TP : Polarisation Le but de ce TP est d'analyser la polarisation de la lumière et de mettre en évidence quelques phénomènes qui peuvent la modifier. I. Rappels sur la polarisation 1. Définition La polarisation de la lumière est la direction du champ électrique dans un plan perpendiculaire à la direction de propagation quand on regarde l'onde arriver. La polarisation est une propriété du champ électromagnétique due à sa nature vectorielle. 2. Etats de polarisation • Lumière polarisée ou non polarisée : On dit que la lumière est polarisée si dans n'importe quel plan perpendiculaire à la direction de propagation la direction du champ électrique est bien définie, c’est‐à-dire qu’elle ne varie pas aléatoirement au cours du temps. Dans le cas contraire, on dit que la lumière n’est pas polarisée ou non polarisée. La lumière fournie par les lampes à incandescence est non polarisée, de même que celle fournie par les lampes spectrales. Certains lasers fournissent quant à eux une lumière totalement polarisée. •Etats de polarisation d’une lumière polarisée : La polarisation totale de la lumière peut être de trois sortes : ‐ polarisation rectiligne : la direction du champ électrique est constante au cours du temps et de la propagation. ‐ polarisation circulaire : la direction du champ électrique tourne au cours du temps mais son amplitude reste constante ‐ polarisation elliptique : la direction du champ électrique tourne au cours du temps avec une amplitude non constante Une polarisation circulaire ou elliptique est qualifiée de droite lorsqu’on la voit tourner dans le sens horaire (donc vers la droite) lorsqu’elle nous vient dans l’œil. Au contraire, une polarisation circulaire ou elliptique est qualifiée de gauche lorsqu’on la voit tourner dans le sens trigonométrique (donc vers la gauche) lorsqu’elle nous vient dans l’œil. Nous n’aborderons dans ce TP que le cas de la polarisation rectiligne. II. Action d'un polariseur sur la lumière 1. Polarisation par dichroïsme Pour obtenir une onde polarisée dans un état donné, et à défaut de source polarisée, on utilise un polariseur, c’est-à‐dire un dispositif susceptible d’agir soit sur la lumière naturelle, soit sur de la lumière dans un état de polarisation différent. Les polariseurs les plus utilisés sont les polariseurs rectilignes, qui permettent de transformer la lumière incidente en lumière polarisée rectilignement. Principe du polariseur dichroïque : Le dichroïsme correspond à l’absorption sélective de la lumière en fonction de sa direction de polarisation. Il est à la base du polariseur rectiligne le plus couramment utilisé à l’heure actuelle : le polaroïd ou polariseur dichroïque. Un polariseur dichroïque se présente sous la forme d’une feuille en matière plastique de quelques dixièmes de millimètres d’épaisseur, généralement de teinte gris neutre. Cette feuille est constituée de longues chaînes de polymères étirées majoritairement dans une direction. Le polariseur dichroïque absorbe la lumière lorsque celle-ci est polarisée selon la direction de l’axe des chaînes de polymères, mais presque pas lorsque celle-ci est polarisée selon la direction perpendiculaire à l’axe des chaînes de polymères, appelée axe passant du polariseur. De cette façon, l’absorption du polariseur dichroïque dépend très fortement de la direction de polarisation. Remarque : les polymères n’interagissent plus avec la lumière si la longueur d’onde de celle‐ci est trop loin d’une transition électronique, ce qui explique le très mauvais fonctionnement des polaroïds dans l’infrarouge. 2. Action d’un polariseur sur une onde non polarisée Expérience : Placer un polariseur dichroïque entre une lampe blanche et un écran. Faire tourner le polariseur dans le plan perpendiculaire à la direction de propagation de l’onde lumineuse et observer l'intensité lumineuse sur l'écran. Que constatez-vous ? Interprétation : La lumière provenant de la lampe étant non polarisée, la direction du polariseur ne modifie en rien les observations faites à l’écran puisqu’il n’y a pas de direction privilégiée dans la lumière incidente. Par contre, en sortie du polariseur rectiligne, la lumière est désormais polarisée rectilignement selon la direction de l’axe passant du polariseur. 3. Action d’un polariseur sur une onde polarisée rectilignement Expérience : En laissant le premier polariseur dichroïque P1 en place, placer un second polariseur P2 dichroïque sur le trajet du faisceau. Tourner P2, et observer l'intensité lumineuse sur l'écran. Que constatez-vous ? Plus précisément, par combien de maxima et de minima passe l’intensité lumineuse lorsqu’on fait un tour complet avec P2 ? Pour quelles valeurs d'angles entre P1 et P2 a-t-on ces extrema ? Que vaut l'intensité lumineuse des minima ? Faire tourner P1 au lieu de P2, qu'observe-t-on ? Interprétation : Le polariseur dichroïque P1 sert de polariseur, c’est-à‐dire qu’il permet d’obtenir en sortie une polarisation rectiligne selon l’axe passant de P1. Le second polariseur P2 sert d’analyseur, c’est-à‐dire qu’il ne laisse quant à lui passer que la projection de la polarisation issu de P1 selon son axe passant : ainsi la lumière sur l’écran est maximale lorsque les axes passants des deux polariseurs sont parallèles et minimale (extinction) lorsque les axes passants des deux polariseurs sont perpendiculaires. III. Analyse de la lumière par un polariseur 1. Analyse de la polarisation des sources usuelles Expérience : Observer les différentes sources de lumière usuelles (éclairages, ciel, écran de téléphone, d'ordinateur...). Lesquelles sont polarisées rectilignement, partiellement polarisées et non polarisées ? 2. Loi de Malus Expérience : Reprendre l'expérience du paragraphe I.3 en remplaçant l'écran par un luxmètre. Mesurer l'intensité lumineuse I en fonction de l'angle θ entre les deux polariseurs. Tracer à l'aide d'un tableur la courbe I(θ). On écrit l'intensité lumineuse sous la forme I(θ) = I0 f(θ) où I0 est l'intensité lumineuse maximale. Quelle fonction f modélise le mieux l'allure de l'intensité lumineuse ? 3. Lunette 3D Expérience : Proposer et réaliser un protocole pour déterminer l'axe de polarisation de chaque verre d'une paire de lunette 3D. 4. Polarisation par réflexion vitreuse L’observation d’une scène quotidienne à travers un polaroïd permet de se rendre compte qu’une quantité importante de la lumière naturelle (non polarisée) est polarisée par réflexion sur des surfaces lisses diélectriques, c’est-à‐dire non métalliques (par exemple vitres, peintures, matières plastiques, surfaces des liquides…). Si on observe soigneusement, on constate que cette polarisation est partielle (on ne parvient pas à obtenir une extinction complète comme c’était le cas dans l’expérience précédente), rectiligne selon la direction parallèle à la surface. Expérience : Envoyer une onde lumineuse plane non polarisée (le vérifier au préalable à l’aide d’un polariseur dichroïque) sur un milieu homogène diélectrique (verre ou plastique). D’après les lois de Snell-Descartes, le rayon incident donne naissance à un rayon réfléchi et à un rayon réfracté. Nous nous intéressons ici à la polarisation de la lumière réfléchie. Placer un polariseur dichroïque entre le rayon réfléchi et l’écran et observer l’intensité transmise en fonction de l’orientation du polariseur dichroïque, qui sert ici d’analyseur. Que constatez-vous ? La lumière réfléchie est-elle polarisée rectilignement ? Faire varier l’angle d’incidence sur le milieu homogène et montrer que pour une incidence particulière, appelée incidence de Brewster ou angle de Brewster, on obtient une extinction totale avec l’analyseur. Interprétation : L’expérience précédente nous permet d’affirmer que la lumière réfléchie est polarisée rectilignement alors que la lumière incidente n’était pas polarisée : il y a donc phénomène de polarisation par réflexion. Cette polarisation par réflexion est totale pour un angle d’incidence particulier, appelé angle de Brewster, correspondant à un angle droit entre le rayon réfléchi et le rayon transmis. Grâce à la relation de Snell-Descartes, on peut calculer la valeur de l’angle de Brewster : Pour une réflexion air-verre : n1 = 1,0 et n2 = 1,5 => iB = 56°. Application : en photographie, on peut utiliser un filtre polarisant (qui n’est rien d’autre qu’un polariseur) pour éliminer les réflexions sur les surfaces vitrées, les reflet sur l’eau, la neige… 5. Polarisation par diffusion Le phénomène de diffusion par des molécules, et plus généralement par des particules en suspension, constitue une autre source de polarisation de la lumière naturelle. Lorsqu’une onde se propage dans un tel milieu, elle provoque un mouvement oscillatoire forcé des charges électriques des molécules (ou des particules en suspension). Ces dernières se comportent comme des dipôles électriques oscillants qui émettent un rayonnement polarisé dans des directions perpendiculaires à la direction de propagation de l’onde incidente. (Cadre de la diffusion de Rayleigh, pour laquelle la lumière bleue est beaucoup plus diffusée que la lumière rouge). Par exemple, partant de la lumière non polarisée émise par le Soleil, la diffusion permet d’obtenir dans certaines directions privilégiées une onde polarisée rectilignement. Expérience : Eclairer une suspension de lait dans l’eau à l’aide d’un faisceau parallèle de lumière blanche et observer simultanément la lumière transmise par la solution et la lumière diffusée latéralement. On "voit" le faisceau qui traverse la solution, ce qui veut dire qu’il y a diffusion par la solution. Le faisceau diffusé est bleu alors que le faisceau transmis par la solution est orange/rouge. Utiliser un analyseur pour étudier la polarisation des lumières transmise et diffusée. Que constatez-vous ? Interprétation : L’interprétation qualitative de l’expérience précédente repose sur le phénomène de diffusion par les particules microscopiques de la solution. On qualifie cette diffusion de diffusion Rayleigh, car la taille des particules diffusantes, nommés dipôles, est beaucoup plus faible que la longueur d’onde de la lumière incidente. La puissance diffusée en diffusion Rayleigh est proportionnelle à 1/λ4 : la lumière bleue est diffusée plus efficacement que la lumière rouge, ce qui explique pourquoi la lumière diffusée nous paraît bleue alors que la lumière transmise est quant à elle rouge (car c’est ce qui reste de la lumière incidente après avoir ôté la lumière diffusée). La lumière diffusée est polarisée rectilignement selon l’axe d’oscillations des dipôles, qui est la direction verticale dans notre expérience. Application : en photographie, on a vu qu’on peut utiliser un filtre polarisant pour éliminer les réflexions sur les surfaces vitrées, les reflets sur l’eau, la neige… Ce filtre polarisant permet également de réduire le voile atmosphérique en éteignant la composante polarisée rectilignement de la lumière diffusée par l’atmosphère. On obtient ainsi des paysages lumineux sur fond de ciel bleu profond. 6. Activité optique d'une substance chirale : polarisation rotatoire Certaines substances, dites « optiquement actives » possèdent la propriété de faire tourner d’un angle α le plan de polarisation d’une lumière incidente qui traverse la substance. On distingue les substances : - dextrogyres : l’observateur « voit » tourner l’analyseur dans le sens des aiguilles d’une montre, sens choisi pour α algébriquement positif. - lévogyres : l’observateur « voit » tourner dans le sens trigonométrique. Le pouvoir rotatoire : l'angle α dépend de : - la longueur d'inde de la lumière incidente - la température T - la longueur l de la cuve traversée - la concentration massique C de la substance active selon la loi de Biot : α = α0 l C où α0 est appelé pouvoir rotatoire spécifique. Quelques exemples de valeur du pouvoir rotatoire spécifique pour quelques sucres : Substance active α0 (°.mL.g-1.dm-1) à λ = 589,3 nm α-D Glucose +112 Fructose -92,2 Expérience : Proposer et réaliser un protocole pour mesurer la concentration massique des solutions proposées à l'aide de la loi de Biot.