L`enregistrement sédimentaire des variations du niveau marin

Préparation à l’agrégation SV-STU, université Pierre & Marie Curie.
L'enregistrement sédimentaire des variations du niveau marin.
Leçon de spécialité (secteur C) de géologie.
Proposition de plan par : M. Rodriguez, Pr. Agrégé en sciences naturelles et doctorant iSTeP/ ens.
Adresse mail : rodriguez@geologie.ens.fr
finitions :
Il convient de distinguer deux grands types de variation du niveau marin (NM) : les variations
relatives et absolues.
Les variations absolues du niveau marin correspondent à la variation de la distance entre la
surface de la mer et une référence fixe : en pratique, l’ellipsoïde de référence déterminé par la
géodésie est la plus utilisée. Les variations absolues du NM correspondent à des variations spatiales
et temporelles du NM par rapport à cet ellipsoïde. L’eustatisme désigne les changements globaux du
niveau absolu de la mer.
Lorsque nous parlons de niveau marin relatif (NMR), il s’agit du NM mesuré à partir d’un
point de référence dans le soubassement. Il s'agit de la position de la ligne de rivage. Il ne tient pas
compte de l’épaisseur de sédiment mais comprend la subsidence ajoutée au niveau eustatique.
L’accommodation désigne l’espace total disponible pour déposer du sédiment ; la notion d’espace
disponible désignant quant à elle la fraction de cet espace n’ayant pas encore été comblée par du
sédiment.
Fig. 1 : la variation du niveau marin et sespercutions enregistrables par la sédimentation
(exemple d’une montée du niveau de la mer) (Document : G. Merzeraud).
Les notions de régression et de transgression
Une variation du NMR ne correspond pas toujours à une variation du niveau marin absolu : le
NMR dépend aussi de la subsidence et des apports sédimentaires. Si par exemple, au cours d’une
montée du niveau eustatique les sédiments arrivent plus vite et en plus grande quantité que le
niveau ne monte, alors la plate-forme se comble, la ligne de rivage est repouse au large, et il y a
régression. En Scandinavie, du fait du rebond post-glaciaire de la lithosphère, une baisse du NMR est
enregistrée à niveau eustatique constant dans les régions où la lithosphère se soulève et vice-versa
dans les régions où la lithosphère subside.
Les régressions et transgressions correspondent à la position de la ligne de rivage : quand il y
a régression, il y a retrait de la ligne vers le large ; inversement en période de transgression,
la ligne de rivage progresse sur le continent (fig.2).
Fig.2 : Les différentes manières d’obtenir une transgression ou une régression en faisant
varier, indépendamment des autres facteurs, l’eustatisme, la subsidence, et les apports
sédimentaires (Document : G. Merzeraud)
Problématique :
Comment l'enregistrement sédimentaire peut-il constituer un enregistrement des variations
du NMR? Quelle est la résolution temporelle de cet enregistrement ? Que nous apprend l'étude des
sédiments sur les variations du NMR? Comment reconstituer les variations du NMR d’après
l’enregistrement sédimentaire ?
[Nous limitons notre étude à la sédimentation détritique, même si la sédimentation
carbonatée peut aussi fournir des informations précieuses sur les variations du NMR.]
A)
1) Mise en évidence des variations du Niveau Marin Relatif dans l'enregistrement sédimentaire :
approche historique (De Hutton à Vail & Mitchum)
Lorsque dans un bassin sédimentaire les dépôts se font régulièrement, sans interruption, et
que les strates s’accumulent ainsi les unes sur les autres, on dit qu’il y a concordance des dépôts
sédimentaires. Mais de nombreux évènements tectoniques ou eustatiques peuvent perturber la
concordance des dépôts. James Hutton fut le premier en 1787 à décrire et surtout à proposer une
origine pour une discontinuité érosive particulière : la discordance. L’affleurement étudié se situe à
Jedburgh, en Ecosse. Les discordances sont interprétées par Hutton comme résultant de phases
d’érosion majeures, capables d’araser les chaînes de montagnes (fig. 3).
Hutton, et l'identification des discontinuités sédimentaires
Fig. 3 : La discordance angulaire décrite par Hutton à Jedburgh en Ecosse (Document : G.
Merzeraud)
Par exemple, les reliefs créés lors du basculement des couches accompagnant une phase de
compression sont ensuite aplanis par l’érosion. Lors du retour de la mer, les nouveaux dépôts
recouvrent les anciennes structures basculées : il s’agit d’une discordance angulaire. Dans le cas plus
simple d’une surface de discordance formée par le simple retrait de la mer, les dépôts mis en place
lors de la transgression suivante n’ont pas une grande différence de pendage avec les dépôts qu’ils
recouvrent. Difficilement identifiable à l’affleurement, ces discordances sont plus visibles à l’échelle
d’une carte géologique : c’est pourquoi on parle de discordance cartographique. Au niveau d’une
surface de discordance donnée, le temps n’est pas enregistré jusqu’au retour de la mer. Ainsi, la
quantité de temps enregistrée par une surface d’érosion peut être bien plus importante que celle
enregistrée dans une séquence de dépôt !
Fig. 4 : Discordance angulaire observée sur l’île de Socotra, Yemen (Photo : M. Fournier)
Autres surfaces remarquables : les niveaux condensés (Hardgrounds)(fig.5). En période de
transgression marine, un point autrefois situé proche d'une source d'apports sédimentaires peut s'en
retrouver éloigné. La sédimentation devient alors essentiellement pélagique, avec des taux de
sédimentation très faibles, qui autorisent une intense bioturbation. Le terme de "niveau condensé"
vient du fait qu'une grande quantité de temps est enregistrée dans une faible épaisseur de
sédiments.
Fig.5 : Exemple de niveau condensé à différentes échelles (Document : G. Merzeraud)
Les différentes surfaces repères illustrent donc le caracre fragmentaire de l’enregistrement
sédimentaire. Si le temps est enregistré en continu, il ne l’est pas toujours au même endroit. Certaines
formations sédimentaires enregistrent plus de temps que d’autres : une turbidite de quelques cm
d’épaisseur se dépose en quelques heures, là où il faut plusieurs milliers d’années pour obtenir la
même épaisseur de sédiment avec des pélagites ! Ces surfaces repères sont interprétables en termes
de variations du NMR.
Au 18°siècle, Lavoisier réalisa une des premières mises en évidence des variations relatives
du niveau marin (NM), dans une localité Suisse du nom de St Gobain, alors qu'il travaillait à
l'élaboration des premières cartes géologiques de la France. A la base de l’affleurement étudié (Fig.
6), une strate renfermant des coquilles d’organismes peu usées. Au sommet, une seconde strate
composée de galets arrondis. Lavoisier associe à la première strate un milieu de dépôt calme, tels
ceux observés en milieu pélagique ; à la deuxième strate un milieu de dépôt agité, les angles des
galets (et brèches) ayant été émoussés par un roulement sur un rivage agité par les vagues. En
appliquant le principe de superposition, Lavoisier conclut qu’en un même point de l’espace se sont
succés au cours du temps deux milieux de dépôts différents (l’un calme, l’autre agité),
correspondant à différentes positions des anciennes lignes de rivage, et différentes profondeurs de la
mer. Lavoisier identifiait ainsi une variation du niveau relatif de la mer.
B) Lavoisier et l'analyse des faciès sédimentaires
Fig. 6 : Gravure extraite de la publication originale de Lavoisier, montrant le lien entre la position
de la ligne de rivage et les différentes granularités des dépôts.
La démarche de Lavoisier est basée sur l'analyse des faciès sédimentaires. Un faciès est défini
par l'ensemble des caractères biostratigraphiques, lithologiques et hydrodynamiques d'une strate.
En effet, certaines espèces fossiles sont caractéristiques de milieu de vie + ou - profonds (ex. les
rudistes sont les témoins d’un environnement de plate-forme récifale peu profond). La granularité
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