ment, cette étiologie inhabituelle n’était pas envisagée et le
patient était adressé au spécialiste pour chirurgie ou iode
radioactif. Ces tumeurs peuvent cosécréter d’autres hormo-
nes telles que la prolactine et la GH, plus rarement LH
(hormone lutéïnisante), FSH (hormone folliculostimulante)
ou ACTH (hormone corticotrope). Ainsi, un bilan complet de
la fonction hypophysaire est indiqué chez de tels patients.
Parfois on découvre, dans le cadre d’un adénome considéré
comme initialement comme non sécrétant, une hyperthy-
roïdie subclinique avec un taux à peine élevé de T4 libre
et une valeur normale de TSH. Finalement, on peut men-
tionner l’existence d’adénome à TSH silencieux où le ma-
tériel retiré lors de la chirurgie hypophysaire montre la
présence de TSH à l’examen immunohistochimique. La TSH
est synthétisée, stockée puis sécrétée par les cellules thy-
réotropes de la partie antéro-médiane de l’hypophyse. Elle
est constituée d’une sous-unité alpha, identique à celle de
la LH, de la FSH et de l’hCG (hormone chorionique gonado-
trope) ainsi que d’une sous-unité bêta, spécifique à la cel-
lule thyréotrope, qui s’élève en cas d’adénome et lors de
la ménopause. L’apparition de l’adénome est liée notam-
ment à des altérations de la fonction du récepteur aux hor-
mones thyroïdiennes (TR-bêta), qui a perdu sa fonction
régulatrice.7,8
traitement de l’adénome sécrétant de
la thyréostimuline
Le but du traitement est de normaliser la fonction thy-
roïdienne et de traiter la tumeur hypophysaire.9,10
Chirurgie
Après avoir obtenu un contrôle de la fonction thyroïdien-
ne (cf. ci-après) une adénomectomie représente le trai-
tement de choix, pratiquée le plus souvent par voie trans-
nasale et -sphénoïdale.11,12 Environ 40% des patients sont
guéris, plus souvent en cas de micro-adénome que de
macro-adénome, lié au fait que les adénomes à TSH se
distinguent par leur aspect souvent plus invasif et fibreux,
qu’ils se manifestent par une hyperthyroïdie ou sous une
forme silencieuse.
Radiothérapie
Lors de sécrétion persistante après chirurgie, d’infiltra-
tion du sinus caverneux ou de non-réponse au traitement
médicamenteux, cette thérapeutique peut être envisagée.
Toutefois, son efficacité est faible vu la relative radiorésis-
tance et la diminution hormonale ne s’installe que lente-
ment.13,14 Les bénéfices de la radiochirurgie par
Gamma knife
dans ce type d’adénome seront à évaluer dès que des col-
lectifs de patients seront disponibles, un premier cas décrit
récemment semble indiquer un succès.
Analogues de la somatostatine et
dopaminergique
La sécrétion de la TSH est modulée par la somatostatine
qui se fixe sur cinq récepteurs dénommés sst1 à sst5 ainsi
que par la dopamine avec ses récepteurs D1 à D5.15,16 Des
analogues de ces deux peptides ont été utilisés avec succès
pour inhiber la sécrétion de TSH et représentent ainsi la
thérapeutique de choix. Chez les patients inopérables ou
en cas de maladie persistante après chirurgie, l’octréotide
ou le lanréotide peuvent être prescrits avec une efficacité
dépendant notamment de l’expression du récepteur sst2
présent sur les cellules tumorales, car ces deux neurotrans-
metteurs ont une haute affinité pour sst2 et sst5 et moindre
pour sst3 notamment. Les dopaminergiques, tels que la
bromocriptine et le cabergoline ont été utilisés avec un
succès lié à la présence du récepteur D2 sur les cellules
tumorales.17,18 Des combinaisons d’analogues de la soma-
tostatine et d’analogues dopaminergiques ont été pres-
crites avec un certain succès. E. Fliers et coll. viennent de
décrire un traitement curatif d’un macro-adénome à TSH
avec une hyperthyroïdie manifeste chez un jeune homme
de dix-neuf ans par de l’octréotide seul (Sandostatin LAR
20 mg chaque quatre semaines) avec une imagerie de con-
trôle montrant une hypophyse normale après quatre ans de
traitement.19 Cinq ans plus tard, le patient a une fonction
toujours normale. Ces auteurs proposent ainsi un traitement
d’épreuve avant toute chirurgie dans de tels adénomes en
évaluant son effet après quatre mois avant d’envisager une
chirurgie ou la poursuite de l’octréotide.
contrôle de l’hyperthyroïdie
L’utilisation des traitements classiques utilisés dans l’hy-
perthyroïdie peut être envisagée à court terme pour dimi-
nuer les risques périopératoires des patients présentant
une hyperthyroïdie franche ou à plus long terme.
Les antithyroïdiens (carbimazole) sont utilisés en sachant
qu’ils peuvent être associés à une augmentation du volu-
me du goitre si le taux de TSH s’élève. Ils sont surtout pres-
crits à court terme, n’étant pas un médicament de choix à
long terme.
Les bêtabloquants non sélectifs inhibent en partie la
conversion périphérique de T4 en T3 et ont un bon effet sur
les symptômes de type tachycardie et tremblement.
L’iodure de potassium n’est utilisé que pour la prépara-
tion à une chirurgie vu son effet inhibiteur à court terme
(Wolff-Chaikoff).
Bien que l’administration d’un traitement ablatif à l’iode
radioactif ait eu un effet favorable chez deux patients, sans
modification de la taille de l’adénome hypophysaire sur
une période de huit et douze ans respectivement, il ne peut
être recommandé vu l’absence de données suffisantes.20
discussion et conclusion
Dans la pratique médicale courante, les tests hormonaux
peuvent parfois simplement confirmer une suspicion clini-
que évidente ou plus rarement être le début d’une histoire
prolongée. La première étape est alors de connaître les va-
leurs de laboratoire attendues en fonction de la physiopa-
thologie, sachant que les principales glandes sont caracté-
risées par des axes comportant des hormones périphériques
exerçant un rétro-contrôle sur la production des hormones
hypophysaires. En cas de discordance par rapport à l’anoma-
lie attendue, il s’agit de rechercher les causes les plus cou-
rantes, d’abord par le contexte clinique et la prise médica-
menteuse puis, par des examens et tests complémentaires.
2190 Revue Médicale Suisse
–
www.revmed.ch
–
14 novembre 2012
35_39_36786.indd 4 08.11.12 09:55