Constipation

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 Conseil de pratique
Constipation
Rédacteur : Thierry PICHE
Références :
Piche T, Dapoigny M, Bouteloup C, Chassagne P, Coffin B, Desfourneaux V, Fabiani P, Fatton B, Flammenbaum M, Jacquet A, Luneau F, Mion F, Moore F, Riou D, Senejoux A; French Gastroenterology Society. Recommandations pour la pratique clinique dans la prise en charge et le traitement de la constipation chronique de l'adulte. Gastroenterol Clin Biol. 2007 Feb;31(2):125-­‐35. Wald A. Chronic constipation: advances in management Neurogastroenterol Motil 2007 Jan;19(1):4-­‐10. Date : juillet 2013
Diagnostic de constipation
1-­‐ Le diagnostic est clinique. Il s’agit d’une association symptomatique reposant sur la perception subjective des malades : -­‐ Insatisfaction lors de la défécation -­‐ Selles peu fréquentes (< 3 selles semaine) -­‐ Difficultés à exonérer -­‐ Depuis au moins 6 mois 2-­‐ L’interrogatoire, l’utilisation de calendriers des selles et l’examen permettent d’apprécier la sévérité de la constipation et de rechercher des complications : -­‐ Résistance aux règles hygiéno-­‐diététiques et au traitement laxatif de première intention -­‐ Moins d’une selle par semaine -­‐ Symptôme invalidant -­‐ Altération de la qualité de vie -­‐ Difficulté à différencier du SII -­‐ Complications •Aggravation d’une maladie hémorroïdaire •Maladie des laxatifs (hypokaliémie) •Impaction fécale •Incontinence fécale (encoprésie) 3-­‐ Examen clinique 1
Rechercher : • une anomalie à l'examen (abdominal, général) • au TR : une fissure anale, une stase rectale, une tumeur, un trouble de la statique pelvienne 4-­‐ La présence de signes cliniques d’alarme doit faire rechercher une cause organique -­‐ Age supérieur à 50 ans -­‐ Effet secondaire de nombreux médicaments (opiacés…) -­‐ Antécédent familial de cancer du côlon, de MICI -­‐ Sang dans les selles, anémie, amaigrissement, fièvre, syndrome inflammatoire -­‐ Constipation sévère ne répondant pas au traitement -­‐ Aggravation d’une constipation sans cause évidente Les explorations complémentaires
1-­‐ Pour éliminer une cause organique (cf plus haut) : la coloscopie. Les indications de la coloscopie reposent sur les recommandations du dépistage des polypes et du cancer colorectal en population générale. La coloscopie ne permet pas de préciser le mécanisme d’une constipation chronique. La coloscopie doit toujours être envisagée pour éliminer une organicité (cf plus haut) 2-­‐ Pour apprécier le mécanisme de la constipation : La manométrie ano-­‐rectale (MAR) avec un test d’expulsion au ballonnet et la mesure d’un temps de transit colique (TTC) aux marqueurs radio-­‐opaques sont recommandés. Trois mécanismes sont retenus après la MAR et le TTC : -­‐ La constipation est fonctionnelle quand la MAR et le TTC sont normaux -­‐ La constipation est distale quand la MAR est anormale -­‐ La constipation de transit requiert une MAR normale et un TTC allongé dans le colon a) La MAR -­‐ A un intérêt diagnostique (anisme, mégarectum, hypertonie, Hirschsprung) et un intérêt pronostique (bilan préopératoire des rectocèles) -­‐ Le test d’expulsion au ballonnet permet d’éliminer un obstacle terminal avec une valeur prédictive négative de 87 à 97%. b) Le TTC -­‐ A une variabilité individuelle importante et la sectorisation un caractère arbitraire. -­‐ Ne permet pas de différencier la constipation distale de celle de transit car il peut être augmenté en cas de constipation distale. 2
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-­‐ La réalisation de 2 TTC permet d’augmenter sa fiabilité, en particulier quand une indication chirurgicale est discutée. 3-­‐ Les explorations des troubles de la statique pelvienne (défécographie, colpocystodéfécographie, défécoIRM) : -­‐ Sont utiles pour mieux explorer une constipation distale quand l’examen clinique périnéal est anormal. -­‐ Permettent d’observer et de préciser la nature d’une colpocèle postérieure (rectocèle, élytrocèle, sigmoidocèle), une rectocèle, une intussusception intra-­‐anale, une élytrocèle, une descente périnéale. La défécoIRM est plus précise pour analyser les muscles élévateurs de l’anus et les entérocèles et les troubles de la statique antérieure associés. -­‐ Il est souvent difficile d'affirmer la responsabilité des anomalies anatomiques mises en évidence dans la genèse des symptômes. Un traitement chirurgical ne doit être envisagé que lorsque la certitude d’améliorer les symptômes fonctionnels est acquise. Les traitements de la constipation chronique
1-­‐ Les objectifs du traitement sont : -­‐ Soulager les symptômes -­‐ Améliorer la qualité de vie -­‐ Prévenir les complications 2-­‐ Les moyens thérapeutiques a) Les règles hygiénodiététiques : L’augmentation de la ration en fibres s’accompagne d’une augmentation du nombre des selles et l’amélioration de leur consistance. L’augmentation jusqu’à 15-­‐40 grammes doit être progressive pour limiter la survenue des flatulences et des ballonnements. L’activité physique et l’augmentation de la ration hydrique sont recommandées au titre du bien être général plus que de leur efficacité réelle sur la constipation. b) Les laxatifs -­‐ Les laxatifs lubrifiants (paraffine) peuvent être utiles, ils sont souvent utilisés en auto-­‐
médication -­‐ Les laxatifs osmotiques : les polyéthylènes glycol sont plus efficaces que le lactulose avec moins d’effets secondaires; ils sont bien tolérés avec un bon rapport coût efficacité. Ils sont recommandés en première intention. 3
-­‐ Les laxatifs de lest (mucilages, psyllium, ispaghule) sont également recommandés en première intention -­‐ Les laxatifs par voie rectale (lavements et suppositoires) doivent être privilégiés dans la constipation distale. Certains suppositoires libèrent des gaz dans le rectum pour stimuler le besoin. Dans certains cas, les irrigations rétrogrades avec les systèmes Péristeen peuvent être utiles. -­‐ Les laxatifs stimulants sont efficaces, ils améliorent la qualité de vie. La diarrhée et des douleurs abdominales sont des facteurs d’interruption thérapeutique dans environ 10% des cas. Ils peuvent être utilisés en traitement de fond sous surveillance médicale (troubles hydroélectrolytiques) c) Les colokinétiques : le prucalopride : -­‐ Agoniste sérotoninergique sélectif des récepteurs 5-­‐HT4. -­‐ Augmente la fréquence des selles et améliore leur consistance. -­‐ Améliore la qualité de vie. -­‐ Effet secondaire le plus fréquent : Céphalées, observées dans 10% des cas, essentiellement au cours des premiers jours de traitement. -­‐ Non remboursé par la sécurité sociale. Le prucalopride dispose d’une AMM chez la femme dans le cadre de la constipation chronique réfractaire aux traitements laxatifs de première intention. d) Le biofeedback : rééducation anopérinéale -­‐ 3 à 10 sessions suivies d’auto-­‐entretien -­‐ Indiqué surtout en cas de constipation distale -­‐ Une rééducation de la sensibilité rectale par sondes à ballonnets peut être réalisée si besoin -­‐ Améliore la qualité de vie jusqu’à 2 ans -­‐ Réduit la consommation de laxatifs -­‐ Plus efficace que les laxatifs en cas de dyschésie -­‐ Son efficacité repose sur la motivation des malades et sur l’expérience du thérapeute -­‐ Une rééducation abdominale peut être associée à la rééducation périnéale. e) La caecostomie chirurgicale (procédure de Malone) ou perendoscopique -­‐ Permet la réalisation d'irrigations coliques antérogrades. -­‐ Efficace dans des situations particulières mais avec un recul encore insuffisant. f) La chirurgie La prise en charge chirurgicale de la constipation chronique repose sur des concertations pluridisciplinaires. Le bilan pré-­‐opératoire doit être complet, en particulier quand une inertie colique est suspectée, incluant une coloscopie, un lavement baryté (mégacôlon et mégarectum), le TTC et la MAR (attester l’augmentation du temps de transit), une 4
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manométrie colique, une défécographie/défécoIRM, et une étude de la motricité oesogastrique et du grêle par manométrie. Ce bilan vise à identifier un trouble de la motricité colique isolé et à repérer les mauvais candidats à la chirurgie de la constipation quand il existe des troubles diffus de la motricité digestive. Colectomie totale avec anastomose iléorectale -­‐ Doit rester exceptionnelle et concerne moins de 5% malades atteints de constipation sévère (inertie colique). -­‐ Seule la colectomie totale avec anastomose iléo-­‐rectale doit être envisagée. L’intérêt des colectomies segmentaires n’a jamais été documenté. -­‐ Le succès dépend de la sélection rigoureuse des malades. -­‐ Effets secondaires : Douleurs abdominales, diarrhée et incontinence fécale chez 10-­‐
40% des malades en post-­‐opératoire. Chirurgie des troubles de la statique pelvienne – Rectocèle Si échec du traitement médical et de la rééducation Si symptomatique, de grande taille (>3cm), s’évacuant mal en défécographie et/ou imposant des manœuvres digitales (contre-­‐appui vaginal) – Intussusceptions intra-­‐anales Si échec des autres traitements Aggravation de la constipation dans 25 à 50% des cas – Elytrocèle Pas d’argument pour traiter les formes isolées (souvent associées aux autres troubles de la statique) G-­‐ La neuromodulation des racines sacrées (NMS) La NMS est utile dans le traitement de l’incontinence anale et quelques études montrent un bénéfice symptomatique au cours de la constipation. Cette technique fait l’objet d'études complémentaires dans cette indication. 3-­‐ La stratégie thérapeutique Les traitements doivent être hiérarchisés et il faut insister sur l’importance d’une prise en charge individualisée pour évaluer le plus objectivement possible les symptômes et l’évolution. Ainsi, l’utilisation de calendriers comprenant le nombre de selles par jour et leur consistance appréciée par l’échelle de BRISTOL (disponible facilement sur Google) est conseillée. 5
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Les règles hygiénodiététiques et les laxatifs doivent être utilisés dans tous les cas et en première intention. -­‐
La constipation fonctionnelle doit faire proposer les traitements du syndrome de l’intestin irritable dont l’évaluation des troubles psychologiques -­‐
La constipation distale orientera vers la rééducation anopérinéale (biofeedback si anisme ou hypertonie anale instable) et des laxatifs par voie rectale. Une chirurgie des troubles de la statique pelvienne peut être envisagée (si considérés comme responsables de la constipation). La constipation de transit fera préférer les laxatifs puis les colokinétiques et dans des cas exceptionnels d'inertie colique une solution chirurgicale. 6
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