LE MÉDECIN GÉNÉRALISTE FACE AU REFUS DE SOIN DU

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RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
UNIVERSITE CLAUDE BERNARD LYON-1
FACULTE DE MEDECINE LYON EST
Année 2015 Thèse n°110
LE MÉDECIN GÉNÉRALISTE
FACE AU REFUS DE SOIN DU SUJET ÂGÉ
Étude qualitative à partir de 14 entretiens semi-dirigés
Thèse
Présentée à l’Université Claude Bernard-Lyon 1
et soutenue publiquement le 11 juin 2015
pour obtenir le grade de Docteur en Médecine
par
RADREAU Sophie
Née le 2 septembre 1984
à Saint-Rémy (71)
RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
UNIVERSITE CLAUDE BERNARD – LYON 1
. Président de l'Université́
François-Noël GILLY
. Président du Comité de Coordination
François-Noël GILLY
des Etudes Médicales
. Secrétaire Général
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SECTEUR SANTE
UFR DE MEDECINE LYON EST
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Pédiatrie
Pneumologie ; addictologie
Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
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et de la reproduction ; gynécologie médicale
Neurologie
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vieillissement ; médecine générale ; addictologie
Maladie infectieuses ; maladies tropicales
Cancérologie ; radiothérapie
Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale
Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale
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Françoise
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Guérin
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Ninet
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Georges
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Pierre
Yves
Jean-François
Philippe
Jean
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Thierry
Michel
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Rivoire
Thivolet-Bejui
Vandenesch
Zoulim
Didier
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Françoise
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Cancérologie ; radiothérapie
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gynécologie médicale
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Cardiologie
Réanimation ; médecine d’urgence
Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence
Chirurgie thoracique et cardiovasculaire
Urologie
Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale
Hématologie ; transfusion
Immunologie
Biochimie et biologie moléculaire
Pneumologie ; addictologie
Chirurgie orthopédique et traumatologique
Chirurgie thoracique et cardiovasculaire
Physiologie
Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie
Endocrinologie, diabète et maladies métaboliques ;
gynécologie médicale
Radiologie et imagerie médicale
Cancérologie ; radiothérapie
Anatomie et cytologie pathologiques
Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie
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Xavier
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Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence
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Cardiologie
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Médecine interne ; gériatrie et biologie du
vieillissement ; médecine générale ; addictologie
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Thérapeutique ; médecine d’urgence ; addictologie
Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale
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clinique ; addictologie
Radiologie et imagerie médicale
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Neurologie
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Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
Chirurgie générale
Anatomie
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Nutrition
Hématologie ; transfusion
Cancérologie ; radiothérapie
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Biochimie et biologie moléculaire
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technologies de communication
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Réanimation ; médecine d’urgence
Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence
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Rhumatologie
Radiologie et imagerie médicale
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Hématologie ; transfusion
Anatomie et cytologie pathologiques
Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale
Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie
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Dermato-vénéréologie
Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence
Maladie infectieuses ; maladies tropicales
Pédopsychiatrie ; addictologie
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Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale
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Biophysique et médecine nucléaire
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Dermato-vénéréologie
Ophtalmologie
Médecine interne ; gériatrie et biologie du
vieillissement ; médecine générale ; addictologie
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reproduction ; gynécologie médicale
Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie
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Chirurgie générale
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gynécologie médicale
Cancérologie ; radiothérapie
Réanimation ; médecine d’urgence
Physiologie
Radiologie et imagerie médicale
Psychiatrie d’adultes
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Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie
Neurologie
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Professeur des Universités - Médecine Générale
Letrilliart
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Flori
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Marie
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Itti
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Bernard
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Paul
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Pédiatrie
Chirurgie infantile
Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
Cardiologie
Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie
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Cancérologie ; radiothérapie
Pédiatrie
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Biophysique et médecine nucléaire
Anatomie et cytologie pathologiques
Anatomie
Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence
Biologie cellulaire
Neurochirurgie
Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie
Neurologie
Cytologie et histologie
Réanimation ; médecine d’urgence
Maîtres de Conférence – Praticiens Hospitaliers
Hors classe
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Mehdi
Biologie et médecine du développement et de la
reproduction ; gynécologie médicale
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Davezies
Germain
Jarraud
Jouvet
Le Bars
Normand
Persat
Pharaboz-Joly
Piaton
Rigal
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Streichenberger
Timour-Chah
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Marie-Odile
Eric
Dominique
Dominique
Nathalie
Quadiri
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Physiologie
Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
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Biophysique et médecine nucléaire
Médecine et santé au travail
Parasitologie et mycologie
Biochimie et biologie moléculaire
Cytologie et histologie
Hématologie ; transfusion
Biophysique et médecine nucléaire
Anatomie et cytologie pathologiques
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clinique ; addictologie
Anatomie
Parasitologie et mycologie
Maîtres de Conférence – Praticiens Hospitaliers
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Barnoud
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Chalabreysse
Charrière
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Cozon
Dubourg
Escuret
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Grégoire
Laurence
Vanessa
Valérie
Marie Nathalie
Frédéric
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Delphine
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Géraldine
Ingrid
Muriel
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Roman
Tardy Guidollet
Tristan
Vlaeminck-Guillem
Jacques
Sabine
Véronique
Anne
Virginie
Maladies infectieuses ; maladies tropicales
Anatomie et cytologie pathologiques
Biophysique et médecine nucléaire
Anatomie et cytologie pathologiques
Nutrition
Anatomie et cytologie pathologiques
Immunologie
Physiologie
Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
Anatomie et cytologie pathologiques
Immunologie
Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
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technologies de communication
Anatomie et cytologie pathologiques
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Biophysique et médecine nucléaire
Biochimie et biologie moléculaire
Biostatistiques, informatique médicale et
technologies de communication
Epidémiologie, économie de la santé et prévention
Physiologie
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Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
Biochimie et biologie moléculaire
Maîtres de Conférences – Praticiens Hospitaliers
Seconde classe
Casalegno
Jean-Sébastien
Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
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Chêne
Duclos
Phan
Rheims
Rimmele
Gautier
Antoine
Alice
Sylvain
Thomas
Schluth-Bolard
Simonet
Thibault
Vasiljevic
Venet
Caroline
Thomas
Hélène
Alexandre
Fabienne
Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale
Epidémiologie, économie de la santé et prévention
Dermato-vénéréologie
Neurologie
Anesthésiologie-réanimation ;
médecine d’urgence
Génétique
Biologie cellulaire
Physiologie
Anatomie et cytologie pathologiques
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Chanelière
Farge
Figon
Marc
Thierry
Sophie
RADREAU
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Le Serment d'Hippocrate
Je promets et je jure d'être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité dans l'exercice de la
Médecine.
Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans discrimination.
J'interviendrai pour les protéger si elles sont vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou
leur dignité. Même sous la contrainte, je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les
lois de l'humanité.
J'informerai les patients des décisions envisagées, de leurs raisons et de leurs conséquences.
Je ne tromperai jamais leur confiance.
Je donnerai mes soins à l'indigent et je n'exigerai pas un salaire au dessus de mon travail.
Admis dans l'intimité des personnes, je tairai les secrets qui me seront confiés et ma conduite
ne servira pas à corrompre les mœurs.
Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement la vie ni ne
provoquerai délibérément la mort.
Je préserverai l'indépendance nécessaire et je n'entreprendrai rien qui dépasse mes
compétences. Je perfectionnerai mes connaissances pour assurer au mieux ma mission.
Que les hommes m'accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses. Que je sois
couvert d'opprobre et méprisé si j'y manque.
RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
Remerciements
A notre président de jury :
Monsieur le Professeur Jérôme ETIENNE
Pour l’honneur que vous nous faites de présider ce jury. Nous vous remercions de vos
conseils. Soyez assuré de notre profond respect.
Aux membres de notre jury :
Madame le Professeur Liliane DALIGAND
Nous sommes honorés de votre participation à ce jury. Soyez assurée de notre reconnaissance.
Monsieur le Professeur Yves ZERBIB
Nous sommes honorés que vous ayez accepté de juger ce travail. Soyez assuré de notre
gratitude.
Monsieur le Docteur Thierry FARGE
Pour l’honneur que vous me faites d’avoir dirigé cette thèse.
Pour la confiance et le soutien dont vous m’avez gratifié tout au long de ce travail mais aussi
pendant l’internat.
Merci pour votre disponibilité, les précieux conseils et le partage de votre expérience.
Aux médecins qui ont participé à cette étude :
Nous les remercions pour le temps qu’ils nous ont accordé, pour l’intérêt porté à notre travail
et pour nous avoir livré leurs ressentis riches d’enseignement.
Merci à l’URPS des médecins de Rhône-Alpes d’avoir diffusé notre travail de thèse.
RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
A mes parents Armelle et Gérard : merci pour l’enfance heureuse, merci pour votre
indéfectible soutien durant ces années d’études. Vous avez toujours œuvré pour notre
bonheur : MERCI.
A ma sœur Mylène : ma soeurette adorée je suis heureuse de la complicité qui nous unit.
J’espère que la route que tu as finalement choisie te rendra heureuse, nul doute que tu seras un
excellent médecin.
A ma grand-mère Andrée : brin de femme au caractère affirmé (on sait d’où cela vient…!).
J’aurais aimé que tu sois là ce jour.
A ma famille : je prends toujours autant de plaisir à vous retrouver en Bourgogne autour
d’une bonne table.
A Marion : à ton positivisme, à nos voyages, à nos fous rires, aux descentes de VTT ! Merci
d’avoir toujours répondu présente dans les moments clés. Ton amitié m’est précieuse.
A Gaëlle : à notre rencontre sur les bancs de la maternelle, à nos quatre-mains au piano, aux
années lycées, à nos week-ends détente et la liste est encore longue !
Aux rencontres essentielles de l’internat : Clément, Lucile, Fanny, Olivier T., Céline, Olivier
A., Abdellah. A nos virées aux quatre coins de la Haute-Savoie, aux soirées endiablées sur la
piste de danse, aux bonnes bouffes. L’internat n’aurait pas eu la même saveur sans vous. C’est
une chance de vous avoir à mes côtés. Longue vie à notre amitié !
A Cécile, la meilleure des chefs de pédiatrie.
A Séverine : merci pour ta relecture.
A tous les soignants rencontrés au cours de ce parcours qui m’ont permis de devenir à mon
tour soignante.
RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
Table des matières
I INTRODUCTION……………………………………………………………………………4
II GENERALITES …………………………………………………………………………….6
1) Quelques définitions …………………………………………………………………..6
1.1) Le soin ...……………………………………………………………………………6
1.2) Le refus de soin ………………………………………………………………….…8
1.3) La vieillesse ……………………………………………………………………...…8
2) Le refus de soin : évolution légale de la position du patient …………………………10
2.1) Le consentement éclairé …………………………………………………………...10
2.2) L'obligation d'information …………………………………………………………12
2.3) Du droit au consentement au droit au refus ………………………………………..13
2.4) Cas particulier : la fin de vie ……………………………………………………….13
3) Le principe d'autonomie ……………………………………………………………….15
III MATERIEL ET METHODE ………………………………………………………….….18
1) Choix de la méthode …………………………………………………………………18
1.1) Type d'étude ………………………………………………………………………..18
1.2) Population …………………………………………………………………………18
1.3) Guide d'entretien …………………………………………………………………...19
1.4) Déroulement des entretiens ………………………………………………………..19
2) Méthode analytique …………………………………………………………………..20
3) Méthodologie de la recherche bibliographique ………………………………………20
IV RESULTATS ……………………………………………………………………………..21
A) Les entretiens ……..….…………………………...……………………………………21
B) Description de la population ………...……..…………..………………………………21
C) Analyse thématique des entretiens …………..……...…………………………………23
1) Définition du soin par les médecins généralistes …………………………………….23
2) Prévalence du refus de soin exprimé par le patient selon les médecins généralistes ...24
3) Analyse des causes du refus de soin …………………………………………………26
3.1) Les causes du refus de soin dans la population générale ………………………..26
3.2) Les causes du refus de soin spécifiques au sujet âgé ……………………………30
4) Les réactions des médecins confrontés au refus ……………………………………..34
4.1) Influence du type de soin ………………………………………………………..35
1 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
4.2) Influence de l'âge du patient …………………………………………………….35
4.3) Influence de l'âge du médecin ……………………………………………...……36
4.4) Influence des obligations médico-légales sur l'attitude des médecins ………….37
5) La pertinence du consentement de la personne âgée en cas de troubles cognitifs …...39
6) Les moyens mobilisés par les médecins pour obtenir une adhésion au soin …...……41
6.1) Anticiper le refus …………………...……………………………………………41
6.2) Explorer l'ambivalence du patient ……………………………………………….42
6.3) Fixer des objectifs de soin adaptés à chaque patient …………………………….42
6.4) Expliquer les propositions ……………………………………………………….43
6.5) Respecter le rythme de réflexion du patient ……………………………………..44
6.6) Rechercher un compromis ……………………………………………………….44
6.7) Rôle du comportement du médecin ………...……………………………………45
6.8) Maîtriser des techniques de communication …………...………………………46
6.9) Faire appel à des personnes ressources …………………………………………..47
6.9.1) Les aidants professionnels ………………………………………………….47
6.9.2) Les aidants non professionnels : l'entourage ……………………………….48
7) La contribution des directives anticipées …………………………………………….51
7.1) Les connaissances théoriques des médecins ……………………………………..51
7.2) Les conditions de recours aux directives anticipées …………….……………….52
7.3) Les freins évoqués par les médecins ……………………………………………..53
7.4) Les limites des directives anticipées ……………………….…………………….55
8) Conséquences du refus sur le médecin et sur la relation médecin-patient ……..…….55
8.1) Vécu personnel du médecin ………...……………………………………………55
8.2) Le refus du patient a-t-il des conséquences sur la relation médecin-malade ? ….57
V DISCUSSION ……..………………………………………………………………………60
A) Les forces, limites et biais de l’étude ……………..………………………………………60
1) Les points forts ……………………………………………………………………….60
2) Les limites et biais ………...…………………………………………………………60
2.1) Concernant le recrutement de la population …………………………………….60
2.2) Concernant la réalisation des entretiens …………...……………………………60
2.3) Concernant l’analyse des données ………………………………………………61
B) Analyse étiologique et sémiologique du refus ……………………………………………61
C) Les moyens mobilisés pour répondre au refus ……………………………………………65
2 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
D) La réponse finale des médecins au refus : le respect …….……………………………….68
E) Les conséquences du refus sur le médecin …………………………..……………………70
VI CONCLUSION ……………………………………………………..…………………….72
VII ANNEXES ………………………………………………………………………………74
1) Mail de demande d'entretien ………………………………………………………………74
2) Canevas d'entretien …………………………..……………………………………………75
3) Critères d'évaluation des capacités décisionnelles de Grisso et Appelbaum ………...……77
4) Questionnaire UBACC ……………………………………………………………………78
5) Recommandations du CCNE : « Refus de traitement et autonomie de la personne »……..79
VIII BIBLIOGRAPHIE ……………………...………………………………………………82
IX ABREVIATIONS ……………...…………………………………………………………87
3 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
I INTRODUCTION
Tout médecin généraliste a été ou sera un jour confronté au refus de soin exprimé par
un patient.
Le respect du droit du patient au refus est un principe éthique important de la relation
médecin-malade.
Il est le reflet de l'intérêt croissant pour la question de la place du patient au sein du système
de soin ces dernières décennies. Depuis la déclaration des droits du patient de Lisbonne de
l'Assemblée Médicale Mondiale en 1981 : « Tout adulte compétent a le droit de donner ou de
refuser de donner son consentement à une méthode diagnostique ou thérapeutique », jusqu'à
la loi du 4 mars 2002 en France, l'obligation légitime d'information et de recueil du
consentement n'a cessé d'être renforcée (1, 2).
Cette notion de refus de soin, même si elle est désormais érigée comme un droit plein
et entier, reste délicate et source « d'un véritable dilemme éthique » pour les professionnels
de santé selon le Comité Consultatif National d'Ethique (3).
En effet le médecin est soumis à deux injonctions qui peuvent être parfois difficilement
conciliables : respecter le droit d'une personne à décider pour elle-même et la protéger d'une
liberté qui peut potentiellement lui nuire. Son action reste encadrée médico-légalement et
déontologiquement par le devoir impératif de soin et le respect de la volonté de la personne.
Le médecin se retrouve au cœur de cette situation paradoxale opposant deux principes selon
Beauchamp et Childress : d'un côté le principe de bienfaisance qui l'anime et de l'autre celui
du respect de l'autonomie de son patient (4).
La liberté de consentement est supposée totale et sans réserve pour tout patient quel
que soit son âge, même avancé. Mais les soins en gériatrie peuvent comporter des spécificités
éthiques comme les problèmes d'autonomie, de compétence et de valeur du consentement, et
notamment lorsqu'apparaissent des altérations des fonctions cognitives.
Dans une société où démographiquement la part dans la population des plus de 75 ans ne
cesse de croître, il est intéressant de se demander dans quelle mesure l'âge influence-t-il la
réponse médicale à un refus ?
4 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
Ainsi le refus de soin d'un patient et notamment âgé, soulève des questions complexes
et passionnantes qui sont sources de nombreux débats éthiques et philosophiques. Pourtant
nous n'avons pas retrouvé d’étude faisant l’état des lieux des comportements des médecins
généralistes confrontés à cette problématique. Nous avons donc entrepris d'étudier les
réactions de médecins exerçant en région Rhône-Alpes, en choisissant une approche
qualitative.
Nous avons fait l'hypothèse que faire face au refus de soin d'un patient âgé pouvait être
source de difficultés pour un médecin généraliste.
Notre travail avait pour objectif principal l'étude des stratégies humaines et
professionnelles du médecin généraliste mises en place face à un refus de soin du sujet âgé.
Nous avions deux objectifs secondaires : d'une part analyser les causes du refus de soin
identifiées par les praticiens, et d'autre part étudier le ressenti des médecins généralistes.
5 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
II GENERALITES
1) Quelques définitions
Notre travail portant sur le refus de soin du sujet âgé, il nous paraît important au
préalable de tenter d'en définir tous les termes.
1.1) Le soin
Etonnement il n’est donné aucune définition du mot soin dans les dictionnaires médicaux
type Garnier-Delamare (5).
Lorsque l’on recherche le mot soin dans les dictionnaires généraux, ceux-ci proposent de
multiples définitions montrant bien à quel point il peut être difficile de définir le soin.
Ainsi le dictionnaire Larousse nous indique (6):
• Pour le mot "soin" au singulier :
-
attention que l'on porte à faire quelque chose avec propreté, à entretenir quelque chose
-
attention portée à présenter quelque chose avec netteté, minutie
-
souci de bien faire, effort, peine scrupuleuse que l'on se donne
-
charge, devoir de veiller à quelque chose, de s'en occuper
-
avoir, prendre soin de quelqu'un, de quelque chose : y penser, s'en occuper
• Pour le mot "soins" au pluriel :
-
actes par lesquels on veille au bien-être de quelqu'un
-
actes de thérapeutiques qui visent à la santé de quelqu'un, de son corps
-
actes qui visent à entretenir, préserver
Le dictionnaire de l'Académie Française dans sa 8ème édition emploie sensiblement les
mêmes termes en précisant que les remèdes et traitements prodigués par le médecin peuvent
être appelés soins (7).
Il est intéressant de relever les synonymes proposés par le dictionnaire établi par le CRISCO
(Centre de Recherche Inter-Langues sur la Signification dans le Contexte). Ainsi 66 termes
6 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
sont répertoriés parmi lesquels : attention, application, délicatesse, zèle, conscience, scrupule,
circonspection, précaution (8).
Ces ouvrages généralistes évoquent donc la connotation médicale du terme soin. Ils
soulignent le fait que le soin s'établit dans la relation, mais ils mettent surtout en avant des
idées comme la préoccupation, la sollicitude, l'attention à autrui, soit autant de qualités
attendues d'un médecin.
Sur le plan médical nous pouvons également tenter de définir et catégoriser le soin
selon son but.
Ainsi pour un soignant le soin peut être :
-
un soin vital, c'est-à-dire que l'absence de sa mise en œuvre aboutit à la mort du
patient
-
un soin préventif ou curatif c'est-à-dire ayant pour objectif d'éviter ou abréger un
problème de santé
-
un soin de confort, un soin palliatif
Le refus de chaque catégorie de soin est source de problèmes éthiques différents pour le
médecin.
Pour le patient la finalité d'un soin peut être la santé, l'intégrité du corps, le bonheur.
Le but commun du soin, à la fois pour le soignant et le soigné, étant la santé. Terme
qui, comme le souligne la définition de l'OMS de 1946 « La santé est un état de complet bienêtre à la fois physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de
maladie ou d'infirmité », est dans nos sociétés occidentales à la fois, un droit, un objectif à
atteindre pour de nombreux individus, mais aussi une valeur au même titre que le bonheur (9).
On notera enfin que la langue française, avec un seul terme, ne fait pas de distinction
entre le sens général et le sens médical du soin à la différence de la langue anglaise qui utilise
care et cure. Care ou to take care, pour soigner ou prendre soin, renvoie aux gestes rendant la
vie quotidienne plus supportable. Cure, pour guérir, s'applique aux interventions
thérapeutiques.
Cette absence de distinction en français apparaît néanmoins logique car il semble difficile de
hiérarchiser ces différentes formes de soins qui se chevauchent en pratique, la notion de cure
n'étant qu'un sous-ensemble du care.
7 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
Nous avons tenté, pour terminer, de formuler une définition du soin qui conviendrait
dans un contexte médical : « Attention à l'autre et actions qui ont pour objectif de préserver
ou améliorer son bien-être. »
1.2) Le refus de soin
On peut considérer comme refus de soin le patient qui s'oppose à la réalisation d'un
acte susceptible d'améliorer son état de santé actuel ou à venir.
Un refus de soin peut être un traitement quel qu'il soit, un examen, une hospitalisation, une
toilette, une institutionnalisation...
Bien que le soin repose sur la relation soignant-soigné, le refus de soin signifie rarement le
refus complet de la relation, notamment avec le médecin.
L'expression du refus peut être de deux types :
-
explicite : le patient déclare qu'il ne suivra pas la proposition de soin. Ce non peut être
signifié de façon non-verbale, nécessitant d'être attentif aux expressions et gestuelles.
-
implicite : il s'agit ici de la non-observance. Cette forme de refus de soin est fréquente
et le médecin parvient très souvent malgré tout à la déceler.
Le refus de soin doit être distingué du renoncement aux soins. Il y a renoncement
lorsqu'une personne ne recourt pas aux services de soins alors que son état de santé le
nécessiterait (que le besoin de soin ait été identifié par la personne elle-même ou par un
professionnel de santé). Le renoncement est alors le fait de barrières ou contraintes
environnementales notamment financières alors que le refus résulte d'un choix intrinsèque
(10).
1.3) La vieillesse
Il convient dans un premier temps de distinguer vieillesse et vieillissement.
Le vieillissement est un processus, il se mesure en durée, il ne commence pas à un âge donné,
comme le souligne la définition du Collège National des Enseignants en Gériatrie (CNEG) :
« Le vieillissement correspond à l'ensemble des processus physiologiques et psychologiques
qui modifient la structure et les fonctions de l'organisme à partir de l'âge mûr » (11).
8 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
La vieillesse est un état qui se constate. Elle peut être définie de différentes manières sans
qu'il n'existe de consensus.
L'OMS par exemple, dans une approche quantitative, donne une définition chronologique de
la vieillesse : elle retient le critère de 65 ans pour parler de personne âgée, les 75- 90 ans sont
des vieillards et les plus de 90 ans des grands vieillards. Cette vision peut paraître quelque peu
monolithique notamment à l'échelle mondiale où les variations de l'espérance de vie sont
importantes d'un pays à un autre.
Il paraît difficile de donner un âge physiologique à la vieillesse car comme le remarque le
psychosociologue Jean-Jacques AMYOT « A la différence de l'enfance et de l'adolescence
qui peuvent se déterminer par rapport à des points de références physiologiques et
biologiques, la vieillesse ne s'ancre pas sur des critères objectifs, reconnus unanimement par
convention. » (12).
D'un point de vue social il s'agit souvent de l'âge de départ en retraite mais ce seuil n'est pas
pertinent car évolutif. Le terme sénior s'applique socialement parlant à partir de 60 ans. Pour
bénéficier de l'Allocation Personnalisée d'Autonomie (APA), destinée aux personnes âgées en
manque ou perte d'autonomie en raison de leur état physique ou mental, il faut être âgé d'au
moins 60 ans.
Il est intéressant de consulter la définition de la vieillesse donnée par le dictionnaire Larousse
« diminution des forces physiques et fléchissement des forces mentales qui accompagnent
habituellement cette période » (13). Celle-ci renvoie à une vision négative qui fait écho à
nombre de stéréotypes dominants dans la culture occidentale : la vieillesse associée à la
maladie (être vieux c'est être en mauvaise santé) ou encore la vieillesse somme de perte
(perte d'autonomie, perte du conjoint, perte du domicile privé, perte de l'identité
professionnelle).
Le CNEG, en tentant de faire la synthèse de ces différents critères, considère que l’âge de 75
ans est le plus pertinent (11).
Nous terminerons ce paragraphe par quelques données démographiques sur le
vieillissement.
La population française continue de vieillir, ainsi selon les données de l'Institut National de la
Statistique et des Etudes Economiques (INSEE) au 1er janvier 2015 les personnes de plus de
9 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
60 ans représentent 24,8 % de la population et les plus de 75 ans 9,3% (sur une population
totale de 66,3 millions d'habitants).
Selon une projection, si la tendance démographique actuelle se poursuit, le nombre de
personnes de plus de 75 ans passerait de 5,2 millions en 2007 à 11,9 millions en 2060
représentant alors 16,2 % de la population (14).
Cette tendance est bien entendue liée à l'augmentation de l'allongement de la durée de vie.
En 2014 l'espérance de vie à la naissance est de 79,2 ans pour les hommes et 85,4 ans pour les
femmes. A l'âge de 60 ans, les hommes peuvent espérer vivre 23,1 ans et les femmes 27,7
ans.
2) Le refus de soin : évolution légale de la position du patient
2.1) Le consentement éclairé
La relation médecin-malade a profondément évolué au cours des dernières années,
passant d'un modèle paternaliste, autoritaire et directif, à un modèle autonomique centré sur le
consentement au soin. Le patient n'est plus objet de soins mais sujet de soins.
Le consentement au soin est lié au principe de respect de l'intégrité du corps humain
comme le rappelle l'article 16.1 du Code Civil, issu des lois de Bioéthique de 1994 : « Chacun
a droit au respect de son corps. Le corps humain est inviolable. Le corps humain, ses
éléments et ses produits ne peuvent faire l'objet d'un droit patrimonial. » (15).
En 1936 l'arrêt Mercier (qui a pour origine le dépôt d'une plainte pour radio-dermomucite de la face consécutive à une radiothérapie) stipule : « L’obligation de soins découlant
du contrat médical et mise à la charge du médecin est une obligation de moyens ; le médecin
ne pouvant s’engager à guérir, il s’engage seulement à donner des soins non pas quelconques
mais consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science » (15). Au-delà
de rappeler la responsabilité médicale à savoir l'obligation de moyens, il souligne le caractère
contractuel de la relation médecin-malade. Hors un contrat, comme définit par le Code Civil,
suppose l'accord ou l'engagement des deux parties. Ainsi même si le terme consentement n'est
pas précisément cité on peut y voir les prémices.
10 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
En France le consentement entre dans le Code Civil en 1994 avec l'article 16. 3 : « Il
ne peut être porté atteinte à l'intégrité du corps humain qu'en cas de nécessité médicale pour
la personne ou à titre exceptionnel pour autrui. Le consentement de l'intéressé doit être
recueilli préalablement hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique
à laquelle il n'est pas à même de consentir. » (15).
Le consentement est un préalable nécessaire à la réalisation d'un acte médical.
La loi du 4 mars 2002 renforce la place du patient au centre de la décision en matière
de soins. Comme le souligne Mr Bernard Kouchner, alors ministre de la santé, lors des débats
parlementaires : « Le consentement ne doit plus être l'acceptation passive d'une décision prise
pas un autre ; il doit devenir l'expression d'une participation active du malade aux décisions
qui le concernent, l'expression de responsabilité sur sa propre santé » (16).
Ainsi l'article L 1111-4 du Code de Santé Publique (CSP) réaffirme le principe du droit au
consentement :
-
« Toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte-tenu des
informations et préconisations qu'il lui fournit, les décisions concernant sa santé. »
-
« Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement
libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment. »
(17).
Mais l'exercice de donner son consentement, c'est-à-dire choisir, peut parfois être
difficile pour un patient. Le législateur a pris en compte ceci en introduisant dans la loi du 4
mars 2002 la notion de personne de confiance. Son statut a été précisé lors de l'adoption en
1ère lecture du projet de loi des députés Mrs Claeys et Leonetti le 17 mars 2015.
Art. L. 1111-11-1 du CSP : « Toute personne majeure peut désigner une personne de
confiance, qui peut être un parent, un proche ou le médecin traitant et qui sera consultée au
cas où elle-même serait hors d’état d’exprimer sa volonté et de recevoir l’information
nécessaire à cette fin. Elle témoigne de l’expression de la volonté de la personne. Son
témoignage prévaut sur tout autre témoignage. Cette désignation est faite par écrit. Elle est
révocable à tout moment. Si le malade le souhaite, la personne de confiance l’accompagne
dans ses démarches et assiste aux entretiens médicaux afin de l’aider dans ses décisions. »
(17).
11 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
2.2) L'obligation d'information
Le consentement du patient à un soin implique qu'il dispose de connaissances
suffisantes pour être en mesure de prendre une décision libre et éclairée et est donc sous-tendu
par une obligation d'information.
Ce souci d'information n'est pas nouveau puisque Hippocrate, médecin de l'Antiquité, en fait
état dans son serment : « J'informerai les patients des décisions envisagées, de leurs raisons
et de leurs conséquences ».
Cette nécessité d'information est à la fois un devoir du médecin et un droit du patient.
Elle est garantie par
le Code de Déontologie Médicale qui reprend le Code de Santé
Publique.
Article 35 du Code de Déontologie Médicale :
« Le médecin doit à la personne qu'il examine, qu'il soigne ou qu'il conseille une information
loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu'il lui propose. Tout
au long de la maladie, il tient compte de la personnalité du patient dans ses explications et
veille à leur compréhension.» (18).
L'information doit porter sur :
-
l'état de santé du patient
-
les investigations diagnostiques, thérapeutiques et préventives, et leurs risques
-
leurs alternatives
-
l'évolution du patient en cas de refus des investigations ou du traitement
Autrefois il incombait au patient d'apporter la preuve de l'insuffisance d'information. Avec
l'arrêt Hedreul du 25 février 1997 la jurisprudence a évolué (15). Cet arrêt a été rendu dans le
cadre d'une affaire de perforation colique post-polypectomie : il a été reproché au praticien de
ne pas avoir informé le patient du risque de perforation inhérent à la réalisation d'une
coloscopie. La cour de cassation a alors jugé que « le médecin est tenu d'une obligation
particulière d'information vis-à-vis de son patient et qu'il lui incombe de prouver qu'il a
exécuté cette information ».
Le code de santé publique a suivi cette évolution en réaffirmant que la preuve de l'information
incombait au médecin.
12 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
Article L1111-2 du code de santé publique :
« En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la
preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent
article. Cette preuve peut être apportée par tous les moyens. » (17).
La preuve de l'information est souvent apportée par l'écrit (données consignées dans le
dossier du patient, fiche d'information) mais l'information orale reste indispensable. L'H.A.S.
a établi une recommandation de bonne pratique sur la délivrance de l'information (19).
2.3) Du droit au consentement au droit refus
Hippocrate ne reconnaissait pas ce droit au patient et les blâmait pour inobservance.
La reconnaissance du droit au consentement a eu pour corollaire la reconnaissance du droit au
refus.
Article 36 du Code de Déontologie Médicale :
« Lorsque le malade, en état d'exprimer sa volonté, refuse les investigations ou le traitement
proposé, le médecin doit respecter ce refus après l'avoir informé le malade de ces
conséquences. Si le malade est hors d'état d'exprimer sa volonté, le médecin ne peut
intervenir sans que ses proches aient été prévenus et informés, sauf urgence ou
impossibilité. » (18).
Si les textes réglementaires précisent les modalités pour faire la preuve de la
délivrance de l'information, il n'en est rien sur la façon pour un médecin de conserver la
preuve d'un refus de soin. Seul le Conseil National de l'Ordre des Médecins précise qu'il est
« souhaitable que cette démarche se concrétise sous une forme écrite » (20).
2.4) Cas particulier : la fin de vie
La loi Leonetti du 22 avril 2005, relative aux droits des malades et à la fin de vie, a
précisé le devoir du médecin à respecter le refus de la part d'un patient en fin de vie et à
l'accompagner, et a introduit les directives anticipées qui ont marqué une étape de plus dans le
respect des libertés individuelles (21). Elles offrent au patient la possibilité de faire connaître
directement ses volontés, dans le cas où il serait un jour hors d'état de les exprimer,
temporairement ou durablement. Toute personne majeure, capable, qu'elle soit bien-portante
13 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
ou malade, peut rédiger ses directives anticipées pour indiquer ses souhaits ou refus de
poursuite de traitement
Le 17 mars 2015, la proposition de loi de Mr Claeys et Mr Leonetti créant de
nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, a été adoptée en 1ère
lecture par L’Assemblée Nationale (22). Ce nouveau texte apporte des changements
importants par rapport à la version initiale des directives anticipées de 2005 :
-
tout d'abord en leur donnant un caractère contraignant, c'est le principe d'opposabilité,
alors qu'avant le médecin pouvait ne pas les suivre
-
elles seront sans limite de validité alors qu'elles n'étaient valables que 3 ans, mais
révisables et révocables
-
jusqu’à présent rédigées sur papier libre, un modèle officiel va voir le jour, permettant
d'éviter les imprécisions qui pouvaient compliquer l'interprétation par le médecin
-
elles seront conservées sur un registre national faisant l’objet d’un traitement
automatisé (la proposition de loi prévoyait initialement que leur existence soit signalée
sur la carte vitale). Jusqu' alors elles pouvaient être conservées dans le dossier de la
personne (du médecin choisi ou du dossier médical en cas d'hospitalisation) mais aussi
par l'auteur ou bien confiées par ce dernier à la personne de confiance, un membre de
sa famille ou un proche
L’article L. 1111-11 du CSP est ainsi rédigé :
« Toute personne majeure et capable peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle
serait un jour hors d’état d’exprimer sa volonté. Ces directives anticipées expriment la
volonté de la personne relative à sa fin de vie en ce qui concerne les conditions du refus, de la
limitation ou l’arrêt des traitements et actes médicaux.
Elles sont révisables et révocables à tout moment. Elles sont rédigées selon un modèle dont le
contenu est fixé par décret en Conseil d’État pris après avis de la Haute autorité de santé. Ce
modèle prévoit la situation de la personne selon qu’elle se sait ou non atteinte d’une affection
grave au moment où elle rédige de telles directives.
Elles s’imposent au médecin, pour toute décision d’investigation, d’intervention ou de
traitement, sauf en cas d’urgence vitale pendant le temps nécessaire à une évaluation
complète de la situation. Si les directives anticipées apparaissent manifestement
inappropriées, le médecin, pour se délier de l’obligation de les respecter, doit consulter au
moins un confrère et motiver sa décision qui est inscrite dans le dossier médical. » (17).
14 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
Cette nouvelle loi renforcera également le droit pour un patient dûment informé par un
professionnel de santé de refuser un traitement comme le stipule l'article 5 :
-
« Toute personne a le droit de refuser ou de ne pas subir tout traitement. Le suivi du
malade reste cependant assuré par le médecin, notamment son accompagnement
palliatif. »
-
« Le professionnel de santé a l’obligation de respecter la volonté de la personne après
l’avoir informée des conséquences de ses choix et de leur gravité. Si par sa volonté de
refuser ou d’interrompre tout traitement, la personne met sa vie en danger, elle doit
réitérer sa décision dans un délai raisonnable. Il peut être fait appel à un autre
membre du corps médical. L’ensemble de la procédure est inscrit dans le dossier
médical du patient. Le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité
de sa fin de vie en dispensant les soins visés à l’article L. 1110-10 » (17).
Au terme de l'examen de ces différents articles, on constate que la loi affirme la
participation active du patient aux soins fondée sur son autonomie, mais la responsabilité
d'apprécier cette autonomie est laissée au médecin.
3) Le principe d’autonomie
L'autonomie est la faculté de se donner à soi-même la loi de son action (du grec
"autos" : soi-même et "nomos" : la loi, la règle). Cela renvoie à la notion de libre-arbitre de la
personne.
En médecine l'autonomie s'exerce par le consentement libre et éclairé.
Etre autonome et consentir, cela suppose la capacité de comprendre et analyser l'information
pour pouvoir décider, comme le rappelle le Comité Consultatif National d'Ethique (CCNE) :
« L'acte de consentir suppose une double compétence : il faut pouvoir comprendre et pouvoir
se déterminer librement » (23).
La reconnaissance de l'autonomie d'une personne apparaît donc comme un principe
préalable au respect du refus et une exigence éthique, mais elle est source de nombreux
questionnements pour le médecin : n'y-a-t’ il pas un risque à faire reposer le soin sur l'unique
responsabilité du patient sous prétexte d'autonomie ? Comment évaluer au mieux les capacités
15 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
de compréhension et de réflexion du patient et sa liberté de jugement par rapport à autrui (un
tiers notamment) ?
Il n'existe pas de démarche validée et reconnue pour apprécier l'autonomie d'une
personne, c'est-à-dire ses capacités cognitives, ses capacités à émettre un jugement, sa
capacité de discernement. Les critères décisionnels du professionnel de santé ont donc une
nécessaire part de subjectivité.
L'échelle de la compétence éthique d'un patient de Beauchamp et Childress propose 7 étapes
pour aider cette évaluation, allant de l'aptitude requise la plus faible jusqu'à la plus grande
(4) :
1. capacité de manifester une préférence ou un choix
2. capacité de comprendre sa situation
3. capacité de comprendre les informations révélées
4. capacité de donner une raison (un motif)
5. capacité de donner une raison rationnelle (plausible)
6. capacité de donner une raison évaluant le rapport risque/bénéfice
7. capacité de formuler une décision raisonnable
Chez la personne âgée la question de l'évaluation de l'autonomie est essentielle. L'âge,
du fait de l’émoussement de certaines capacités intellectuelles et physiques (par exemple les
déficits visuels et auditifs), peut entraîner une limitation de l'autonomie.
De la même façon qu'il faut distinguer autonomie (capacité de vouloir par soi-même) et
indépendance (capacité de faire par soi-même), il ne faut pas en gériatrie assimiler la
dépendance à la perte d'autonomie.
Le CNEG définit la dépendance comme « l'impossibilité partielle ou totale pour une
personne d'effectuer sans aide les activités de la vie, qu'elles soient physiques, psychiques ou
sociales, et de s'adapter à son environnement » (11).
Une personne âgée peut donc être dépendante et faire valoir son autonomie.
16 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
Il existe des échelles pour aider à évaluer la perte d'autonomie de la personne âgée :
-
l'échelle IADL (Instrumental Activities of Daily Living) ou échelle des activités
instrumentales de la vie quotidienne
-
la grille AGGIR (Autonomie Gérontologie Groupes Iso-Ressources)
-
le MMSE (Mini Mental State Examination) pour l'altération des capacités cognitives
et mnésiques, peut aussi être utile
Les difficultés liées au recueil et à l'interprétation du consentement en gériatrie peuvent
trouver une aide partielle avec les dispositifs de la personne de confiance et des directives
anticipées.
17 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
III MATERIEL ET METHODE
1) Choix de la méthode
1.1) Type d'étude
Notre travail est une étude qualitative visant à explorer les comportements et ressentis des
médecins généralistes face au refus de soin d'un patient âgé.
Il s'agit d'une étude qualitative par entretiens individuels semi-dirigés de médecins
généralistes, volontaires pour participer à l'étude.
Des entretiens individuels ont été réalisés afin de permettre aux médecins de s'exprimer
librement, sans crainte du jugement éventuel d'autres confrères.
Les entretiens ont été conduits par l'enquêtrice qui a également effectué l'analyse des résultats.
1.2) Population
Les médecins généralistes ont été contactés par mail, grâce au concours de l'Union Régionale
des Professionnels de Santé Médecins de Rhône-Alpes qui a diffusé par voie électronique
notre demande d'entretien aux médecins généralistes des départements de la région RhôneAlpes (annexe 1).
Parmi les réponses favorables, les médecins n'ont pas été choisis aléatoirement. Ils ont été
recrutés de façon à être complémentaires sur les critères suivants : sexe, âge, milieu
géographique d'exercice (urbain/ semi-rural/ rural). Le but était d'obtenir un échantillonnage
dit en « recherche de variation maximale ». Il n'y a pas de recherche de validité statistique. La
diversité des points de vue, des perceptions et des comportements était recherchée.
Le seul critère d'exclusion était l'absence de mode d'exercice libéral (exclusif ou non) de la
médecine générale.
Lorsque le médecin donnait son accord pour un entretien, un rendez-vous était fixé, par mail
ou téléphone.
18 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
1.3) Guide d'entretien
Un entretien semi-dirigé se caractérise par l'utilisation d'un guide d'entretien qui définit les
différents thèmes à aborder lors de la discussion et qui permet ainsi de recueillir les données.
Il est composé de questions ouvertes ainsi que de phrases de relance pour guider le médecin
dans sa réflexion.
Nous avons réalisé un canevas d'entretien simple, connu seulement de l'interrogateur, qui
explorait trois axes principaux :
-
l'analyse du refus de soin par le médecin
-
les attitudes et stratégies mises en place par le médecin face au refus de soin
-
le ressenti du médecin
Ce guide a été testé auprès de deux médecins généralistes, ce qui a permis de l'adapter,
notamment en reformulant des questions qui semblaient mal comprises, et de l'enrichir. Ces
deux entretiens n'ont pas été inclus dans les résultats.
1.4) Déroulement des entretiens
Les entretiens ont été réalisés au cabinet des médecins, à l’exception d’un entretien réalisé au
domicile personnel (médecin L). La durée annoncée de l'entretien était d'environ 30 minutes
afin que le médecin prévoit un temps dédié suffisant, sans qu'il ne soit imposé de limite ni
minimale ni maximale.
Les entretiens ont été enregistrés, après accord oral des médecins, en leur garantissant
l'anonymat, avec un dictaphone (modèle Olympus WS-831). Le langage non-verbal a
également été relevé en parallèle.
Le tutoiement du médecin interviewé, quand tel était le cas, résultait de sa demande.
Le nombre d'entretien n'était pas prédéfini. Le recrutement a été stoppé à saturation des
données, c'est-à-dire lorsque les arguments étaient redondants et qu'aucune donnée nouvelle
n'apparaissait dans l'analyse.
19 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
2) Méthode analytique
Les entretiens ont été retranscris verbatim, manuellement, via le logiciel Word, en faisant
apparaître le langage verbal et non verbal. La retranscription mot à mot respecte ainsi le style
du langage parlé propre à chaque interlocuteur. Une copie des retranscriptions
dactylographiées est jointe sur CD-ROM (annexes 1 à 14).
Les entretiens ont été anonymisés et indexés de A à M selon leur ordre chronologique de
réalisation.
L'analyse des verbatim des entretiens retranscris a d'abord été verticale puis transversale.
Les différentes idées ont été encodées sous forme de nœuds puis regroupées sous forme de
thèmes. Ceci a permis de dégager les principales idées soulevées par les médecins et orienter
le plan de travail.
L'analyse descriptive et interprétative est décrite dans le chapitre résultats.
3) Méthodologie de la recherche bibliographique
Nous avons réalisé des recherches en français et en anglais à partir de mots-clés conformes à
la terminologie MeSH (d'après le site du CISMeF). Les mots-clés utilisés en français étaient :
refus de soin, refus de soin par le patient, personne âgée, autonomie du patient, consentement
au soin.
Ceux en anglais ont été : patient
refusal of treatment, elderly patient, patient consent,
personal autonomy.
Nous avons utilisé le site de documentation de la bibliothèque universitaire de Lyon 1
(http://portaildoc.univ-lyon1.fr), Pubmed (http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed), le site du
CAIRN (http://www.cairn.info), le site du Système Universitaire de Documentation
(http://www.sudoc.abes.fr/xslt/), le site de la Banque de Données en Santé Publique
(http://www.bdsp.ehesp.fr) et Google Scholar (https://scholar.google.fr/schhp?hl=fr).
Nous avons également recherché des informations sur les sites de Légifrance, du Ministère
des Affaires Sociales et de la Santé (http://www.sante.gouv.fr).
20 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
IV RESULTATS
A) Les entretiens
Quatorze entretiens ont été réalisés entre le 18 décembre 2014 et le 19 février 2015.
Les entretiens ont duré entre 18 minutes et 51 minutes avec une moyenne de 31,5 minutes et
une médiane de 30,5 minutes.
B) Description de la population
Quatorze médecins généralistes ont été interrogés pour composer l'échantillon, exerçant dans
les départements du Rhône, de l'Ain et de l'Isère.
Parmi les 14 médecins interrogés, 5 étaient des femmes et 9 des hommes.
L'âge des médecins de l'échantillon variait de 28 ans à 67 ans avec un âge moyen de 45 ans.
Il est à noter que d'après leur dernier Relevé Individuel d'Activité et de Prescription (RIAP)
fourni par la CPAM, le pourcentage de patients âgés de plus de 70 ans au sein de la patientèle
des médecins interrogés, était conforme à la moyenne régionale en Rhône-Alpes qui est de
12,81%.
Les caractéristiques personnelles des médecins sont récapitulées dans le tableau n°1.
21 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
Médecin
Age
Sexe
Année
Zone
Intervention
Orientation
installation
d’exercice
EHPAD
particulière
A
47 ans
M
2001
urbaine
oui
non
B
28 ans
F
2014
urbaine
oui
médecin en
crèche
C
34 ans
F
2012
semi-rurale
oui
non
D
36 ans
F
2011
urbaine
non
non
E
36 ans
M
2014
urbaine
oui
non
F
59 ans
M
1993
rurale
oui
ostéopathie
G
62 ans
M
1980
rurale
oui
non
coordonnateur
H
41 ans
F
2010
urbaine
oui
formation
urgentiste
I
42 ans
M
2003
urbaine
oui
non
J
50 ans
M
1997
rurale
non (pas
traumatologie
d’EHPAD sur le
soins palliatifs
secteur)
K
54 ans
M
1989
semi-rurale
oui
médecin sapeurpompier
L
67 ans
M
1979
urbaine
oui
psychothérapie
M
42 ans
M
2011
semi-rurale
oui
non
N
33 ans
F
2011
urbaine
non
non
Tableau 1 : caractéristiques sociodémographiques des médecins interrogés.
22 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
C) Analyse thématique des entretiens
1) Définition du soin pour les médecins généralistes
Définir ce que représentait le soin ne paraissait pas aussi évident pour des professionnels de
santé. Cinq médecins (B, D, E, I, M) l'ont exprimé dès le début des entretiens.
B : « Ah c’est vachement dur comme question »
M : « [prend une grande inspiration] Ouh c'est un vaste débat ».
Soigner consiste à prendre en charge un individu dans son environnement.
K : « La pratique qui est de soigner quelqu'un dans son environnement avec ses pathologies
et euh… les impératifs de sa vie. (…) Et c'est ce qui rend aussi le métier de généraliste
intéressant à mon avis, c’est qu’on traite la personne dans son environnement, on ne traite
pas la personne comme un malade. »
Les médecins s'accordent à dire que le soin doit répondre à une demande du patient.
J : « on s’inscrit dans la demande du patient et pas dans la volonté du soignant voilà. »
L'objectif du soin est de préserver la santé de leur patient.
A : « Moi je suis assez proche de la définition de l’OMS de la santé, enfin pour la santé. »
D : « pour moi c’est accompagner en fait la personne, dans…euh… pour préserver sa santé
physique et mentale. »
E : « Le soin bah c’est augmenter, c’est, c’est, c’est l’activité qui permet d’augmenter les
indicateurs de santé chez quelqu’un (…) Ça englobe des données subjectives qui sont propres
au patient et ça englobe des données objectives qu’on connaît nous »
En tant que soignant, ils se perçoivent davantage comme des "accompagnateurs" et non pas
comme des "guérisseurs".
B : « Parce que, finalement on guérit pas beaucoup de gens »
H : « Le soin ça peut être guérir quelque chose de facilement guérissable mais c'est plutôt
apporter du confort ou du mieux-être »
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Et notamment lorsqu'il s'agit de prendre en charge des patients âgés pour deux médecins.
F : « quand on a affaire à une personne âgée, le soin et la guérison sont deux choses qui
s’éloignent l’une de l’autre. Et le soin c’est des fois plus prendre soin que soigner. »
L : « Enfin surtout quand on parle de personnes âgées, on est plus dans le "care" que dans le
"cure" hein, c'est évident. »
Ils mettent en avant le fait que le soin doit être dicté par un comportement, une attitude de la
part du médecin : la bienveillance.
C : « Donc le soin pour moi y’a une notion de bienveillance derrière, qui pour moi est
inhérente au soin. »
I : « C’est pour moi quelque chose d’assez profond cette attention à l’autre finalement. Ça va
un peu au-delà de la résolution des problèmes. C’est la résolution d’un problème et la façon
qu’on a de résoudre ce problème aussi. »
2) Prévalence du refus de soin exprimé par le patient selon les médecins généralistes
La recherche du consentement du patient doit être un préalable indispensable à tout soin, mais
un médecin soulignait que dans la pratique cette recherche n'était pas toujours active.
H : « C'est vrai que je demande pas à chaque fois savoir si y veulent vraiment qu'on fasse ça.
(…) Je me vois pas demander à chaque consultation si ils veulent bien que. »
Pour tous les médecins interrogés, le refus de soin exprimé par un patient (quel que soit son
âge) est une situation fréquente.
A : « Eh oui c’est des choses qui sont assez, assez fréquentes. »
M : « Ouais comme tout un chacun. Y’a toujours des patients qui sont pas d’accord pour faire
des actions qui tendraient à les amener vers une meilleure santé oui y’en a »
Pour certains il s'agit même de scènes quotidiennes.
G : « Tous les jours ! »
I : « Si on est un peu attentif à l’accord du patient c’est vraiment quotidien que d’être
confronté à, au refus du soin. »
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Même si l'observance réelle d'un patient n'est pas toujours aisée à évaluer.
A : « Je sais pas ce que ça donne en terme d’observance. Pfff, c’est difficile de se rendre
compte de la façon dont les gens font les choses. »
Ils pensent être à même de percevoir le refus de soin implicite.
A : « Enfin on se rend compte il y a des examens qui sont pas fait parfois, des traitements qui
sont pas pris, on a des retours »
B : « ils m’ont dit oui-oui pour me faire plaisir et puis trois consultations après on en était
toujours au même point »
Pour ce qui est de la fréquence ressentie par rapport aux autres classes d'âges, neufs médecins
interrogés (A, D, G, F, H, I, K, L, M) ne pensent pas que les personnes âgées refusent
davantage.
A : « j’ai autant de refus voire même de difficultés avec des gens plus jeunes »
D : « Moi j’ai l’impression d’avoir des difficultés de soins à tous les âges de la vie et quel que
soit le sexe. »
M : « Je dirais qui refusent pas davantage, comme les autres. Peut-être que c'est les raisons
du refus qui changent. Mais euh… j'ai pas l'impression que les personnes âgées sont plus
difficiles en terme d’obtention de participation à un soin que quelqu'un qui a 30- 40- 50 ans
quoi. »
Ils avancent pour cela les raisons suivantes :
-
ils jugent les patients âgés plus compliants
H : « Bah moi j’les trouve plutôt compliants en fait. »
-
ils accorderaient plus facilement leur confiance au médecin
G : « Ah non, c’est les jeunes qui sont plus chiants. Non. Les gens âgés, surtout cette
génération, en grande majorité nous font beaucoup confiance. »
I : « Alors j’dirais non. Parc’que y’a encore chez les sujets âgés une sorte de déférence, une
sorte de "dites moi docteur c’que j’dois faire ? ", c’est vous le docteur c’est à vous de me
dire, qu’on trouve plus trop chez les jeunes »
-
les personnes âgées feraient preuve d'une attitude plus respectueuse
F : « les personnes âgées ont encore le respect du médecin qui font que quand le médecin
explique et prend la peine de …de donner du temps et ben généralement elles finissent par
être du même avis que le médecin. (…) J’ pense que les personnes âgées sont plus en
harmonie avec leur médecin, globalement. »
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Un médecin n'évalue pas précisément la prévalence du refus chez le patient âgé par rapport
aux autres tranches d'âges.
C : « Oui peut-être…bah, pff, non difficile de dire. Silence. J’aurais du mal à dire,
honnêtement. »
Les quatre derniers médecins estiment que les patients âgés refusent davantage.
E : « Et puis effectivement j’pense que le refus de soin y monte probablement crescendo avec
l’âge, ouais j’pense. »
3) Analyse des causes du refus de soin
Avant de mettre en lumière les causes identifiées par les médecins généralistes, notons
que pour l'ensemble des médecins interrogés, la recherche de la cause est un préalable
nécessaire avant tout réponse à donner à ce refus.
H : « Mais bon moi j’pars du principe quand quelqu’un est pas d’accord faut trouver
pourquoi. Y’a toujours une raison, voilà. La plupart des gens ils ont pas envie de dire non à
leur médecin. Donc si ils disent non c’est qu’ils ont une raison qu’il faut déjà identifier.
(...)Moi j’suis tout de suite dans le questionnement de chercher pourquoi en fait. Chercher
pourquoi et comprendre (…) y faut qu’je fasse un diagnostic de ce qu’il y a dans ce non. »
M : « J’ pense qu'avant tout il faut se dire tiens il a pas adhéré ah ça bah pourquoi et le plus
simple c'est de lui demander pourquoi vous faites pas ce que je vous ai dit. »
3.1) Les causes du refus de soins dans la population générale
• Le défaut d'information
La plupart des médecins se sont accordés à dire qu'une des premières causes de refus est le
manque d'information.
E : « Comme je disais tout à l’heure moi je crois beaucoup que les refus du quotidien (...)
sont du manque d’information et sont en fait un appel à une exigence d’info et qu’on leur doit
effectivement. »
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Ce défaut d'information est alors source d'incompréhension.
E : « Moi j’crois beaucoup au fait que les gens refusent parc’qu’ils ont pas compris, ils ont
peur (...) C’est lié à l’inconnu et l’ignorance. »
H : « Des fois c’est parc’qu’ils ont pas compris, »
Trois médecins ont souligné que cela peut-être accentué par une certaine désinformation ou
"mésinformation" liée à l'influence des médias.
A : « Ils ont tous internet même les vieux, c’est une catastrophe. Et tous ils vont chercher les
résultats sur les forums. »
G : « ah bah non docteur j’en veux pas, j’ai entendu à la télé que c’était pas bon. »
L : « Alors au moment où les joyeux scandales successivement le Médiator, la pilule de
troisième génération etc. ont éclaté ces dernières années beaucoup de patients ont dit mais
alors toutes les saloperies que vous nous donnez (...) les gens se méfient des médicaments. »
Deux autres médecins rapportent que l'incompréhension des informations peut être la
résultante de barrières linguistiques.
H : « c’est quelqu’un qui parle très très mal le français donc il avait peut-être pas tout
compris non plus. »
N : « Ici on a beaucoup de patients qui parlent pas français ou pas bien, donc du coup on
explique beaucoup moins bien quand c'est déjà super difficile d'expliquer la base. »
• Des représentations erronées de la maladie
Notamment lorsqu'il s'agit de pathologies sans symptômes immédiats perceptibles par le
patient.
A : « sur des pathologies qu’en sont pas, enfin type hypertension, diabète, des choses qui sont
pas perçues comme des maladies parce que y’a pas de symptômes, où là on est plus en
situation d’échec à mon avis. C’est plus difficile de motiver les gens que lorsqu’y commence à
y avoir des symptômes, des éléments de perte d’autonomie ou des complications dans la vie
quotidienne. »
• Une discordance d'objectifs et des attentes différentes.
Le médecin et le patient peuvent avoir des représentations différentes de la maladie, donc des
attentes différentes et le patient peut refuser un soin car il ne correspond pas à ses attentes.
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I : « soit parc ‘que c’est complètement aux antipodes de ce à quoi y s’attendait quoi. (…) Et
puis parfois c’est un soin qui leur parait pas acceptable tout simplement. (…) c’est quelque
chose qui, qui ne leur semble pas, en tout cas au moment où on leur annonce, correspondre à
leurs attentes. »
Il peut exister un conflit entre le projet de soin du médecin et le projet de vie du malade.
M : « Pourquoi ils ne font pas ? Parce qu'ils sont pas en recherche de la bonne santé.
Personne n’est à la recherche de la bonne santé, les gens sont à la recherche du bonheur, pis
ils font toutes les actions possibles et imaginables pour y arriver y compris les plus stupides.
(...) quand ils ne font pas c’qu'on leur demande ou c’qu'il faudrait faire c'est pas juste pour
nous enquiquiner, c'est parce que c'est pas le chemin qu'ils ont pris, parce que c'est pas celui
qui leur semble aller vers le bonheur. »
• Le temps du patient peut être différent du temps du médecin
Il s'agit de savoir à quel stade d'acceptation de la maladie se situe le patient.
D : « y’a des moments où on sent que les gens ne sont pas prêts, pas prêts à entendre (…) où
en est la personne au moment où, elle est capable ou pas d’entendre certaines choses. »
I : « (...) ou que c’est pas le bon moment pour le patient pour se soigner. »
Au sein de ce cycle le patient peut par exemple être au stade du déni, processus psychopathologique de défense fréquent pour trois médecins (B, D et C).
B : « Quand les gens sont dans le déni par exemple, ils sont dans l’opposition parce qu’ils
dénient. »
Il peut être au stade de la révolte.
N : « ceux qui disent fichez moi la paix il faut savoir si ils sont en colère ou pas parce que
c'est ils sont en colère c'est pas le même fichez- moi la paix. »
• Le refus lié au soin proposé en lui-même
Les patients peuvent avoir peur de ce soin, des résultats, des conséquences.
H : « Parc’que eux souvent le refus va plutôt être lié à une peur. (…). A priori quelqu’un qui
dit non c’est quelqu’un qui, moi j’pars du principe c’est quelqu’un qui a peur. C’est comme
les gens agressifs en général, c’est une réaction de défense. »
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Ce peut être la crainte de la pénibilité du traitement ou de son caractère contraignant.
H : « quelle liberté ils ont dans ce traitement, parc’que voilà y’a des traitements où y’a pas
de liberté possible. Euh… j’sais pas par exemple un épileptique qui veut pas prendre son
traitement c’est pas tout à fait pareil que quelqu’un qui veut pas prendre son doliprane quand
il a mal au dos. »
M : « y'a certains soins qui sont simples et courts et souvent y'a pas d’opposition mais y'a
certains soins qui sont beaucoup plus complexes, beaucoup plus plus désagréables ou
beaucoup plus longs et là euh… qui mettent en jeu beaucoup plus de choses c'est parfois plus
compliqué et là on peut se voir opposer un refus »
Le soin proposé peut être vécu comme "de trop". Notamment pour des patients souffrant de
pathologies chroniques ou polymédiqués.
K : « il a déjà 15 cachets dans la journée pour autre chose, on comprend qu’il ait pas envie
de se nourrir de comprimés quoi. Nous déjà à notre âge quand on doit prendre 2 comprimés
par jour pendant 6 jours, on tient 4 jours et pis c'est tout, alors quand c'est des traitements de
fond depuis des années c'est encore autre chose. »
• La personnalité propre du patient
E : « je connais les gens et pis leur caractère et je sais que ça va être plus difficile »
• L'histoire de vie du patient
Des événements de vie marquants ou traumatisants peuvent influencer la prise de décision
d'une personne.
D : « je pense que l’histoire de la personne joue et moi dans mon exercice j’ai vu qu’il était
difficile de soigner des gens qui avaient été maltraités. Après je connais pas les histoires de
tous mes patients, mais ceux avec qui ça c’est mal passé, avec qui j’ai été dans une opposition
de soin (...), j’me suis rendu compte qu’y avait des histoires de, ouais de maltraitance. »
• Des convictions idéologiques, religieuses
L : « Si on veut tenter de vous guérir, y va falloir vous faire des chimiothérapies, qui dit
chimiothérapie dit effondrement des globules rouges, qui dit effondrement des globules
rouges dit transfusion: non je suis témoin de Jéhovah. J’le savais mais c'est bien pour ça que
j'ai amené la discussion là dessus tout de suite. »
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3.2) Les causes du refus de soins spécifiques au sujet âgé
Les médecins interrogés repèrent dans leur pratique des motifs de refus plus prégnant chez
le patient âgé.
• La perturbation des capacités de raisonnement
Tous ont mis en exergue le problème du refus de soin dans le cadre de troubles cognitifs.
Ceux-ci peuvent être source d'agressivité et de comportement opposant.
B : « il a une démence à corps de Lewy, il est dans le refus de soin permanent, dans
l’agressivité »
C : « une personne âgée qui est atteinte d’une maladie neurodégénérative (...) qui peut être
dans une opposition permanente »
La particularité du refus de soin des sujets âgés souffrant de troubles cognitifs fait l'objet d'un
chapitre spécifique dans notre travail ci-après.
Les praticiens recherchent également une composante dépressive chez un sujet âgé qui refuse.
La perte de l'estime de soi liée à la dépression peut effectivement engendrer une perte de
motivation pour des soins qui sont alors perçus comme inutiles.
D : « j’dirais que la personne âgée étant de facto p’têtre plus touchée par la dépression,
enfin dans cet âge de la vie comme le sont par exemple les ados, on sait que c’est des âges qui
sont plus touchés par ça, ça peut rendre le soin ou l’adhésion au soin difficile. »
N : « Mais quelqu'un qui me dit à 75 ans qu'il a plus trop envie, ça dépend ce qu’il y a
derrière : si j’le sens dépressif. »
• La modification des traits de caractère avec l'âge
Pour six médecins (B, D, E, F, H, M) les personnes âgées font preuve d'un caractère opposant.
D : « j’crois que peut être qu’à l’âge âgé y’a certains traits de personnalité qui se révèlent et
qui font que parfois ben… ces traits là parfois psycho-pathologiques peuvent rendre le soin
difficile. »
H : « Voilà ils ont des idées assez arrêtées sur ce qu’ils veulent bien faire, sur ce qu’y veulent
pas faire »
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• La lassitude conséquence de l'âge
K : « Le refus d'un patient âgé… y'a une certaine lassitude à un moment donné des
traitements »
M : « il y a des personnes âgées qui estiment qu’elles ont fait entre guillemets leur temps »
N : « Y'a du discours du genre " (...) j’ suis assez vieux pour faire c’que je veux et surtout
c'est un âge où il faut partir, arrêtez de m’embêter " »
• Le refus de la perte d'autonomie
Le refus de soin représente le refus de la maladie qui peut être source de perte d'autonomie
temporaire ou définitive. Le refus de soin est un moyen d'exprimer la difficulté à vivre cette
situation régressive de dépendance.
C : « ça l’inquiétait énormément de ne plus avoir le contrôle de sa vie. Il s’est diminué très
très vite, très très rapidement. (...)Et c’est vrai qu’il me disait je peux plus couper mon bois,
regardez j’ai maigri [mime la perte de circonférence brachiale] (…) Il y a cette inquiétude
d’être… de n’être plus capable de gérer leur vie, d’être actif. »
Le non exprime la volonté de garder une certaine maîtrise sur les événements.
N : « il y a la crainte de perdre le contrôle, soit que ce soit trop fatiguant soit de perdre le
contrôle, surtout chez les personnes âgées. »
• L'angoisse de mort
Ce sentiment d'angoisse, l'idée d'une mort prochaine et certaine, peut conduire la personne
âgée à se poser la question de l'intérêt d'un soin ou traitement puisque selon elle tout est déjà
perdu et qu'il n'y a pas de projection dans l'avenir.
H : « Les personnes âgées c’est vrai que le refus de soin ça peut être en lien avec des
angoisses de mort. »
• Les représentations personnelles négatives liées à un soin
Pour six médecins (A, C, E, H, J, N) ceci concerne particulièrement l'hospitalisation.
C : « D’ailleurs c’est ce qu’on voit à chaque fois quand ils sont hospitalisés (...). Pour eux
c’est synonyme d’aller à l’abattoir quasiment, c’est un peu ça quoi. »
N : « La crainte aussi de l'hôpital. Si je vais à l'hôpital je retournerai pas chez moi, ils vont
pas me lâcher donc j'y vais pas. »
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• L'influence du passé médical
Les personnes âgées peuvent mettre en avant leur expérience médicale personnelle pour
justifier un refus.
B : « C’est beaucoup plus compliqué, parce qu'ils ont 80 ans de vie médicale à digérer et
donc du coup ils ont vu X médecins, ils ont eu X prises en charge, X pathologies et ils ont
l’habitude, ils sont rodés. Ils savent ce qu’on peut éventuellement ou pas leur proposer. Ils
ont testé plein de trucs »
H : « Oui y’a le fait qu’ils se connaissent. Ils ont une expérience, une expertise d’eux-mêmes
et une expérience de vie qu’ils vont nous mettre face à nos connaissances médicales. Du
genre "écoutez moi j’me suis jamais vacciné pour la grippe, j’ai jamais attrapé la grippe, et
c’est comme ça ". »
• Les contraintes liées au soin
Le soin est jugé comme compliqué à organiser et sa mise en œuvre perturbe les habitudes de
vie.
Il s'agit notamment des déplacements que nécessitent certains soins.
J : « Comme motif c’est qu’elle voulait pas quitter la maison (…) »
N : « c'est des personnes que je vois à domicile et qui sortent plus et donc y me disent ça fait
six ans que je suis pas sorti non j’irai pas chez le cardiologue j'ai pas envie de sortir. »
Ou encore des interventions au domicile vécues comme intrusives, notamment dans le cas de
la prévention du risque de chute.
B : « les interventions qu’on peut leur proposer dans ce domaine là, en tout cas notamment
pour les chutes, c’est extrêmement intime (…) il faut réorganiser votre domicile c’est juste le
bazar »
• La peur du changement
I : « c’qui les fait le plus paniquer c’est le changement. Euh… là depuis 20 ans vous aviez ce
médicament et ben on va changer. Là ça les rassure pas donc y ont tendance à, à dire ben
non moi j’ai toujours fait comme ça. (...) c’est l’appréhension d’un changement. »
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Et parmi le changement, celui de médecin traitant (le patient âgé qui voit son médecin de
famille de 40 ans partir en retraite et qui doit s'adapter à un nouveau médecin) peut être un
motif de refus, au moins initialement.
I : « Y’a parfois le charisme, ou le poids on va dire, du praticien précédent. "Parc’que le
docteur D et bah lui y faisait comme ça". »
• Les pressions familiales
N : « des fois la pression familiale, parce que quand ils vivent avec la famille, les enfants, les
petits-enfants, si ils ont pas envie mais qu'ils ont des enfants hyper inquiets et qui poussent à
faire des examens c’est… c'est toujours embêtant. »
• La nécessité de s'occuper d'un tiers à domicile
Le poids d'un conjoint dépendant peut conduire à refuser un soin parce que sa propre santé
n'est pas prioritaire.
K : « il refuse pour l'instant de se faire opérer parc’que bah y va bien, qu’il a sa mamie qu’a
Alzheimer et y dit si je me fais opérer bah personne pourra s'occuper d'elle, si je meurs
pendant l’intervention personne s’occupera d’elle »
• Le refus de soin qui s'inscrit dans un syndrome de glissement
L : « le refus de soins ça m'évoque autre chose, c'est les patients âgés qui se laissent glisser
hein. »
• Un critère sociogéographique : la ruralité
Selon un médecin, le fait que la personne âgée vive en milieu rural peut être un facteur de
risque de refus.
J : « Bah nous on a une population, la population âgée actuelle c’est une population rurale
hein (...) j’pense qu’y a une culture rurale qui fait que… qui fait que les gens ont pas envie de
descendre à l’hôpital (…) c’est toujours l’esprit un peu rural quoi. Ils ont pas une appétence
particulière à v’nir voir leur toubib, ni la pharmacie. »
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4) Les réactions des médecins confrontés au refus de soin
Même si leurs attitudes peuvent différer, pour les quatorze médecins interrogés le
respect du refus est non opposable.
J : « Mais la décision finale ça sera celle du patient. »
L'opposition du patient peut être parfois à l'origine d'une remise en question de la part
du médecin qui l'amène à se ranger à l'avis du malade.
E : « Y’a l’effet inverse aussi des fois, tu te dis non finalement il a raison on peut très bien se
démerder sans l’hospitaliser, sans faire le scan, sans je sais pas. (...) Et puis en même temps
des fois je me remets en cause mais en direct, j’peux changer d’avis aussi grâce au patient. »
H : « des fois elle est justifiée et c’est eux qui, qui voilà nous mettent le doigt sur un truc
qu’on n’avait pas vu. »
Car le médecin n'est pas le seul détenteur d'un savoir.
J : « On détient pas, enfin faut arrêter de considérer que les médecins détiennent la vérité
absolue. On est quand même souvent pris à défaut quoi. »
N : « insister davantage sur le droit la personne pour se rendre bien compte que le savoir est
pas forcément détenu que par médecin et qu'en tout cas c’est pas parce que qu’il sait ce qu’il
faut faire que c'est ce qu'il faut faire »
Pour tous, la condition sine qua non pour respecter le refus du patient est que ce
dernier ait bien compris les enjeux du soin.
E : « je leur dis souvent "j’veux bien que vous refusiez mais avant toute chose je veux être sûr
que vous ayez bien compris pourquoi je veux. C’est la seule condition pour laquelle j’accepte
que vous refusiez. Tant que vous avez pas super bien compris, que j’ai pas l’impression que
vous avez super bien compris, je refuse que vous refusiez »
K : « une fois qu'il a bien reverbalisé les tenants et les aboutissants et que j'ai bien compris,
enfin j'ai bien réalisé qu'il avait bien compris et qu'il voulait pas, c'est son choix OK très
bien »
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4.1) Influence du type de soin
L'attitude initiale interventionniste ou attentiste du médecin dépend du caractère vital
ou non du soin.
Ils expriment leur insistance en cas de soin vital.
F : « J’vous dis y’a que quand c’est …quand la situation de refus me semble mettre en jeu la
survie de la personne euh… ou risque d’avoir des conséquences délétères graves euh… où
j’insiste un p’tit peu »
L : « mais si ça le met en danger je vais me battre. »
S'il n'y pas de mise en danger immédiate, les médecins l'acceptent sans peine.
L : « Bah si le refus ne met pas sa vie en danger, à court terme, bah pas vraiment de
problème majeur. »
I : « on a vraiment permis au patient d’exprimer son refus de soin et on a vraiment, on est
vraiment allé au bout de la philosophie c'est-à-dire finalement c’est sa santé et ben on n’est
pas dans le cadre d’une HDT, il est tout à fait libre de choisir le côté obscur si il le
souhaite. »
Ils indiquent également tolérer plus facilement le rejet de propositions de soins préventifs.
K : « eh bien aujourd'hui un refus de soins préventifs, parce que c'est surtout là où il y a des
refus de soins, euh… et bah OK vous voulez pas faire de la prévention on traitera le problème
quand il sera là. »
4.2) Influence de l'âge du patient
Deux médecins (D et K) ont déclaré que leur réaction n'était pas modifiée par l'âge du
patient refusant.
D : « Ça peut arriver de me mettre dans les mêmes états pour une personne âgée que pour
quelqu’un, un adulte dans la vie active. (...) Non j’me dis pas bon bah il est âgé, j’déteste
cette réflexion de " oh bah voilà vous avez l’âge de vos artères" ou " bon ben voilà c’est
l’âge ”. C’est quelque chose que j’accepte pas (…) j’ai pas le sentiment d’être un médecin
qui baisse les bras du fait de l’âge de ses patients. »
K : « En tout cas j'ai pas l’impression de réagir différemment. »
35 RADREAU
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Pour tous les autres médecins, l'âge entre en ligne de compte.
M : « L’âge est un élément important de ma décision. »
Ils admettent plus naturellement le refus d'un patient âgé, pour les motifs suivants :
-
une acception plus volontiers "a priori" du fait de l'âge avancé pour quatre médecins
(E, G, L, N)
E : « Ah oui, alors moi oui. Ah oui, ah bah là oui oui. Mais c’est p’têtre un tort. Parc’que y’a
peut-être pas de raison de vouloir imposer plus des choses aux plus jeunes, c’est peut-être pas
une bonne raison philosophique.(...) J’ai moins de résistance au refus de soin chez une
personne âgée que le trentenaire. »
N : « Personnellement j'ai tendance à lever le pied parce que… parce que voilà quoi après
un certain âge ça a pas toujours du sens. (…) J'ai l'impression d'être moins stressée ou d’être
moins perturbée par des personnes âgées qui ne font pas ce qu'elles ont à faire. »
-
leur espérance de vie est plus courte, les conséquences du refus leur paraissent donc
moins graves
F : « Très honnêtement, un patient de 85 ans je crois qu’il a, qui refuse d’être soigné pour
son cancer du poumon, ça va pas changer énormément son avenir, ça va peut-être le
raccourcir un peu mais pas de façon euh…, il va pas perdre 40 ans de vie quoi »
L : « Je crois pas parce que j'ai toujours dans un coin de ma tête que si cette personne très
âgée choisi de ne pas se soigner elle va p’têtre raccourcir un peu sa vie mais voilà. »
-
la balance bénéfice-risque du soin leur est plus souvent défavorable
E : « Pour le reformuler je dirais que la balance bénéfice-risque est moins évidente chez les
patients âgés quoi. C'est-à-dire que le bénéfice qu’y peuvent tirer des soins, on est souvent
dans des situations où la partie bénéfice est moins évidente à évaluer alors que la partie
risque celle-là au contraire elle gonfle »
4.3) Influence de l'âge du médecin
L'attitude des médecins évolue au fil des années d'exercice. Ils ont l'impression d'être
plus respectueux des choix du patient avec l'âge. C'est ce qu'ont notamment exprimé les
médecins plus âgés interrogés.
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G : « Vous vous allez le vivre différemment quand vous allez vous installer, que vous êtes
encore avec toute votre, votre enthousiasme de ce que vous venez d’apprendre et vous voulez
convaincre les gens qu’ils fassent comme vous voulez parc’que vous savez que vous avez
raison. Que quand vous arrivez vers mon âge, vous commencez à être un peu plus… voir ça
de loin. (...) l’âge du médecin compte autant que l’âge du patient hein. Quand on débute on
est très à cheval sur ce qu’on nous a appris donc on est plus agressif pour faire adhérer les
gens. »
J : « J’pense que j’ai lâché du lest en vieillissant »
L : « J'ai passé l’âge de dire "Hé c'est moi le docteur" [dit cela en prenant une grosse
voix]. »
Le médecin I relève que lorsque le patient a le même âge que le médecin, ce dernier pourrait
se projeter davantage et cela influerait sur son attitude quant au fait de respecter ou non ce
refus.
I : « L’âge change la façon de faire bah forcément parc’que des fois on va se, enfin on va
être plus motivé à convaincre, enfin convaincre ah j’utilise le mot banni ! On va plus être
motivé à, justement à aider un patient à aborder une meilleure démarche santé quand on
s’reconnait en lui parce qu’il a notre âge. »
4.4) Influence des obligations médico-légales sur l'attitude des médecins
Il s'agit pour eux de l'obligation d'informer et s'assurer que les patients aient bien compris.
A : « Bah le seul médico-légal que j’ai en tête moi c’est une obligation de moyens voilà.
Après moi par rapport à ça… L’obligation d’informer, l’obligation de moyens. (...) Les gens
sont pas fous. Une fois qu’ils ont eu les explications, ils comprennent quoi, ils sont capables
d’assumer leurs responsabilités. »
Cette question médico-légale est présente dans l'esprit des trois médecins C, D et L.
D : « Oui, mais malheureusement pour tous les patients. Et ça c’est un vrai problème. C’est
un vrai problème parce qu’à mon sens aujourd’hui le médico-légal altère la relation de
confiance à la personne et peut-être nous fait prendre des décisions qu’on n’aurait pas prises
autrement. Ça c’est une inquiétude, permanente, et qui altère la qualité humaine. (…) On est
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dans une société qui fonctionne comme ça parce qu’on sait que le patient y peut dégainer
aussi la plainte et du coup euh… la crainte médico-légale elle est à tous niveaux et quel que
soit l’âge. »
Mais pour les autres elle n'est pas obnubilante. Ce n'est pas une crainte prépondérante dans
leur exercice.
A : « enfin c’est pas un frein, c’est pas une crainte »
M : « moi j’me sens pas pénalement, administrativement ou ordinalement responsable d'un
patient qui a clairement les informations, qui les a compris et qui refuse le soin. »
Car ils se sentent protégés par la relation singulière, par le lien de confiance entre le médecin
généraliste référent et son patient.
A : « A partir du moment où la relation est à peu près construite, enfin où il y a une relation
de confiance qui s’est établie des deux côtés (...) y’a pas de médico-légal. »
G : « Alors que quand vous êtes en cabinet c’est différent. Les gens vous ont choisis déjà et
puis euh…le contact est pas le même. On les connaît depuis plus longtemps, c’est pas le même
contact. »
Souvent il s'agit d'une appréhension davantage par rapport à l'entourage et à la famille, que le
patient lui-même (médecins I, J, L).
L : « un intérêt à appeler la famille, je dirais qu'il est médico-légal "ah le docteur il a rien
fait, il a laissé mourir la mémé" »
I : « C’est pas du tout une décharge. C’est j’assume ma responsabilité, par contre j’vous
demande juste de m’aider à pouvoir prouver, par la suite, que je vous ai informé, vraiment de
manière claire et loyale, du risque que vous courriez et que, si y’a une plainte de la famille
trois ans après, je puisse dire ce monsieur a signé un document où je disais qu’il allait
mourir, il a signé. »
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Ils ne sont pas tous d'accord sur l'intérêt médico-légal de renseigner le dossier à
propos du refus de leur patient.
Pour la majorité d'entre eux (12 médecins) la notification du refus du patient dans le dossier
médical est très importante.
C : « Quand il y a eu notamment une discussion autour d’un truc avec un refus de soin ou un
refus, ça je le note, pour moi quoi. Parce qu’à un moment donné il faut aussi savoir se
protéger. »
J : « L’aspect médico-légal encore une fois c’est l’écriture. Y’a des traces dans le dossier.
(...) Parc’qu’ effectivement professionnellement on peut s’exposer et euh… y faut faire la
trace dans l’écriture du refus de traitement. »
Par contre, une décharge signée par le patient n'a à leurs yeux aucune utilité ni valeur pour un
médecin.
A : « c’est bien pour un gastro-entérologue ou un chirurgien y fait signer mais ici on n’a pas
ce genre de problème je pense. »
Pour deux médecins (F et K) l'oral prime même sur l'écrit.
F : « ma façon de travailler c’est une relation de confiance entre un patient et un médecin. Si
le patient dit au médecin, ce que je veux c’est ça et si le médecin en tient pas compte c’est
qu’il est pas dans cette relation de confiance et inversement j’veux dire. C’est vraiment une
relation humaine, une relation duelle et une relation de confiance donc voilà je… Qu’elle
s’appuie sur des papiers, ça me dérange enfin ça me dérange, j’suis pas familier de cette
chose là. »
5) La pertinence du consentement de la personne âgée en cas de troubles cognitifs.
Tous les médecins de l'étude ont évoqué la difficulté posée par le recueil et la valeur
du consentement de la personne âgée atteinte de troubles cognitifs. Ils s'interrogent sur
l'attitude à adopter en cas de refus dans ces circonstances.
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D : « Après dans les refus de soin la difficulté c’est les personnes qui ont des troubles
cognitifs. »
C : « Y’a des facteurs limitant si c’est quelqu’un qui est atteint, une personne âgée qui est
atteinte d’une maladie neurodégénérative, forcément y’a….en général les personnes qui sont
pas, qu’arrivent pas à… comment dire à… à comprendre le pourquoi du comment. »
Même en cas d'altération des fonctions cognitives, l'information doit être délivrée et
reste un droit.
A : « Ça dispense pas de donner des explications pour le coup en même temps, ou de
préparer, y’a peut-être des choses qui passent. »
L'existence de troubles de la compréhension du fait de pathologies neurodégénératives ne doit
pas être un frein pour tenter d'obtenir un consentement, quatre médecins (B, D, H, G) ont
particulièrement insisté.
B : « Mais pour les personnes âgées, même démentes, même qui ne peuvent plus
communiquer, évidemment… enfin voilà y’a un consentement qui est imprescriptible quoi. »
G : « Moi quelqu’un qui a un Alzheimer, vous pouvez faire des examens, des traitements, il
faut quand même chercher à obtenir son consentement. »
Car l'absence d'adhésion aux soins peut être source de violence.
H : « on essaye toujours d’avoir l’adhésion sinon ça rime à rien. Imposer des soins euh…
ouais vraiment imposer des soins à une personne qu’a la maladie d’Alzheimer qui
comprendrait pas l’intérêt des soins et qui vivrait ça comme une espèce de torture imposée,
c’est plus de la médecine. C’est vrai que même avec eux on doit négocier quand même. »
Mais certains médecins sont ambivalents à cause du caractère changeant de la pensée en cas
troubles cognitifs.
A : « Si on peut avoir un consentement en même temps c’est bien, mais en même temps la
valeur qu’il peut avoir et sa réversibilité dans les 5 minutes, ça le rend vraiment précaire
quoi, c’est difficile de se baser dessus. »
D : « On essaye d’obtenir l’adhésion mais l’adhésion elle est fluctuante. »
N : « J'ai un vrai problème avec les patients Alzheimer ou les troubles mnésiques et … là moi
j'ai des patients qui me disent oui mais je sais pas quelle est la valeur du oui ou non et je sais
pas quelle est la valeur du non donc voilà. »
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Ils ne sont pas tous unanimes sur le crédit à donner à ce consentement, et certains n'en
tiennent pas compte.
M : « dans la mesure où il est dément cet agrément n’a pas de valeur de participation. »
Dans leurs réponses les médecins soulignent que le problème se pose en terme de
communication.
F : « comment communiquer euh…des sujets qui sont des fois à la limite de ce que nous nous
pouvons comprendre avec quelqu’un qui n’a plus toute sa capacité intellectuelle ? »
Car certaines fonctions de communication restent préservées.
A : « Même quand il y a des altérations de fonctions cognitives c’est assez surprenant parfois
d’avoir des retours élaborés. Voilà, on se dit ça va pas être possible c’est pas la peine de
discuter, en fait non il y a des choses qui passent quand même. »
Il leur faut aussi s'appuyer sur d'autres facteurs relationnels.
H : « les personnes qui ont vraiment des troubles cognitifs, moi j’trouve que euh… ce qu’ils
ont de préservé assez longtemps quand même c’est les liens affectifs, les émotions, donc ça on
peut jouer là-dessus dans l’approche physique de la personne, dans la façon de parler. Voilà
le fait d’être vraiment, comme apprivoiser quelqu’un, y faut les apprivoiser quoi. »
Ils accordent une place importante dans ce cas à l'analyse du non-verbal pour obtenir un
consentement ou ne pas enfreindre un refus de soin.
B : « Enfin il a plus les compétences pour prendre la décision. En fait euh, euh…en regardant
en fonction de sa physionomie, de ses attitudes, de ses gestes euh… quand il ouvre les yeux
c’est qu’il est d’accord, quand il les ferme et qui se crispe c’est qu’il est pas d’accord. »
6) Les moyens mobilisés par les médecins pour obtenir une adhésion au soin
6.1) Anticiper le refus
Deux médecins expliquent essayer de repérer au cours de la consultation les éventuelles
résistances ou signes annonciateurs d'un refus pour ainsi adapter leur proposition de soin.
B : « C'est-à-dire quand je les examine que je commence à leur dire "oh là ça ça me plaît
pas, oh vous avez vu vos pieds comme y sont dégueulasses faut faire quelque chose", voilà,
j’regarde quelle tête y font et ce qu’ils me renvoient. C'est-à-dire que si ils commencent à se
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crisper, à se fermer comme des huîtres ou à faire la tronche, à me dire " ah pff on m’l’a déjà
dit 10 fois " ben je, j’essaye d’en parler tout de suite, de dire "oh bah je vois bien que vous
faites la tronche, oh bah je vois bien que je vous casse les pieds avec ça, pourquoi, comment
ça se fait". Pour lever tout de suite les barrières et que ça s’installe pas »
I : « Parc’que justement si je sens que la prescription elle est pas acceptée je la fais pas. »
Il s'agit aussi d'anticiper au sens prévoir l'organisation du soin afin qu'il soit mieux accepté.
C : « Quand j’ai une hospitalisation c’est quelque chose que j’essaie d’organiser un
minimum (…)
j’essaie toujours de shunter les urgences pour les personnes âgées, au
maximum. »
D : « y faut préparer le terrain. Et moi d’expérience en fait que j’ai eu des gens qui ont
commencé à avoir des troubles cognitifs graves, enfin qui s’aggravaient en fait très vite, plus
la décision d’institutionnalisation était faite au moment où les gens étaient capables de
prendre la décision et de ne pas la subir, mieux ça c’est fait et mieux l’institutionnalisation
s’est passée. »
6.2) Explorer l'ambivalence du patient
C : « Je considère que le patient s’il a demandé (...) à ce qu’on vienne le voir, même si lui il
grogne, il est pas content, bon bah c’est qu’il y a quelque chose qui ne va pas. »
K : « Alors si vraiment ils avaient dans l'idée de pas se soigner ils appelleraient personne. »
Ils renvoient le patient face à cette contradiction entre sa demande de consultation et le refus
de la proposition de soin.
L : « Alors moi j’veux bien que vous refusiez ça mais vous vous mettez en danger et dans ce
cas là, expliquez moi pourquoi vous êtes venu me demander mon avis. »
6.3) Fixer des objectifs de soin adaptés à chaque patient
Les objectifs du médecin doivent être en adéquation avec ceux de son patient dans la mesure
du possible.
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B : « Je pense qu’à partir du moment où, en tant que soignant, on a des objectifs qui sont, qui
collent avec le patient, et ben on ne se pose même plus la question du consentement, il est
naturel, il vient tout seul. »
Les médecins tentent d'adapter leur démarche de soin à la personnalité de leur patient. Il ne
peut y avoir de réponse préétablie à un refus, car tout se passe dans la subjectivité de la
relation médecin-malade.
D : « j’dirais que pour moi en tout cas le refus de soin il est géré différemment en fonction de
la personne que j’ai en face ».
L'effort d'adaptation est fait par le médecin et non l'inverse
C : « Et après en fonction des caractères et des personnalités qui sont en face de moi,
j’adapte ma façon de faire. »
Cela permet d'obtenir une décision partagée, élément clé pour obtenir une adhésion aux soins.
E : « Moi je vois plutôt le truc comme une décision commune basée, enfin c’est peut-être un
peu idéal ce que je dis, plutôt que de voir le médecin qui propose et le patient qui dispose ou
pas, c'est-à-dire qui rejette ou pas, j’aurais plutôt tendance à dire on est ensemble et on
évalue ensemble la balance bénéfice-risque pour le gars quoi. Pour décider ensemble. »
M : « on sera beaucoup plus efficace si on travaille en collaboration étroite avec le patient
que si on travaille seulement dans une optique dirigiste »
La décision devant rester centrée sur le patient.
I : « On a quand même une approche centrée sur leurs attentes. »
6.4) Expliquer ses propositions
Lorsqu'ils sont confrontés à un refus de soin, tous les médecins recommencent leur
travail d'explications, ils reformulent.
A : « j’essaye de, de m’astreindre à expliquer, à apporter une information »
Certains sont investis par cette mission de "pédagogue".
E : « enfin moi dans mon expérience, c’est la pédagogie par rapport à la médecine, en
repartant sur les bases avec le patient, la physiopath quoi, le cours de médecine (…) j’fais
des schémas, je dessine les organes (...) le refus se dissipe très souvent quand les gens ils ont
bien compris l’enjeu et surtout l’enjeu du soin rapporté à l’explication physiopathologique »
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Ils essaient de partager et vulgariser leurs connaissances.
K : « Ça je pense que c'est très important de…d’utiliser des mots qu'ils puissent comprendre
et pas des grands termes médicaux ou même nous on a de la peine à s’y retrouver. »
Pour ce travail d'explication, ils se sentent avantagés par le colloque singulier qui existe entre
le médecin traitant et son patient.
J : « on est médecin de famille donc y’a aussi donc dans l’argumentation ça pèse un peu,
même beaucoup »
6.5) Respecter le rythme de réflexion du patient
Le processus de soin s'inscrit dans la durée. Le rythme du patient ne suit pas toujours
celui du médecin, et tous les praticiens interrogés l'ont souligné.
Il faut laisser la possibilité au patient de mûrir sa réflexion.
A : « Donc il faut revenir quoi, à la charge, régulièrement et puis on est rarement dans
l’urgence donc on peut toujours prendre un p’tit peu de temps et jalonner. »
M : « on est là en train de se dire bon on est à une sorte de statu quo sur ce sujet là, on n’ a
pas d'accord commun, peut-être que ça va évoluer dans le temps. J’pense qu'il faut pas
fermer la porte »
Un refus de soin initial, ne signifie pas un refus ferme, définitif ou irrévocable.
C : « Et pour moi ça ne veut pas dire que ce sera forcément non à la fin »
Pour cela, la position de spécialiste en médecine générale leur paraît être un facteur facilitant,
car la relation s'inscrit également dans la longévité.
H : « En médecine générale c’est vrai qu’on a cet avantage là du temps. »
6.6) Rechercher un compromis
Presque tous les médecins ont employé le terme "négociation" ou "compromis" (A, B,
C, D, F, G, H, I, J, L, M, N). Cela leur parait être la meilleure méthode pour finalement
obtenir une alliance thérapeutique.
G : « Sinon il y a toujours des possibilités de négocier, tout est affaire de négociation. »
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M : « Donc le maître mot c’est le compromis si y'a pas une adhésion complète, entre rien et
l'adhésion complète et bah j’pense que le compromis c'est pas mal. »
Alors que la confrontation est contre-productive.
B : « Mais, le fait de s’opposer comme ça [mime le poing qui tape dans l’autre main] ça
change strictement rien quoi. »
Un médecin souligne la différence pour cela entre convaincre (amener quelqu'un, par des
raisons ou des preuves, à reconnaître quelque chose comme vrai ou nécessaire) et motiver
(créer chez quelqu'un les conditions qui le poussent à agir). Le patient doit être moteur de la
décision.
I : « C’est inutile de chercher à convaincre. Y faut motiver. [Rires] Convaincre c’est une
perte d’énergie terrible. »
6.7) Rôle du comportement du médecin
Les médecins ont conscience que leur attitude joue un rôle important dans la réponse à
apporter à un refus.
A : « il y a beaucoup de questions de personnalité, de culture, une question d’apprentissage
et puis une question de posture. »
Mais ils ne sont pas tous du même avis et ils s’interrogent quant à la meilleure conduite à
adopter pour vaincre les résistances du patient.
D : « Je sais pas trop comment les gérer en étant suffisamment inquiétante pour euh voilà, et
suffisamment enrobante pour pas non plus leur faire voilà, leur faire peur. Trouver un juste
milieu (…) Et des fois j’trouve qu’y a une histoire où on passe en fait à un rôle de père, enfin
de père d’autorité on va dire, j’dis père pour faire des raccourcis, mais parfois on passe
d’une autorité un p’tit peu violente à un maternage peut être un peu trop important »
Certains (les médecins A, C et D) pensent qu'être plus autoritaire peut aider chez certains
patients.
A : « Moi ça m’arrive d’être un p'tit peu directif en matière de réflexion. Parfois je peux être
capable de mettre les gens face à leur réalité de manière un peu brutale, sur certains aspects
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en tout cas (...) en tout cas mettre les gens devant des réalités soit qu’ils n’expriment pas soit
qu’ils n’ont pas forcément vues. »
C : « Il y en a où je vais être un p’tit peu, un p’tit peu, je vais un peu titiller (...) ça peut
arriver parce que je sais qu’avec cette personne ça va fonctionner comme ça. Il faut un peu
les électrocuter quoi. »
Cette attitude peut aussi se justifier quand le patient se met en danger.
D : « des patients qui avaient plus de comment dire, de jugement euh objectif en fait sur leur
santé, ça m’est déjà arrivé de ouais m’engueuler avec des patients pour leur imposer. (…)
quand t’as l’impression que la personne est vraiment en train de se mettre en danger…et quel
est ton rôle en fait à c’moment là, un p’tit peu de prendre le rôle autoritaire quoi »
Mais la plupart pensent qu'il faut rester flexible et conciliant.
M : « Moi j’pense qu'il faut être très souple, parce que quand c'est très rigide de toute façon
on arrive vite à des limites. »
Ils pensent que ceci reflète bien l'évolution de leur pratique et la position du médecin : ils
considèrent que l'abandon du modèle paternaliste est une bonne chose.
J : « Non j’pense que globalement les jeunes soignants, jeunes médecins…ils ont cessé d’être
dictateur quoi, c’est quand même un progrès. Prendre du temps pour argumenter,
l’introduction de l’éducation thérapeutique, enfin ce rapport au patient sachant c’est
important. »
G : « Si vous partez du principe moi j’suis le médecin j’ai raison, vous êtes le malade vous
avez tort, à ce moment là des patients qui acceptent on en a quasiment plus. »
6.8) Maîtriser des techniques de communication
I : « j’pense que ça passe beaucoup par des outils de, de communication pour dépasser le,
enfin pour gérer la situation. (…) le refus de soin qui s’arrête au non du patient c’est un
échec de la communication »
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Des médecins exposent leurs astuces, outils de communication :
-
la technique du "disque rayé"
H : « Un des trucs, un des outils par exemple ça s’appelle la technique du disque rayé (...)et
ben le disque rayé c’est on lui répète toujours la même chose et au bout d’un moment : on lui
dit oui c’est vrai j’comprends bien que vous avez pas envie d’aller à l’hôpital c’est vrai que,
mais aujourd’hui faut y aller. La personne dit nan, nan, nan j’suis pas d’accord, tout le
monde meurt à l’hôpital. Oui c’est vrai que mais aujourd’hui faut aller à l’hôpital. Et donc on
répète tout le temps comme ça la même phrase »
-
le questionnement réflexif
I : « le questionnement réflexif : "Vous me dites que vous ne souhaitez pas faire tel soin,
d’après vous comment est-ce qu’on pourrait faire autrement ?/ Oh bah j’sais pas. /Vous savez
ce que vous ne voulez pas mais j’aimerais qu’on regarde maintenant ce que vous vous voulez.
Qu’est-ce que vous pensez que je pourrais faire devant cette situation ? " »
Un manque de formation est parfois ressenti dans ce domaine.
D : « peut-être qu’y me faudrait des aides en terme de communication avec les patients.
Peut-être qu’aujourd’hui ce qui pointe c’est les formations par rapport aux entretiens
motivationnels (…) Aujourd’hui ça c’est quelque chose que je sais pas faire mais peut-être
que demain moi ce qui pourrait m’aider ce serait peut-être des formations sur l’adhésion du
patient et l’entretien motivationnel et la communication avec l’autre quoi. »
6.9) Faire appel à des personnes ressources extérieures
6 .9 .1) Les aidants professionnels
Devant une situation de refus de soin, les médecins n’éprouvent pas de difficulté à faire appel
à d'autres confrères.
B : « Ah bah oui oui oui, quand j’suis paumée j’suis paumée hein, je passe la main. »
Et en premiers recours il s'agit de confrères généralistes.
M : « Enfin en plus on peut les adresser un autre confrère ça peut être aussi un moyen
d'obtenir leur assentiment en disant "bah voilà aller voir quelqu'un d'autre, discutez-en avec
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cette personne là et puis voyez ce qui vous dit, si jamais il vous dit la même chose que moi ce
sera peut-être un argument supplémentaire pour pouvoir prendre les choses en charge telles
qu'on vous les propose".
J’pense que c’est d’ailleurs une ressource très intéressante. Par exemple nous on le fait parce
qu'on est deux au cabinet parce que des fois on n'a pas la même approche et on dit pas la
même chose. »
L'exercice en cabinet de groupe leur semble être un atout.
D : « Et j’trouve ça intéressant d’être du coup dans ces cas la d’être en équipe. »
E : « Dès que j’ai un problème c’est mon premier réflexe c’est d’en discuter avec le voisin. »
Il apparaît judicieux parfois de laisser le patient choisir le médecin pour un second avis, pour
écarter tout soupçon de connivence entre médecins.
M : « Alors soit on va adresser à un confrère mais là la personne va être adressée donc elle
va se dire ouais y m'envoie voir quelqu'un qui va avoir le même discours, soit on le laisse
libre de choisir hein. »
En second recours viennent les spécialistes d'autres disciplines, qui peuvent faire figure
d'autorité.
B : « le spécialiste ça aide bien. C'est-à-dire que lui s’occupe du physique, y fait le méchant
médecin. [Rires] C’est horrible hein. Pis moi après je leur tapote sur la main [fait le geste en
même temps] en leur disant ah y vous a dit qu’y avait rien ben c’est peut-être qu’y a rien en
même temps »
H : « Des fois les spécialistes aussi. Quand nous ça fait 10 fois qu’on dit quelque chose si un
jour c’est le gériatre qui le dit des fois ils l’entendent autrement oui. »
6.9.2) Les aidants non professionnels : l'entourage
Lorsque les patients âgés refusent un soin, les médecins font majoritairement appel à
la famille et notamment aux enfants.
I : « L’entourage, j’dirais que c’est des relais, c’est les personnes qui connaissent le mieux le
patient euh… et c’est les relais de la volonté du patient. »
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Ils ne négligent pas pour autant le conjoint.
A : « Et qui fonctionne en binôme quoi, donc il y a une unité fonctionnelle du couple qu’est
importante. (...) C’est un travail global sur les deux personnes et parfois le consentement
peut-être qu’il est pas obtenu de façon claire sur une personne mais, mais le couple accepte
les choses quoi. »
Le refus d'un patient âgé ne doit pas découler systématiquement sur le recours à un tiers. Les
médecins le font intervenir dans les cas suivants :
-
quand le soin refusé est jugé absolument nécessaire
N : « Quand j’pense que c'est important, quand j'ai des doutes sur la compréhension ouais
j'ai tendance à m'appuyer sur les familles »
-
lorsqu’il existe une altération des fonctions cognitives
I : « C'est-à-dire que là aujourd’hui il est pas capable de le dire mais s’il avait eu le choix
est-ce que vous pensez que ça il aurait plutôt accepté ou plutôt refusé »
-
lorsque la personne âgée est dépendante
C : « Je demande quand c’est des personnes âgées qui ont un problème de dépendance. »
Néanmoins ils soulèvent un certain nombre de limites à faire appel à l'entourage :
-
cela peut générer un sentiment d'infériorité pour la personne âgée
D : « j’fais toujours passer la personne âgée avec des troubles cognitifs avant la famille,
avant le choix de la famille (...) pour pas avoir à l’infantiliser »
-
la relation habituellement duelle devient triangulaire, et peut être alors plus
compliquée à gérer
F : « J’ai très peu de problèmes avec les personnes âgées lorsque l’on est en binôme. J’ai
plus de problème avec les familles. (...) Par contre, il y a des fois il y a des divergences
d’appréciation et des fois ça met très mal à l’aise, c’est… parce qu’on pense dans notre fort
intérieur que la décision qu’on aurait aimé prendre ou qu’on aurait aimé mettre en œuvre
était la bonne, et quand la famille a une vision différente de la chose, c’est vrai que c’est
assez inconfortable. »
-
est-ce vraiment le rôle du tiers ?
M : « passer à un intervenant familial qui est un non soignant ça pose un autre problème de
débat qui est est-ce que c'est son rôle de manipuler la personne pour qu'elle participe aux
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soins. Est-ce que c'est normal qu'on mette cette responsabilité, ce poids là, sur les épaules
d'un accompagnant qui est là plus pour accompagner, pour prendre une part de vie, plutôt
que d'amener du médicament ou du soin thérapeutique. »
-
le risque est d'éclipser la parole du patient et de donner plus de poids à celle de
l'entourage
N : « Alors c'est vrai que des fois je pense que je triche, je m'appuie sur les conjoints, les
enfants, quand ils sont pas seuls. Quand je pense que c'est important. /Et pourquoi vous dites
tricher ?/Euh… parce que je pense que du coup je les écoute moins (...) Et finalement je pense
que je triche parce que je ne respecte plus mon patient… et du coup c'est pas forcément
honnête. Et plus on, enfin quand on commence à faire ça on a tendance à le refaire. Et une
fois que l'interlocuteur n'est plus le patient, on a plus tendance à s'adresser aux enfants et
c’est des fois difficile de recentrer en disant oui mais non là il a pas envie on s'arrête »
Pour éviter cet écueil, les médecins sont attentifs à la formulation de leurs questions lorsqu'ils
s'adressent à l'entourage.
I : « c’est très important de poser les questions de la bonne manière. On va pas dire " bon
qu’est-ce qu’on fait ? ". Parc’que si on dit qu’est-ce qu’on fait, c’est à votre avis qu’est-ce
qu’on fait donc qu’est-ce qui vous plairait qu’on fasse. Donc c’est pas ça. C’est " là dans
cette situation, tel soin me semble important, j’me rends bien compte qu’il est pas en mesure
de donner son avis sur la situation, vous qui le connaissez bien vous pensez qu’il aurait dit
quoi ? " »
-
ne plus respecter le secret médical en partageant des informations avec la famille
C : « Mais du coup je fais le médiateur et la famille quand je lui explique que c’est important
elle soutient ma parole et du coup, voilà, mais c’est pas une coalition, c’est que je le préviens,
je dis au patient écoutez moi je vais la prévenir. »
-
les intérêts de l'entourage peuvent différer des intérêts du patient
E : « t’as un interlocuteur sur lequel t’as des doutes qui puisse vraiment servir les intérêts du
patient, c’est délicat quoi. »
F : « Alors quand les aidants sont véritablement aidants, il y a rarement de problème. Quand
les aidants sont plutôt des héritiers, il peut y avoir des problèmes. »
I : « Y’a un biais. Y’a un biais parc’que le proche projette aussi ce que lui souhaite, ses
propres attentes et ses propres réticences »
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Finalement il leur apparaît parfois délicat de trouver la personne adéquate.
N : « Parce que les enfants ils ont pas du tout les mêmes demandes. Des fois c'est dur de
trouver qui est l'interlocuteur. »
Les médecins jugent alors très important de pouvoir faire désigner une personne de confiance
par le patient, pour éviter toute ambiguïté.
E : « c’est qu’on invite les gens à nous, tant qu’ils en sont capables, à bien nous donner des
noms de leurs personnes ressources, de désigner leur personne de confiance »
7) La contribution des directives anticipées
7.1) Les connaissances théoriques des médecins
Cinq médecins (C, D, F, K, N) ne connaissaient pas l'existence des directives anticipées et
leur principe.
C : « C’est quoi ça les directives anticipées »
N : « Alors je sais pas, je suis nulle du point de vue légal, je sais pas précisément dans quel
cadre il faut le faire. »
Parmi les médecins qui avaient des connaissances précises quant à leurs objectifs et utilisation
il est à noter que l'un avait un DU de soins palliatifs et le second avait suivi un séminaire
dédié à l'étude de la loi Leonetti de 2005 et que tous deux ont souligné le caractère essentiel
de cette formation.
J : « De toute façon c’est écrit dans la loi Leonetti, y suffirait de la lire et de la comprendre,
et de la diffuser chez les soignants, ce qui n’est pas le cas. On a fait 2, 3 EPU autour de la loi
Leonetti, c’est affligeant quoi, je parle des professionnels de santé hein. Le niveau de
connaissance pour moi est très décevant. »
I : « j’ai envie de vous dire que c’était pour moi tellement nébuleux ces histoires là, avant
que je fasse un séminaire de formation 2 jours dessus »
Pour eux les directives anticipées ne sont pas nécessairement la traduction de refus de soin,
elles servent avant tout à exprimer des souhaits.
I : « oui c’est une façon de dire ce qu’on souhaite et où on en est vis à vis de ça quoi. Est-ce
qu’on est un peu choqué par l’acharnement thérapeutique et on le veut pas pour soi ou est-ce
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qu’au contraire on veut que tout soit fait jusqu’au bout, jusque vraiment il n’y ait plus rien à
faire quoi.(...) On s’fait souvent la représentation des directives anticipées comme une
limitation des soins mais non non c’est pas du tout ça. C’est une forme d’expression, un
moyen d’expression. »
7.2) Les conditions de recours aux directives anticipées
La demande de rédaction de directives anticipées émane très rarement des patients euxmêmes.
K : « Alors les personnes qui rédigent leurs souhaits non j'en ai jamais eu. »
L : « Ah non jamais. Jamais un patient est venu me voir en me disant je voudrais rédiger mes
directives anticipées. Bah je pense que dans la génération des 80 ans et des poussières et audelà c'est sûrement par manque d’information. »
Les médecins quant à eux n'abordent pas ce sujet avec tous leurs patients mais seulement avec
ceux atteints de pathologies chroniques ou souffrant de maladie engageant le pronostic vital.
H : « Les patients qui ont des pathologies lourdes, chroniques, pas forcément mortelles dans
l’immédiat mais on sait que un jour ou l’autre ça va se présenter, par exemple l’insuffisance
respiratoire dans les maladies neurologiques dégénératives. Et c’est vrai que c’est des
situations on pourrait se dire on pourrait anticiper »
J : « Globalement c’est surtout dans les pathologies chroniques et en cancéro notamment
chez des patients qui sont en 3ème-4ème rideau de chimiothérapie »
Ou bien lors d'institutionnalisation.
M : « Bah y signent des directives anticipées en entrant dans l’EHPAD où je travaille par
exemple, c'est proposé de façon systématique. »
La moitié des médecins interrogés (B, E, H, I, J, L, M) partagent le sentiment que les
directives anticipées sont utiles.
E : « Ah moi les directives anticipées j’trouve ça hyper important. »
H : « Moi j’pense que c’est très important que les gens aient eu ce genre de réflexion avant
avec leur médecin »
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Malgré cela ils concèdent les proposer très peu, voire jamais.
M : « Bah les directives anticipées c'est un outil…mais… j’trouve qu'on a du mal à l’utiliser.
Bah en tout cas c'est pas très répandu dans les cabinets il me semble, en tout cas pas ici.
Bah je l'ai encore jamais proposé en toute honnêteté »
7.3) Les freins évoqués par les médecins
• Le reflet d'un manque d'information à l'échelle nationale
Pour les médecins le niveau d'utilisation encore faible des directives anticipées ne relève pas
de la seule responsabilité des médecins, il est également le reflet d'un défaut d'information
plus global.
A : « Mais culturellement c’est pas encore bien établi cette affaire. C’est pas un truc
naturel. »
I : « cette loi j’ai pas souvenir qu’y ait eu vraiment, des campagnes d’information auprès des
patients pour dire voilà la loi change et à partir d’aujourd’hui vous avez possibilité de vous
exprimer sur ce qu’on fait de votre corps quand vous êtes plus en mesure de dire ce que vous
voulez qu’on en fasse quoi. (…) Alors bon, est-ce que c’est vraiment notre rôle d’informer les
patients sur ce dispositif ? Ben…quand ça se présente je le fais, mais…mais là on est quand
même plus sur quelque chose de sociétal »
• La difficulté à parler de la fin de vie
Une difficulté qui peut être ressenti par le médecin, attaché à son patient après plusieurs
années de suivi.
B : « Ah c’est vachement dur. Bah oui. On a envie qu’ils aillent bien nos patients. On a envie
qu’ils meurent jamais, enfin moi en tous cas j’ai envie qu’y meurent jamais, et qu’y soient
jamais malades. Enfin c’est terrible je devrais pas dire ça, mais c’est vrai. On n’a pas envie
qu'ils leur arrivent des choses. Donc c’est dur aussi d’en parler. »
D : « j’pense que le jour où elle m’a posé la question en gros de la fin de sa vie j’ai été
incapable de lui répondre et pour moi ça a été très violent. (…) j’pense qu’y a aussi un
problème à entendre la fin de vie quoi, à gérer enfin l’approche de la fin de vie aussi en tant
que médecin. Et moi je vois c’est vrai que mes patients âgés j’ai du mal à me confronter à
leur maladie et à leur fin quoi. »
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Les situations de consultations ne sont pas toujours propices pour instaurer ce dialogue.
B : « Mais c’est difficile parce que quand les gens viennent pour un rhume, ou un genou qui
gratte, ou une oreille qui pique, c’est difficile de dire et alors quand vous mourrez ça se
passera comment, enfin voilà de basculer sur ces sujets là ça se fait pas comme ça quoi »
Mais aussi pour les patients qui ne sont souvent pas prêts à aborder ce sujet. Il leur est
difficile de se projeter dans la situation de fin de vie.
H : « Les gens tant qu’ils vont bien, tant qu’ils sont pas confrontés à l’imminence de la mort,
c’est quand même rare ceux qui sont prêts à réfléchir là-dessus. Franchement c’est pas
simple. Les gens ont pas envie de parler de leur mort. »
L : « Et moi quand je branche les gens là-dessus, j'ai l'impression qu'ils reculent, comme si
parler des directives anticipées c'était déjà ouvrir le cercueil quoi. »
Un médecin mettait en exergue sa propre expérience
I : « (…) enfin moi dans le cadre d’un séminaire sur la loi Leonetti j’ai dû rédiger mes
directives anticipées. (…) Au moment où je faisais mes directives anticipées, même si j’ai bien
conscience de ma mortalité, j’étais pas du tout dans le projet de mourir [rires] à brève
échéance. Donc c’est une première difficulté à la rédaction de ces directives. »
• Deux médecins (D et F) mettaient en avant le colloque singulier entre le médecin
généraliste et son patient : ils connaissent de ce fait les volontés de leur patient et ne
perçoivent pas la nécessité de les rédiger de façon formelle.
D : « En tout cas dans le rapport que j’ai avec mes patients… Je crois que maintenant, c'està-dire dans le rapport de confiance qui s’est créé je crois que…on n’est pas au point de
formaliser les choses. »
• La lourdeur administrative
F : « Ça veut pas dire que dans l’esprit de la loi Leonetti ou autre il n’y ait pas des choses qui
sont bien mais pffoou…c’est, c’est, c’est lourd quoi. (…) J’ai l’impression qu’on vit dans une
époque où les administratifs au sens large du terme voudraient pouvoir tout contrôler les
aspects de la médecine. C’est voué à l’échec quoi, j’veux dire c’est voué à l’échec parce que
justement la médecine c’est autre chose que l’application de simples protocoles, le
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remplissage de formulaire, c’est autre chose que ça. Voilà. On est dans une relation qui est,
qui implique une certaine philosophie et la philosophie je suis pas sûr que ça se mette… »
7.4) Les limites des directives anticipées
La principale limite à l'application de ces directives est liée selon eux au caractère
potentiellement réversible de la décision du patient.
K : « Quand la personne n'est pas en épisode aigu elle a une certaine forme de pensée, quand
elle est en épisode aigu elle a une autre forme de pensée. Quand il n'y a pas l’angoisse, quand
on réfléchit aux choses et qu'il n'y a pas l'angoisse de la mort on peut prendre des décisions et
puis quand on est véritablement dans le… dans le cas avec l'angoisse, avec la douleur, avec
la fatigue et avec etcétéra, on réfléchit plus du tout de la même façon. »
Trois médecins (B, H et M) pointent d'autre part le problème du partage de cette information.
Les directives anticipées sont souvent utiles en situation d'urgence et lors de prises en charge
hospitalières, et dans ce cas le médecin généraliste dépositaire des volontés de la personne
n'est pas toujours contacté.
H : « la personne qu'elle a informé c’est son médecin et moi j’sais très bien que l’hôpital
m’appellera pas pour me demander s’ils la réaniment ou pas (…) y’a peu de lien entre
l’hôpital et la ville sur ce type de situation (…) ils demandent éventuellement à la famille.
Mais pour les personnes où la famille n’est pas joignable ou qui n’ont pas de famille, des fois
on est les seuls dépositaires de cette volonté et y’a pas de lien quoi, l’outil n’existe pas. »
8) Conséquences du refus sur le médecin et sur la relation médecin-patient
8.1) Vécu personnel du médecin
• Pas d'atteinte narcissique
A l'exception de deux médecins (jeunes) pour qui être confronté au refus d'un patient est vécu
parfois difficilement.
D : « Ouais ça a des répercussions… parc’que ça me remet en question ».
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N : « C'est dur (...) Mais souvent émotionnellement c’est compliqué. (...) Mais c'est vrai qu’ça
peut poser de vrai problème. C'est pas facile à vivre »
Tous les médecins s'accordent à dire que sur le plan personnel ils ne vivent pas le refus
comme une attaque. Ils font la distinction entre le professionnel de santé et l'Homme. Le refus
n'est pas source d'angoisse non plus.
F : « dans l’absolu ça a pas d’incidence sur moi (…). C’est pas sur moi, je m’en fiche de ça
(...) mon égo est pas au premier plan »
E : « Après j’ai pas le souvenir d’un truc vraiment où j’en souffrais vraiment »
Certains expriment même une certaine indifférence.
B : « Et quand le patient dit non (...) qu’est-ce que ça te fait ? Oh je m’en fous
complètement »
A : « Ça, ça m’empêche pas de dormir »
D'autres simplement une contrariété passagère.
H : « oh y’a des fois j’suis comme tout le monde ça énerve ça agace mais c’est assez
passager »
Ils reconnaissent néanmoins que cette absence de blessure narcissique est la conséquence
d'une prise de distance au fur et à mesure des années de pratique.
C : « C’est différent maintenant de quand j’étais remplaçante, parce que maintenant j’ai fait
beaucoup de chemin (...) Avant ça avait un impact énorme, je me disais t’es incompétente. Je
me remettais en permanence en cause, et ça m’effondrait, j’avais juste envie de me cacher.
J’étais vraiment pas bien, vraiment. Et je pouvais avoir des réactions de défense, d’être sur la
défensive, d’être vexée quoi quasiment. »
Cette difficulté parfois ressentie en début d'exercice serait le reflet d'un manque de formation
en sciences humaines.
N : « on n'est pas assez formé à laisser la possibilité de dire non sans que ce soit pris pour
une offense personnelle (…) Culturellement, avoir des cours de philo et d'éthique ce serait
bien.»
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• Un défi personnel
Des médecins (C, H et I) ont exprimé le fait que le refus pouvait être une source de
stimulation.
C : « C’est un peu un défi. C'est-à-dire qu’il dit non, et pour moi derrière il y beaucoup de
choses que je comprends, que j’entends en fonction de la personne, si je la connais plus ou
moins bien. »
H : « Et pis c’est un challenge aussi pour nous quand même, un patient qui dit non ça nous
oblige à aller chercher un peu plus. C’est intéressant quoi. »
Ils déclarent même un certain côté ludique (médecins B, E, H).
B : « je me dis ah chouette [tape et frotte dans ses mains] je vais pouvoir aller grattouiller,
voir pourquoi est-ce qu’il me dit non »
E : « Non, non moi j’aime bien en fait quoi, j’crois que j’aime bien ces situations où ça racle
un peu, j’suis peut-être un peu maso. [Rires] J’aime bien que les gens m’exigent des
explications. »
8.2) Le refus du patient a-t-il des conséquences sur la relation médecin-malade ?
• Il n'entraîne généralement pas de rupture de la relation
K : « En tout cas je me désintéresse pas du patient en disant bon bah il veut pas se soigner
donc je laisse tomber. »
M : « mais c'est pas ça qui va forcément faire en sorte que je ne vois plus ce patient là ou que
ce patient ne vienne plus me voir ( ...) pas forcément un critère qui va faire en sorte que la
relation va se déliter
C'est pas quelque chose qui va nécessairement nuire au très long terme, en tout cas sur la
relation hein. On peut très bien avoir une relation avec un patient qui adhère pas au
traitement, heureusement d'ailleurs parce qu’y en a quand même beaucoup. J'en ai jamais
mis à la porte. »
Il n'y a pas de jugement de valeur d'un patient parce qu'il dit non.
G : « Jusqu’à présent moi j’ai des patients, des malades mais j’ai pas des bons ou mauvais. »
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• Des répercussions positives
Le refus d'un patient est finalement analysé et perçu de façon favorable pour plus de la moitié
des médecins. (A, B, C, E, H, I, M, N).
M : « Ah bah forcément ça l’impacte, mais pas forcément négativement hein »
D'une part parce qu'un patient qui dit non est un patient acteur de ses soins.
H : « C’est bien qu’ils exercent leur liberté à dire oui ou à dire non. Et j’préfère vraiment un
patient qui va me dire non frontalement que celui qui dit oui oui oui et pis qui part et en fait
derrière on s’rend compte 6 mois après qu’il a rien fait de ce qui était prévu. (…) Ça veut
dire qu’il a son avis, qu’il l’exprime et qu’on est vraiment dans un échange et c’est ça la base
de la médecine : échanger autour de la santé du patient. »
D'autre part ils interprètent la liberté de parole de leur patient comme un signe de confiance,
un signe de bonne santé de la relation.
A : « c’est que ça permet aux gens de s’exprimer librement, de dire j’ai fait, j’ai pas fait, ça
ça me plaît, ça ça me plaît pas, plutôt que d’avoir peur de contrarier le médecin. Là pour le
coup c’est assez ouvert »
N : « je pense que des gens qui me disent non, c'est pas évident pour eux de dire non, de
savoir s'ils vont être entendu donc je pense que quand on a réussi à avoir cette confiance
euh… ça peut mettre en confiance pour d'autres choses. »
Cela peut être constructif, et contribuer à renforcer, enrichir la relation.
C : « Parce que je sais qu’il y a toujours possibilité de discuter et que voilà c’est ça qui est
super avec l’humain finalement c’est quand on est quand même dans l’échange et c’est
l’échange qui va apporter et qui va enrichir »
H : « Les gens qui disent non c’est une bonne base de travail. »
I : « Enfin j’crois qu’le patient qui exprime son refus c’est un trésor quoi. On va pouvoir
travailler, le faire avancer là-dessus et puis lui faire exprimer les vraies raisons de son refus.
Et ça c’est génial. »
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• Des répercussions négatives
En cas de refus systématiques ou répétés quelques médecins pensent que la relation peut être
mise en danger.
H : « Après par contre sur des refus systématiques on peut se sentir démuni au point de dire
à un moment donné je sais pas à quoi je vous sers, je sais pas où on va , j’me demande si vous
devriez pas voir un autre confrère. Ça ça pourrait se poser oui. »
Deux médecins déclarent avoir mis un terme à la relation avec un patient et cessé d’être leur
médecin traitant.
D : « un patient (...) qui refusait les soins et qui était un peu en guerre contre tout le monde.
Donc là j’ai obtenu qu’y parte et après j’ai refusé de continuer à le suivre. (...) C’est
quelqu’un qui remettait toujours en question mes prescriptions. (...)Et après y’a des gens qui
sont continuellement dans une mise en échec de ce que je propose, et alors là à ce moment là
je deviens plus très sympa. »
L : « Si j’prends un exemple récent oui j’l'ai foutu dehors. Silence. Mais on était… ça faisait
deux ans que j’me battais avec ce type diabétique, hypertendu, enfin le diabète multicompliqué, qui refusait ci, qui refusait çà. / Et cette situation vous est arrivée souvent ?/
Silence. En 35 ans…bof aller on va dire 10 fois. »
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V DISCUSSION
A. Les forces, limites et biais de l'étude
1) Les points forts
Le thème du refus de soin est souvent d'actualité, source de nombreux questionnements
pour le monde médical. Sur ce sujet nous n'avons pas retrouvé d'étude qualitative s’intéressant
aux comportements et ressentis des médecins généralistes.
Nous avons reçu un bon accueil des médecins interrogés, tous volontaires puisqu'ils ont
répondu spontanément à la demande envoyée par mail via l'URPS, et qui ont bien pris part à
la discussion.
2) Les limites et biais
2.1) Concernant le recrutement de la population
Même si nous avons choisi les médecins afin d'obtenir un échantillon raisonné, notre
étude s'appuie sur un petit nombre de médecins exerçant en Rhône-Alpes et n'est donc pas
représentative de la population médicale générale.
Nous pensons avoir atteint la saturation des données mais un échantillon plus large aurait
été préférable pour conclure à une transférabilité des résultats.
2.2) Concernant la réalisation des entretiens
Ils ont tous été réalisés au cabinet des médecins généralistes (à l’exception d’un entretien)
et des perturbations externes (interruption par le téléphone, la secrétaire, une urgence) ont pu
troubler leur déroulement.
Les entretiens ont été conduits par un enquêteur non professionnel, ce qui a pu aboutir à une
perte d'information.
Cette méthode requiert un certain climat de confiance pour que le médecin interrogé réponde
librement et sans crainte de jugement. Ainsi il peut être difficile pour l'enquêté de se confier à
une inconnue et ceci peut peut-être mener à une certaine autocensure. Par ailleurs, il était
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difficile en tant que médecin remplaçante de veiller à adopter en permanence une position
neutre pour ne pas influencer le discours des participants.
Enfin, chaque entretien était unique, les idées exprimées sont donc celles de l'instant, et
peuvent avoir évoluées secondairement.
2.3) Concernant l'analyse des données
Un seul enquêteur a analysé les entretiens, avec des interprétations personnelles. Il existe
donc une subjectivité à l'analyse des résultats. Cette absence de triangulation, c'est-à-dire
l'encodage des données par deux chercheurs indépendants, constitue un biais d'interprétation.
Par ailleurs les résultats n'ont pu être comparés à d'autres études qualitatives.
B. Analyse étiologique et sémiologique du refus
Tous les médecins interrogés ne se contentent pas d'un non et cherchent une raison
pouvant motiver ce refus, quel que soit l'âge.
La première des causes de refus est selon eux un manque ou une mauvaise
compréhension de l'information délivrée. Cela signifie que le patient a besoin de plus
d'informations ou que celles fournies manque de clarté. Les médecins estiment que dans ce
cas ce manquement relève de leur responsabilité. Ils soulignent néanmoins que la tendance de
plus en plus marquée des patients à aller chercher l'information sur d'autre sources
(notamment internet) ne leur facilite pas la tâche.
Une autre cause est en lien avec les représentations que le patient peut avoir de la
pathologie nécessitant des soins ou bien du soin en lui-même. La perception qu'à la personne
du soin va moduler son observance. Des représentations négatives ou fausses peuvent
entraîner un refus. Les médecins doivent donc s'informer sur ce que leur patient sait, croit ou
craint.
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Certains médecins sont également attentifs à repérer à quel stade d'acceptation de la
maladie et donc du soin se trouve le patient. Ils transposent en fait trois théories dans leur
analyse du refus d'un patient.
D'une part la stratégie du « coping » de Lazarus et Folkman (24). Le coping, que l'on
peut traduire en français par « ajustement », représente pour ces deux auteurs l'ensemble des
moyens qu'un individu mobilise pour faire face à un stress. Il s'agit d'un processus
dynamique : la phase primaire concerne la perception qu'a l'individu de la situation et il s'agit
souvent d'un sentiment de perte, de menace ou de déni ; au cours de la phase secondaire il met
en œuvre ses ressources pour gérer la situation. On peut dès lors considérer que le soin
pouvant représenter un stress, cette stratégie de gestion s'applique dans cette situation et
proposer un soin à un patient qui se trouve en phase primaire expose à un risque plus
important de refus.
D'autre part le « modèle transthéorique du changement » de Prochaska et DiClemente
(25). Utilisé pour l'aide au sevrage en cas de comportement addictif, le cycle de Prochaska
décrit cinq étapes au changement du comportement : la pré-intention, l'intention, la
préparation, l'action et le maintien. Il sert à évaluer la motivation du patient. Le temps
nécessaire pour passer d'une étape à une autre varie pour chaque personne.
On peut transposer ce modèle pour tout soin : un patient qui se trouve au stade de la préintention c'est-à-dire qu'il ne compte pas changer son comportement est à risque de refus, il
faut alors lui laisser du temps et lui reproposer plus tard.
Et enfin bien sûr les cinq phases, décrites par le Dr Kübler-Ross, par lesquelles passe
une personne en réaction à l’annonce d’une mort prochaine à savoir : le choc- l’incrédulité, la
colère, la négociation, la dépression et l’acceptation (26).
Les médecins recherchent et identifient des causes de refus plus spécifiques au sujet
âgé.
Lorsqu’ on les compare à celles décrites dans la littérature on constate que leur analyse est
pertinente. Les études ne recensent pas spécifiquement les étiologies du refus mais celles de la
non-adhésion thérapeutique chez le patient âgé, on peut néanmoins les transposer (27,28).
Les facteurs prédictifs de mauvaise observance ou obstacles à l'adhésion les plus fréquents
chez les personnes âgées, répertoriés par les auteurs sont :
-
des problèmes psychologiques avec en particulier la dépression, l'anxiété
-
des déficiences cognitives
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-
des lacunes du patient quant à la connaissance de sa pathologie, les représentations
négatives de la maladie
-
les effets secondaires, la complexité du traitement
-
le manque de confiance du patient dans les bénéfices du traitement, du soin
-
la faiblesse de la relation médecin-patient
Les troubles cognitifs représentent un facteur de refus évident pour tous les médecins
car source d'incompréhension de la proposition de soin bien sûr, mais aussi parce qu'ils
peuvent s'accompagner d'une attitude agressive et résistante.
Ils s'interrogent sur la valeur à donner au consentement d'une personne démente. La difficulté
réside pour eux dans l'évaluation des capacités décisionnelles. Les études suggèrent que les
capacités d'autonomie décisionnelle sont souvent sous-estimées et que les professionnels de
santé ont parfois tendance à se substituer à la parole du sujet âgé.
Dans notre travail si certains médecins reconnaissent cet écueil, d'autres au contraire
expliquent prendre le temps d'apporter l'information même s'ils savent qu'elle ne sera sans
doute pas reçue du fait des déficiences, et ils recherchent systématiquement un consentement.
Cette attitude est-elle le reflet de valeur humaine ou bien répond-t-elle à une obligation
médico-légale ? Notre étude n'apporte pas la réponse mais il serait intéressant de questionner
les médecins sur ces déterminants.
Il n'existe pas d'outils consensuels internationaux pour évaluer les capacités à
consentir.
Le M.M.S.E. par exemple évalue les facultés cognitives mais est peu discriminant
pour apprécier les aptitudes décisionnelles, en effet un trouble mnésique n'est pas synonyme
d'incompétence à décider.
Les travaux de Grisso et Appelbaum proposent des critères et des questions à poser par
les praticiens pour les aider dans cette évaluation, il s'agit en quelque sorte d'un entretien
semi-dirigé (29).
Le patient est évalué sur quatre critères :
-
la possibilité de communiquer un choix
-
la compréhension des informations délivrées
-
apprécier les conséquences médicales du consentement
-
raisonner quant aux différentes options de traitement, soin, possibles.
Le guide des questions figure en annexe dans sa version originale (annexe 3).
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Ceci est intéressant mais peut paraître chronophage.
Un outil plus concis est validé et utilisé aux USA, il s'agit de l'UBACC (the University
of California Brief Assessment of Capacity to Consent) (30). Le questionnaire a été conçu
pour évaluer le consentement à la participation à la recherche clinique de sujets âgés ayant
spécifiquement des troubles cognitifs (annexe 4). Les 10 questions sont rapides, chaque
réponse est cotée de 0 à 2 (0= réponse clairement inappropriée, 1= éléments de réponse
partiellement inappropriés, 2= réponse totalement appropriée). Un score de 0 ou 1 à au moins
une question doit alerter le soignant. Il est en cours d'évaluation et validation en Europe.
Même si ce modèle ne peut être transposé il nous semble à tout type de soin, car accepter de
participer à une étude c’est à dire à des soins pour autrui ne signifie pas la même chose que
des soins ayant une finalité personnelle, certaines idées pourraient néanmoins servir de base
pour créer un nouvel outil.
Ces questionnaires nous apparaissent comme une aide potentielle. En France où le
nombre de personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer est estimé à plus de 800 000, la juste
évaluation de leurs capacités de décision est primordiale afin de ne pas les sous-estimer et de
les respecter car comme le démontre une récente étude française même s'il existe une
altération des capacités de discernement dès le stade léger de la maladie d'Alzheimer, les
patients demeurent capables d'exprimer un choix et de le maintenir dans le temps (31, 32).
Dans notre travail, les médecins jugent le caractère de certains patients âgés plus
opposant : cette tendance à “l'oppositionnisme” du fait de l'âge prédisposerait au refus. Les
personnes âgées sont souvent décrites comme plus rigides, autoritaires ou obsessionnelles
mais n'est-ce pas un stéréotype sur la vieillesse ? Y-a-t-il une personnalité sénile
caractérielle ? Pour répondre à cette question il faut souligner que le groupe « personne âgée »
est un ensemble hétérogène et qu'il n'y a donc pas un modèle de vieillissement de la
personnalité. A l'inverse la personne peut devenir plus douce ou passive.
Lorsque le médecin estime que le refus est en lien avec un caractère agressif, il doit
s'interroger pour savoir s'il s'agit de l'accentuation de traits de personnalité antérieurs,
spontanée ou en réaction à des difficultés, ou bien si ce changement est nouveau et peut-être
révélateur de trouble de l'humeur et notamment d'une pathologie dépressive, ou bien d’une
pathologie sous-jacente aiguë non diagnostiquée (un globe vésical par exemple) (33).
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La dépression est justement identifiée par les médecins comme motif possible de
refus. L'opposition au soin peut être un signe d'appel, et plus particulièrement de la dépression
hostile du sujet âgé. La pathologie dépressive est fréquente chez les personnes âgées, estimée
à un taux de 5 à 10% en soins primaires et jusqu'à 35% en institution (34). Mais elle reste
sous-diagnostiquée car on attribue souvent les symptômes à des plaintes usuelles de la
vieillesse, comme en témoigne certaines réponses des médecins : l'agressivité est liée à la
personnalité caractérielle, la fatigue et la lassitude vont de pair avec l'âge, la tristesse résulte
de la solitude, les plaintes somatiques se multiplient car le corps est "usé".
A l'extrême, le refus de soin peut révéler un syndrome de glissement, que les praticiens de
notre travail considèrent comme un équivalent suicidaire.
Le questionnement du médecin sur la cause du refus est donc essentiel puisqu'il peut
permettre de diagnostiquer et traiter l'épisode dépressif du sujet âgé et ainsi diminuer le risque
suicidaire. Le taux de suicide étant élevé dans cette catégorie d'âge : 28% des suicides
concernent les plus de 65 ans, l'incidence du suicide pour 100000 habitants est de 29,6 pour
les 75-84 ans et de 40,3 pour les 85-94 ans (35).
Enfin les médecins pensent que des contraintes extérieures peuvent conduire les
individus âgés à refuser :
-
des contraintes familiales (la nécessité de s'occuper d'un conjoint dépendant)
-
des contraintes géographiques (difficultés d'accès au soin en zone rurale)
Il faut donc penser à resituer la personne dans son environnement.
C. Les moyens mobilisés pour répondre au refus
Les médecins considèrent que leur rôle est d'accompagner le patient dans sa réflexion.
Leurs réponses convergent toutes dans le même sens : le meilleur moyen pour tenter d'obtenir
une adhésion est d'être à l'écoute des résistances.
On ne perçoit aucun jugement ni aucune critique du patient, par contre ils n'hésitent pas à se
remettre personnellement en question : ils réexpliquent, ils reformulent, ils changent d'avis
parfois. Ils appliquent en fait le « jugement réflexif a posteriori » en réfléchissant à la manière
dont ils ont proposé initialement le soin (36).
65 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
Ils sont tous animés par le même principe : une approche centrée sur le patient. En proposant
et en aménageant le soin pour qu'il soit au plus près des attentes de la personne, ils
parviennent souvent à obtenir si ce n'est une adhésion totale, un compromis qui n'est pas un
aveu d'impuissance. Il s’agit de trouver le juste milieu entre le projet de vie de la personne et
le projet du soignant.
La communication est un élément essentiel. Même s'ils ne le nomment pas
explicitement, la plupart appliquent les principes de l'entretien motivationnel. En explorant et
en renvoyant le patient à son ambivalence, en étant dans l'empathie, en explorant les
résistances c'est-à-dire les causes du refus et en respectant son autonomie, ils essaient de
modifier le comportement pour obtenir une alliance thérapeutique (37).
Lorsque le dialogue au sein de la relation duelle entre le patient et le médecin n’est pas
suffisant, les médecins n'hésitent pas à faire appel à des aides extérieures.
Ils n'ont aucune difficulté à adresser la personne à des confrères qu'ils soient
généralistes ou spécialistes pour qu'elle obtienne un éclairage différent. Cette collaboration est
importante : « Chaque professionnel détient des informations pertinentes et synergiques à la
compréhension du patient dans son contexte » (38).
Et puis lorsqu'il s'agit d'un patient âgé, ils font principalement appel à l'entourage
familial, notamment en cas de déficiences cognitives entravant les capacités décisionnelles.
Ils sollicitent les “protecteurs naturels ” du patient, qui sont censés le connaître le mieux.
Même si le fait de demander l'avis de la famille relève toujours d'une attitude bienveillante,
les médecins sont conscients qu'il existe des limites : les attentes de la parenté peuvent
différer et surtout le risque est d'infantiliser la personne âgée.
Ils sont donc attentifs lorsqu'ils prennent l'avis des familles à la formulation de leur discours
pour rappeler qu'il ne s'agit pas d'agir "à la place de", mais "dans l'intérêt de".
Mais malgré tout parfois ce n'est pas évident de trouver le meilleur interlocuteur.
Une des solutions pourrait être, comme préconisé par le Comité Consultatif Bioéthique belge
dans un avis spécifique aux « Règles éthiques face aux personnes atteintes de démence », de
faire rédiger par la personne des directives anticipées à caractère social et pour des soins
médicaux ordinaires, distinctes de celles concernant la fin de vie, dans lesquelles elle
désignerait sa personne de confiance et ses souhaits en terme de soins courants, avant
l'apparition des incapacités (39).
66 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
Ceci renvoie à l'intérêt d'anticiper pour d'une part peut-être éviter les situations de
refus et d'autre part les gérer au mieux quand elles se présentent.
Les directives anticipées existent en France depuis 2005 mais cinq des médecins de
notre étude ne le connaissaient pas (21).
Ce constat sévère est également reconnu par le CCNE dans son avis rédigé en octobre 2014
après deux années de débat public impliquant des citoyens et des professionnels de santé (40).
Pour les médecins qui en connaissent l'existence, le principe leur semble utile mais ils
reconnaissent les utiliser très peu. Ils déclarent également que la demande n'émane
qu'exceptionnellement des patients. Ceci concorde avec l'enquête de l'INED de 2012 : parmi
les personnes se trouvant en fin de vie, seules 2 ,5% d'entre elles avaient rédigé des directives
anticipées et pour 72% des médecins leur existence est utile à la prise de décision médicale
dans ce contexte (41). Une autre étude réalisée par le centre d’éthique de Cochin abonde
également dans ce sens : sur 186 personnes âgées de plus de 75 ans, 90 % n’avaient jamais
entendu parler des directives anticipées et les personnes informées avaient le même profil à
savoir un tempérament autonomiste et fort (42).
Si les professionnels de santé le maîtrisent peu, on ne peut s'étonner que le grand
public et donc les patients ne se soient pas appropriés cet outil.
Comment peut-on expliquer cette sous-utilisation ?
Les médecins ont fait part de la difficulté à aborder le sujet de fin de vie et des
conditions de la mort avec leur patient. La proximité qui existe très souvent entre une
personne et son médecin traitant, son médecin de famille, n'apparaît donc pas nécessairement
comme un facteur facilitant dans cette situation : certains ont exprimé leur malaise à se
confronter à la fin de vie de patients âgés du fait de l'attachement et sans doute de certaines
projections personnelles. Et même si cette relation singulière peut aider, il n'est pas toujours
aisé de trouver le bon moment, que la personne soit en bonne santé ou atteinte d'une
pathologie à mauvais pronostic.
La formation médicale est essentiellement biotechnique, cette question éthique de la
fin de vie est peu abordée et cette négligence n'est peut-être donc pas entièrement volontaire.
Le CCNE recommande la mise en place obligatoire d'un séminaire dédié lors du 3ème cycle
des études médicales, quel que soit le D.E.S. (43). Mais comme le soulignent les enquêtés,
dans ce débat sociétal, cette sous-utilisation ne relève pas de la seule responsabilité des
soignants et une campagne d'information nationale devrait être organisée par les pouvoirs
publics.
67 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
Les médecins ont soulevé un certain nombre de limites parmi lesquelles la réversibilité de
la décision du patient et l'accessibilité des directives anticipées. Les modifications (détaillées
dans la partie généralités de notre travail) qui seront prochainement apportées à la loi
devraient permettre de lever ces freins.
D. La réponse finale des médecins au refus : le respect
Après avoir analysé les raisons possibles du refus, tenté d'accompagner le patient dans
sa décision, si celui-ci persiste, les médecins le respectent.
Une majorité des médecins de l'échantillon n'a pas le sentiment que les patients âgés
refusent davantage par rapport aux autres classes d'âge. Rappelons que nous n'avons pas
choisi de nous intéresser plus particulièrement au refus chez le sujet âgé pour des raisons
d'incidence ou de prévalence, mais pour les questions éthiques et morales que peuvent
susciter les soins de cette population.
Nous n'avons pas retrouvé d'étude de qualité sur la prévalence du refus de soin exprimé par
les patients et plus particulièrement lorsqu'ils sont âgés, en médecine ambulatoire.
Il existe des études sur la non-adhésion thérapeutique principalement aux traitements
médicamenteux (qui est une forme de refus de soin) chez la personne âgée atteinte de
pathologies chroniques et sévères : sa fréquence oscille entre 40 et 60% (44).
Ces médecins qui perçoivent des refus moins fréquents chez leurs patients âgés ont
notamment mis en avant une meilleure compliance, une confiance accordée plus facilement
ou une certaine « déférence » du fait de l'âge. La compliance suggère que le patient suit
passivement les prescriptions du médecin et témoigne donc plutôt d'un mode de relation
paternaliste. Il est sans doute vrai que les personnes âgées peuvent avoir été habituées à ce
modèle paternaliste et continuent à fonctionner ainsi. Il y a là une contradiction entre des
médecins plutôt favorables à l'abandon progressif de ce modèle et finalement la
reconnaissance que la confiance a priori du patient limite les situations de refus.
68 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
Pour tous, le respect du choix du patient même âgé est fondamental. Ceci est essentiel
car le non respect de leur choix est vécu par les sujets âgés comme une maltraitance comme le
souligne une enquête portant sur les « Perceptions et réactions des personnes âgées aux
comportements maltraitants » (45). La remise en cause de la liberté à décider pour soi-même
est définie comme une atteinte à l'autonomie citoyenne, une infantilisation.
Les médecins en agissant ainsi veillent au principe de non-malfaisance (4).
Ils admettent, à l'exception de deux médecins, que l'acceptation est plus facile pour
eux lorsque le refus émane d'un patient âgé. Notamment parce qu'ils pensent que les
conséquences du refus seront moins graves en terme d'années potentielles de vie perdues.
L'âge leur apparaît donc comme un critère décisionnel. Mais n'est-ce pas discriminatoire ?
L'âge doit-il est un critère pour limiter des soins ? A ces questions il n'y a pas de réponse
catégorique.
D'un côté la réponse est oui, comme en témoigne le développement de la gériatrie,
discipline fondée sur l'âge. Le raisonnement médical doit tenir compte des particularités
physiologiques et psychologiques de la vieillesse pour soigner au mieux et de ce fait traiter un
patient âgé différemment n'est pas signe d'injustice.
D'un autre côté la réponse est non : on doit raisonner selon l'état de santé de la
personne et non sur un âge chronologique sinon cela s'apparente à de l'âgisme. L'âgisme est
un écueil fréquent de nos sociétés occidentales où la vieillesse est souvent perçue
négativement à la différence des sociétés africaines par exemple pour lesquelles elle
représente la sagesse. Il est le reflet de la place accordée à la personne âgée, une tendance à la
mise à l'écart, la considérant sans doute moins utile en terme de productivité.
Les deux argumentaires sont complémentaires et au final là encore la réponse se trouve sans
doute dans le respect des attentes et décisions de la personne concernée, au cas par cas.
Les médecins ayant plus d'années d'exercice avaient l'impression que leur attitude
avait évolué au fil du temps, qu'ils étaient devenus plus respectueux des souhaits de leur
patient et notamment lorsqu'ils se manifestaient sous forme de refus.
Est-on nécessairement interventionniste lorsqu'on est jeune médecin et plus attentiste avec
l'expérience ? Les réponses recueillies n'abondent pas dans ce sens et les jeunes médecins
interrogés ne semblent pas plus autoritaires ou irrespectueux ou désireux d'imposer leurs
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(CC BY-NC-ND 2.0)
connaissances, sans doute parce qu'ils ont moins été formés au modèle de relation paternaliste
avec le patient.
Les médecins ne s'accordent pas tous quant à l'influence du risque médico-légal sur
leur pratique dans ce cas particulier.
Pour certains cette inquiétude est présente : en acceptant le refus, si la non-réalisation du soin
est finalement délétère au patient, ils craignent que cela puisse leur être reproché par la suite.
Dans le cas de personne âgée, ils redoutent davantage les plaintes de la famille plutôt que du
patient lui-même. Pour se prémunir de ce risque médico-légal, ils mentionnent par écrit le
refus du patient dans le dossier médical.
Pour les autres médecins, à partir du moment où ils ont satisfait à l'obligation de moyens qui
est là leur, c'est-à-dire dans le cas d'un refus avoir bien informé et expliqué au patient les
conséquences, ce n'est pas une crainte. Cette pensée est majoritaire. Ils se sentent en quelque
sorte protégés par la relation de confiance singulière qu'ils entretiennent avec leurs malades.
Ce facteur protecteur du statut de médecin généraliste a été mis en évidence dans la thèse du
Dr Roland portant sur les médecins généralistes et le risque médico-légal (46).
Leur attitude est en accord avec les recommandations du CCNE en cas de refus de traitement,
à savoir « ne pas céder à l'obsession médicale du concept de non-assistance à personne en
danger qui ne doit pas occulter une relation médecin/malade fondée avant tout sur la
confiance » (3 , annexe 5).
E. Les conséquences du refus sur le médecin
Dans de nombreux articles d'opinion le refus de soin apparaît comme une question
angoissante ou source d'une certaine souffrance pour les professionnels de santé. Ceci ne
concorde pas avec ce qu'ont exprimé les médecins de notre étude : ils ne vivent pas, sauf peutêtre les toutes premières années d'exercice pour certains, le refus de leur patient comme une
offense ou une agression personnelle. Pour quelles raisons ?
D'une part parce qu'ils ne sont plus dans une interaction paternaliste avec leurs
patients, cela écarte donc le risque d’atteinte narcissique. L'évolution du droit médical qui a
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renforcé le principe d'autonomie et la relation contractuelle est bien intégrée. Ils ne se
déchargent pour pas pour autant de leur devoir médical en renvoyant le patient à son unique
responsabilité.
D'autre part parce qu'un patient refusant ne le fait jamais dans le but de nuire à son
médecin ; surtout quand il s'agit du médecin traitant qu'on choisit jusqu'à présent, ses raisons
comme nous l'avons exposé précédemment sont toutes autres.
De la même manière, le refus du patient conduit rarement à une rupture de la relation.
Au contraire, le non du patient est interprété comme un signe de liberté d'expression,
d'interactions possibles, de confiance. Il est constructif, et ce parce que le refus d'un soin ne
signifie pas le rejet de tous les soins.
71 RADREAU
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VI CONCLUSIONS
Le refus de soin d'un patient âgé, comme pour tout autre patient, est une situation
fréquente en consultation de médecine générale.
Le but de notre travail n'était pas de proposer une démarche à suivre standard, car chaque
situation est particulière, mais d'explorer les perceptions et réactions du médecin généraliste
confronté à cette problématique. Nous avons donc réalisé une étude qualitative.
La réponse à un refus de soin passe par le nécessaire diagnostic de ses causes. En cela,
l'analyse des médecins nous semble pertinente. Pour eux, le refus d'un patient est avant tout le
signe d'une incompréhension ou de représentations négatives, et donc le reflet d'un manque
d'information quant au soin proposé. Chez le sujet âgé il peut être symptomatique d’un
syndrome dépressif. L’existence de déficits cognitifs est également source de refus. Dans ce
cas la difficulté est d’estimer le plus justement l’autonomie décisionnelle. Des outils doivent
encore être développés pour aider ces médecins à évaluer les capacités à consentir de la
personne âgée.
Pour tenter d'obtenir une adhésion à leur proposition de soin, la stratégie la plus
adéquate est d'adopter une approche centrée sur le patient afin d'aboutir à un compromis entre
le projet du soignant et le projet de vie de la personne. La compréhension des attentes de
l'autre repose avant tout sur la communication. Les médecins n'hésitent pas à faire appel à des
tiers professionnels ou familiaux, en étant bien conscients et attentifs au fait que l'avis de
l'entourage n'est jamais totalement équivalent au consentement de la personne. C'est pourquoi
les directives anticipées, qui sont l'expression des souhaits du patient, ont été mises en place.
Malheureusement il ressort de notre étude que ce dispositif est insuffisamment connu et
utilisé. Gageons que les modifications
apportées à la loi Leonetti et leurs diffusions
permettront d'y remédier.
Lorsqu'au terme de ce processus une décision partagée n'est finalement pas possible, tous les
médecins s'accordent sur le respect absolu de ce droit au refus. Dans ce cas l'âge est un facteur
d'influence puisqu'une majorité des médecins admet accepter plus facilement le refus exprimé
par un patient lorsqu'il est âgé.
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VII ANNEXES
Annexe 1 : DEMANDE D'ENTRETIEN
Madame, Monsieur
Sophie Radreau, je suis médecin généraliste remplaçante dans le Rhône. Je prépare
actuellement ma thèse, dirigée par le Dr Thierry Farge. J’étudie la gestion et les réactions du
médecin généraliste face au refus de soin du sujet âgé.
Pour ce faire je réalise des entretiens auprès de médecins généralistes (il s’agit d’un travail de
recherche qualitative). Ces entretiens me permettront de collecter des données pour ma thèse :
de recueillir vos stratégies professionnelles et humaines, vos éventuelles difficultés, afin de
faire émerger de vos expériences des aides possibles pour la pratique quotidienne.
Cet entretien sera individuel, d’une durée d’environ 30 minutes. Il sera enregistré, avec votre
accord, afin de garantir la retranscription fidèle de vos propos, et restera strictement
confidentiel et anonyme (rien dans mon analyse ne permettra de vous reconnaître).
Je suis bien consciente de la difficulté de donner du temps, et souhaite être le moins
chronophage possible pour ceux d’entre vous qui accepteront de participer à ce travail. Je suis
disponible pour me déplacer au cabinet de chacun pour réaliser ces entretiens selon vos
disponibilités.
Je suis joignable aux coordonnées ci-dessous :
[email protected]
Un grand merci à vous par avance.
Cordialement
Sophie Radreau
74 RADREAU
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Annexe 2 : CANEVAS D’ENTRETIEN
Bonjour Dr X. Je vous remercie d'avoir accepté de participer à mon travail de thèse qui porte
sur la gestion du refus de soin du sujet âgé par le médecin généraliste.
Ces entretiens confidentiels sont enregistrés afin de garantir la retranscription fidèle de vos
propos, et rendus anonymes, rien dans mon analyse ne permettra de vous reconnaître. L'idée
est de vous exprimer librement, sans crainte de jugement.
1) Pour commencer qu’est-ce que veut dire soigner pour vous ?
Pourriez-vous qualifier le « soin » ?
2) Mon travail porte sur le recueil du consentement, comment l’abordez-vous en
consultation ? Et plus particulièrement pour des patients âgés ?
Comment évaluez-vous la compétence d’une personne âgée à prendre une décision
concernant un soin ?
3) Est-ce-que vous avez en mémoire une consultation où un patient âgé à refuser votre
proposition de soin ? Est-ce fréquent ?
Est-ce que vous avez déjà été confronté au refus de soin d’un patient âgé ? relance = soin au
sens large : un examen, un médicament, une hospitalisation
Est-ce que les patients âgés refusent davantage ?
4) Déterminants
Recherchez-vous une cause au refus ? Quelles causes de refus repérez-vous ?
Est-ce que vous identifiez des motifs de refus spécifiques au sujet âgé ?
Quelle(s) signification(s) donnez-vous au refus chez cette population ?
5) Prise en charge
Cherchez vous à interrompre cette situation de refus ?
Si oui, comment ? Méthodes pour obtenir adhésion ? Personnes ressources ?
Si non, pourquoi ?
Quelle place prend l’aspect médico-légal dans votre décision ?
75 RADREAU
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Cherchez vous à prévenir cette situation ? Comment ?
Relance : que pensez-vous des directives anticipées ?
6) Répercussions
Quelles conséquences, répercussions ce refus a-t-il sur vous ?
Sur votre relation avec le patient ?
7) Avant de terminer avez-vous quelque chose à ajouter ?
Voulez-vous préciser votre pensée sur un point particulier ?
Notre entretien touche à sa fin, encore quelques questions sociodémographiques
8) Fiche médecin
- âge, sexe, zone installation, durée installation
- type patientèle (répartition âges, proportion patients âgés) , orientation particulière
Je vous remercie de m’avoir accordé du temps pour cet entretien.
Si vous le souhaitez je vous ferai part des résultats de mon travail.
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Annexe 3 : critères de Grisso et Appelbaum pour évaluer la capacité décisionnelle
Legally Relevant Criteria for Decision-Making Capacity and Approaches to Assessment of the Patient.
Criterion
Communicate a
choice
Physician’s Assessment
Approach
Ask patient to indicate a
treatment choice
Questions for Clinical Assessment
Have you decided whether to follow
your doctor’s [or my] recommendation
for treatment?
Can you tell me what that decision is?
[If no decision] What is making it hard
for you to decide?
Understand the
relevant information
Encourage patient to
paraphrase disclosed
information regarding
medical condition and
treatment
Please tell me in your own words
what your doctor [or I] told you about:
The problem with your health now
The recommended treatment
The possible benefits and risks
(or discomforts) of the treatment
Any alternative treatments and
their risks and benefits
The risks and benefits of no treatment
Appreciate the
situation and its
consequences
Ask patient to describe
views of medical condition,
proposed treatment,
and likely outcomes
What do you believe is wrong with
your health now?
Do you believe that you need some
kind of treatment?
What is treatment likely to do for you?
What makes you believe it will have
that effect?
What do you believe will happen if
you are not treated?
Why do you think your doctor has
[or I have] recommended this
treatment?
Reason about
treatment options
Ask patient to compare
treatment options
and consequences
and to offer reasons
for selection of option
How did you decide to accept
or reject the recommended treatment?
What makes [chosen option] better
than [alternative option]?
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(CC BY-NC-ND 2.0)
Annexe 4 : questionnaire UBACC (Brief Assessment of Capacity to consent)
1. What is the purpose of the study that was just described to you ?
(2 points si réponse correcte)
2. What makes you want to consider participating in this study ?
( 2 points si réponse aider les autres)
3. Do you believe this is primarily research or primarily treatment ?
(2 points si réponse recherche)
4. Do you have to be in this study if you do not want to participate ?
(2 points si réponse non)
5. If you withdraw from this study, will you still be able to receive regular treatment ?
(2 points si réponse oui)
6. If you participate in this study, what are some of the things that you will be asked to
do ?
(2 points si au moins 2 actions citées, par exemple prendre des médicaments, répondre
à des questions, faires des prises de sang…)
7. Please describe some of the riks or discomforts that people may experience if they
participate in this study ?
(2 points si au moins 2 risques cités)
8. Please describe some of the possible benefits of this study.
(2 points si au moins 2 bénéfices cités)
9. Is it possible that being in this study will not have benefit to you ?
(2 points si réponse oui)
10. Who will pay for you medical care if you are injured as a direct result of participating
in this study ?
(2 points si réponse hôpital ou institution)
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(CC BY-NC-ND 2.0)
Annexe 5 : recommandation du CCNE, avis n° 87 « Refus de traitement et autonomie de la
personne ».
Le Comité propose ainsi les recommandations suivantes :
1 - Tout faire pour éviter que les décisions importantes ne soient prises qu’en situation
critique. Que ce soit sur le plan médical somatique ou psychiatrique il faut, toutes les fois où
cela est possible, anticiper au maximum les situations, afin d’éviter que surgissent des
conflits graves lors de la décision de mise en œuvre d’un nouveau traitement, susceptible de
provoquer un refus.
2 - Promouvoir le sentiment et des attitudes de reconnaissance mutuelle ; en dehors d’une
situation d’extrême urgence le médecin ne doit jamais imposer une solution thérapeutique ; il
ne doit pas non plus adopter une attitude de fuite, d’abandon ou de chantage. Sa responsabilité
professionnelle est celle du maintien du soin en respectant au maximum les décisions d’un
malade qui doit pouvoir comprendre, lui aussi, les obligations morales de celui qui le soigne.
3 - Ne pas céder à l’obsession médico-légale du concept de « non assistance à personne en
péril » qui ne doit pas occulter une relation médecin/malade fondée avant tout, sur la
confiance dans l’aide que ce médecin peut apporter au malade, même s’il faut aussi que le
médecin puisse se protéger de situations rares mais toujours possibles par une mention écrite
de ce refus.
4 - Etre conscient qu’une information doit, dans toute la mesure du possible, être progressive,
évolutive en fonction du temps, tenant compte d’éventuels phénomènes de sidération
psychique et au besoin réévaluée.
5 - Etre sensible au fait qu’une information est l’expression de faits ou d’opinions explicités
de façon apparemment objective, fondés sur un savoir porté par une personne, mais qui
s’adressent à la subjectivité d’une autre personne. Une information ne peut donc jamais être
purement objective, car la subjectivité de l’émetteur et celle du récepteur interagissent
dans le processus de communication et modifient en permanence les conditions de
l’échange.
6 - Etre conscient que, dans la rencontre de deux libertés, la compassion comporte le piège de
l’abus d’autorité. Les médecins doivent en être conscients, et être formés à l’écoute de
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l’expression de la liberté du malade, comme l’a rappelé le CCNE dans son avis n° 84 sur la
formation à l’éthique médicale ; l’appréciation du degré d’autonomie doit être évolutive en
fonction du temps.
7 - Ne pas présumer l’absence totale de liberté pour éviter de prendre en compte un refus de
traitement ; ne pas profiter pour le médecin de cette situation de vulnérabilité. Respecter cette
personne vulnérable en l’informant de façon telle qu’elle comprenne les enjeux sans chantage
ni indifférence. On ne peut vouloir faire toujours le bien d’une personne contre son gré au
nom d’une solidarité humaine nécessaire et d’une obligation d’assistance à personne en péril.
8 - Réfléchir à une nouvelle compréhension de la déontologie médicale qui tienne compte de
l’évolution culturelle d’une revendication croissante à l’autonomie. Le caractère
déraisonnable d’une obstination devrait pouvoir être aussi jugé par le malade et non par le
médecin seul.
9 - Comme toujours en situation de crise, recourir non seulement à un deuxième avis, mais
aussi à un processus de médiation ou à une fonction médiatrice, pour ne pas laisser seuls
face à face le médecin et le malade ou le médecin et une famille. C’est à ce titre, que les
tierces personnes, peuvent faire prendre conscience, au malade et au médecin, de la
reconnaissance qu’ils peuvent avoir mutuellement, et de ce que cela implique. La notion de
personne de confiance inscrite dans la loi de mars 2002 prend ici toute sa signification.
L’importance des psychologues, voire des psychiatres et du personnel soignant ne peut être
que soulignée. L’objectif est en effet non seulement d’accueillir une parole de refus comme
réellement signifiante, mais aussi de juger du degré d’aliénation éventuelle. Pour autant, il ne
s’agit pas de s’en remettre à un tiers de la responsabilité de la décision, mais d’aider la
personne au gouvernement d’elle-même.
10 - Accepter de passer outre un refus de traitement dans des situations exceptionnelles
tout en gardant une attitude de modestie et d’humilité susceptible d’atténuer les tensions et de
conduire au dialogue. Même s’il est impossible de fixer des critères, des situations peuvent
être envisagées où il serait permis d’effectuer une telle transgression, quand des contraintes de
temps mettent en cause la vie ou la santé d’un tiers. Ainsi :
-
Les situations d’urgence ou d’extrême urgence où la médecine se trouverait en
situation d’avoir à répondre dans l’instant en présence d’une personne inconsciente ou
à laquelle il est en pratique impossible de demander dans l’instant, un accord. La
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(CC BY-NC-ND 2.0)
présence d’un tiers, même détenteur d’une déclaration anticipée, ne constitue pas un
élément décisif.
-
Un accouchement en urgence mettant en jeu la vie d’un enfant à naître. L’éthique
dans ce domaine ne doit pas constituer le paravent d’une fausse bonne conscience
respectueuse à l’excès de l’autonomie.
-
Les situations où la sécurité d’un groupe est en jeu, comme lors du cas de menace
d’épidémie grave où la liberté d’un individu doit être jugée de manière responsable à
l’aune du devoir de solidarité envers son prochain.
11 - Respecter la liberté individuelle tant qu’elle ne s’approprie pas la liberté d’autrui.
Le refus d’une césarienne ou d’une transfusion doit pouvoir être entendu en dehors
des situations d’urgence. Le refus de traitement clairement exprimé par une
personne majeure ayant encore le gouvernement d’elle-même ne peut être que
respecté, même s’il doit aboutir à sa mort. Soigner une personne, ce n’est pas
prendre en compte chez elle, seulement l’aspect médical mais l’unité même de sa
personne. Venir en aide à une personne n’est pas nécessairement lui imposer un
traitement. C’est ici tout le paradoxe parfois méconnu par la médecine qui doit
accepter d’être confrontée à une « zone grise » où l’interrogation sur le concept de
bienfaisance reste posée.
81 RADREAU
(CC BY-NC-ND 2.0)
VIII BIBLIOGRAPHIE
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Disponible sur: http://www.ccne-ethique.fr/sites/default/files/publications/avis087.pdf
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Université Claude Bernard Lyon 1; 2012, 232 p
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IX ABREVIATIONS
AGGIR : Autonomie Gérontologie Groupes Iso-Ressources
CANTOU : Centre d'Animation Naturel Tiré d'Occupations Utiles
CCNE : Comité Consultatif National d'Ethique
CISMeF : Catalogue et Index des Sites Médicaux de langue Française
CMPPA : Centre Médico-Psychologiques pour Personnes Agées
CNEG : Collège National de Enseignants de Gériatrie
CPAM : Caisse Primaire d'Assurance Maladie
CRISCO : Centre de Recherche Inter-Langues sur la Signification dans le Contexte
CSP : Code de Santé Publique
DES : Diplôme d’Etude Spécialisé
DU : Diplôme Universitaire
EHPAD : Etablissement d'Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes
HAD : Hospitalisation A Domicile
HAS : Haute Autorité de Santé
HDT : Hospitalisation à la Demande d’un Tiers
HO : Hospitalisation d’Office
IADL : Instrumental Activities of Daily Living
INED : Institut National d’Etudes Démographiques
INSEE : Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques
MAIA : Maisons pour l'Autonomie et l'Intégration des malades Alzheimer
MeSH : Medical Subjects Headings
MMSE : Mini Mental State Examination
OMS : Organisation Mondiale de la Santé
RIAP : Relevé Individuel d’Activité et de Prescription
UBACC : the University of California Brief Assessment of Capacity to Consent
URPS : Union Régionale des Professionnels de Santé
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RADREAU Sophie : Le médecin généraliste face au refus de soin du sujet âgé. Etude
qualitative à partir de 14 entretiens semi-dirigés.
87 pages, 1 CD-ROM, 1 tableau
Th. Méd : Lyon 2015 n° 110
__________________________________________________________________________
Résumé :
Le refus de soin d'un sujet âgé est une situation fréquente en consultation. Nous avons
entrepris d'étudier les réactions de médecins confrontés à cette problématique, dans une
approche qualitative.
Nous avons réalisé 14 entretiens individuels semi-dirigés de médecins généralistes, en RhôneAlpes, entre décembre 2014 et février 2015.
La réponse à un refus passe par le diagnostic de ses causes. Le refus signe souvent une
incompréhension et donc un manque d'information. Chez le sujet âgé il peut être dû à un
syndrome dépressif. Les déficits cognitifs sont source de refus. Dans ce cas la difficulté est
d’estimer l’autonomie décisionnelle. Des outils doivent encore être développés pour aider les
médecins à évaluer les capacités à consentir de la personne âgée. Pour obtenir une adhésion
au soin, la meilleure stratégie est d'adopter une approche centrée sur le patient. Ils n'hésitent
pas à faire appel à des tiers, en étant conscients que l'avis de l'entourage n'est jamais
équivalent au consentement de la personne. C'est pourquoi les directives anticipées ont été
mises en place, mais il ressort de notre étude que ce dispositif est insuffisamment utilisé.
Lorsqu' une décision partagée n'est pas possible, tous les médecins s'accordent sur le respect
absolu de ce droit au refus. L'âge est un facteur d'influence puisqu'une majorité accepte plus
facilement le refus exprimé par un patient lorsqu'il est âgé. Quant aux conséquences du refus :
il n’y a pas d’atteinte narcissique du médecin et il entraîne exceptionnellement une rupture de
la relation thérapeutique.
Au final, les attitudes professionnelles et humaines des médecins témoignent d'un
comportement éthique responsable.
MOTS CLES : refus de soin, personne âgée, médecin généraliste, consentement au soin,
autonomie du patient
JURY :
Président : Monsieur le Professeur Jérôme ETIENNE
Membres : Madame le Professeur Liliane DALIGAND
Monsieur le Professeur Yves ZERBIB
Monsieur le Docteur Thierry FARGE
DATE DE SOUTENANCE : jeudi 11 juin 2015
Adresse de l’auteur : 18 rue Balthazar 69003 LYON
Mail : [email protected]
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