Professions Santé Infirmier Infirmière N° 64 • juin-juillet 2005
Soins Libéraux
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L
es troubles mentaux et psy-
chiques font souffrir, sont inva-
lidants et peuvent même
abréger la vie ; la santé mentale étant
l’un des fondements du développe-
ment humain. Il n’y a aucune raison
éthique, scientifique ou sociale d’ex-
clure de la communauté les per-
sonnes qui souffrent de maladie
mentale ou de troubles psychiques.
Mais ne pas reconnaître le handicap
psychique risque d’exclure davantage
l’individu de la vie sociale à laquelle il
peut souvent prétendre.
Le handicap et la loi
La participation et la citoyenneté des
personnes handicapées est définie
dans le projet de loi pour “l’égalité des
droits et des chances”. Or, classifier le
handicap psychique et mental selon
des critères généraux pose problème.
En effet, et c’est un progrès, selon la
classification internationale du fonc-
tionnement de la santé et du handi-
cap, il ne s’agit pas seulement de
décrire les difficultés rencontrées par
les personnes concernées, mais
d’améliorer les conditions de vie par
des actions spécifiques qui profitent
au plus grand nombre. En bref, il s’agit
d’améliorer l’environnement pour que
les personnes handicapées puissent
avoir une accessibilité universelle.
Cependant, souligne François Cha-
pireau, psychiatre (Antony) : « Il est
possible d’imaginer une société qui
serait pleinement accessible à toutes
les personnes ayant des difficultés
physiques, grâce à des aménage-
ments de l’environnement matériel et
à la mise à disposition d’aides humai-
nes et techniques. En revanche, com-
ment se représenter les modifications
de l’environnement,
les aides hu-
maines et techniques qui ren-
draient la société pleinement
accessible aux personnes ayant
des difficultés psychiques ou men-
tales ? » Certes, la nouvelle loi
énonce des principes, dont celui de
“non-discrimination” obligeant la
collectivité nationale à garantir les
conditions de “l’égalité des droits et
des chances” à tous les citoyens,
notamment aux personnes handi-
capées, quelle que soit la nature de
leur handicap.
La souffrance psychique
Le principe est un peu vague quant
à son application pour des per-
sonnes en souffrance psychique.
C’est pourquoi la version adoptée
par l’Assemblée nationale prévoit
d’insérer une définition du handicap
dans le code de l’action sociale sous
la forme de l’article L.114 : «
consti-
tue un handicap, toute limitation
d’activité ou restriction de participa-
tion à la vie en société subie dans
son environnement par une per-
sonne en raison d’une altération
substantielle, durable ou définitive
d’une ou plusieurs fonctions phy-
siques, sensorielles, cognitives ou
psychiques, d’un polyhandicap ou
d’un trouble de santé invalidant.
» 0r
les enquêtes, notamment celle de
l’Insee pour le compte du ministère
appelée “Handicaps Incapacités
Dépendances” (HID), montrent l’in-
suffisance de l’aide et des soins en
ambulatoire et à domicile pour les
malades mentaux.
D’autant plus si ces derniers sont
éloignés de leur famille, ce qui
amplifie leurs difficultés tout en ren-
dant plus longs les séjours à l’hôpi-
tal et plus aléatoire la réinsertion.
Et l’emploi ?
Selon une enquête OMS de 1998, il
s’avère que 75 % des personnes
atteintes de troubles psychiatriques
sont sans emploi et le taux monte à
90 % quand ils sont schizophrènes.
Les troubles mentaux entraînent sou-
vent la perte d’emploi et sont aussi un
handicap pour le retour à l’emploi ; la
conséquence principale des troubles
psychiques étant l’isolement. “Les dis-
positifs mis en place pour faciliter la
réinsertion des handicapés psy-
chiques sont peu nombreux et se
caractérisent par leur inadaptation eu
égard aux caractéristiques et à la lour-
deur de ce handicap”, dénonce-t-on à
l’UNAFAM. Le CAT (centre d’adapta-
tion par le travail) serait l’établisse-
ment le mieux adapté en raison de
ses soutiens financiers et de ses pré-
occupations éducatives. Mais il
accueille en priorité les déficients psy-
chiques de naissance. Dans une
entreprise ordinaire, les réticences des
employeurs à l’égard des personnes
atteintes de handicap psychique sont
grandes car il est vrai que la maladie
est invisible, qu’elle est imprévisible
parfois et que l’on ne guérit pas d’une
maladie mentale facilement. Les
troubles mentaux ne s’estompent que
progressivement mais sont latents et
peuvent réapparaître soudainement.
Comment prendre le risque ? L’intérêt
serait donc dans un concept de transi-
tion où le soignant connaît les caracté-
ristiques de l’activité assurée par son
patient, les satisfactions retirées et les
difficultés rencontrées. Le rapport
Roelandt insiste d’ailleurs sur la néces-
sité d’actions concertées entre les dif-
férents intervenants médicaux et
sociaux, au cours du parcours d’inser-
tion. Mais permettre aux personnes
qui en sont atteintes de retrouver une
véritable place dans la cité par l’accès
au travail passe par la déstigmatisation
systématique de la maladie mentale.
ALP
Medec 2004
Handicap mental et réinsertion
Comment faire surface
La santé mentale fait partie intégrante de la santé. Sans elle, l’individu,
handicapé, ne peut donner la pleine mesure de ses aptitudes cogni-
tives, affectives et relationnelles. Un bon équilibre mental permet de
mieux supporter les tensions de la vie et s’intégrer dans la vie sociale.
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