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1
BULLETIN DE PSYCHOLOGIE
J
~
0
b
Tome XLIX
-
423
1:-
S
"
La
création
de
l'U.E.R.
sciences
humaines
cliniques
l
ians
les
années
50,
avant
la
réforme Fouchet,
le
cursus
de
psychologie comportait quatre cer-
tificats à
passer
en
deux ans après l'année dite
propédeutique conçue, elle, comme une année
de
culture générale, Trois de ces certificats,
les
CI~S
cie
Psychopathologie, de Psychologie de
l'enfant
et
de Psychologie sociale avaient été
créés
en 1947 en
même temps que
la
licence,
le
CES de
Psychologie générale était
lui
d'un plus
haut
lignage,
Les
psychologues l'empruntaient
à
Iii
vénérable licence de philosophie,
La
tradition
était
clone
que
la
responsabilité de
la
psycholo-
gie
générale soit confiée
à
qui
avait circulé entre
p
hilosop
hie et
psychologie, Juliette Favez-
Boutonier était
du lot.
Ayant amorcé et conduit
à
hien. après son agrégation de philosophie, des
études
de
médecine, une formation psychanaly-
tique.
un
Doctorat ès lettres sur un thème,
l'illlgoisse,
situé
au
bar yce
n
t re de ces trois
disci-
plines. elle
avait très normalement été appelée
de
Strasbourg
à la
Sorbonne pour assurer
la direc-
t
iou du
C.LS.
de psychologie générale.
Sur
place cependant
les
choses ne
se
présen-
taient
pas
d'une façon propre
à
la
satisfaire entiè-
rcme nt
Paul
Fraisse, responsable de
la
section
cie
psyc
hologie de
la
Sorbonne, très en cour
auprè»
des
instances ministérielles, avait obtenu
t'Il
eHe-t
que
le
pr ogr ainrne de ce
CES
soit remo-
delé
et
comporte outre
les
réflexions tradition-
nellcs
relevant de son versant philosophique, une
initiatiun assez poussée
à
J'approche expérimen-
tale et
aux statistiques. C'était mettre
les
ensei-
gnements relevant directement de Juliette Favez-
Houto
nier
à la
portion congrue.
En fin
d'année
Il"
mélange
cie
notes attribuées selon des systè-
mes
de notation hétérogènes assuraient en effet
aux correcteurs des copies de statistique et de
psychologie expérimentale, peu avares de très
mauvaises
et
d'excellentes appréciations, une
in-
J.
GAGEY
fluence déterminante.
La
sélection des
futurs
psychologues s'en trouvait quelque peu gaurhi«.
Juliette Favez-Boutonier ne
se
privait
pas d'affi-
cher
le
ressentiment qu'elle en éprouvait.
N'étant pas armée pour faire face sur
ce
plan.
elle avait choisi de contre-attaquer
en
affirmant
son autorité au niveau de
la
direction des thèses.
Tout professeur
à
J'époque était, comme
tel. qua-
lifié
pour prendre en charge
les
impétrants
de son
choix et
les
amener
à
soutenir
un
doctoral. 1)0['-
torats d'Etats dits Doctorats
ès
Lettres
au premie-r
chef,
mais
aussi,
depuis peu, Doctorats
dit de troi-
sième cycle ou de spécialité,
qui
comporteraient
donc de droit, dans
le
cas de J'espèce,
la
mention
psychologie. Cette innovation avait muit
iplié les
candidatures. Juliette Favez-Bo utonier
prit le
parti de n'en rejeter aucune, voire d'en solliciter
plusieurs.
Elle
ne
se
donnait nullement,
ce faisant.
comme étant capable de
les
encadrer fortement.
L'approche holistique de J'homme
en
situation,
qu'elle avait vue sous
le
nom d'approche
clinique.
selon une tradition ancienne résolument reprise
par Daniel Lagache et elle même,
ne se prévit-
lait pas
d'une méthodologie assurée.
Mais .Juliette
Favez-Boutonier ne doutait pas que
la
réitération
de
tentatives, même quelque peu désordonnées.
dans
le
sens d'une telle approche
finisse
par
pro-
duire des
fruits. Elle
comptait aussi sur
la dispo-
nibilité d'Anne-Marie Rocheblavc, secondée par
Robert
Mallet.
Dans
la
salle aussi modeste que
prestigieuse du premier étage
cie
l'escalier
A,
pompeusement baptisée Laboratoire de
Psycho-
logie
Clinique,
ils
s'activaient sans relâche
ave-c
elle pour accueillir
les
doctorants. discuter
de
leurs projets, ranimer leur flamme. orienter
leurs
lectures, leur prêter
tel
ou
tels
des
livres qui
('[1111-
mençaient
à
remplir
les
rayons
de la IJilJliolllè-
que.
Plus
essentiellement, avec
le
sens politique
aigu qui
était
le
sien, elle jugeait, sur
le
précédent
lfili
BULLETIN
DE
PSYCHOLOGIE
dt,
lil
guerrt
..
de Corée, qu'il pouvait être décisif
de cout
r
eba lancer par une foule, même
un
peu
bariolée, de docteurs en psychologie d'orienta-
tioll
clinique,
la
prétention d'expértmentaltstes
trop infatués
à
son goût de leurs savants appa-
reillages.
l.a
réforme
Foucher,
dont
la
mise en œuvre
était prévue pour
la
rentrée
67,
devait
lui
offrir
la
possibilité d'ouvrir
un
autre front.
Au
cursus
ell
t
rois ans, tel
que décrit ci-dessus, cette réforme
allait substituer Ull cursus en quatre années:
un
Ueug
de deux aus, différent de
la
propédeutique
car déjà spécialisé,
suivi
par une licence en deux
certificats obligatoires
et
une maîtrise elle-même
en
deux certificats dont l'un optionnel. D'évi-
dence dans celte affaire l'orientation que repré-
sentait Juliette Favez-Boutonier était appelée
à
se
diluer dans
les
enseignements du Deug, sauf
à ce
que
lui soit
trouvé
un
domaine bien
à
elle
sous les
espèces d'un certificat optionnel de maî-
trise,
Juliette Favez-Boutonier s'employa donc
à
obtenir
du
Ministère
la
création d'un certificat
C4
(lit
de
Psychologie clinique,
La
section de psycho-
logie de la
Sorbonne ne
lui
mît pas
les
bâtons dans
les
roues dans
la
pensée sans doute que
la clini-
que,
dont
les
vertus
lui
paraissaient plus que dou-
teuses, s'étiolerait dans ce ghetto,
La
médecine,
par contre, s'insurgera
à
l'idée que
le
monopole
du
vocable clinique puisse
lui
échapper.
Il
fallut
à
Juliette favez-Boutonier beaucoup d'habileté,
de
persévérance et d'entregent (elle n'en man-
quait
pas)
pour obtenir gain de cause,
Il
lui fallut
également beaucoup de lucidité pour
mettre
à profit,
comme elle
fit,
l'ouverture en
sep-
tembre
67
d'une annexe de
la
Sorbonne
à
Cen-
sier, La
grande majorité de ses collègues refusait
obstinément de s'y
«
exiler
».
Elle
comprit qu'elle
pouvait
y
trouver
un
point d'ancrage pour
la cli-
nique
et
négocia habilement l'échange de
la
pièce
qui lui
avait été allouée
à
la
Sorbonne, contre bon
nombre de mètres carrés, au troisième étage de
la
nouvelle construction,
C'est
qu'à
la
rentrée
67
furent accueillis
les
étudiants inscrits au tout nouveau
C4
de psycho-
logie
clinique. Juliette Favez-Boutonier en atten-
dait
vingt.
Il
s'en présenta six
fois
plus, Heureuse
surprise
'/
Oui
et non, Juliette Favez-Boutonier
se
serait accommodée de roder sur un petit groupe
le
programme pédagogique qu'elle avait conçu,
Elle
n'en
fit
pas moins face avec
les
appuis dont
elle disposait de
la
part de Claude Prévost, de
Pierre Fédida, qui venait d'arriver de Lyon, et de
moi-même, Placée sous
le
signe d'une grande
liberté,
déprise de
la
phobie des examens, l'année
fut
agréable pour
les
enseignants,
Et
tout autant,
à
ce qu'il semble, pour les étu-
(liants,
Quand
se
produisirent au mois de mai
les
événements que l'on sait, ceux-ci entreprirent en
effet de réfléchir
la
possibilité de généraliser
à
l'ensemble du cursus de psychologie
le
st
y!e-
d'enseignement qu'ils venaient de connaître,
Ils
s'y appliquèrent davantage qu'à discuter des
pro-
blèmes généraux de l'Université et de
la
société
française,
Un
mois durant salle
318, la
discussion
fut
permanente, Outre
les
étudiants
et
leurs
ensei-
gnants, vinrent
y
prendre part de uo
mb
reux
psychologues en activité dans
le
secteur de
la
santé mentale, Devenus
ou
non psychothérapeu-
tes, et/ou psychanalystes, tous témoignaient de
l'inadéquation de leur formation première aux
responsabilité qu'ils avaient conquises,
qui le ur
étaient échues ou qu'ils
se
sentaient vocation
d'obtenir. L'objectif était clair
et
consensuel. jeter
les
bases d'un cursus qualifiant des psyc hologues
ayant
à
se
spécifier comme des intervenants
à
part entière dans
le
champ de
la
souffrance
psychique face
à
et en rapport avec
la
psychia-
trie d'une part,
la
psychanalyse de l'autre,
Juliette Favez-Boutonier ne participait
pas
directement aux échanges, mais elle venait
régu-
lièrement
à
son bureau de Censier,
se faisait
ren-
dre compte des propos tenus, ne négligeait
pas
de donner son avis, non pour contrer
ce qui ten-
tait de s'élaborer de façon un peu relationnelle
mais pour en favoriser
la
décantation.
A la
retombée du mouvement
fin
juin,
loin
s'en
fallait
que
le
bouillonnement d'idées
ait
accouché
d'un programme réaliste, Juliette
Fa
ve
z-
Boutonier se garda bien d'en tirer occasion,
comme tant de ses collègues, pou r
se
reposition-
ner dans un rôle magistral.
Elle
attendait
la suite,
Celle-ci
ne tarda guère, Avec
la loi
Edgard Faure
d'octobre
68,
s'offrit
à
l'Université
la
possibilité
de mettre en acte
le positif,
pour autant
qu'il exis-
tait, de ce dont
il
avait été débattu en
mai,
S'agissant de
la
psychologie, ce positif existait
à
tout
le
moins dans
la
revendication commune
que
la
formation donnée
à
l'Université
soit ajus-
tée aux responsabilités
qui
de
fait
s'avéraient
devenir celles des psychologues dans
le
monde
de
la
santé mentale
et,
faute que
le
temps imparti
et
le
cadre universitaire permettent d'atteindre
assez cet objectif, que
les
étudiants
y
soient
bien
mis
en posture de consolider et d'enrichir
ulté-
rieurement et ailleurs une première formation
dans ce sens,
Le
programme détaillé d'un cursus répondant
à
cet objectif était alors très
loin
d'être
à
l'esprit
de quiconque, Juliette Favez-Boutonier n'en
décida pas moins de demander
la
création d'une
U,E,R.
de Psychologie clinique ayant pour voca-
tion
affichée d'encadrer des étudiants de maîtrise.
mais devant dans son esprit
se
rendre peu
à peu
capable d'inventer un cursus tout entier placé
à
l'enseigne de
la
clinique,
La
modestie
du
projet
affiché ne trompa qu'un instant
le
directeur
cie
la
section de psychologie de
la
Sorbonne,
ll
com-
prit vite qu'y était en cause
un
affaiblissement
éven
le
le pl
me
n
moir
insu
Julie
vain
l'UUI
faisë
tant
lon,
don
Li
me-
étUI
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mis
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