Développements / septembre 2013 7
Les troubles psychomoteurs aujourd’hui : entre Ajuriaguerra et la théorie des systèmes dynamiques
mineure» en référence aux travaux de Wender,
n’est pas réellement prise en compte par celui-ci
alors même qu’elle s’inscrit dans cette opposi-
tion à toute «lésion en foyer» tout en rappelant
l’attachement au «soma». La complexité et les
divergences quant à la détermination, l’analyse et
la signification de ces signes en ont rebuté plus
d’un. Ils obligent en effet le praticien à poser avec
force l’association intime des mécanismes percep-
tifs et moteurs et à développer, pour l’organisation
psychomotrice, une approche neuropsycholo-
gique de l’enfant, éléments qui étaient encore bal-
butiants à l’époque contrairement au rôle central
dévolu au tonus par exemple.
Les troubles de la motricité intentionnelle, dont
le trouble de l’Acquisition de la Coordination
(TAC) constitue le tableau cardinal, font l’objet
de recherches en nombre croissant dans diffé-
rents pays avec des conférences de consensus
qui permettent d’harmoniser les différents points
de vue (Fox & Polatajko, 1994; Sugden, 2006;
Blank et al., 2012). Les quatre caractères précisés
plus haut sont aisément identifiables.
Troubles perceptivo-moteurs dans le TAC
Plusieurs travaux mettent en évidence les particula-
rités et les atteintes des différents systèmes percep-
tifs avec une faible discrimination proprioceptive et
kinesthésique (Laszlo et al., 1988), une mauvaise
perception de la durée relative des sons (Williams,
Woollacott, & Yvry, 1992), des perturbations dans
les perceptions visuelles (Hulme et al., 1982) et
la prise en compte des informations visuo-spa-
tiales (Wilson & McKenzie, 1998), ainsi que dans
le transfert intermodal (Newnham & McKenzie,
1993), une prise en compte des informations hap-
tiques altérée (Schoemaker et al., 2001).
Les fonctions d’action sur le milieu physique sont
également perturbées avec, notamment, des temps
de réaction et de mouvement allongés et plus
variables (Henderson et al., 1992; Van Dellen &
Geuze, 1988), une régularité moindre dans les
épreuves de pointillage (Geuze & Kalverboer,
1993), des coordinations générales (course,
sauts…) atypiques et se caractérisant principale-
ment par un manque d’amplitude, une limitation
des degrés de liberté des articulations ainsi qu’un
enchaînement séquentiel inapproprié des parties
du corps concernées par le mouvement (Larkin
& Hoare, 1992; Williams et al., 1985), des coor-
dinations bimanuelles d’autant plus échouées que
la coordination est complexe (Volman & Geuze,
1998) ou que les contraintes augmentent (Castelnau
et al., 2007), un contrôle proximal plutôt que
distal au niveau de l’écriture avec diminution
de la souplesse du geste (Missiuna, 1994), une
lenteur dans les épreuves visuo-motrices (Schoe-
maker et al., 2001), sans oublier la présence
de dysgraphie (Rosenblum & Livneh-Zirinski,
2008). Les enfants porteurs d’un TAC présentent
également des dyspraxies idéomotrice (Zoia et al.,
2002), idéatoire (Dewey, 1991), visuoconstruc-
tive (Wilson, 2004), voire orofaciale (Dewey, 1993)
avec des particularités dans le contrôle de la motri-
cité orale (Ho & Wilmut, 2010).
Signes neurologiques doux dans le TAC
Différents signes doux sont retrouvés comme
une instabilité posturale dans l’équilibre sta-
tique (Williams et al., 1985; Geuze, 2003), des
syncinésies (Licari, Larkin, & Miyahara, 2006),
des mouvements choréiformes et de l’hypoto-
nie (Hadders-Algra, 2002), une exagération de
certains réflexes tendineux (Williams & Burke,
1995), une faible régulation de la force muscu-
laire (Lundy-Ekman et al., 1991), un déficit de
la graphesthésie, une dysdiadococinésie et de la
lenteur (Losse et al., 1991).
Complexe psychopathologique dans le TAC
Il existe tout d’abord une psychopathologie réac-
tionnelle qui se développe autour d’une faiblesse
de l’estime de soi dans les différents domaines avec
une prédilection pour les compétences athlétiques
et la réussite scolaire, mais aussi d’une faiblesse
du support social et des différents processus de
maîtrise qui joue certainement un rôle dans l’ap-
parition de troubles anxieux (Miyahara & Piek,
2006; Skinner & Piek, 2001; Watson & Knott,
2006). L’étude de Green et al. (2006) montre, par
exemple, que 85% des 47familles d’enfants avec
TAC mentionnent la présence de problèmes émo-
tionnels et comportementaux sévères à l’aide du
questionnaire de Goodman (The Strengths and
Difficulties Questionnaire, Goodman 1997).
De façon plus générale, la présence de comorbidi-
tés avec un ensemble de troubles spécifiques des
apprentissages, de troubles externalisés et inter-
nalisés suscite des interrogations diverses sur la
raison de telles associations (Cairney, Veldhuizen,
& Szatmari, 2010; Soppelsa, Albaret, & Corraze,
2009). Différentes études mettent ainsi en avant
une association fréquente avec le Trouble Défi-
cit de l’Attention/Hyperactivité, que certains
auteurs regroupent sous l’appellation de Défi-
cit en attention, contrôle moteur et perception
(Gillberg, 2003). Une étude longitudinale menée
sur une dizaine d’années par Hellgren, Gillberg,
Bågenholm et Gillberg (1994) indique que ces
enfants présentent un risque élevé de troubles
psychiatriques, notamment de dépression.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Toulouse 2 - - 193.55.175.57 - 25/11/2013 11h38. © De Boeck Supérieur
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