N ° 9
Les Échos du CPNLF
Post Scriptum
d'un Congrès à l'autre...
109e session
REPENSER
L'AUTISME
UMD : du sécuritaire
aux soins intensifs
N°9
Directeur de la publication : Pierre Thomas - Rédacteur en Chef : Patrick Martin
Infographiste : Vivianne Lambert - Photos de ce numéro : Martine Bertheuil
de l’EPF ou modèle de sur-fonctionnement perceptif. Dans ce
modèle, au lieu de considérer que certaines données ne
peuvent être traitées par les autistes et qu’elles requièrent
une opération cognitive particulière, le groupe de Montréal
sugre qu’il s’agit en fait d’un niveau de traitement
présentant des particularités. L’EPF repose sur trois
conceptions :
le traitement perceptif est meilleur dans l’autisme. La
plupart du temps les autistes ont des performances
supérieures dans le traitement de la perception, c’est-à-dire
que les taches sont mieux réalisées.
Il y a une autonomie supérieure de la perception dans
l’autisme ; c’est elle qui commande.
• La perception a un rôle supérieur. Chez les humains
neurotypiques, la perception agit en conjonction avec
d’autres composantes de l’architecture cognitive ; la
perception n’est jamais seule à agir. Chez l’autiste, elle
n’aurait pas ce rôle ancillaire.
Le modèle de sur-fonctionnement perceptif rend compte
avec un haut niveau de plication des pics d'habileté
perceptive visuelle de bas et de hauts niveaux, des
constructions visio-spaciales, de la recherche visuelle et
auditive, des paradoxes de l’intelligence autistique, des
réallocations corticales en faveur de zones d’expertises
visuelles observées dans des tâches adultes.
Le Professeur Mottron a suggéré que ce modèle rendrait
aussi compte, de manière plus spéculative, des atypies
sociales et communicatives des autistes par une sur-
concentration sur les aspects physiques et informationnels
de l’environnement.
Le Dr Frédérique Bonnet-Brillaut (Tours)quant à elle, à
traité de l' Hypothèse neuro-développementale et modèles
psycho-physiologiques de l’autisme.
Désormais, on admet que l’altération des capacités de
communication et d’interaction chez les patients autistes
est liée à un trouble précoce du développement et du
fonctionnement cérébral. De nombreuses questions restent
cependant à résoudre, notamment, y a-t-il une fenêtre
temporelle critique dans laquelle intervient l’émergence de
ce trouble ?
Lorsqu’on cherche des indices pour mettre en évidence les
étapes-clés de veloppement de la pathologie, les
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C'est au cours de la session thématique "Troubles
envahissants du développement : repenser l'autisme",
présidée par les Prs Manuel Bouvard (Bordeaux) et
Laurent Mottron (Montréal), que ce dernier à évoqué
"L'autisme comme réorganisation cérébrale en faveur de
la perception".
Le Professeur Mottron, de l’Université de Montréal, a offert
une présentation des données récentes de neurosciences
cognitives en faveur d’une conception de l’autisme vu non
pas comme un désordre mais comme une réorganisation
cérébrale en faveur d’une fonction particulière : la
perception.
Durant la grande vogue des modèles unifiants cognitifs des
années 90, les neuroscientifiques tentaient de trouver une
anomalie cognitive unique qui, en cascade, produirait la
totalité des signes retrouvés dans les trois aires de l’autisme.
Nous en sommes revenus, réalisant qu’il est impossible de
trouver un modèle unique des anomalies observées, qui sont
domaines spécifiques.
Ce que le groupe de Montal veloppe depuis une quinzaine
d’années est un modèle alternatif, domaine néral. Il s’agit
Post Scriptum, ce mois-ci comme chaque mois, rapporte dans la rubrique "Les Échos du CPNLF" une partie
des interventions communiquées dans le cadre du 109e congrès du CPNLF.
Vous prendrez connaissance des interventions de la session thématique concernant l'autisme, pour laquelle
des collègues québécois s'étient joints à nous pour nous faire part de leur expérience. Puis nous évoquerons
le rôle et les problèmes soulevés par l'UMD, par le compte-rendu d'une conférence débat.
Le Pr Manuel Bouvard
Lorsqu’on regarde le cerveau d’un patient autiste au repos,
les anomalies du fonctionnement cérébral peuvent être
explorées en imagerie fonctionnelle, en éléctro-
encéphalographie ou en magnéto-encéphalographie. Ces
outils permettent aussi de mettre en évidence des
particularités dans la synchronisation des réseaux
neuronaux chez les patients sans qu’on leur demande
premières données importantes sont anatomo-
pathologiques. On observe des anomalies de l’organisation
cyto-architecturale du cortex par exemple. On retrouve des
anomalies dans la densité des cellules, ou en terme
d’arborescence dendritique. Le cervelet est une zone-clé
dont le rôle est encore à explorer dans l’autisme. Les
deuxièmes données importantes, côté neuro-anatomique,
concernent un processus neuro-inflammatoire impliquant
des réactions astrogliales et microgliales importantes.
Un autre argument fort, pour affirmer qu’il s’agit
effectivement d’un trouble du développement rébral,
découle des données de croissance cérébrale. Lorsqu’on
retrace la dynamique de croissance au cours des premières
années de la vie, on observe une accélération de la
croissance de la substance blanche et des fibres radiaires. A
nouveau, il s’agit de cibler les fenêtres temporelles critiques
de l’émergence du trouble.
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Le Dr Frédérique Bonnet-Brillaut
Le Pr Pascale Abadie
Le Pr Laurent Mottron
aucune tache particulière. La question demeure chez des
sujet adultes en activation : lorsqu’on teste les fonctions de
communication, d’interaction et d’adaptation à
l’environnement, quels sont les systèmes défaillants
responsables du fait qu’un sujet autiste ne communique pas,
n’interagit pas, n’arrive pas à développer son imagination et
son intérêt ?
Les modèles d’automutilation autistique ont été évoqués
par le Pr Pascale Abadie (Montréal).
En neuropsychiatrie, les comportements automutilatoires
sont classés en sous-types selon leur répétitivité et selon
leur signification psychopathologique.
Il est possible de repérer des sous-catégories, tel que le
comportement automutilatoire de type impulsif, dans des
situations d’intolérance à la frustration, de grande anxiété,
de type compulsifs plutôt ego-dystoniques, qui échappent
à la volonté du sujet. Des comportements de types contre-
dissociatifs, où le sujet est dans la recherche des repères
corporels, en état de dépersonnalisation, de de-réalisation.
Ces derniers comportements, Pascale Abadie les qualifie
d’automatisés. Les comportements d’automutilation chez
l’autiste seraient en rapport avec des comportements
automatisés.
Le professeur Abadie a alors présenté certaines des études
récentes explorant les comportements automutilatoires
dans l’autisme. Certains auteurs ont travaillé sur la
dimension émotionnelle, montrant qu’il existerait une
hypersensibilité à la douleur dans l’autisme, avec une
capacité de régulation émotionnelle moindre. D’autre part,
il existerait une hypersensibilité et une hyper-réactivité au
stress et à l’anxiété il s’agit de travaux portant sur des
situations de stress aigu mais également de comorbidi
dans l’autisme. Par ailleurs, les comportements stéréotypés
auraient une fonction perceptive régulatrice qui permettrait
de filtrer une surcharge perceptive.
Les émotions semblent être marqueur d’un état
pathologique déclenchant un comportement d’auto-
mutilation. Les comportements stéréotypés, qui sont
marqueur d’un état perceptif, permettent le maintien et
l’aggravation de ces comportements. Par contre, la
participation des autres comportements répétitifs, comme
les tics, n’a pas encore été évaluée. De même, on ne sait pas
à quel point ces comportements sont dépendants ou non
du niveau intellectuel du sujet. Les études sont rares et peu
hétérogènes, et des efforts dans ce sens sont encore à
réaliser, conclut-elle.
La présentation du Dr Chantal Caron (Montréal) a porté sur
la question du diagnostic différentiel entre deux pathologies
aux frontières floues : le syndrome de Gilles de la Tourette
(GDT) et les Troubles envahissants du développement (TED)
en pratique clinique .
Les cliniciens de la clinique Gilles de la Tourette de Sainte-
Justine à Montréal se sont réunis, ainsi que des psychiatres
et neurologues, pour établir des paramètres de pratique
pour réaliser ce diagnostic différentiel.
GDT et les TED sont deux syndromes comportementaux
complexes qui apparaissent pendant l’enfance, avec une
prédominance garçon-fille de 5 pour 1. Les deux pathologies
présentent des mouvements anormaux, et partagent des
pathologies comorbides telle que l’anxiété, des troubles de
la socialisation, des modulations sensorielles aberrantes, des
hypersensibilités auditives, sensitives, olfactives, ou des
hypo-sensibilités. Pour ces deux syndromes, la
symptomatologie fluctue dans le temps. Il existe aussi un
impact sur la cognition un trouble de l’apprentissage dans
la plupart des cas.
Il existe cependant des dissemblances entre GDT et les TEDs
: d’une part, le cours de la maladie est différent. Même si
GDT débute dans l’enfance, le syndrome diminue ou
disparaît à l’âge adulte dans 80% des cas. Chez les autistes,
les patients sont autant des enfants que des adultes. D’autre
part, le mouvement anormal n’est que l’un des critères de
diagnostic du TED, alors qu’il est central dans GDT. Il s’agit
de tics dans GDT, les mouvements anormaux sont des
stéréotypies dans le TED. On trouve souvent des obsessions
chez les patients GDT, alors qu’il s’agit plutôt d’intérêts
surinvestis dans le TED. Les compulsions sont présentes dans
GDT lorsqu’il y a présence d’un TOC, alors qu’on parle plutôt
de ritualisation chez les TEDs. Enfin, on observe une atteinte
de la socialisation secondaire chez les patients GDT, alors
qu’elle est centrale pour les TED.
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Le Dr Chantal Caron
Les experts canadiens cherchent aussi à identifier une
possible étiologie commune aux deux pathologies. On parle
de plus en plus de pathologies pouvant partager des mêmes
gènes, mais aussi des mêmes symptômes non spécifiques.
Probablement que le concept de comorbidité est factice,
note le Dr Caron, dans le sens l’ensemble de la
symptomatologie psychiatrique a é subdivisé en
catégories et que plusieurs des critères se recoupent.
Dans le cadre de la conférence débat "UMD : du sécuritaire
aux soins intensifs", présidée par les Drs Bernard Lachaux
(Villejuif) et Serge Kannas (Paris, MNASM), le Dr Bernard
Lachaux a démarré la session avec une introduction
générale sur les UMDs, rappelant l’évolution du concept
depuis la mise en place de ces structures en tant que
systèmes d’isolement curitaire quasi-carcéral, avec un
arsenal thérapeutique quasi inexistant jusqu’à leur
reconnaissance en 1986.
Le type de population qu’on y rencontre aujourd’hui est
majoritairement constitué de patients HO dits "classiques".
Il y a ensuite une minorité de HO judiciaires, et quelques
cas de patients condamnés, que les SMPR n’arrivent pas à
prendre en charge pour cause de manque de moyens.
Le Dr Lachaux en est alors arrivé au point central de son
intervention : le manque de ressources et d’organisation
face à une demande grandissante de prise en charge en
UMD, en évoquant que 34% des secteurs de psychiatrie
générale font chaque année une ou plusieurs demandes en
UMD.
Lexpert plaide d’une part pour un dispersement régional
des UMDs, d’autre part pour le développement d’une étape
intermédiaire les Unités des soins intensifs en psychiatrie,
USIPs au nombre de cinq actuellement, et qui n’en sont
qu’à un stade expérimental. Les USIPs permettraient de
rendre un service rapide et gradué lorsque les secteurs de
proximité sont dépassés.
Ainsi, Dr Lauchaux prône un système institutionnel sur trois
niveaux qui s’articulent : un secteur de psychiatrie de
proximité, les unités de soins intensifs en psychiatrie, et les
UMDs.
Sous le titre "Les Unités de Soins Intensifs Psychiatriques
(USIP) : synergie et complémentarité dans le dispositif de
soins", le Dr lène de Rocquigny (Paris) a ali une
présentation sur la spécificité de l’USI de l’hôpital Henri Ey,
dans le 13e arrondissement à Paris.
Il s’agit d’une structure d’accueil pour patients très
désorganisés, dissociés, souvent en échec thérapeutique,
ayant besoin d’un étayage important et d’une limitation des
stimulations extérieures. Les équipes vont essayer de
désamorcer des situations critiques, parfois prévenir un
passage à l’acte – en tout cas recréer un lien, surtout envers
les soins psychiatriques en général.
Les moyens utilisés sont en priorité la psychothérapie
institutionnelle, même s'il peut y avoir adaptation du
traitement pharmacologique.
L’objectif est de réaliser un séjour le plus bref possible pour
retourner vers le secteur d’origine avec un bon ancrage.
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Le Dr Bernard Lachaux
Le Dr Hélène de Rocquigny
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