Syndrome de la LH invisible et effet Hawthorne : quand l`instrument

Revue Médicale Suisse
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5janvier 2008 00
Syndrome de la LH invisible et effet
Hawthorne : quand l’instrument d’analyse
modifie le phénomène obser
leurs limites. En effet, les patients inclus
dans ces études ne ressemblent que de
très loin aux malades suivis par le géné-
raliste. Ces derniers sont en général plus
âgés, polymédiqués et polymorbides.3Le
patient type de l’EBM est trop idéal pour
que les conclusions tirées des études
soient applicables telles quelles au ma-
lade du généraliste, qui est à l’image de
laLH tronquée, trop imparfait pour être
admis dans les études randomisées. Un
exemple typique est l’effet bénéfique de
la spironolactone en cas d’insuffisance
cardiaque qui, appliquée à des malades
tout venant, a donné lieu à des cas d’hy-
perkaliémie mortels.4Appliquer le même
traitement à des patients qui ne sont pas
comparables n’est pas sans risque. Lors
de l’étude du rimonabant, utilisé en cas
d’obésité, on a exclu tous les patients pré-
sentant des antécédents dépressifs.5Le
risque est d’inclure ce type de patients
lors de l’utilisation ultérieurede ce médi-
cament.
Le simple fait de se savoir inclus dans
une étude clinique peut modifier le com-
portement des malades ou le cours de
leur maladie, ce qu’on appelle l’effet
Hawthorne.Il s’agissait d’étudier dans
les années 1920 l’effet des conditions de
travail sur la productivité d’ouvriers travail-
lant dans l’usine électrique de Hawthorne.
On s’est aperçu que leur rendement aug-
mentait au cours de l’étude, quelles que
soient les améliorations apportées à leur
environnement. En médecine, on a réali-
sé que le comportement alimentairedes
obèses par exemple, était différent selon
qu’ils sont observés à leur insu ou qu’ils
savent qu’ils participent à une étude.6
L’effet Hawthorne a été démontré de
façon bénéfique pour les malades at-
teints d’Alzheimer, qui vont mieux quand
ils participent à une étude. Mais l’effet
Hawthorne a été négatif chez des pa-
tients devant subir un pontage coronarien
et qui savaient qu’ils étaient soutenus
par un groupe de prière.7Peut-êtreont-
ils été paniqués à l’idée que leur pontage
nécessite le secours de la religion !De
façon générale, toutes les études impli-
quant une prise en charge des patients
avec des contrôles réguliers ou une inter-
action avec les observateurs vont ampli-
fier les résultats du groupe contrôle, par-
ticipant globalement à l’effet placebo.8
En conclusion, l’instrument et les condi-
tions d’observation vont modifier l’objet
oule sujet étudié et ce dernier, selon ses
caractéristiques propres, va modifier en
retour les conditions et les résultats des
observations.
Rémy C. Martin-Du-Pan
L’hormone lutéinisante (LH), qui
stimule l’ovulation et la synthèse
des androgènes, est une glyco-
protéine formée de deux sous-unités,
l’alpha (commune aux autres hormones
hypophysaires) et la bêta, spécifique de
laLH. Les radio-immuno-essais (RIA) uti-
lisés classiquement pour le dosage de la
LH utilisent des anticorps polyclonaux re-
connaissant les différentes formes circu-
lantes de LH. Dans les années 90, ont
été développées des techniques utilisant
deux anticorps monoclonaux reconnais-
sant différents épitopes sur les molécu-
les de LH (technique sandwich). Ces do-
sages étaient nettement plus spécifiques.
On a eu cependant la surprise d’observer
que chez 25% des patients les molécu-
les de LH étaient, soit non détectables,
soit mesurées à des valeurs trop basses
par rapport aux dosages classiques. Il
s’agissait de formes de LH dont la chaîne
bêta était tronquée. Cela a conduit à des
erreurs diagnostiques et à des examens
inutiles.1Ce phénomène de la LH invisible
illustre le fait que certains instruments de
mesure trop spécifiques perdent en sen-
sibilité (des molécules biologiquement
actives mais imparfaites ne sont plus re-
connues) et parfois même faussent le
résultat des analyses. Il en est de même
pour la macroprolactinémie. Selon les
méthodes de dosage, on peut mesurer
des taux faussement élevés de prolacti-
ne par RIA ou par ELISA lorsqu’on est en
présence de big big prolactine,qui a un
poids moléculaireélevé comparativement
à la prolactine usuelle monomérique. Cette
big big prolactine n’a que peu d’activité
biologique et n’est pas due à un adénome
hypophysaire. Des dosages faussement
élevés peuvent conduireinutilement à
des IRM de l’hypophyse.2C’est un phéno-
mène courant en médecine, comme en
mécanique quantique, que l’instrument
d’analyse modifie le phénomène observé.
Ceci concerne non seulement les métho-
des de dosages biologiques mais égale-
ment les outils statistiques (cf. syndrome
du réverbère(*)), ainsi que les études cli-
niques.
Par exemple, les études randomisées,
qui constituent le fondement de l’eviden-
ce-based medicine (EBM), ont également
abécédaire
Bibliographie
1Martin-Du Pan RC,Horak M, Bischof P.Clinical
significance of invisible or partially visible luteini-
zing hormone. Hum Reprod 1994;9:1987- 90.
2Martin-Du Pan RC. Hyperprolactinémie : adé-
nome hypophysaire ou macroprolactinémie? Schw
Ges Für Klin Chemie 1997;3:23-4.
3Jenicek M. Evidence-based medicine: Fifteen
years later. Golem the good,the bad and the ugly in
need of a review ? Med Sci Monit 2006;12:241-51.
4Juurlink DN,Mamdani MM, Lee DS, et al. Rates
of hyperkalemia after publication of the randomi-
zed aldactone evaluation study. N Engl J Med 2004;
351:543-51.
5Christensen R, Christensen PK, Bartels EM, et
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rimonabant. Lancet 2007;370:1706-13.
6Rodin J, Schank D, et al. Psychological features
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7Benson H, Dusek JA, Sherwood JB, et al. Study
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trial of uncertainty of receiving intercessory prayer.
Am Heart J 2006;151:934-42.
8Martin-Du Pan RC, Martin C. Effet placebo
dans les thérapies médicales, les psychothérapies
et les médecines parallèles; aspects spécifiques et
non spécifiques des thérapies. Psychol Med 1990;
11:1117-22.
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24 septembre2008
*Autres syndromes traités prochainement dans cette
rubrique.
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