
Alors éloignons ceux qui souffrent, enfermons-les. Pour notre sécurité, la
sécurité de nos psychismes… N’autorisons pas le rétablissement, nous finirions
par payer le prix de notre culpabilité, de la culpabilité des délits et des
crimes qui sont cause de tant de souffrance. Pour une société délivrée de toute
souffrance, blindée.
Absurde. La vie ne pourrait-elle pas reprendre ses droits ?
Ainsi, le danger et la mise en danger doivent être clairement définis, de même
que le danger pour la santé psychique, s’il existe.
Le vrai danger ne serait qu’une agression physique ou vitale, non la menace,
insuffisante à moins de saisir la justice. Ceci est valable pour toute
population, patients psychiques, patients somatiques, ou non-patients. Pour une
population, dans quelque cadre que ce soit, les infractions au droit commun
peuvent être jugées, la décision pouvant être soit une amende, soit une peine de
prison, soit une admission contre son gré dans un établissement de santé. Mais
tout n’est pas infraction, distinguons : la perturbation sociale gestuelle ou
verbale n’est pas un danger (sauf harcèlement et manipulation ?), si elle n’est
pas une agression physique. Les patients psychiques ne sont pas des
contrevenants au code social, mais s’ils l’étaient, ils ne devraient pas déroger
au droit commun. En institution psychiatrique cependant, puisque la prison y est
interdite et qu’une admission contre son gré en établissement de santé serait un
paradoxe, seule l’amende, voire les travaux d’utilité collective, seraient
efficients. Ou d’autres moyens non-violents que je laisse à votre imagination…
Dans le respect des droits du patient, du citoyen.
La justice ne condamne pas le suicidé. Elle ne le peut pas. Les délinquants et
les criminels sont condamnés, sauf ceux qui échappent à la justice…
La police veille à éviter le danger pour autrui. Pour le danger pour soi, des
accompagnements peuvent exister. Privés de liberté, il n’y a qu’un petit nombre
de patients psychiques dont on pourrait réellement dire qu’ils puissent
représenter un danger pour soi ou pour autrui.
Gardes-malades, gardes-fous, police, les soignants pourraient véritablement
accompagner ces personnes en danger pour soi, non les enfermer et les soumettre
à contraintes, et instruire les personnes en danger pour autrui de leur
responsabilité légale, non les enfermer et les soumettre à contraintes.
La définition du danger doit ressortir du droit commun, la justice n’appartient
pas à la médecine, et un service de police dépendant de la justice devrait
exister au sein des institutions de psychiatrie pour régler les difficultés
liées au danger pour autrui.
A l’art. 5 du projet de loi sur la privation de liberté à des fins d’assistance,
nous contestons la présence des notions de danger pour soi ou pour autrui, à
moins d’y ajouter le grave état d’abandon ou une autre cause qui se détache
d’incidences délictuelles ou criminelles, afin encore une fois d’essayer
d’éviter la confusion et l’amalgame entre souffrants psychiques et délinquants.
Le danger pour soi ou pour autrui tend aussi à devenir un instrument pour
contraindre avant la faute, pour punir préventivement, tel ‘prévenir vaut mieux
que guérir’. Nous avons le devoir de rester attentif à l’usage raisonnable de
cette ‘prévention’, au glissement possible vers une privation de droit,
interdite.
Et quel libre-arbitre le patient psychique va-t-il avoir pour estimer, lui, un
danger, et quelles voies de droit va-t-on lui donner pour exercer sa
citoyenneté ? Mais là encore, on se heurte à l’assermentation du médecin, à la
protection des soignants…
b) Les souffrants psychiques et les délinquants
Faisons la différence entre délinquants et souffrants psychiques. Un petit
schéma. Divisons notre société en trois groupes, les gens sans problèmes ( ?),
les délinquants, les souffrants psychiques. Mettons-les dans leur milieu
naturel, le monde libre, la prison, l’asile (ou l’institution psychiatrique).
Les gens sans problèmes dans le monde libre ne nous intéressent pas. De plus,
nous avons bien sûr le délinquant du monde simple de la prison, et celui de
l’asile de la prison. Ajoutons que tous les délinquants ne sont pas en prison…
Faisons l’hypothèse, hardie, que la majorité des troubles psychiques sont
d’origine délinquante.