LES SOINS PALLIATIFS EN ÉTABLISSEMENTS SOCIAUX ET MÉDICO-SOCIAUX POUR PERSONNES POLYHANDICAPÉES OU EN SITUATION DE HANDICAPS SÉVÈRES Autour du patient BH2 Prise en charge de la douleur chez la personne polyhandicapée en fin de vie 1 Le soulagement de la douleur est inscrit dans la loi « (…) Toute personne a le droit de recevoir des soins visant à soulager sa douleur. Celle-ci doit être en toute circonstance prévenue, évaluée, prise en compte et traitée (…) » Loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé 2 Le soulagement de la douleur : surtout une question d’éthique « (…) le respect du jeune polyhandicapé, sa reconnaissance en tant que personne et être humain à part entière passe aussi et peut-être et surtout par la reconnaissance et la prise en compte de sa souffrance (…) » Philippe Pernes – Vivre et grandir polyhandicapé Dunod 2010 3 La douleur : définition « Expérience sensorielle et émotionnelle désagréable liée à une lésion tissulaire existante ou potentielle ou décrite en terme d’une telle lésion. » (définition de l’IASP*) La douleur est une expérience personnelle et subjective qui engage la personne dans tout son être « Phénomène central, modulé apprentissages antérieurs. » (G. Pfister) par les L’intensité de la perception douloureuse n’est pas toujours en lien avec la gravité de la lésion * International Association for the Study of Pain 4 La douleur : concept de « souffrance totale » « Total Pain » ou « douleur totale » : décrit le caractère multidimensionnel de la douleur en fin de vie (Cicely Saunders) Cette souffrance totale est à la fois : – – – – physique psychologique sociale spirituelle • La douleur est une expérience globale et nécessite une approche pluridisciplinaire 5 Une forte prévalence de la douleur La douleur fait partie du personnes polyhandicapées quotidien L’expression de la douleur considérablement amoindrie peut des être Elle doit faire l’objet d’un questionnement permanent Elle est un préalable accompagnement obligatoire à tout 6 Prise en charge de la douleur : 4 étapes 1. Recherche systématique et évaluation 2. Diagnostic étiologique et identification du ou des mécanismes en cause 3. Traitement 4. Réévaluation 7 Repérage de la douleur : 1ère étape Repérage (1) Évaluer systématiquement la douleur lors de l’admission dans l’établissement Repérer la présence d’une douleur de manière active et volontariste 8 L’absence de plainte n’est pas synonyme d’absence de douleur Repérage (2) La douleur n’est pas toujours exprimée, ni visible, ou fréquemment de présentation atypique La douleur a parfois entraîné chez les soignants l’idée d’une relative insensibilité de certaines personnes à la douleur Connaître le résident est indispensable repérage et à la prise en charge de la douleur au Croire à la plainte douloureuse 9 Les douleurs induites sont fréquentes Repérage (3) Toutes les interventions de pratique courante sont potentiellement douloureuses ‒ Prélèvements sanguins, ponctions, pansements, poses et soins de sondes ou de cathéters, soins d’hygiène, mobilisation du patient, etc. Les douleurs induites peuvent être prévenues et, pour beaucoup, soulagées ‒ Traitements antalgiques, soin relationnel, organisation réfléchie des soins Les objectifs de soins doivent être réévalués régulièrement 10 La présence de déficiences multiples complique la prise en charge de la douleur Repérage (4) Les déficiences multiples induisent des troubles de la communication verbale, qui sont un facteur de risque de traitement insuffisant de la douleur Ils doivent donc entraîner une vigilance accrue des soignants ‒ Repérage des changements dans les comportements, qui doivent systématiquement faire rechercher une douleur 11 La présence de déficiences multiples complique la prise en charge de la douleur Repérage (5) Le repérage nécessite ‒ du temps, organisé et voulu ‒ un espace de parole où chaque soignant peut s’exprimer et être entendu ‒ des temps de discussion interdisciplinaire ‒ au domicile, une sensibilisation, voire une éducation de l’entourage ‒ le recours à des échelles d’hétéro-évaluation 12 Évaluation L’évaluation doit être systématique et répétée Privilégier l’auto-évaluation (échelles EVS, EN, DN4) ‒ Le patient est le mieux placé pour juger du degré de soulagement de sa douleur Recourir à l’hétéro-évaluation quand le patient est incapable d’une auto-évaluation (troubles cognitifs, troubles de la communication verbale) ‒ Échelles comportementales ALGOPLUS ou ECS DOLOPLUS, ECPA, 13 Auto-évaluation Échelles des visages - Verticale - Schéma corporel Échelle des visages 14 Questionnaire DN4 : évaluer les douleurs neuropathiques Estimation de neuropathique la probabilité d’une douleur 4 questions : ‒ ‒ ‒ ‒ caractéristiques de la douleur symptômes associés dans la même région hypoesthésie effets du frottement Score total de 0 à 10 Un score ≥ 4/10 témoigne de la présence d’une douleur neuropathique 15 Hétéro-évaluation (1) Échelle DOLOPLUS Dix items, répartis en trois groupes : 1. Retentissement somatique : plaintes somatiques, positions antalgiques au repos, protection de zones douloureuses, mimique, sommeil 2. Retentissement psychomoteur : toilette et/ou habillage, mouvements 3. Retentissement psychosocial : communication, vie sociale, troubles du comportement Quatre niveaux de cotation par item (score total de 0 à 30) 16 Hétéro-évaluation (2) Échelle ECPA (Échelle comportementale d’évaluation de la douleur chez la personne âgée non communicante) 8 items : Expression du visage Position spontanée au repos Mobilité du patient Relation à autrui Anticipation anxieuse aux soins Réactions pendant la mobilisation Réactions pendant les soins des zones douloureuses Plaintes exprimées pendant le soin 17 Hétéro-évaluation (3) Échelle ALGOPLUS Hétéro-évaluation de la douleur aiguë et de la douleur induite 5 domaines d’observation : ‒ ‒ ‒ ‒ ‒ Les expressions du visage Les expressions du regard Les plaintes émises Les attitudes corporelles Le comportement général Score total sur 5 ‒ Un score ≥ 2 témoigne de la présence d’une douleur 18 Hétéro-évaluation (4) Échelle Comportementale Simplifiée (ECS) Items évalués hors soins et mobilisations 1. 2. 3. 4. 5. 6. Comportement spontané Mimique douloureuse spontanée Intérêt pour l’environnement Regard spontané Posture spontanée Contact verbal Items évalués pendant les soins et mobilisations 7. Réactions aux soins 8. Réactions à la mobilisation Items évalués une fois/24h 9. Sommeil (équipe de nuit) 10. Alimentation 19 Hétéro-évaluation (5) DESS - Douleur Enfant San Salvadour Basée sur l’interrogatoire et l’observation du comportement Deux volets 1. En dehors de situation douloureuse : dossier de base 2. En situation douloureuse : une grille de cotation en 10 items 20 Hétéro-évaluation (6) EDAAP* * Échelle d’évaluation de l’expression de la Douleur chez l’Adolescent ou l’Adulte Polyhandicapé1 Réalisée à partir de « DOLOPLUS » et « DESS » Échelle qualitative d’évaluation comportementale 11 items répartis en 2 catégories 1Hôpital Marin d’Hendaye 21 Hétéro-évaluation (7) NCPCC Grille d’évaluation de la douleur - déficience intellectuelle (GED-DI) ☞ Échelle NCCPC : Children’s Pain Checklist Non Communicating 30 items simples côtés de 0 à 3 22 Hétéro-évaluation (8) FLACC Grille d’évaluation comportementale de la douleur – – – – – Face (visage) Legs (jambes) Activity (activité) Cry (cris) Consolability (consolabilité) 23 Diagnostic étiologique et identification du ou des mécanismes en cause : 2ème étape 1. Caractère multiple et simultané des étiologies Cancer, arthrose, fractures, escarres, zona, etc. 2. Fréquence des douleurs induites 3. Fréquence des douleurs neuropathiques, sous diagnostiquées et insuffisamment traitées 4. Fréquence des douleurs mixtes, nociceptives et neuropathiques 5. La douleur irritative intervient comme une épine 24 Traiter : 3ème étape Soulager la douleur est une urgence Le traitement étiologique doit être entrepris quand il est possible Les traitements antalgiques seront adaptés au(x) mécanisme(s) en cause Les traitements médicamenteux et non médicamenteux sont associés Un test antalgique est nécessaire en cas de doute sur la présence d’une douleur 25 Suivre et ré-évaluer : 4ème étape Les effets des traitements et leurs effets secondaires sont systématiquement évalués Le suivi de la prise en charge de la douleur est formalisé et tracé Les outils du suivi : dossier de soin et fiche de suivi 26 Conclusion La prise en charge de la douleur est un volet essentiel de la démarche palliative L’existence d’une douleur doit être recherchée systématiquement et activement par le soignant et l’entourage, sans attendre la plainte Le soulagement de la douleur est une véritable urgence 27