CHAPITRE 12 CARACTÉRISTIQUES PROPRES À CERTAINS MARCHÉS 235
habituellement le secteur de la « distribution» de ce bien. Au sein de celle-ci, une
partie importante des activités de stockage s’explique par la connaissance incertaine
qu’ont les distributeurs du niveau de la demande finale. Selon que leurs prévisions
se réalisent ou pas, il y aura stockage ou déstockage (avec à la limite la «rupture de
stock », situation de rationnement des acheteurs clients de la firme). On voit ainsi
que les stocks permettent d’atténuer ou réduire les rationnements; en fait, ils
contribuent à une meilleure adéquation de l’offre à la demande.
Par ailleurs d’autres activités de stockage sont motivées par des objectifs de
spéculation : celle-ci consiste à acheter ou vendre un bien dans l’intention exclusive
de faire l’opération inverse après quelque temps, en vue de bénéficier de la variation
du prix susceptible de survenir pendant cette période. Bien des économistes
défendent la thèse que la spéculation atténue, quant à elle, les fluctuations de prix;
mais cette thèse est controversée : quoique fondée sur une application stricte de la
loi de l’offre et de la demande, son degré de vérification varie très fort d’un marché
à l’autre.
b Les biens non stockables ou « services »
Les biens non stockables, aussi appelés services, ont pour caractéristique que la
capacité de production (c’est-à-dire le producteur lui-même, et ses inputs) doit
être disponible au moment même où la demande se manifeste.
Si cette condition n’est pas remplie, il y a automatiquement rationnement des
demandeurs. Graphiquement, cela signifie que la demande des consommateurs
rencontre directement la courbe d’offre des producteurs (elle-même égale à leur
coût marginal) sans l’intermédiaire de distributeurs ou détaillants.
Lorsqu’il y a rationnement des demandeurs par indisponibilité d’une capacité
suffisante, le rationnement prend diverses formes, selon le type d’industrie en
cause : le cas extrême est celui de la coupure du service (électricité), mais des cas
intermédiaires sont par exemple l’encombrement (réseau téléphonique) et les files
d’attente (service au guichet dans une banque). Le rationnement se traduit ici par
une dégradation de la qualité du service.
D’autre part, il y a rationnement des offreurs si, pour le niveau auquel la demande
s’exprime, la capacité est excédentaire. Ainsi par exemple, dans le cas d’un salon de
coiffure installé avec dix fauteuils et un personnel en nombre suffisant pour servir
dix clients à la fois, s’il n’y a jamais que six clients en même temps dans le salon.
« Surcapacité» et rationnement de l’offreur sont ici synonymes.
En cas de rationnement d’un côté ou de l’autre du marché, les variations de prix
(du type de celles étudiées plus haut) sont fréquemment employées comme moyens
de le réduire : tarifs de jour plus élevés que ceux de nuit en électricité et au télé-
phone; loyers plus élevés « en saison » que « hors saison» pour les locations de
villas de vacances, pour les transports ou pour les spectacles, etc. Ces cas illustrent
particulièrement bien en quoi les variations du prix d’un bien ou service (qui par
ailleurs reste le même) peuvent avoir pour rôle de remédier aux rationnements.
12.2