Elleestnéanmoins
vue,àcausedesongenrenotamment,commeunpersonnagefaible.Lescontestationsdelasuccession
sont nombreuses et donnent lieu à une nouvelle guerre dès son arrivée au pouvoir. Elle s'impose
néanmoinsentantquesouveraine28etobtientunsoutientrèsfortdanssesterres.ElleépouseFrançoisde
Lorrainequideviendraempereur29.Elleeut16enfantsdont10quisurvivront(JosephII,Marie-Antoinette),
sanspourautants'effacerdupouvoir:ellegouverneetesttoujoursprésenteauprèsdesesministres.
La deuxième moitié du 18e siècle est présentée comme une période de paix et de faste en matière
économique.LesprémicesdelarévolutionindustriellesemettentenplaceetlerègnedeMarie-Thérèse
estvucommeuntempsdeprospérité.Cettedernièren'ayantcependantjamaisposélepiedauxPays-Bas,
c'estCharlesdeLorraine,sonbeau-frère,quidevientgouverneurdesPays-Basentre1741et1780.Ilavécu
àBruxellescommetouslesgouverneursgénéraux,brillamment,ets'estinvestidanslesPays-Basentant
que chef du pouvoir comme s'ils lui appartenaient. Certains virent en cette personne impliquée un «
souveraindesPays-Bas».
JosephII,filsaînédeMarie-Thérèse,luisuccèdeen1780.Contrairementàsesprédécesseurs,ilchercheà
connaîtresurleterraintouslesterritoiressoumisàsonadministration:ilvisitelesPays-Basen1781eten
revientmécontentdeleurautonomie,leurparticularismeetleurnationalisme.IlinstauresasœurMarieChristine(avecsonmariAlbert-CasimirdeSaxe-Teschen30)commegouvernante.LesréformesqueJoseph
IIimposeraauxPays-Bas,malperçuesetmalcomprises,mènentàuneoppositiond'abordsourde,maisqui
donneralieuàunerévolutiondès1789pourchasserlesAutrichiensdesterritoires.
LesÉtatsquisedéfontdelatutelledeJosephIIetrejettentl'AncienRégimedécidentdesenommerÉtats
BelgiquesUnis,enréférenceauxÉtats-Unisd'Amériquequiviennentd'accéderàl'indépendance.Léopold
II, nouvel empereur autrichien, parvient cependant à récupérer les Pays- Bas une année plus tard et y
réinstaure Marie-Christine. Son successeur, François II (1792-1794) doit faire face à une première
occupationfrançaiseentre1792et1793etrestaureunenouvellefoisenmettantCharlesdeHabsbourgà
lagouverneen1793-1794.L'année1794marquelafindel'AncienRégimeenBelgiqueparlavictoiredes
troupes françaises sur nos terres face au recul des Autrichiens. Jusqu'en 1815, les Pays-Bas seront
incorporésàlaFranceetdesdépartementssontcréésàlaplacedesanciennesprincipautés.
b. L'évolutiondurôledugouverneurgénéralau18 e siècle
Leterme«Pays-Basautrichiens»maisaussi«ProvincesBelgiques»estdéjàadmisetutiliséàl'époque.Le
gouverneurgénéralestlereprésentantdusouverain,fondésurlemodèlefondéparCharlesQuint.On
assistenéanmoinsàuneforteévolutiondesonrôleau18esiècle.
28
ReinedeHongrieetdeBohême,duchessedeBourgogne,deMilan,deBrabant,deLimbourgetdeLuxembourgetarchiduchesse
d’Autriche,duchessedeParmeetdePlaisance
29
OnparleradesHabsbourg-Lorrainepourmontrerlacontinuité
30
Ilss’installent,commeleursprédécesseurs,àBruxelles,etvontconstruireunchâteauàl’extérieurdelavielle(châteaude
Laeken).
51
Lanominationparlesouveraind'unsecrétaired’ÉtatetdeGuerre,àlafoissecrétaireetconseillerpour
lesaffaireslesplusimportantes,àpartirdelafindu16esiècleetdurantle17esiècle,étaitunemanièrede
contrôlerlegouverneurgénéral.Ildevientau18esiècleunesortedesupersecrétairedesPays-Bas.
Souslerégimeautrichien,cerôled'assistanceetdecontrôlefutreprisparleministreplénipotentiaire,
nomméparVienne,etenprincipeplacésouslesordresdugouverneurgénéral;soitunreprésentantde
l'Autricheauprèsdupremierreprésentantdel'Autriche(quin’étaitpaschoisipoursesqualitésmaispour
sesliensfamiliaux).Leministrepeutremplacerlegouverneurensonabsence,ilestenquelquesorteun
Premier ministre qui fera évoluer la fonction du gouverneur général vers une fonction représentative
tandisquelepouvoirministérieldeviendrapluseffectif,enconnexiondirecteavecVienne.
Malgré les limites apportées aux prérogatives des gouverneurs généraux, ceux-ci étaient entourés du
décorumréservéausouverainqu'ilsreprésentaientdanslesPays-Bas:onpermetaugouverneurd'avoir
unecourbrillanteetdes'endettermais«legouvernementdoitenapparencetoutfaire,maisdanslefond
nepasfaireunpassansordre.»
UneplaceroyaledédiéeàCharlesdeLorraineestconstruitesurlesruinesduCoudenberg;Marie-Thérèse
acomprisquesonpouvoirdanslesPays-Bass'appuyaitsurlefasteconsacréàsonbeau-frère,mêmesi
l'AutricheestenpleineGuerredeSeptAns.Enréalité,c'estleministreplénipotentiairequigouvernedans
l'ombre, loin des projecteurs : un modèle qui préfigure la monarchie (un représentant et son
gouvernement)estmissurpied.
B. L’Étatmoderne:entrecentralisationetspécialisation
L'administrationdesPays-Basautrichiens;uneévolutionentroisétapes
a. 1 e étape:1715-1725:Tâtonnementsetessaisenvued'établirunrégimea bsolutiste
Lesgouverneursreçoiventdeslettrespatentesaveclesdirectivesdusouverain.LesPays-Bas,sortantde
plusieursannéesdeconflit,sontaffaiblisetémettentdesprotestationsofficiellesquitournentenémeutes
lorsqu'elles ne sont pas écoutées. Il n'y a aucun système policier réellement en place ; des troupes
composéesdebourgeoisgardentlesportesdelavillelanuitetsontpeufiables.
Danslesystèmeabsolutiste,legouvernementrenonceauxconseilscollatérauxetdonnelaparoleauseul
Conseil d’État, dans lequel les dissensions sont violentes. De plus, le gouverneur, Eugène de Savoie ne
pouvantsedéplacersurplace,estremplacéparunministreplénipotentiaireimbudelui-même,leMarquis
dePrié.Lesmembresdel’aristocratieestimentqu’ilssontlàpourpartagerlepouvoiravecleministre,alors
que ce dernier se voit comme un imposeur de pouvoir, et qu’il peut uniquement être conseillé par les
membresduconseilsd’État.Sonautoritéestmisealorsendangercariln'estpasreconnuparlesnoblesdu
gouvernement(quifinissentparneplusvenirauconseilsd’État)
Alorsquel'autoritéestdéléguéeausouverain,sansdiscussion,lesmembresdelanoblesseestimentavoir
ledroitaupouvoirpartagé:ilsnesupportentpasqu'unministreprennedesdécisionssansleuraccord.Le
gouvernement est donc désavoué par ses membres eux-mêmes, ainsi que par la population. Le régime
autrichiencommencesousdesmauvaisauspices,etlatentatived'imposerunl'absolutismeestunéchec.
De plus les populations des Pays-Bas doivent entretenir les garnisons hollandaises (perçue comme une
secondetutelle),enplusdesimpôtsalorsquelespopulationssontdéjàassezmalenpoint.
52
OnvoitalorsdesincompréhensionspuisdesprotestationsdepuislesÉtatsprovinciaux,aumoyendenepas
accepterlesimpôts(pourallercontrelapolitiqueautoritairevoulue).Cequiamèneàdesconfrontations.Le
momentdeladécapitationdeFrançoisAnneessens,leaderd'uneprotestation,démontreledécalagetotal
desdirigeantsparrapportàlapopulation,unesituationcomplexeoùlerégimeautrichienestcontraintde
démontrersaforceparuneexécutionsurlaGrand'PlacedeBruxelles.
LesautrichiensvoientlesPays-Bascommeuneoccupationetnoncommeunetutelle.Lesdirigeantseurent
cependantl'intelligencederetournerversunmodèlepolitiquequieutdusuccèsdanslepassé:ladélégation
du pouvoir à quelqu'un de proche de la famille, conseillé par les spécialistes locaux des trois conseils
collatéraux.
b. 2 e étape:1725-1785:Modernisationdesinstitutionsdanslerespectdescoutumeset
desl ibertés
Apartirde1725,jusqu'en1785,c'estsurcemodèlepluséquilibréquelesAutrichiensgouvernentlesPaysBas.LegouvernementdeBruxellespeutalorsprocéderàunemodernisationdesinstitutionsdanslerespect
des coutumes et des « libertés », qui tiennent tellement à cœur aux habitants des Pays-Bas et ne se
concilient pas avec un pouvoir absolu. Charles de Cobenzl sera ministre plénipotentiaire entre 1753 et
1770.Wenzel-AntonvonKaunitzestluichancelierdeCouretd’Étatde1753à1794(ilestl'équivalentdu
premierministredeMarie-ThérèsepuisdeJosephII).
Legouverneurgénéral,portantlesinsignesetlagloiredupouvoir,estenvoyéauxPays-Bas,appuyéparun
ministre plénipotentiaire. Ce dernier a les pleins pouvoirs pour remplacer le gouverneur lors de ses
déplacements;ilserafinalementmaintenu,mêmelorsquelegouverneurestsurplace,entantquepremier
conseiller.Iln'estpasnécessairementunAutrichien,maisestunambassadeurdumonarqueautrichien
auprèsdugouverneurgénéral.
Charles de Cobenzl et Wenzel-Anton von Kaunitz ont été nommés en même temps pour établir une
collaboration très étroite, via une correspondance quasiment quotidienne à propos des affaires de
Bruxelles.Ilsontfaitleursétudesensemble,àl'universitédeLeiden,horsdel'Empire.Ilssontadmirateurs
desphilosophesfrançais,sansêtreséduitpourautantparlacontestationdel'autoritémonarchiquequi
leurestpropre.Ilsserontlespremiersartisansdudespotismeéclairé.
L'échangedescorrespondancesentreBruxellesetVienne
➢ Bruxelles
Commesouslerégimeespagnol,legouverneurgénéralentretientunecorrespondancerégulièreavecle
souverain.Ils'agitd'unepartd'unecorrespondanceprivée,puisqu'ellesefaitentremembresd'unemême
famille,etd'autrepartd'unecorrespondanceofficielle,surlesprincipalesaffairesdugouvernement.La
correspondance officielle se fait en français pour l'essentiel, et un peu en allemand pour les questions
militaires.
Le ministre plénipotentiaire (avant lui, le grand maître de la cour) exerce une fonction de plus en plus
importante.Lesecrétaired’ÉtatetdeGuerreperddesoninfluencedanslesmatièresmilitaires,dontla
direction est désormais centralisée à Vienne. Il est cependant la cheville ouvrière du gouvernement de
Bruxelles,chargédelacorrespondanceavecVienneetaveclesorganessubordonnésdanslesPays-Bas;il
n'adoncaucunpouvoir,maissaittoutdesaffaires.
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➢ Vienne
LeConseilsuprêmedesPays-BassituéàVienne(inspiréduConseilsuprêmedeFlandreetdeBourgogneà
Madridsouslerégimeespagnol)estchargédelacorrespondance(enfrançais)aveclegouvernementde
Bruxellesetpréparelesdécisionssouverainessurlesprincipauxdossiersrelatifsàcespays.Ilfonctionne
de1717à1757etpermetd’intégrerlesPays-Basdanslesaffairesd’Autriche.Ceconseilestprésidéparun
fidèleconseillerdusouverain,lesmembresduConseil,quantàeux,viennentdesPays-Bas.
Apartirde1757,lesaffairesrelativesauxPays-Bassontpréparéesauseind'unbureaudelaChancellerie
deCouretd’État,sousladirectionduchancelierKaunitz;iln'yadoncplusdeconseillersvenantdesPaysBas pour proposer des solutions à Marie-Thérèse. Une correspondance très dense s'établit entre le
chancelieretleministreplénipotentiaire,quitravaillentensemblepourintroduirelesréformesdansles
Pays-Bas.KaunitzestlepremierconseillerdeMarie-ThérèsepuisdeJosephII,ilestdoncunartisandela
centralisationdupouvoir.
En1757,c’estledébutdelaguerrede7ans.Ilestimequ’ildoitavoirtouteslesmanettesenmainpourgerer
lemaintiendelamonarchie.DansunextraitderapportdeKaunitzàMarie-Thérèseen1758,celui-ciexplique
queCobenzlestlepremierconcernédanslesdécisions,dontilrendcompteàCharlesdeLorrainequiles
transmetalorsàMarie-Thérèse.Kaunitzyfaitl'énumérationdesgrandesaffairesdevantêtreprésentéesà
Marie-Thérèse.Lalettremontrequialamainetdémontrelacentralisation:laconduitedesaffairesest
dirigéeparlesministres,pasparlegouverneur,quireçoitseulementlesdehorsdupouvoir.Onobserveun
changementdevisiondeschoses:onveutduchangement,delanouveauté.
UnÉtatdeplusenplusinterventionniste
UnepolitiqueéconomiquevolontaristenaîtdanslesPays-Basdurantunepériodedepaixetdeprospérité
retrouvées. Le calme permet de relancer l'économie dans laquelle l’État intervient notamment en
construisantlecanald'Ostendeetunvéritableréseauroutierempierré.Ilchercheégalementàfavoriser
ledéveloppementducommerceetdesmanufacturesdel'époqueparletransitetexportdemarchandise,
comme en témoigne l'entrepôt du Quai au Foin, proche du canal. La politique protectionniste est
semblableàcelledeColbertenFrance;Cobenzlestd'ailleursappeléleColbertbelge.
L’État tente de lutter contre le paupérisme, la pauvreté. En effet, dans une période de prospérité,
l'augmentation de population à la veille de la révolution industrielle provoque paradoxalement
l'accroissement de la pauvreté, dans les villes notamment où les mendiants cherchent un moyen de
subsistance.Laprésencedeceux-cipeutêtreconsidéréecommedangereuseetl'idéevientdoncdeles
mettreautravaildansdesmanufactures.L'undespenseursdececonceptestleComtedeVilainXIII.Ces
maisonsdecorrectionpermettentenquelquesorted'enfermerlesvagabonds.L’Étatintervientdoncdans
ledomainedelabienfaisance,autrefoisréservéàl’Église.
Lerégimepénalestadouci:latortureestsuppriméeau18esiècle.CesareBeccaria,écrivainmilanaisdes
Lumières,rédigeunlivreauxidéesmodernesquiluttentcontrelesarchaïsmesdusystèmejudiciaire,ceà
quoilesdeuxministresnesontpasinsensibles.Maislesmagistratsetlesconseilsdejustices,conservateurs,
n’accepterontpascechangement.
L’Étatintervientégalementdansl'organisationdel'enseignement.En1772,laBibliothèqueroyale,etses
collectionsdegouverneurs,estouverteaupublic(restreint)tandisquel’AcadémieImpérialeetRoyaledes
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SciencesetdesLettresestfondéeaumêmemomentpourpromouvoirl'étude.En1773,souslapression,
lePapesupprimel'OrdredesJésuitesetlaissealorsunepartiedel'enseignementsecondaire,sousforme
decollèges,àl’État.OnvoitégalementdesencouragementsauxacadémiesdesBeaux-Artsetlacréation
d’écolesmilitaires.
Lesavancéespermettentunemeilleureconnaissancedupaysavecl'établissementdestatistiquesetde
cartes géographiques : Bruxelles est enfin officiellement cartographiée. Ce n'est pas seulement une
illustrationmaislacartefourniténormémentderenseignementsàl'historienàproposdelaville.
Uncontrôleaccrudesadministrationslocalesestappliqué,envued'unemeilleurerépartitiondel'impôt.
Étantdonnéqu'ilfauttoujoursnégocieraveclesÉtatsprovinciaux,CobenzletKaunitzcherchentàmettre
del'ordredanslesstructurespouréviterlesapproximations.ParuneinterventionauLuxembourgd'abord,
l’Étatsouhaitelancerunsignalauxautresprovincesetremédierainsiàdespréoccupationsdiverses:
•
•
•
•
•
fiscales:augmenterlesrevenusdel’État;
financières:réduirel'endettementdesinstitutionsprovincialesetlocales;
politiques:renforcerlepouvoircentral;
économiques:promouvoirl'agriculture,lecommerceetl'industrie;
statistiques:meilleureconnaissancedupays.
Évolutiondesconseilscollatérauxau18esiècle
LeConseild’Étattendàdevenirunconseilhonorifique,présentdansl'organigrammemaisjamaisréuni;la
noblesseestdoncdépouilléedesapartdupouvoir.
LeConseilprivéreprendlescompétencesduConseild’État,notammentàproposdesrelationsavecl'Église,
en prenant en charge la collation des principaux bénéfices ecclésiastiques. Il décide également de la
nominationauxprincipauxpostesdanslamagistrature.Enrevanche,ilexercedemoinsenmoinsunrôle
detribunal.
Le Conseil des finances joue un rôle important dans la politique économique avec l'importance
grandissantedesdroitsdedouanes.
➢ LesJointes
L’Étatsecentralisemaissedirigeégalementversunespécialisation.Enmargedesconseilscollatéraux,se
développentdesjointes,descomitésspécialisésgérantdesaffairesbienprécises(lesnouvellestâchesque
s’imposel’État).LaJointedeCabinetestréuniepourseprononcersurlesaffaireslesplusimportantesdu
gouvernementetpourliertouscescomités.
Çatraduitlavolontéd’avoirdesspécialistesdedifférentsdomainesauprèsdugouverneurgénéral.Pourlui
c’est une manière d’entendre ses conseillers et non seulement recevoir des dossiers. C’est toujours le
gouverneurgénéralquiprendlesdécisionsàlasortiedelaJointedeCabinet.
Jointes«politiques»:
- JointedesTerrescontestées➝repèrelesproblèmesetconflitsdefrontières
- JointedesMonts-de-Piété➝prêtengageauxpluspauvres
- Jointe des Amortissements ➝ les personnes morales (ecclésiastiques, abbayes, couvents) ne payent
d’impôtqueparladîme,maisanormalquecesbienssoientisolésdelasociétééchappentàl’État,on
décidedemettreenplaceunesommeàpayerpouramortirl’héritage
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- Comitéjésuitique➝suitledossierdesuppressiondesJésuites
- CommissionroyaledesÉtudes➝s’occupedusecteurdel’enseignement
Jointesrelevantdesaffaireséconomiquesetfinancières:
- JointedesMonnaies➝frappelamonnaieetgèrecelle-cipourqu’ellegardesavaleur
- JointedesAdministrationsetdesAffairesdesSubsides
- Comité pour le Dénombrement du Luxembourg ➝ cadastre du Luxembourg et fait le relais avec le
gouvernementcentral
- Jointe de l'Épizootie (les épidémies animales) ➝ volonté de ne plus s’en tenir au sort : prend des
décisionsradicalespouréviterlescontagionsdemaladies(seulessolutionsconnues:abattrel’animalet
prendredesmesuresd’hygiène).Cettepolitiqueestlabasedelamédecinevétérinaire
- JointedesEaux➝maintientetgérancedescanaux
- ComitédelaCaissedeReligion➝couventssuppriméssousJosephII
➢ Débatautourdel'importancedesÉtatsprovinciaux
LaJointedesAdministrationsetdesAffairesdessubsidesestcrééeen1764.L'Autricheétantengluéedans
laguerre,Marie-ThérèseestimequelaprospéritéactuelledesPays-Baspourraitfournirlesfondsdontson
paysatellementbesoinàtraverscettejointe.Onveutaméliorerlaperceptiondesimpôtsenaméliorantle
fonctionnementdesadministrationslocales.Danscesterritoiresendéveloppement,l’administrationpeut
essayerdegrossirlesrevenusvialesdroitsdedouanes.
CettemesuremiseenplaceparCobenlzn’estpaspopulaireetonperçoitmalquelegouvernementmette
sonnezdanslesaffairesdeprovince.
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-
KaunitzestimeparailleursquelefaitqueMarie-Thérèsenepuisseleverdirectementlesimpôtsest
scandaleux et sujet à des excès ou des manipulations. La majorité de la population est écrasée, il
reproche aux privilégiés (haut clergé, haute noblesse, représentants des villes) de ne pas payer les
impôts.Deplusl’impositionestbaséesurdesmatriculesetdesrelevésdebienobsolètes.Lechancelier
souhaitevoirunsystèmepluséquitablepourtous.
-
CharlesdeLorraine,quiestluientourédecesÉtatsàsacour,nesouhaitepaslesheurteretpréférerait
conserverlesystème.
Lafracturesecréeentrelegouverneurplusconservateuretlesvolontésmodernistesdesministres.Les
privilégiéstouchésparlesmesuresdugouvernementcentralreprennentl'expressiondeTribunalduSang
(enréférenceauducd'Albe),pourqualifierletraitementdontilssontvictimes.
KaunitzpréfigureparsaréactionlesréformesdeJosephII,quiirajusqu'àlaruptureoùn'étaientpasallés
Marie-Thérèseetsesministres.Ledespotismeéclairéestletermequiqualifiel'allianceentreunpouvoir
autoritaireetdesidéeséclairésavecpourbutd'améliorerlesaspectséconomiques,sociaux,etc.delavie
dechacun.
c. 3 e étape:1785-1789:Profondesréformesdansl'administrationdesPays-Bas
Danslasecondemoitiédusiècle,unepolitiquetendantàrenforcerlaprééminencedel’Étatsurl’Égliseest
menéesousl'impulsionduConseilprivéavecl'appuideVienne.LechancelierKaunitzenatrèsclairement
donné le sens : « L’Église ne doit s'occuper que de la prédication de l’Évangile, l'exercice du culte,
l'administrationdessacrementsetdeladisciplineintérieuredel’Église.Lereste,quitouchelaviecivile,ne
regardequel’État.»Enaffirmantainsilasuprématiedupouvoirtemporelsurlesprérogativesdel’Église,
lechancelierannonçaitleprogrammederéformesquiallaienttransformerradicalementlasociétédela
findel'AncienRégimedanslesÉtatsautrichiens.
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➢ Premièresréformes31deJosephII
-
LeséditsdeTolérancede1781:leschrétiensnon-catholiquesobtiennentdanslesÉtatsdelamonarchie
le droit d'exercer leur culte en privé, sans ostentation, mais ils ont accès aux postes de la fonction
publique,àlabourgeoisie,etc.
-
Lasuppressiondescouvents«inutiles»pourrenforcerleclergéséculieren1781,puisen1783dans
lesPays-Bas.
-
Lalégislationdumariagequienfaituncontratcivil(1784)
-
Lasuppressiondesconfrériesreligieuses(1786)pourréorganiserl'assistanceauxpauvres,maladeset
orphelins.
-
Lamisesurpieddeséminairesd’Étatpourlaformationdesprêtres(1786).C'estlagoutted'eauquifait
déborderlevase:lesconservateurssententqueleurplaceestbousculéedanslapolitique.
➢ Profonderéformedel'administrationdesPays-Bas(1787)
-
AbolitiondesConseilscollatéraux,desJointesetdelaSecrétaireried’ÉtatetdeGuerre,pourdonner
lieuàlacréationduConseilduGouvernementGénéral.
-
RefonteetréformedelaChambredescomptes.
-
Suppressiondesanciennesprovincesetcréationdeneufcercles,divisésen64districts.
-
Miseenplacedesintendants,dansunedynamiquedecentralisation.
➢ RéformedelajusticedanslesPays-Bas(1787);rationalisationdelajustice
-
Créationdetribunauxdepremièreinstance.
-
Deuxcoursd'appel(BruxellesetLuxembourg).
-
Créationd'unConseilsouveraindeJustice,siégeantàBruxelles,instancederévisionetenchargede
l'administrationsupérieuredelajustice.
Lesouverain,imprégnédeseslecturesmodernesmaispasprêtàpartagerlepouvoir,imposecesréformes
pourrattraperleretardqu'ilestimequesamèreaaccumulé.Faceàcela,lesBrabançonssontmécontents
etprofitentdelaJoyeuseEntrée32pourjustifierleurrévoltedontlebruitempêcheraenfaitlamiseen
placedesréformesdanslesPays-Bas.ABruxelles,legouvernementpardélégationlessupprimeaprèsavoir
mesuréleurimpacttropdangereux.LesPays-Bascessentégalementdepayerlesimpôts.
JosephIItented'imposersesdécisionsenremplaçantlegouverneurparquelqu’und’autoritaire.Leclimat
tourne au conflit armé entre lui et ceux qui craignent la nouvelle politique égalitaire. La révolution se
déclencheen1789,pourunretouràl'AncienRégime,aucontrairedelaRévolutionfrançaisequisedéroule
au même moment. C’est la révolution brabançonne. Les Vonckistes, plus inspirés par cette dernière
31
Réformesquines’appliquentpasuniquementauxPays-Basmaisàl’entièretédespossessionsautrichiennes
32
Cérémonie solennelle tenue, au Moyen-Âge et pendant l'Ancien Régime, lors de la première visite d'un monarque
régnant, prince, duc ou gouverneur dans une ville, au cours de laquelle les privilèges de la ville étaient confirmés ou
octroyés
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cherchentàcréerunnouveaurégimeplusdémocratique(maisrestentopposésausouverain)tandisque
lesStatistessontconservateursetveulentmaintenirl’autoritédel’État.
LesPays-BasréussissentàsedéfairedelatutelledeJosephIIetdécidentdesenommerÉtatsBelgiques
Unis.LéopoldII,nouvelempereurautrichien,parvientcependantàrécupérerlesPays-Basuneannéeplus
tard.
LesPays-BasserontensuiteoccupéunepremièrefoisparlaFranceentre1792et1793,maissontrécupérés
parl’Autriche.LesPays-Basdeviennentdéfinitivementfrançaisen1794etunepolitiquesemblableàcelle
deJosephIIestmiseenplace.
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