Les anorexiques prépubères présentent-elles des caractéristiques psychologiques,
familiales ou sociales distinctes de celles des anorexiques pubères?
Par
Isabelle Thibault
Programme de sciences cliniques
Thèse présentée à la Faculté de médecine et des sciences de la santé
en vue de l’obtention du grade de philosophiae doctor (Ph.D.)
en sciences cliniques, Faculté de médecine et des sciences de la santé, Université de
Sherbrooke, Sherbrooke, Québec, Canada, J1H 5N4
Introduction : L’anorexie prépubère survient généralement chez les enfants de 9 à 12 ans.
Elle demeure relativement rare puisqu’elle ne concerne que 5 % de tous les cas d’anorexie.
Cette forme d’anorexie semble se distinguer de l’anorexie pubère sur certaines
caractéristiques, ce qui pose la question du degré de parenté entre ces troubles. Plusieurs
spécialistes se demandent même s’il ne faudrait pas considérer l’anorexie prépubère comme
un nouveau sous-type d’anorexie. Objectifs : L’objectif général de la présente étude est de
déterminer si les anorexiques prépubères se distinguent des anorexiques pubères. De façon
plus spécifique, elle vise à : 1. décrire un groupe d’enfants présentant une anorexie
prépubère sur la base de caractéristiques psychologiques, familiales et sociales
généralement associées à l’anorexie; 2. identifier, parmi un ensemble de caractéristiques
psychologiques, familiales et sociales, celles qui permettent de distinguer un groupe
d’anorexiques prépubères d’un groupe d’anorexiques pubères. Méthode : L’échantillon de
cette étude transversale est composé de 21 patients anorexiques prépubères âgés en
moyenne de 12,1 ans (écart-type = 0,8) et de 126 patients anorexiques pubères âgés de 15,4
ans (écart-type = 1,4). Ces patients ont été recrutés dans le cadre d’une étude longitudinale
qui se déroule dans trois Centres hospitaliers universitaires du Québec. Les instruments de
mesure utilisés sont ceux auxquels ont généralement recours les chercheurs dans ce
domaine. Les répondants aux questionnaires sont les patients ainsi que leurs parents. Des
analyses descriptives (moyenne et écart-type ou équivalent non-paramétrique) et
comparatives (test t ou équivalent non-paramétrique) sont présentées. Résultats : Au
niveau psychologique, les patients anorexiques prépubères apparaissent significativement
plus en difficulté que la population générale pour la plupart des variables mesurées. Au
plan familial et social, les résultats rapportés par les patients et leurs parents indiquent
l’absence de distinction avec la population générale. En regard du second objectif de
recherche, les patients anorexiques prépubères présentent un profil psychologique
généralement moins sévère que celui des anorexiques pubères. Les scores obtenus par les
patients anorexiques prépubères et pubères ou par leurs parents ne diffèrent pas pour les
variables familiales et sociales. Conclusion : Les résultats ne supportent pas l’hypothèse de
spécificité de l’anorexie prépubère. Les principales différences observées semblent
attribuables à l’effet de l’âge, notamment au manque de maturité des enfants
comparativement aux adolescents sur le plan des fonctions exécutives. En somme, la
puberté n’apparaît pas le meilleur moyen pour catégoriser les différents profils des patients
anorexiques. Des méthodes alternatives de catégorisation, notamment celles basées sur le
profil de personnalité, semblent davantage prometteuses.
Mots clés : trouble alimentaire, enfant, menarche, catégorisation, début précoce.