Études du CEFRES n° 8
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Pour comprendre une culture, faudrait-il
adopter son point de vue ?*
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L’idée selon laquelle, pour comprendre un énoncé culturel ou, plus largement, un fait de culture,
il faudrait se placer du point de vue de cette culture est l’article de base du relativisme culturel
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Cette idée est soit très banale, aujourd’hui du moins, soit tout à fait inacceptable si l’on en tire
certaines conclusions.
Elle est triviale si l’on entend par là qu’il faut, par exemple, replacer les énoncés culturels dans le
contexte de la culture où ces énoncés ont été prononcés. Lorsque l’historien des sciences tente de
décrire et d’expliquer ce que des hommes d’autrefois pensaient de la structure du monde, il
s’emploie le plus naturellement qui soit à replacer cette pensée dans le contexte d’une époque. La
notion de phlogistique, par exemple, n’est intelligible qu’en référence à la chimie du XVIII
e
siècle et aux conceptions que l’on se faisait des corps et de la matière dans cette période.
Personne n’ignore que le terme d’âme n’a pas le même sens prononcé par un prêtre dans une
église, mobilisé par un philosophe matérialiste ou employé par Fichte lorsqu’il dit avoir vu passer
à Iéna l’âme du monde à cheval. Et contextualiser, c’est bien ce que nous faisons chaque jour en
communiquant avec autrui : nous interprétons ses mots et ses phrases en fonction de ce que nous
connaissons de lui, des habitudes de langage qui sont les siennes et des circonstances dans
lesquelles il s’exprime. Nous savons bien, comme d’instinct, que dans certains contextes la
phrase « Il fait froid » est un constat météorologique et que, dans d’autres, elle veut dire « Fermez
la fenêtre ». Alors l’idée selon laquelle ce que pensent, disent et font les hommes, appartenant à
un certain univers culturel, ne prend sa signification que relié au système d’idées et de valeurs
* Ce texte a été présenté par Gérard Lenclud lors de la séance introductive des Ateliers en sciences sociales « Penser
les cultures : pluralité ou universalité des valeurs » organisés par le CEFRES, l'Ecole des hautes études en science
sociales (EHESS, Paris) et l'Université Charles, à Prague, le 24 octobre 2006.
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Alban BENSA reviendra, dans le prochain numéro des Études du CEFRES, sur les usages (et les mésusages) de la
notion de culture. Il me suffit donc ici de dire que j’entends par énoncé culturel ou par fait de culture tout énoncé ou
tout fait rapporté ou analysé dans une perspective anthropologique au sens large. Je n’ai guère besoin de rappeler que
tout Homo sapiens est un Homo culturalis et que, par conséquent, la culture commence à domicile !