APERÇU SUR LE SECTEUR BETAIL/VIANDE AU MALI : Viande Rouge et Lait. Dr. Mamadou D. Coulibaly Direction Nationale Des Productions Animales, Bamako, Mali INTRODUCTION Le Mali est l’un des grands pays d’élevage de l’Afrique de l’ouest, avec une biomasse animale estimée à environ 8,9 millions d’UBT en 2004. L'économie du pays repose essentiellement sur le secteur rural et l’élevage, comme sous-secteur, contribue à la formation du PIB national pour environ 10 %. Malgré cette importance numérique et économique, les productions animales sont limitées par une faible productivité liée à plusieurs contraintes et sont loin de couvrir les besoins domestiques. Le développement de l’élevage est confronté à de nombreuses contraintes au nombre desquelles la prévalence des systèmes extensifs de production à faible productivité, les difficultés alimentaires, le faible potentiel génétique des animaux, d’importants problèmes de santé animale, la faible performance des systèmes de commercialisation et de transformation et l’insuffisance des données statistiques pour la planification. C’est pour la levée de ces contraintes que, depuis plusieurs décennies, le Gouvernement a déployé et continue de déployer de gros efforts pour la mise en œuvre de projets et programmes dits de développement de l’élevage. Le présent document fait un aperçu sur le sous-secteur du bétail et de la viande au Mali en jetant un regard rétrospectif sur les acquis pour illuminer le chemin futur à parcourir. SYNTHESE Etat des lieux Généralités Situé au cœur de l'Afrique de l'Ouest entre les 10° et 17° latitudes Nord, le Mali est un pays enclavé de 1 240 019 km2. Son climat est de type intertropical continental se caractérisant par une seule saison de pluie dont la durée moyenne varie entre 2 et 6 mois et les précipitations entre 100 et 1200 mm du Nord au Sud. Le réseau hydrographique comprend essentiellement le fleuve Niger sur 1700 km et le Sénégal sur 900 Km à l'ouest. La superficie des terres possédant une aptitude pour l'agriculture couvre 23,8% des terres. Les réserves pastorales, diversifiées en qualité et quantité, sont importantes mais inégalement réparties sur l'ensemble du territoire. Elles sont à l'origine des pratiques d'élevage séculaires, comme le nomadisme ou la transhumance. L'économie du Mali repose essentiellement sur le secteur rural qui occupe présentement près de 74% de la population active. Entre 1987 et 2004, la valeur moyenne du PIB a été de 821,1 milliards de FCFA dont un apport du secteur primaire de 333,3 milliards F CFA soit une contribution de 41%. Le sous-secteur d’élevage occupe une place importante dans le secteur primaire. Au plan de l’économie nationale, sa contribution au PIB était estimée à 12% (DNSI, 1997) et son apport aux recettes d’exportation était de 40 milliards de FCFA en 1995 soit 17,5% des exportations totales, occupant la troisième place après le coton et l’or. 61 MSAS'2008 En dépit de cette importance numérique et économique du sous-secteur élevage, les productions animales sont limitées par une faible productivité liée à plusieurs contraintes et sont loin de couvrir les besoins domestiques. Ainsi les niveaux de consommations des produits animaux sont encore faibles, 6 à 30 litres de lait et 12 kg de viande par habitant par an. Le développement de l’élevage est confronté à de nombreuses contraintes parmi lesquelles nous retenons (i) les difficultés d’alimentation du bétail, (ii) le faible potentiel génétique des animaux, (iii) des problèmes de santé animale, (iv) la faible performance des systèmes de commercialisation et de transformation, (v) l’insuffisance des données et des systèmes de planification et de suivi évaluation des activités du sous secteur élevage et (vi) la faiblesse des systèmes de communication. Pour lever ces contraintes des projets et programmes ont été mis en œuvre ou sont en cours d’exécution. Les efforts d’amélioration consentis par le gouvernement par le passé et jusqu'à un passé très récents n’ont pas corrigé cette lacune. Ils ont visé des objectifs globaux d’amélioration de l’élevage et ont été dans la plupart des cas régionalisés. Les nouvelles tentatives privilégient plutôt l’approche filière : bétail/viande, lait et volaille. Statistiques de l’élevage Les effectifs du cheptel étaient estimés en 2006 à 7.843.442 têtes de bovins, 8.870.735 ovins, 12.647.464 caprins, 315.661 équins, 818.896 asins, 700 000 camelins, 71.163 de porcins et 21.243.833 de volailles. La production de viande se situe au tour de 150 000 tonnes de disponible exploitable de viande rouge. La production annuelle de cuirs et peaux est estimée autour de 540 000 cuirs et 1 337 000 peaux. La production de laitière totale estimée à partir de l’application de paramètres zootechnique oscille autour de 1 815 579 de tonnes. Cette production est malheureusement mal valorisée à cause du très faible niveau de collecte et de transformation. Aujourd’hui, il existe au Mali une douzaine d’unités privées de transformation laitière pour environ une capacité totale installée de 62 600 litres de lait par jour. Projets et programme en cours ou en démarrage Programme d’appui aux services agricoles et aux organisations paysannes Projet d’Appui au Développement de l’Elevage au Nord Est du Mali Projet de Conservation In Situ Bétail Ruminant Projet sous régional de l’amélioration de la qualité des peaux et cuirs Projet de Développement de l’Elevage de la Région du Liptako Gourma Projet de Développement de l’Elevage Kayes-Sud Programme de Compétitivité et de Diversification Animale (PCDA) Projet d’Appui au Développement de l’Elevage au Sahel Occidental Projet mouche tsé-tsé Projet d’appui à la sélection et à la multiplication du Zébu Azawak Perspectives Programme Quinquennal d’Aménagements pastoraux MSAS'2008 62 Au Mali, l’élevage étant essentiellement extensif (élevage transhumant et élevage nomade), la mobilité des animaux reste la meilleure forme d’exploitation des ressources fourragères et des points d’eau. Il reste fortement tributaire de ces ressources naturelles. La production fourragère relativement abondante en fin d’hivernage, s’amenuise en saison sèche, une bonne partie de cette production étant, chaque année, réduite en cendres par les feux de brousse. Aussi faut-il souligner que les points d’eau naturels (mares, lacs fleuves,…) constituent les points d’abreuvement essentiels des animaux sur leurs longs trajets de déplacement. Cette dépendance du cheptel vis à vis des pâturages et des points d’eau naturels induit des modes d’occupation et d’exploitation de l’espace rural qui mettent les utilisateurs en compétition voire en opposition, en particulier les éleveurs et les agriculteurs. C’est dans le contexte ci- dessus décrit que l’Etat a adopté en 2007 le présent programme qui vise à améliorer durablement l’alimentation des animaux à travers une accessibilité accrue aux ressources fourragères par l’aménagement approprié des espaces pastoraux. Les objectifs spécifiques du programme sont (i) améliorer l’abreuvement des animaux, (ii) assurer la préservation de la mobilité du cheptel, (iii) assurer la protection du disponible fourrager et (iv) améliorer la gestion des ressources naturelles. Ses axes d’intervention sont (i) Amélioration de l’abreuvement des animaux (15 milliards de F CFA), (ii) Préservation de la motilité des animaux (4 milliards de F CFA), (iii) Protection du disponible fourrager (1,5 milliards de F CFA) et (iv) des Etudes (1,321 milliards de F CFA). Avec des activités de suivi-évaluation et communication le budget global du programme totalise 22,631 milliards de F CFA. Plan de développement de la filière bétail/viande au Mali Avec 7,1 millions de bovin et 18,5 millions d'ovins-caprins, le cheptel malien se classe parmi les effectifs les plus importants de la sous-région ouest africaine. En dépit de ce potentiel fort intéressant, se pose au Mali la problématique de l’approvisionnement satisfaisant de la population, en bétail, en viande et produits dérivés et de la capacité de pouvoir exporter de façon durable vers les marchés traditionnels et ou émergents. C’est à cette fin que le Conseil Présidentiel pour l’Investissement (CPI), lors des assisses de sa deuxième session tenue en mars 2005 à Bamako, a recommandé l’élaboration d’un plan de développement de la filière bétail viande au Mali. Le Ministère de l’Elevage et de la Pêche a été chargé de réaliser l’étude en collaboration avec le Ministère de l’Industrie et du commerce. L’élaboration a commencé par des diagnostics régionaux. Ceux-ci ont révélé l’existence d’une dynamique autour de la filière bétail viande et des opportunités. Au-delà des opportunités, la filière est marquée sur le plan de la transformation par (i) la vétusté des infrastructures d’abattage, (ii) l’insuffisance de chambres froides, (iii) l’absence d’un parc auto approprié pour le transport de la viande et (iv) l’absence de sociétés de provende. Au plan de la commercialisation elle est marquée par (i) l’enclavement des zones de production du bétail et de la viande et (ii) les difficultés de transport lié à l’insuffisance d’un parc auto approprié et au problème du fret retour des camions. A l’analyse de ces contraintes des stratégies et plans d’actions s’inscrivant dans une perspective de moyen et long termes, 10-20 ans, La stratégie comprend les actions d’amélioration (i) de la production du vivant, (ii) de la transformation du vivant en viande, (iii) de la commercialisation du bétail et de la viande et (iv) des mesures d’accompagnement. Les actions sont décrites dans une approche régionale conformément aux résultats du diagnostic. 63 MSAS'2008 Le coût du programme d’action pour la période 2006 à 2010 s’élève à la somme de 227,9 milliards de F CFA devant être financé à hauteur de 54 % par les partenaires, 31% par l’Etat, 9% par les Collectivités Décentralisées et 6% par le secteur privé. Stratégie et proposition d’actions pour La valorisation du lait cru local au Mali La crise mondiale actuelle de la poudre de lait constitue une opportunité réelle pour le Mali, pays d’élevage par excellence, pour faire la promotion de sa production laitière et développer, à terme, une industrie laitière nationale véritable. Ceci aura le double impact d’améliorer d’une part le niveau de consommation du lait per capita et d’autre part d’améliorer sensiblement le revenu des acteurs de la filière du lait cru local. Pour ce faire une stratégie est élaborée, janvier 2008. Elle se propose de développer la production laitière autour des grandes villes tout en capitalisant sur l’expérience des élevages laitiers périurbains et en maximisant la collecte et la transformation du lait cru local. Schématiquement, la stratégie comprend des actions qui porteront spécifiquement sur l’organisation de basins laitiers dévolus à l’intensification de la production à travers une alimentation animale maîtrisée (utilisation de fourrages de qualité et de concentrés alimentaires équilibrés), la production et l’utilisation de bovins sélectionnés ou croisés plus performants, la maîtrise des pathologies ayant un impact direct sur la production laitière et l’organisation des éleveurs laitiers. Pour le segment collecte, il est prévu la mise en place de centres de collecte équipés de tanks et l’équipement des producteurs en moyens logistiques pour la livraison du lait aux centres de collecte où directement aux laiteries. Le segment transformation sera animé par l’implantation d’unités de traitement de lait avec possibilité de production du lait UHT. Pour l’implantation des unités de transformation les villes de Bamako, Kayes, Sikasso, Ségou Mopti, Gao et Kidal (pour le lait de chamelle) sont ciblées. Le coût de la stratégie est estimé à environ 9,9 milliards de FCFA CONCLUSION L’analyse de la situation actuelle du sous-secteur élevage du Mali laisse apparaître des filières bétail et viande à grande potentialité et avec beaucoup d’opportunités. Le cheptel national est très important du point de vue des effectifs et les potentialités pastorales sont énormes. Par contre le niveau des productions animales, s’il présente une certaine tendance à l’augmentation, reste encore faible au regard de la satisfaction des besoins domestiques en produits animaux et des marchés d’exportation qui restent ouverts. Cette insuffisance est liée à des contraintes dont les problèmes d’alimentation, de faible potentiel génétique et de santé animale et faible niveau d’organisation des professionnels et le faible niveau d’investissement. L’Etat a entrepris beaucoup d’effort pour exécuter nombre de projets et programmes de développement de l’élevage. Ces exercices ont permis de faire des acquis certains, mais force est de reconnaître l’importance du chemin à faire. Dans les perspectives beaucoup de projets sont encore en chantier pour améliorer les productions et la productivité animale. De nouveaux programmes et stratégies sont élaborés ou en élaboration. L’adhésion et la participation des partenaires techniques et financiers sont requises pour la mise en œuvre de ces programmes nouveaux tant important pour les plus hautes autorités du pays. MSAS'2008 64